Article 18
(art. L. 1331-7, L. 1331-7-1 [nouveau],
L. 1331-8 et L. 1331-11 du code de la santé
publique)
Simplification du régime applicable au
déversement à l'égout d'eaux usées assimilables
à des rejets domestiques provenant d'activités
économiques
Commentaire : cet article simplifie le régime applicable au déversement à l'égout d'eaux usées provenant d'activités économiques, mais dont les caractéristiques sont celles d'effluents domestiques.
I. Le droit en vigueur
En vertu de l'article L. 1331-1 du code de la santé publique, les eaux usées domestiques sont obligatoirement raccordées à l'égout lorsqu'un réseau de collecte existe . L'article L. 1331-1 dispose ainsi que « le raccordement des immeubles aux réseaux publics de collecte disposés pour recevoir les eaux usées domestiques et établis sous la voie publique à laquelle ces immeubles ont accès soit directement, soit par l'intermédiaire de voies privées ou de servitudes de passage, est obligatoire dans le délai de deux ans à compter de la mise en service du réseau public de collecte ».
S'agissant des effluents non domestiques, une autorisation de rejet à l'égout, de ces eaux usées, est nécessaire en vertu de l'article L. 1331-10 du même code. Cet article dispose en effet que « tout déversement d'eaux usées autres que domestiques dans le réseau public de collecte doit être préalablement autorisé par le maire ou le président de l'établissement public compétent en matière de collecte à l'endroit du déversement ». La loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques (LEMA) a d'ailleurs porté à 10 000 euros le montant de l'amende applicable en l'absence d'autorisation.
C'est donc bien l'affectation professionnelle ou domestique des immeubles, qui apparaît comme le critère 112 ( * ) de détermination de la nature des eaux rejetées. Ainsi les activités qui se caractérisent par le rejet d'eaux usées provenant des besoins d'alimentation et d'hygiène de bureaux, de centres commerciaux, de restaurants ou d'hôtels, ne constituent pas des eaux usées domestiques puisqu'elles ne proviennent pas d'immeubles à usage principal d'habitation.
En application de l'article L. 1331-10 du code précité, l'autorisation de rejet à l'égout peut être subordonnée à la participation de l'auteur du déversement aux dépenses d'investissement entraînées par la réception de ces eaux. Il en est de même, en vertu de l'article L. 1331-7 du même code, pour le raccordement des immeubles d'habitation édifiés postérieurement à la mise en service du réseau de collecte.
II. Le dispositif de la proposition de loi
Cet article propose :
- de compléter l'article L. 1331-10 du code de la santé publique pour préciser que l'autorisation de déversement d'eaux usées n'est pas nécessaire pour les établissements dont les utilisations de l'eau sont assimilables aux utilisations à des fins domestiques ;
- de renvoyer à un décret en Conseil d'État la définition des utilisations de l'eau assimilables à des utilisations à des fins domestiques ;
- de compléter l'article L. 1331-7 du même code afin de préciser que les propriétaires des immeubles ou des établissements édifiés postérieurement à la mise en service du réseau public de collecte auquel ces immeubles doivent être raccordés, et dont les rejets d'eaux usées sont issues d'utilisations de l'eau assimilables à des utilisations domestiques, peuvent être astreints par la commune à verser une participation tenant compte de l'économie qu'ils réalisent en évitant une installation d'évacuation individuelle.
III. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
A l'initiative du rapporteur de la Commission des lois de l'Assemblée nationale, les députés, outre quelques modifications rédactionnelles ont précisé le dispositif initial en :
- prévoyant dans la loi, les critères en fonction desquels le décret en Conseil d'État pourra déterminer les modalités d'application des dispositions. Ils ont ainsi prévu que ce décret détermine, en fonction du volume des rejets ainsi que de la nature et du degré de pollution, les utilisations de l'eau « assimilables à un usage domestique » ;
- prévoyant un dispositif de régularisation de la situation des propriétaires raccordés sans autorisation au réseau de collecte. Ils disposeront ainsi d'un délai de six mois à compter de la publication du décret en conseil d'État précité pour présenter à la mairie une déclaration justifiant qu'ils utilisent l'eau dans des conditions « assimilables à un usage domestique ».
IV. La position de votre commission pour avis
Votre rapporteur pour avis accueille positivement cette mesure de simplification. En effet, la définition des « eaux usées domestiques » étant limitée à celles issues des seuls immeubles à usage principal d'habitation, le nombre d'établissements devant disposer d'une autorisation de raccordement est donc très important.
De nombreux élus locaux constatent que les mairies doivent faire face à plusieurs milliers de demandes d'autorisation, sans toujours disposer des services techniques compétents, la compétence « assainissement » étant souvent déléguée à un établissement public de coopération intercommunale ou à un groupement. Dès lors, on observe que les collectivités concernées n'arrivent pas à accorder toutes ces autorisations dans des délais raisonnables.
L'absence d'exigence d'une autorisation de déversement pour des effluents « assimilables » aux rejets domestiques représenterait donc pour les collectivités territoriales et leurs groupements un allègement important des procédures administratives et des économies budgétaires substantielles. Sur la base d'un coût administratif de 1 000 à 2 000 euros par dossier (réparti entre l'établissement concerné et la collectivité), les charges administratives induites peuvent être évaluées entre 100 et 400 millions d'euros, même s'il convient de souligner que cette évaluation reste très théorique, compte tenu de l'impossibilité pratique de réaliser la totalité des contrôles nécessaires.
Cette simplification est par ailleurs souhaitée par les acteurs économiques 113 ( * ) , d'autant que la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques a porté à 10 000 euros le montant de l'amende applicable en l'absence d'autorisation (art. L. 1337-2 du code de la santé).
Cette exigence d'autorisation de rejet à l'égout est d'autant plus difficilement compréhensible par les établissements concernés que ces mêmes rejets sont considérés par le service de l'eau comme « assimilés domestiques » en application du code de l'environnement pour l'identification du régime de redevances perçue pour le compte de l'agence de l'eau, les « pollutions produites résultant principalement de la satisfaction de besoins d'alimentation humaine, de lavage et de soins d'hygiène des personnes physiques utilisant les locaux desservis ainsi que de nettoyage et de confort de ces locaux » (art. L. 213-10-2, L. 213-10-3 et R. 213-48-1 du code de l'environnement). L'arrêté du 21 décembre 2007 précise la liste des activités concernées.
Si votre rapporteur juge positivement le dispositif proposé, il considère néanmoins que, outre des modifications rédactionnelles, des améliorations substantielles peuvent être proposées, de nature, selon lui, à éviter les risques de contentieux :
- s upprimer le deuxième alinéa de cet article dont les dispositions restreignent très significativement le champ d'application de la participation pour raccordement au réseau public de collecte des eaux usées , aussi appelée « participation pour raccordement à l'égout » (PRE). Tel qu'il est actuellement rédigé, le dispositif du deuxième alinéa crée une incertitude juridique en induisant une confusion entre la PRE et le remboursement par les propriétaires d'immeubles du coût des travaux effectués pour leur compte par le service public d'assainissement lorsqu'il réalise la partie des branchements situés sous la voirie publique. Il s'agit bien de deux contributions distinctes ;
- faire le lien entre la notion des « usages de l'eau assimilables à un usage domestique » et la définition figurant au code de l'environnement (article L. 213-10-2), pour éviter la gestion de plusieurs définitions par les services d'eau et d'assainissement. En effet, le texte actuel renvoie à un décret en précisant des critères de définition d'où le risque d'une nouvelle définition. La mention du « volume » peut notamment conduire à exclure des rejets d'immeubles de bureaux qui ne produisent que des effluents domestiques ;
- préciser que le droit au raccordement au réseau public de collecte est soumis à l'existence de capacités de transfert et d'épuration en aval . Il est en effet important que ce droit s'exerce dans la limite des capacités de transport et d'épuration des installations existantes ou en cours de réalisation. A défaut, les collectivités pourraient se retrouver confrontées à des demandes qu'elles ne seraient pas en mesure de satisfaire, ou qui entraineraient des dépenses importantes non compensées par de nouvelles recettes d'un niveau équivalent ;
- préciser que la « participation versée par le propriétaire » qui évite le coût d'une installation d'évacuation ou d'épuration individuelle réglementaire s'ajoute , le cas échéant, aux redevances mentionnées à l'article L. 2224-12-2 du code général des collectivités territoriales et aux sommes pouvant être dues par les intéressés au titre des articles L. 1331-2 (réalisation du branchement), L. 1331-3 (remboursement de travaux en voie privée), L. 1331-6 (travaux d'office, suppression de fosses) du code de la santé publique ;
- donner la possibilité pour la commune d'édicter des prescriptions techniques par branche d'activité pour le dimensionnement et l'entretien des ouvrages de collecte des eaux usées internes à l'établissement. En effet, compte tenu de la très grande diversité des établissements concernés (industriels, artisanaux, médicaux) et alors que les objectifs de la directive cadre sur l'eau seront déjà difficiles à atteindre, notamment pour les « substances dangereuses et autres micropolluants », il paraît indispensable que les services d'assainissement puissent fixer, par catégorie d'établissements et au cas par cas, des prescriptions techniques appropriées et plus précises que les dispositions du règlement de service applicables à l'ensemble des rejets collectés. Cette disposition permettrait en outre de fonder juridiquement la pratique actuelle de collectivités définissant des prescriptions techniques par type d'activité (restaurant, pressing, coiffeurs, ...) ;
- faire référence, dans le dispositif, non pas à la « mairie » mais à la « collectivité organisatrice du service ou le groupement auquel elle appartient ». En pratique, le service d'eau n'est effectivement pas toujours géré par la commune, cette compétence étant parfois déléguée à un syndicat mixte ;
- porter le délai de « 6 mois à compter de la publication du décret en Conseil d'État » à « un an à compter de la publication de la loi ».
En conséquence, votre commission vous propose d'adopter une rédaction globale de cet article.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié. |
* 112 C'est d'ailleurs ce qu'a confirmé le Conseil d'État dans un arrêt du 26 novembre 1984.
* 113 La nécessité d'une clarification et d'une simplification a été rappelée lors du colloque organisée par l'Association française des ingénieurs et techniciens de l'environnement (AFITE), la Fédération nationale des associations de riverains et utilisateurs industriels de l'eau (FENARIVE) et les chambres de commerce et d'industries, le 23 juin 2009 sur le thème du raccordement des établissements industriels à l'égout. Cette disposition a également été identifiée par la mission de réduction des charges administratives des entreprises (MRCA).