B. LA PLACE DE LA FRANCE EN AFRIQUE EST AUJOURD'HUI FORTEMENT CONCURRENCÉE

Les difficultés qu'éprouve la France à financer une coopération à la hauteur de ses ambitions arrivent à un moment où l'Afrique fait l'objet de toutes les convoitises de la part de nouveaux acteurs que sont les pays émergents.

Si la France n'est plus depuis longtemps seule en Afrique Francophones, il est frappant de constater ces dernières années la croissance du partenariat qui est en train de se nouer entre les pays émergents et les pays africains.

La coopération française en Afrique est en effet depuis longtemps habituée à la présence d'une coopération britannique active, à une intervention très massive des États-Unis, à des coopérations très sélectives des pays européens du Nord.

Mais aujourd'hui, elle doit faire face à des pays qui ont des liens historiques forts avec l'Afrique comme la Chine ou l'Inde ainsi qu'avec des nouveaux acteurs de la coopération internationale que sont le Brésil, les pays du golfe ou la Turquie.

1. La coopération française doit faire face en Afrique à des pays qui ont des liens historiques forts avec l'Afrique, comme la Chine ou l'Inde ainsi qu'avec des nouveaux acteurs de la coopération internationale que sont le Brésil, les pays du Golfe ou la Turquie.

Ainsi, dans ses perspectives économiques en Afrique 2011, « L'Afrique et ses partenaires émergents », l'OCDE considère que l'aide au développement de la Chine en Afrique subsaharienne est aujourd'hui supérieure à celle de la France.

Sur l'ensemble du continent les engagements financiers de la Chine seraient passés de moins de 1 milliard de dollars en 2004 à plus de 8 milliards de dollars en 2008.

Les partenariats que noue la Chine ou l'Inde avec les pays africains associent une aide traditionnelle avec un soutien aux exportations sans s'imposer les mêmes règles que celles qui prévalent dans le cadre du CAD. Cette situation suscite des difficultés, notamment pour les entreprises françaises qui sont tenues par des engagements en matière de responsabilité environnementale et sociale, mais également pour les entreprises locales.

Il reste que ces financements additionnels constituent une opportunité financière importante pour les pays africains.

Engagements financiers de la Chine dans des projets d'infrastructure
en Afrique subsaharienne

Source : Banque Mondiale

De fait, l'Afrique est en train d'accroître son intégration dans l'économie mondiale et de diversifier ses partenariats à une vitesse sans précédent.

Source : Banque Mondiale

En 2009, la Chine a dépassé les États-Unis et est devenue le principal partenaire commercial de l'Afrique ; la part des échanges de l'Afrique avec les pays émergents a sensiblement augmenté au cours des dix dernières années, passant de 23 % à 39 %. Les cinq pays émergents partenaires de l'Afrique les plus importants sont dorénavant la Chine (38 %), l'Inde (14 %), la Corée (7,2 %), le Brésil (7,1 %) et la Turquie (6,5 %).

Il n'y a pas lieu ici de développer plus avant les conséquences politiques, stratégiques, économiques de cette évolution. Le graphique ci-dessus sur les contrats BTP montre combien les entreprises françaises ont perdu de marchés en Afrique au profit des entreprises chinoises.

Plus que jamais, l'Afrique constitue, en ce début du XXI e siècle, un enjeu majeur qui est au coeur d'un jeu d'influences de plus en plus agressives au détriment des pays occidentaux et parfois au détriment des pays africains eux-mêmes.

2. Des opportunités pour des coopérations triangulaires ?

La présence accrue des pays émergents en Afrique constitue également une opportunité pour le développement de ces pays.

Avec environ 18 milliards de dollars, l'apport financier des pays n'appartenant pas à l'OCDE est d'ores et déjà considérable. Ces montants ont vocation à croître avec l'augmentation du revenu national brut de ces pays. En outre on peut espérer que les pays émergents augmentent progressivement le pourcentage du revenu national qu'ils consacrent à l'aide au développement, à l'image de la Corée du Sud qui s'est distinguée en s'engageant à tripler le pourcentage du RNB réservé à l'aide publique au développement d'ici 2015.

Outre ces aides financières toujours plus importantes, ces pays peuvent apporter une précieuse contribution, grâce à leur expérience et à leurs compétences pour résoudre les problèmes les plus complexes liés à la pauvreté. Ayant suivi le processus de développement avec succès, ces pays ont une connaissance approfondie des besoins des pays pauvres et les capacités techniques d'innovation pour répondre à ces besoins.

Le rapport de M. Bill Gates aux membres du G20 cite à cet égard de nombreux exemples de coopération triangulaire réussis : « le Serum Institute of India a récemment mis au point un vaccin pour la méningite A, le tout premier vaccin créé spécialement pour les pays pauvres. Pour le fabriquer au prix cible de 50 cents la dose, l'institut s'est procuré les matières premières auprès d'une société biotechnologique néerlandaise et a organisé un transfert de technologie à partir de la Food and Drug Administration des États-Unis. Ce processus a commencé lorsque des responsables africains ont demandé un moyen plus efficace pour lutter contre les épidémies de méningite. Les secteurs privé et public dans les pays industrialisés et à croissance rapide ont négocié une solution mutuellement avantageuse pour faire face à ce défi».

Source « Mettre à profit l'impact de l'innovation pour financer le développement du 21 e siècle»: A report by Bill Gates to G20 leaders, Cannes Summit, November 2011

De ce point de vue, il existe des opportunités pour des partenariats triangulaires entre les pays émergents, des donateurs traditionnels comme la France et des pays pauvres.

Jusqu'à présent, ces partenariats triangulaires ont concerné des transferts de ressources relativement modestes, mais à long terme, ils offrent des opportunités pour une coopération coordonnées au bénéfice des plus pauvres et ouvrent la voie vers meilleure partage du financement de l'aide au développement. Aujourd'hui, en effet, l'Europe représente 60 % de l'APD mondial pour 30 % du PIB mondial.

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