III. L'INSTAURATION DE LA TAXE DUE PAR LES POIDS LOURDS À RAISON DE L'UTILISATION DE CERTAINES INFRASTRUCTURES, PAR L'ARTICLE 60 RATTACHÉ

A. LE DISPOSITIF DU PROJET DE LOI

La création d'une taxe poids lourds 18 ( * ) , rebaptisée depuis « éco-redevance » par les députés 19 ( * ) , constitue incontestablement l'une des mesures emblématiques issues des conclusions du Grenelle de l'environnement et reprend un engagement du président de la République lors de sa campagne présidentielle. Elle poursuit un double but : incitatif, car il s'agit de donner un signal-prix à l'économie et d'allocation de ressources, car il convient de dégager des ressources nouvelles pour réaliser des infrastructures de transport dans une perspective intermodale. L'article 60 comprend deux volets : l'un est consacré à l'ensemble du territoire national, l'autre à l'Alsace.

1. Le dispositif applicable au territoire national

Les principales caractéristiques de cette taxe sont les suivantes :

- elle vise les véhicules de transport de marchandises d'au moins 3,5 tonnes . Les véhicules d'intérêt général prioritaires, les véhicules et matériels agricoles et les véhicules militaires ne sont pas concernés par la taxation 20 ( * ) ;

- les routes concernées sont, d'une part, les routes et autoroutes appartenant au domaine public routier national, à l'exception des routes et autoroutes à péages et, d'autre part, les routes appartenant à des collectivités territoriales dès lors qu'elles supportent ou sont susceptibles de supporter des reports de trafic significatifs quels que soient la « nationalité » de l'itinéraire et la cause de ce report 21 ( * ) . Par conséquent, la taxe peut s'appliquer à des autoroutes, routes nationales ou routes appartenant à des collectivités territoriales 22 ( * ) . Un décret en Conseil d'Etat définira le réseau routier ad hoc ;

- le taux de la taxe est variable . Il oscillera entre 0,05 et 0,30 euro par kilomètre parcouru, en combinant trois critères : le nombre d'essieu, la classe d'émission EURO du véhicule 23 ( * ) et éventuellement le niveau de congestion de chaque axe routier 24 ( * ) ;

- les informations nécessaires seront collectées grâce à un équipement électronique embarqué . Le principe du télépéage en flux libre a été retenu. Ce n'est qu'à l'issue de l'appel d'offres que l'on connaîtra les technologies qui seront utilisées 25 ( * ) .

Quant aux ressources générées par cette taxe, que l'on estime à 900 millions d'euros à moyen terme, elles seront réparties entre l'AFITF et les collectivités territoriales pour les sommes perçues en raison de l'usage du réseau routier dont elles sont propriétaires 26 ( * ) . En contrepartie, les entreprises du secteur du transport routier de marchandises bénéficieront de compensation, à l'instar de l'abaissement de la taxe dite à l'essieu 27 ( * ) .

* 18 Il s'agit, en droit français, d'une taxe du régime douanier.

* 19 Voir l'article 10 du projet de loi relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

* 20 On devrait compter 600.000 véhicules immatriculés en France et 200.000 véhicules étrangers assujettis à la taxe.

* 21 Concernant les routes appartenant à des collectivités territoriales, le report de trafic peut provenir soit d'itinéraires déjà soumis à la taxe ou à péage en France, soit de routes et d'autoroutes hors de France mais soumis à péage, redevances ou taxation.

* 22 Aujourd'hui, 15.000 km de routes seraient concernées : 12.000 km du réseau routier national non concédé et 3.000 km de réseau local si les collectivités territoriales en décident ainsi.

* 23 On distingue schématiquement 6 normes applicables en fonction de la date de mise sur le marché des véhicules neufs roulants. Plus un véhicule est récent, et plus les limites d'émissions sont strictes.

* 24 Le taux kilométrique moyen devrait être de 12 centimes d'euro par kilomètre.

* 25 La technologie à micro-ondes courtes portée (DSRC) nécessite l'installation de portique ou poteaux disposés aux points de tarifications. La technologie satellitaire est mixte, puisqu'elle détermine la position du véhicule en utilisant les signaux satellitaires mais l'échange d'informations se fait par téléphonie mobile et DSCR. D'autres technologies peuvent naturellement voir le jour d'ici la mise en place de la taxe.

* 26 La recette attendue est de 1,2 milliard d'euro par an, les coûts de collecte étant estimés à 15 % et non 25 % comme en Allemagne.

* 27 Cet alignement de la taxe à l'essieu sur les taux minimas prévus dans l'annexe I de la directive 1999/96/CE devrait représenter un manque à gagner de 70 millions d'euros par an pour l'Etat.

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