EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IV ENCOURAGER L'ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE PAR LA CRÉATION D'UNE PRIME D'ACTIVITÉ
ARTICLE 24 (Art. L. 841-1, L. 842-1 à L. 842-7, L. 843-1 à L. 843-7, L. 844-1 à L. 844-5, L. 845-1 à L. 845-2 et L. 846-1 [nouveaux] du code de la sécurité sociale) Création de la prime d'activité

Commentaire : le présent article a pour objet de remplacer le revenu de solidarité active « activité » (RSA « activité ») et la prime pour l'emploi (PPE) par une prime d'activité en faveur des travailleurs à revenus modestes, afin d'encourager l'activité en soutenant le pouvoir d'achat.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA PRIME POUR L'EMPLOI

1. Les modes de calcul et de versement de la PPE

La prime pour l'emploi (PPE) a été créée par la loi n° 2001-458 du 30 mai 2001 portant création d'une prime pour l'emploi , à la suite de l'annulation par le Conseil constitutionnel de l'article 3 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 38 ( * ) , qui prévoyait d'instaurer une réduction dégressive de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). Cette réduction, dite « ristourne dégressive », devait s'appliquer aux personnes percevant des revenus d'activité compris entre 1 fois et 1,4 fois le SMIC. Le Conseil constitutionnel avait considéré qu'en ne tenant compte ni des revenus du contribuable autres que ceux tirés d'une activité, ni des revenus des autres membres du foyer, ni des personnes à charge au sein de celui-ci, cette mesure entraînait une rupture d'égalité devant les charges publiques contraire à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 39 ( * ) .

La PPE poursuit le même objectif que la « ristourne dégressive » : inciter au retour à l'emploi et au maintien de l'activité , en permettant d'augmenter le revenu net que procure l'exercice d'une activité professionnelle modestement rémunérée.

Il s'agit d'un crédit d'impôt accordé aux foyers fiscaux domiciliés en France et calculé sur la base des revenus individuels des membres de ce foyer fiscal. Les modalités de calcul de la PPE sont complexes. En effet, les contribuables éligibles à ce crédit d'impôt doivent remplir une double condition :

- leurs revenus d'activité annuels doivent être compris entre un plancher de 3 743 euros et un plafond de 17 451 euros (soit entre 0,3 et 1,25 SMIC), porté à 26 572 euros pour les couples mono actifs ou pour les familles monoparentales ;

- le montant du revenu fiscal de référence du foyer auquel ils appartiennent ne doit pas dépasser 16 251 euros pour une personne seule et 32 498 euros pour un couple soumis à imposition commune. Ces plafonds sont majorés de 4 990 euros pour chaque demi-part supplémentaire de quotient familial.

Le montant de la PPE varie en fonction des revenus d'activité du bénéficiaire : elle est égale à 7,7 % du montant de ces revenus lorsque ceux-ci sont inférieurs à 12 475 euros (soit 0,9 SMIC) ; lorsqu'ils sont compris entre 12 475 euros et 17 451 euros, la prime est égale à 19,3 % de la différence entre 17 451 euros et le montant de ces revenus. Ainsi, le montant de PPE versé croît entre 0,3 et 0,9 SMIC , où il atteint son maximum, avant de baisser de nouveau jusqu'au point de sortie situé aux environs de 1,25 SMIC pour une personne célibataire sans enfant.

Barème de la PPE en 2013

Montant

(en euros)

Rémunération mensuelle

(en part de SMIC)

Note : Les montants de PPE sont ceux calculés avant éventuelle imputation du RSA « activité » pour une personne célibataire sans enfant.

Source : Rapport précité de Christophe Sirugue, « Réforme des dispositifs de soutien aux revenus d'activités modeste », juillet 2013

Lorsque l'activité professionnelle n'est exercée qu'à temps partiel ou sur une partie de l'année, le montant des revenus d'activité fait l'objet d'une conversion en équivalent temps plein. La loi de finances pour 2003 40 ( * ) a introduit un mécanisme de majoration de la PPE pour les travailleurs à temps partiel ou sur une partie de l'année seulement :

- en cas de temps de travail inférieur à un mi-temps (inférieur ou égal à 910 heures), le montant de la prime individuelle est majoré de 85 % ;

- en cas de temps de travail supérieur ou égal à un mi-temps (entre 910 et 1 820 heures), la prime individuelle est égale à 15 % de la prime temps partiel majorée de 85 % de la prime temps plein.

Barème de la PPE versée en 2014 (revenus perçus en 2013)

(en euros)

Situation de famille

Revenus d'activité en année pleine (1)

Montant de la prime individuelle

Majorations

Célibataire, veuf, divorcé ou marié bi-actif (2) ou personne à charge du foyer exerçant une activité professionnelle rémunérée au moins 3 743 €

3743 = R = 12 475

R × 7,7 %

36 € par personne à charge (3)

12 475 < R = 17 451

(17 451 - R) × 19,3 %

Marié mono-actif (4)

3 743 = R = 12 475

(R × 7,7 %) + 83 €

36 € par personne à charge

12 475 < R = 17 451

(17 451 - R)× 19,3 % + 83 €

17 451 < R = 24 950

83 €

24 950 < R = 26 572

(26 572 - R) × 5,1 %

Célibataire, veuf, divorcé vivant seul

3 743 = R = 12 475

(R × 7,7 %)

72 € pour la première personne à charge.

36 € par personne à charge supplémentaire

12 475 < R = 17 451

(17 451 - R) × 19,3 %

17 451 < R = 26 572

0 €

Majoration forfaitaire de 72 €

(1) En équivalent temps plein annuel.

(2) Les couples bi-actifs sont les couples mariés ou liés par un PACS soumis à une imposition commune dont les deux conjoints (ou partenaires) exercent une activité leur procurant au moins 3 743 € avant conversion éventuelle en équivalent temps plein.

(3) Personne sans activité professionnelle ou dont les revenus d'activité professionnelle sont inférieurs à 3 743 euros.

(4) Les couples mono-actifs sont les couples soumis à une imposition commune dont un seul des conjoints (ou partenaires) exerce une activité lui procurant un revenu d'au moins 3 743 € avant conversion éventuelle en équivalent temps plein.

Source : ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Ainsi, la prime attribuée au foyer fiscal correspond au total des primes individuelles . De plus, elle est « familialisée » à travers des majorations , en fonction du nombre de personnes à la charge du foyer (majorations de 36 euros par personne à charge ou de 72 euros pour les familles monoparentales) ou en cas de mono-activité (majoration jusqu'à 83 euros).

Pour percevoir la PPE, le contribuable ne doit effectuer aucune démarche puisque celle-ci est automatiquement déduite de l'impôt sur le revenu du foyer fiscal 41 ( * ) , sur la base des informations fournies dans sa déclaration de revenus. Lorsque le montant de la cotisation d'impôt due est inférieur à celui de la PPE, la différence est reversée au contribuable 42 ( * ) . Ce traitement automatisé garantit un fort taux de recours de la PPE, évalué entre 95 % et 97 % 43 ( * ) .

2. Une forte réduction du nombre de bénéficiaires et des montants versés depuis 2008

La prime pour l'emploi a fait l'objet de nombreuses modifications législatives depuis sa création. Celles-ci ont tout d'abord conduit à une forte montée en charge de la prestation et du nombre de bénéficiaires. En effet, les taux utilisés pour le calcul de la prime ainsi que les seuils et plafonds de revenus d'activité ont fait l'objet de revalorisations significatives.

Les taux de la PPE permettant de calculer le montant de la prime individuelle sont ainsi passés respectivement de 2,2 % à 7,7 % et de 5,5 % à 19,3 % entre 2002 et 2007. Les seuils et plafonds de revenus de la PPE ont également été revalorisés chaque année jusqu'en 2008 afin de tenir compte de la progression salariale, tandis que les montants de majoration de PPE ont été relevés en 2008. Une majoration de prime en faveur des personnes exerçant une activité à temps partiel a été introduite par la loi de finances pour 2003 (cf. supra ). Du fait de ces diverses revalorisations, le coût total du de la PPE a fortement augmenté, passant de 2,2 milliards d'euros en 2002 à 4,5 milliards d'euros en 2008 , alors même que le nombre de bénéficiaires demeurait stable et donc sans que le ciblage de la prime soit accru.

Les principales modifications législatives de la PPE

LFI 2002

• Doublement des taux de la PPE versée à compter de septembre 2002 (de 2,2 % à 4,4 % et de 5,5 % à 11 %).

• Revalorisation des seuils et limites de revenus servant au calcul de la PPE.

LFI 2003

• Revalorisation des seuils et limites de la PPE.

• Introduction d'un mécanisme spécifique de majoration de la prime pour les personnes exerçant une activité à temps partiel.

LFI 2004

• Revalorisation des seuils, limites de revenus et taux (de 4,4 % à 4,6 % et de 11 % à 11,5 %) servant au calcul de la PPE.

• Mise en place d'un système d'acompte forfaitaire.

LFI 2005

• Revalorisation des seuils, limites de revenus et des taux (de 4,6 % à 6 % et de 11,5 % à 15 %) servant au calcul de la PPE.

LFI 2006

• Revalorisation des seuils, limites de revenus et taux (de 6 % à 6,8 % et de 15 % à 17 %) servant au calcul de la PPE.

• Modification des modalités d'attribution de l'acompte de PPE.

• Introduction d'un mécanisme de versement mensuel pour les personnes ayant bénéficié de la PPE l'année précédente.

LFI 2007

• Revalorisation des seuils, limites de revenus et taux (de 4,6 % à 7,7 % et de 17 % à 19,3 %) servant au calcul de la PPE.

LFI 2008

• Revalorisation des seuils, limites de revenus et majorations de prime servant au calcul de la PPE.

• Modification du mécanisme de versement mensuel de la PPE.

Loi du 1 er décembre 2008 généralisant le RSA

• Abrogation du mécanisme d'acompte et de versement mensuel.

• Modification des modalités de calcul de la PPE : RSA « activité » considéré comme un acompte non remboursable à valoir sur la PPE.

Ordonnance du 19 septembre 2013

• Minoration du montant de la PPE versée aux contribuables domiciliés dans le département de Mayotte.

Source : commission des finances du Sénat (à partir de l'évaluation préalable annexée au présent projet de loi de finances)

Les modalités de versement de la PPE ont également été modifiées à plusieurs reprises. La loi de finances pour 2004 a introduit un système d'acomptes forfaitaires de PPE d'un montant de 250 euros versé sous certaines conditions, afin d'améliorer le caractère incitatif et la lisibilité de l'aide 44 ( * ) . La loi de finances pour 2006 45 ( * ) a conforté ce dispositif en majorant le montant de cet acompte forfaitaire et en le mensualisant. Suite à la création du RSA par la loi du 1 er décembre 2008 46 ( * ) , ce système de versement par acomptes, lourd à gérer pour les services, a été supprimé.

La mise en place du RSA « activité » , dont l'objectif est également d'inciter à la reprise d'un emploi, a conduit à une forte diminution du coût de la PPE et du nombre de bénéficiaires pour deux raisons principales.

D'une part, le barème de la PPE n'a pas été revalorisé depuis 2008 . Ce « gel » du barème s'est traduit mécaniquement par une réduction du nombre de foyers fiscaux entrant dans le périmètre de la prime ainsi que des montants versés du fait de la revalorisation annuelle du SMIC. Ainsi, le coût de la PPE est passé de 4,5 milliards d'euros en 2008 à 2,2 milliards d'euros en 2014 et le nombre de foyers fiscaux bénéficiaires est passé de 8,9 millions en 2008 à 5,8 millions en 2013.

D'autre part, l'imputation du RSA « activité » sur la PPE versée l'année suivante a également conduit à réduire le montant de la prime et le nombre de foyers bénéficiaires (cf. infra ).

B. LE RSA « ACTIVITÉ »

1. Les modes de calcul et de versement du RSA

Le revenu de solidarité active (RSA) a été créé, après une expérimentation menée dans trente-quatre départements, par la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion. Il est entré en vigueur le 1 er juin 2009 sur le territoire métropolitain et a été étendu le 1 er janvier 2011 aux départements d'outre-mer ainsi qu'aux collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon 47 ( * ) , et mis en place à Mayotte le 1 er janvier 2012 dans le cadre de la départementalisation de ce territoire 48 ( * ) .

Le RSA a remplacé le revenu minimum d'insertion (RMI), l'allocation de parent isolé (API) et les différents mécanismes d'intéressement à la reprise d'activité qui leur étaient associés, avec pour objet « d'assurer à ses bénéficiaires des moyens convenables d'existence, afin de lutter contre la pauvreté, encourager l'exercice ou le retour à une activité professionnelle et aider à l'insertion sociale des bénéficiaires » 49 ( * ) .

Le RSA est une allocation versée mensuellement aux foyers afin de leur garantir un certain niveau de revenus de manière durable . Cette prestation comporte trois composantes :

- le RSA « socle » , versé, en l'absence de revenus d'activité, à tout foyer afin de compléter ses ressources jusqu'à atteindre un montant forfaitaire, calculé en fonction de sa composition ;

- le RSA « socle + activité » , versé aux foyers dont les revenus d'activité ne sont pas suffisant pour atteindre le minimum forfaitaire garanti par le barème ;

- le RSA « activité » , versé, en présence de revenus d'activité, pour permettre à tout foyer de percevoir le montant forfaitaire augmenté de 62 % de ses revenus d'activité, de manière pérenne tant qu'il se trouve en dessous d'un certain seuil de ressources.

Le RSA « activité » est donc une prestation différentielle dont le montant est égal à la différence entre le montant garanti auquel le foyer a droit et les revenus qu'il perçoit - soit les revenus d'activité ainsi que d'autres ressources perçues par le ménage (cf. infra ). Le versement net effectué au titre du RSA « activité » diminue de 38 centimes par euro de revenu d'activité supplémentaire, jusqu'à devenir nul lorsque le revenu d'activité a atteint un certain seuil. Il se distingue en ce sens du RMI, dont le montant était réduit de 100 % des augmentations des revenus d'activité du foyer, une fois les mesures d'intéressement temporaires achevées 50 ( * ) . Pour chaque euro supplémentaire de revenu perçu, le RMI baissait du même montant, ce qui avait un effet désincitatif lors d'une reprise d'emploi.

Schéma simplifié du fonctionnement du RSA

Revenus d'activité

Montant garanti

RSA « activité »

RSA

« socle »

Revenu garanti

Ressources totales

Revenus d'activité

Le RSA est ouvert aux personnes âgées de 25 ans et plus ainsi qu'aux personnes âgées de moins de 25 ans si elles ont un enfant à charge ou à naître ou sous certaines conditions d'activité fixées par décret 51 ( * ) . Les bénéficiaires ne peuvent être élèves, étudiants ou stagiaires, ni être en congé parental, sabbatique, sans solde ou en disponibilité. Par ailleurs, le bénéfice du RSA est conditionné à la jouissance de la nationalité française ou à la détention, depuis au moins cinq ans, d'un titre de séjour autorisant à travailler 52 ( * ) . Les ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Suisse doivent remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un droit de séjour, et avoir résidé en France durant les trois mois précédant la demande 53 ( * ) .

L'accès au RSA et le montant versé dépendent de la composition du foyer, c'est-à-dire qu'il prend en compte les revenus des personnes vivant en couple (concubins, époux, ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité) ainsi que le nombre d'enfants à charge âgés de moins de 25 ans.

Les ressources prises en compte dans le calcul du RSA, qui constituent sa « base ressources », sont étendues. Il s'agit de l'ensemble des revenus d'activité, des revenus de remplacement (comme les indemnités chômage, pensions d'invalidité, indemnités journalières), des revenus tirés de placement, d'épargne ou de biens immobiliers ou d'autres revenus comme les pensions alimentaires. Sont également inclus les avantages en nature ainsi que les prestations et aides sociales à l'exclusion de celles ayant une « finalité sociale particulière » 54 ( * ) . Par ailleurs, plusieurs prestations inclues dans la « base ressources » du RSA sont évaluées de manière forfaitaire : le complément familial majoré, l'allocation de soutien familial, l'avantage en nature lié à la disposition d'un logement ainsi que les aides personnelles au logement (l'allocation de logement familial, l'allocation de logement sociale et l'aide personnalisée au logement) 55 ( * ) .

Le montant forfaitaire fixé pour une personne seule est, depuis le 1 er janvier 2015, fixé à 513,88 euros . Ce montant est majoré de 50 % lorsque le foyer comporte deux personnes, puis de 30 % pour chaque personne supplémentaire à charge. Les parents isolés, c'est-à-dire célibataires, divorcés, séparés ou veufs avec des enfants à charge ou à naître, bénéficient également d'un montant majoré égal à 128,412 % du montant forfaitaire (soit 659,88 euros), à nouveau augmenté de 42,804 %, dans certaines conditions, pour les enfants à charge 56 ( * ) .

Montant forfaitaire du RSA « socle » depuis le 1 er janvier 2015

(en euros)

Nombre d'enfants à charge

Personne seule

Parent isolé

Couple

0

513,88

659,88

770,82

1

770,82

879,84

924,99

2

924,99

1 099

1 079,15

Par enfant supplémentaire

205,55

219,96

205,55

Source : Direction de l'information légale et administrative

Le « point de sortie » du RSA « activité » , c'est-à-dire le montant de ressources du foyer au-delà duquel cette prestation n'est plus versée, dépend de la composition du foyer (en particulier du nombre d'enfants à charge) et des ressources qu'il perçoit. Il se situait en 2014 à 1,15 SMIC pour une personne célibataire sans enfant 57 ( * ) .

Afin de percevoir le RSA, les bénéficiaires doivent fournir une déclaration trimestrielle de ressources (DTR) contenant l'ensemble des ressources précitées perçues par chaque membre du foyer auquel ils appartiennent, et déclarer tout changement de situation intervenant dans cet intervalle de nature à modifier leurs droits au RSA, tel qu'une modification du statut d'activité ou de la composition du foyer. Le RSA est versé chaque mois par les caisses d'allocations familiales (CAF) et de Mutualité sociale agricole (MSA) 58 ( * ) . Lors des trois premiers mois suivant la reprise d'une activité, le bénéficiaire du RSA « socle » continue de percevoir cette prestation à taux plein et ne perçoit pas de RSA « activité », ce qui constitue un mécanisme d'intéressement supplémentaire temporaire. Le RSA est dans son ensemble non imposable au titre de l'impôt sur le revenu et exonéré de contribution sociale généralisée (CSG). Le RSA « activité », en tant que prestation sociale, est soumis à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) au taux de 0,5 % sans abattement.

2. Le financement du RSA « activité »

La part « activité » du RSA est financée par l'État, à travers le Fonds national des solidarités actives (FNSA) , tandis que le financement du RSA « socle » est à la charge des départements. En revanche, l'intégralité du RSA versé aux moins de 25 ans (part socle et activité) est prise en charge par le FNSA.

Depuis la loi de finances pour 2015, qui a procédé à la suppression de l'affectation d'une fraction du prélèvement de solidarité sur les produits de placement et les revenus du patrimoine 59 ( * ) , le FNSA est financé par deux types de ressources :

- une subvention d'équilibre de l'État , retracée dans le programme n° 304 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », d'un montant de 2,3 milliards d'euros en 2015 ;

- une fraction de la contribution exceptionnelle de solidarité des fonctionnaires , pour un montant estimé à 200 millions d'euros en 2015 60 ( * ) .

C. LA DIFFICILE ARTICULATION ENTRE LE RSA « ACTIVITÉ » ET LA PPE

1. Le RSA « activité » s'impute sur le montant de PPE versé

Lors des travaux préparatoires à la création du RSA, la commission présidée par Martin Hirsch prévoyait l'intégration de la prime pour l'emploi à cette nouvelle prestation 61 ( * ) . Cette piste a toutefois été écartée ; la suppression de la PPE en 2008 aurait en effet concerné près de 6 millions de ménages, pour une perte annuelle d'environ 500 euros 62 ( * ) , et aurait conduit à exclure de tout mécanisme de soutien aux faibles revenus la plupart des jeunes actifs âgés de 18 à 25 ans.

La PPE et le RSA « activité » poursuivent des objectifs similaires, en termes d'incitation à la reprise d'un emploi et de soutien aux revenus des travailleurs modestes. Toutefois, ces deux prestations ne se cumulent pas , mais s'articulent de la manière suivante : la PPE, calculée annuellement sur la base des revenus de l'année précédente, est minorée, le cas échéant, des sommes perçues par les membres du foyer fiscal au titre du RSA « activité » . Ainsi, le RSA « activité » est considéré comme un acompte à faire valoir sur la PPE versée l'année suivante. En revanche, le montant correspondant à la différence entre le montant forfaitaire du RSA et les ressources du foyer, c'est-à-dire le RSA « socle », ne vient pas minorer le montant de la PPE.

Lorsque le montant du RSA « activité » est supérieur à celui de la PPE devant être versée l'année suivante, le foyer ne touche pas de prime. Lorsque le montant de PPE est supérieur à celui du RSA « activité » perçu, une prime résiduelle est versée. Selon le rapport de Christophe Sirugue 63 ( * ) , cette prime résiduelle concernait 600 000 foyers fiscaux pour un montant de 200 millions d'euros. Enfin, lorsque les bénéficiaires potentiels de RSA « activité » n'y ont pas recours, ils bénéficient de la totalité de la PPE.

L'articulation entre le RSA « activité » et la PPE

Montant de RSA ou de PPE

Montant des revenus d'activité

RSA

PPE

RSA seul,
non éligibles PPE
(1)

RSA seul,
éligibles à la PPE
(2)

RSA
+ PPE résiduelle (3)

PPE seule
(4)

Note : (1) Ménages percevant le RSA « activité » et non éligibles à la PPE

(2) Ménages percevant seulement le RSA « activité » et éligibles à la PPE, mais dont le montant de PPE dû est inférieur ou égal au montant de RSA « activité »

(3) Ménages percevant le RSA « activité » ainsi qu'un montant de PPE résiduel correspondant à la différence entre la PPE calculée et le RSA « activité » déjà perçu

(4) Ménages percevant uniquement la PPE

Source : Dominique Lefebvre et François Auvigne, Rapport sur la fiscalité des ménages, mai 2014

L'existence de deux dispositifs , aux objectifs proches et à l'articulation peu lisible est un facteur de dispersion des moyens publics et de complexité pour leurs bénéficiaires. Ainsi, la différence de périmètre entre le RSA « activité », perçu par le ménage, et la PPE, versée au foyer fiscal, conduit à ce que l'imputation du RSA sur la PPE se fasse dans des conditions plus ou moins avantageuses selon la configuration professionnelle et fiscale du ménage.

Comme le rappelait le rapport Sirugue, cette complexité est également liée aux différences de gestion, tant en termes de périodicité de la déclaration (annuelle pour la PPE, trimestrielle pour le RSA « activité »), de périodicité du versement (annuelle en année n+1 pour la PPE, mensuelle en année n pour le RSA « activité »), que de formalités administratives ou de différence d'organisme gestionnaire.

Les principales caractéristiques de la PPE et du RSA « activité »

Prime pour l'emploi

RSA « activité »

Année de création

2001

2008

Nature du dispositif

Crédit d'impôt

Aide sociale différentielle

Objectifs (selon les textes)

« Inciter au retour à l'emploi ou au maintien de l'activité »

« Lutter contre la pauvreté au travail et inciter au retour à l'emploi en complétant les revenus d'activité »

Nombre de bénéficiaires (foyers)

5,9 millions

0,8 million

Montant moyen mensuel

36 euros

190 euros

Périodicité de versement

Annuelle (versement en année n+1)

Mensuelle (versement en année n)

Démarche et guichet de versement

Demande par la déclaration annuelle de revenus - DGFiP

Déclarative et actualisation trimestrielle - CAF et MSA

Taux de recours

Entre 95 % et 97 %

32 %

Source : commission des finances d'après le rapport de Christophe Sirugue, « Réforme des dispositifs de soutien aux revenus d'activités modeste », juillet 2013

2. Un coût cumulé de la PPE et du RSA « activité » d'environ 4 milliards d'euros

Le coût cumulé du RSA « activité » et de la PPE représente un montant d'environ 4 milliards d'euros , qui tend à décroitre du fait du gel du barème de la PPE.

Coût cumulé du RSA « activité » et de la PPE

(en milliards d'euros)

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Dépenses totales de PPE

4,48

3,94

3,61

3,10

2,90

2,46

2,20

2,10

Dépenses totales de RSA « activité »

-

0,44

1,31

1,6

1,65

1,57

1,93

1,95

Coût cumulé de PPE et RSA « activité »

4,48

4,38

4,92

4,7

4,55

4,03

4,13

4,05

Source : commission des finances du Sénat (à partir des tomes II des fascicules « Voies et moyens » annexés aux projets de loi de finances et des projets annuels de performances de la mission « Solidarité »)

Selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, le coût cumulé du RSA « activité » et de la PPE se serait établi à 3,8 milliards d'euros en 2016 , en l'absence de réforme et sous l'effet du gel du barème de la PPE. Il n'est toutefois pas précisé si cette prévision intègre ou non le montant final de l'exécution des dépenses de RSA « activité » en 2014, qui ont été nettement supérieures à la prévision initiale.

*

Compte tenu des défauts notable de la PPE et du RSA « activité », rappelés ci-avant dans l'exposé général, l'exécutif a, dans un premier temps, envisagé de transformer la PPE en une réduction dégressive de cotisations salariales de sécurité sociale. Cette mesure ayant été censurée par le Conseil constitutionnel en août 2014 (cf. supra ), le Gouvernement s'est inspiré des travaux du rapport « Sirugue » pour proposer la prime d'activité, dont les grands principes sont inscrits à l'article 24 du présent projet de loi.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article crée le dispositif de la prime d'activité destinée à remplacer à la fois le RSA « activité » et la prime pour l'emploi (PPE), à « périmètre financier constant » par rapport au budget consacré à ces deux dispositifs en 2014, comme le préconisait le rapport « Sirugue », soit une enveloppe correspondant à 4,1 milliards d'euros (en tenant compte de l'inflation entre 2014 et 2016).

La « prime d'activité » reposerait sur les principes suivants :

- l'éligibilité du bénéficiaire au dispositif serait fonction des revenus du foyer ;

- le montant de la prime serait déterminé selon « une approche à la fois familialisée et individualisée », en tenant compte des revenus d'activité du bénéficiaire et de la composition de son foyer. Il s'agit ainsi de maintenir le montant versé aux bénéficiaires actuels du RSA « activité » et de le majorer d'un bonus individuel » pour ceux qui ont un revenu supérieur à 0,5 SMIC, en soutenant plus particulièrement ceux dont la rémunération se situe entre 0,8 et 1,2 SMIC ;

- la prime serait servie mensuellement, dès le premier euro d'activité, en fonction d'une déclaration trimestrielle des ressources du bénéficiaire, à compter de ses 18 ans.

À cet effet, le présent article crée un nouveau titre IV intitulé « Prime d'activité » au sein du huitième livre du code de la sécurité sociale, composé de 22 nouveaux articles.

Il convient de préciser que le présent article se contente de fixer le cadre général de cette nouvelle prestation , l'essentiel des éléments de calcul et des modalités de mise en oeuvre devant être établi par voie réglementaire. L'étude d'impact accompagnant le projet de loi fournit cependant un certain nombre d'éléments permettant de connaître les orientations qui devraient être retenues par le Gouvernement et les hypothèses à partir desquelles les simulations budgétaires ont été élaborées pour déterminer la dépense engendrée.

L'article L. 841-1 du code de la sécurité sociale, qui constitue le premier chapitre du titre IV consacré aux dispositions générales, précise ainsi l'objet et le champ des bénéficiaires de la prime d'activité. Ainsi, la prime « a pour objet d'inciter les travailleurs aux ressources modestes, qu'ils soient salariés ou non-salariés, à l'exercice ou à la reprise d'une activité professionnelle ». La prime d'activité est donc destinée à la fois aux travailleurs salariés et indépendants.

Ainsi, selon l'étude d'impact, tout revenu et assimilé, tiré d'une activité professionnelle devrait ouvrir droit à la prime d'activité, ce qui couvre, outre les salaires, « les traitements, la rémunération sous forme de chèque emploi service universel (CESU), ou encore les indemnités journalières de sécurité sociale perçues à l'occasion des congés légaux de maternité, de paternité ou d'adoption ou, durant les trois mois suivant l'arrêt de travail, perçues en cas d'incapacité physique, d'accident du travail ou de maladie professionnelle ». Les indemnités de chômage ne seraient, en revanche, pas incluses dans les revenus assimilés à des revenus d'activité, à l'exception des indemnités de chômage partiel.

Il convient de signaler que, toujours selon l'étude d'impact, le décret d'application devrait prévoir que les travailleurs en établissements et services d'aide par le travail (ESAT) soient désormais inclus dans le champ des bénéficiaires de la prime d'activité. Leur rémunération serait ainsi assimilée à des revenus d'activité contrairement à ce qui est actuellement pratiqué pour le RSA « activité ». Selon l'étude d'impact, « ces travailleurs en ESAT, environ 26 000, seront donc gagnants à la réforme en obtenant le bénéfice de la prime d'activité ».

En vertu de l'article L. 842-6 du code de la sécurité sociale, les travailleurs indépendants devraient justifier ne pas réaliser un chiffre d'affaires d'un niveau supérieur à un montant fixé par décret pour bénéficier de la prime d'activité. Il en sera de même pour le travailleur agricole (soumis au régime de protection sociale des professions agricoles mentionné à l'article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime) qui « doit mettre en valeur une exploitation pour laquelle le dernier bénéfice agricole connu n'excède pas un montant fixé par décret » .

Ainsi, selon l'étude d'impact, les travailleurs non-salariés devraient voir leurs ressources évaluées « annuellement par les organismes gestionnaires selon des modalités définies par décret, fondées essentiellement sur la prise en considération de leurs bénéfices » , sauf pour ceux ayant « opté pour la déclaration trimestrielle auprès de leur régime social ». S'agissant du chiffre d'affaires ou du bénéfice annuel maximal, il serait quant à lui « variable selon qu'il s'agit d'une activité commerciale, artisanale, agricole ou libérale, proches du régime de l'éligibilité au régime de la micro entreprise ou au régime déclaratif spécial prévus respectivement aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts. »

A. LES CONDITIONS D'ATTRIBUTION DE LA PRIME D'ACTIVITÉ

Le chapitre II , consacré aux conditions d'ouverture du droit à la prime d'activité, est composé de sept articles (articles L. 842-1 à L. 842-7 du code de la sécurité sociale).

1. L'élargissement du champ des bénéficiaires, en particulier aux actifs de 18 à 24 ans

Afin d'être éligible à la prime d'activité, la personne active doit tout d'abord résider en France « de manière stable et effective » et percevoir des revenus professionnels (article L. 842-1).

L'article L. 842-2 précise ensuite les conditions devant être remplies par le bénéficiaire.

En premier lieu, le bénéficiaire doit être âgé de plus de dix-huit ans . La prime d'activité devrait donc être ouverte aux travailleurs ayant entre 18 et 24 ans, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités que les autres bénéficiaires . Cette disposition constitue une différence fondamentale avec le RSA « activité » pour lequel le bénéficiaire doit nécessairement avoir au moins 25 ans, sauf s'il a la charge d'un ou plusieurs enfants nés ou à naître ou sous certaines conditions d'activité fixées par décret (cf. supra ). En revanche, la PPE était déjà ouverte aux jeunes actifs de plus de 18 ans.

Cette évolution fait suite à la préconisation du rapport précité « Sirugue » de ne plus tenir compte de cette condition d'âge. L'étude d'impact indique d'ailleurs que l'accès à ce dispositif de soutien à l'emploi se justifie d'autant plus que le taux de chômage des 18-25 ans s'élève à 23,7 % au troisième trimestre 2014, « soit 13,3 points de plus que le taux de chômage moyen sur l'ensemble de la population . »

L'étude d'impact précise également que le jeune actif pourrait exercer un droit d'option , susceptible d'être revu annuellement , « en fonction de l'évolution de sa situation et de ses ressources d'activité » :

- soit il bénéficierait de la prime en propre, « en constituant son propre foyer au sein de la prime d'activité », tout en résidant encore ou non chez ses parents ;

- soit il en bénéficierait en restant dans le foyer de ses parents, en majorant le montant forfaitaire de la prime versée à l'ensemble du foyer.

La possibilité de modifier cette option chaque année est justifiée par le « caractère potentiellement très évolutif de la situation des jeunes de cette tranche d'âge ».

En deuxième lieu, l'article L. 842-2 prévoit que le bénéficiaire doit être Français ou titulaire d'un titre de séjour autorisant l'exercice d'une activité professionnelle depuis au moins cinq ans . Cette dernière condition n'est toutefois pas applicable aux ressortissants de l'Union européenne, d'un État partie à l'accord de l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse. Elle ne l'est pas non plus pour les réfugiés, les bénéficiaires de la protection subsidiaire, les apatrides et les étrangers titulaires d'une carte de résident ou d'un autre titre de séjour conférant les mêmes droits.

Enfin, comme pour le RSA « activité », cette condition de nationalité ou de titre de séjour n'est pas applicable aux parents isolés c'est-à-dire aux actifs susceptibles de bénéficier de la majoration prévu à l'article L. 842-7 du code de la sécurité sociale 64 ( * ) . Toutefois, ils doivent tout de même répondre aux conditions de régularité de séjour exigé pour les prestations familiales à l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale.

Ensuite, le bénéficiaire ne doit pas être élève, étudiant, stagiaire 65 ( * ) ou apprenti 66 ( * ) . Tout comme pour le RSA « activité », cette condition ne s'applique toutefois pas aux parents isolés.

L'exclusion des étudiants et des apprentis est justifiée dans l'étude d'impact par le fait que ces populations, tout en percevant souvent des revenus professionnels, ne sont pas concernées par la prime d'activité destinée à inciter à l'exercice d'une activité professionnelle pour « les personnes entrées sur le marché du travail, ou en train de s'y insérer ».

En outre, l'étude d'impact indique que l'ouverture de la prestation à l'ensemble des étudiants exerçant une activité salariée régulière conduirait, pour rester dans l'enveloppe budgétaire, à la baisse de 10 euros par mois du « bonus individuel » pour l'ensemble des bénéficiaires 67 ( * ) .

Enfin, l'article L. 842-2 prévoit que les personnes ayant la qualité de travailleur détaché 68 ( * ) sont exclues du bénéfice de la prime .

2. Le calcul du montant de la prime d'activité, à la fois familialisée et individualisée

Les modalités de calcul du montant de la prime d'activité sont prévues à l'article L. 842-3 du code de la sécurité sociale, qui reste, toutefois, pour le moins flou .

Ainsi, selon le dispositif proposé, la prime « prend en compte » :

- un montant forfaitaire « dont le niveau varie en fonction de la composition du foyer et du nombre d'enfants à charge » (1° de l'article L. 842-3 nouveau du code de la sécurité sociale). Ce forfait permettrait donc à la prime d'activité, qui repose sur les revenus d'activité du bénéficiaire, d'être familialisée.

Par ailleurs, ce montant forfaitaire peut fait l'objet d'une bonification , établie « pour chaque travailleur , membre du foyer, compte tenu de ses revenus professionnels ». Le montant bonifié est « une fonction croissante des revenus situés entre un seuil et un plafond ». Le montant est fixe au-delà de ce plafond.

- d'une fraction des revenus professionnels des membres du foyer ;

- les autres ressources du foyer.

Les règles de calcul de la prime d'activité, y compris s'agissant de la bonification, seront fixées par décret en Conseil d'État. Un autre décret déterminera le montant forfaitaire ainsi que la fraction des revenus professionnels des membres du foyer pris en compte.

L'étude d'impact présente ainsi le calcul envisagé de la prime d'activité :

[constante familiale - ressources du ménage] + [62 % des revenus d'activité du ménage + bonus individuels]

Toujours selon l'étude d'impact, les deux termes du calcul correspondraient :

- pour le premier (soit [constante familiale - ressources du ménage]), à un « sous-jacent familialisé ». À partir de cette « constante familiale », correspondant à un montant fixé par décret seraient déduites « les ressources du ménage mobilisées pour le calcul de la prime », une partie d'entre elles « étant appréciées forfaitairement ».

La variation de la constante familiale serait fonction de la composition du foyer du bénéficiaire de la prime d'activité et pourrait être, selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, à tout le moins dans un premier temps, équivalente à celle existant actuellement dans le cadre du RSA, telle qu'issu de l'article R.262-1 du code de l'action sociale et des familles 69 ( * ) ;

- pour le second (soit [62 % des revenus d'activité du ménage + bonus individuels]), aux revenus d'activités du ménage , en intégrant le cas échéant un bonus individualisé par actif.

Le cas échéant, le montant du RSA « socle » serait déduit du montant obtenu par cette formule de calcul.

Selon les informations fournies par le Gouvernement, la prime d'activité, tout comme le RSA « activité », prendrait en compte 62 % des revenus professionnels des membres du foyer.

Les bonus individuels constituent ainsi la principale différence entre le RSA « activité » et la prime d'activité. Compte tenu de la formule de calcul retenue, la prime versée conjuguerait à la fois familialisation et individualisation.

a) Une prime qui reste pour une large part familialisée

Selon l'étude d'impact, la familialisation du revenu permettrait de différencier le point de sortie du dispositif selon la configuration du foyer et des revenus du conjoint ou du concubin.

Le point de sortie du dispositif pour différentes
configurations familiales

Configuration familiale

Revenu d'activité net mensuel
au-delà duquel la prime d'activité est nulle

Personne seule

1 550 € (soit 1,3 SMIC)

Couple mono-actif sans enfants ou famille monoparentale avec 1 enfant

2 265 € (soit 1,9 SMIC)

Couple bi-actif sans enfants (avec un membre rémunéré au SMIC)

1 250 € (soit 1,05 SMIC)
pour le second membre

2 450 € (soit 2,05 SMIC) pour le couple

Couple bi-actif avec 2 enfants (avec un membre rémunéré au SMIC)

1 730 € (soit 1,4 SMIC)
pour le second membre

2 930 € (soit 2,4 SMIC) pour le couple

Source : étude d'impact annexée au présent projet de loi

Selon l'étude d'impact, le mode de calcul retenu devrait permettre de garantir que les bénéficiaires actuels du RSA « activité » ne subissent pas de perte du fait de la réforme.

En vertu de l'article L. 842-5 du code de la sécurité sociale, le conjoint, le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité, serait pris en compte, au titre des droits du bénéficiaire, s'il remplit lui-même les conditions de nationalité ou de résidence sur le sol français prévues au 2° de l'article L. 842-2 et s'il n'a pas la qualité de travailleur détaché.

Ce même article prévoit que les enfants étrangers d'un bénéficiaire de la prime d'activité, lui-même étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, serait pris en compte s'il remplit les conditions définies pour percevoir les prestations familiales en vertu de l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale.

Ce mode de calcul aurait ainsi pour conséquence de revenir sur l'une des caractéristiques de la PPE qui prenait uniquement en compte les revenus déclarés par le travailleur , indépendamment de la rémunération, éventuellement plus élevée, de son concubin (déclarée séparément). Désormais, la prime d'activité pourrait ne plus être versée à un travailleur disposant d'un faible revenu compte tenu des ressources globales du foyer.

L'article L. 842-7 du code de la sécurité sociale prévoit également une majoration du montant forfaitaire pour les parents isolés . Ainsi, elle bénéficierait, pendant une période déterminée et jusqu'à ce que le dernier enfant ait atteint un âge limite (qui devrait être fixé à 3 ans) aux personnes isolées qui assument la charge d'un ou plusieurs enfants ainsi qu'aux femmes isolées « en état de grossesse, ayant effectué la déclaration de grossesse et les examens prénataux ».

Est considérée comme isolée la personne « veuve, divorcée, séparée ou célibataire, qui ne vit pas en couple de manière notoire et permanente et qui notamment ne met pas en commun avec un conjoint, concubin ou partenaire de pacte civil de solidarité ses ressources et ses charges. Lorsque l'un des membres du couple réside à l'étranger, n'est pas considéré comme isolé celui qui réside en France ».

Ce dispositif de majoration est strictement identique à celui actuellement existant à l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles pour le RSA.

b) Une prime individualisée par l'instauration d'un bonus tendant à soutenir l'activité

Un bonus individuel supplémentaire est calculé pour chaque individu actif du foyer. Innovation par rapport au RSA « activité », il constitue l'élément principal destiné à inciter à l'activité.

L'étude d'impact indique que ce bonus serait construit de façon à favoriser plus spécifiquement les travailleurs gagnant entre 0,8 et 1,2 SMIC . Seraient ainsi ciblés les ménages modestes qui disposent de ressources trop importantes pour bénéficier de certains dispositifs de solidarité, notamment les aides personnelles au logement, mais insuffisantes pour bénéficier de la réforme de l'impôt sur le revenu figurant dans la loi de finances pour 2015, qui a procédé à la suppression de la première tranche d'imposition et l'aménagement de la décote.

Le bonus ne serait d'ailleurs pas servi pour ceux ayant des revenus mensuels de 0,5 SMIC ou en-deçà.

Montant mensuel de prime d'activité et supplément perçu par rapport au RSA « activité » pour un célibataire sans enfant (en 2016)

(en euros par mois)

Montant de la prime d'activité

Supplément par rapport au RSA « activité »

Inactif

0

0

Quart temps - 0,25 SMIC

185

0

Mi temps - 0,5 SMIC

246

0

0,6 SMIC

222

22

0,7 SMIC

199

44

3/4 temps - 0,75 SMIC

188

56

0,8 SMIC

176

67

0,9 SMIC

136

67

Plein temps - SMIC

132

67

Plein temps - 1,1 SMIC

105

67

Plein temps - 1,2 SMIC

60

60

Plein temps - 1,3 SMIC

15

15

Plein temps - 1,4 SMIC

0

0

Source : étude d'impact annexée au présent projet de loi

Ainsi, la prime d'activité constituerait, par rapport au RSA « activité », un supplément variant, pour un célibataire sans enfant, de 22 euros mensuels pour une rémunération de 0,6 SMIC, à 67 euros pour une rémunération allant de 0,75 SMIC à 1,1 SMIC. À 1,2 SMIC, la prime d'activité s'élèverait à 60 euros pour un travailleur qui ne touche actuellement rien au titre du RSA « activité ».

Toujours selon l'étude d'impact, une personne célibataire sans enfant bénéficiaire de la prime d'activité pourrait la percevoir jusqu'à un revenu d'activité équivalant à 1 150 euros nets par mois, soit 1,3 SMIC.

Différentes simulations ont été fournies par le Gouvernement à la demande de votre rapporteur pour avis. Elles mettent en évidence les conséquences de la création de la prime d'activité pour différents cas-types de foyers composés d'un couple mono ou biactif, ayant ou non deux enfants, et en fonction du revenu de l'ensemble du foyer.

Principales hypothèses retenues par le Gouvernement pour la construction de ces cas-types :

- les couples sont mariés ou pacsés ;

- la situation familiale et les ressources (en euros constants) des cas-types n'ont pas été modifiées au cours des trois dernières années (2014 à 2016) ;

- les cas-types sont supposés être locataires en zone 2 (agglomérations de plus de 100 000 habitants hors Ile de France) et avoir un loyer supérieur au loyer plafond (environ 250 euros pour une personne seule) ;

- les cas-types ne bénéficient pas de réduction ou de crédit d'impôts ;

- les enfants ont 6 et 8 ans 70 ( * ) ;

- le barème de RSA considéré est celui de 2016, avant revalorisation exceptionnelle de septembre, prévue dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté ;

- ils ne perçoivent pas d'autres ressources que leurs revenus d'activité (ni revenus de remplacement, ni revenus du patrimoine) ;

- ils sont locataires et n'ont pas d'autres revenus que leurs éventuels salaires.

Les calculs ont été établis à partir d'une maquette reflétant la législation en vigueur en 2014, adaptée pour refléter en projection la législation en vigueur en 2016 (en incluant en particulier les revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA des 1 er septembre 2014 et 2015). Une inflation anticipée de 3,25 % entre 2014 et 2016 a notamment été appliquée. Les hypothèses de calcul peuvent expliquer des différences de quelques euros avec les montants réels qui seront versés en 2016.

Cas-type d'un couple monoactif sans enfant

Note : dans le cas d'un couple monoactif, les ressources totales du foyer correspondent au salaire du membre du couple qui travaille.

Source : réponses au questionnaire du rapporteur pour avis

Cas type : couple monoactif avec deux enfants

Note : dans le cas d'un couple monoactif, les ressources totales du foyer correspondent au salaire du membre du couple qui travaille.

Source : réponses au questionnaire du rapporteur pour avis

Cas type : couple biactif sans enfant

Note : dans le cas d'un couple biactif, les ressources totales du foyer correspondent à la somme des salaires des deux membres du couple. Jusqu'à 1 SMIC, on considère que les deux membres du couple perçoivent le même salaire (chacun 0,25 SMIC quand le couple gagne au total 0,5 SMIC). À partir de 1,5 SMIC, l'un des membres du couple est supposé percevoir 1 SMIC et l'autre le salaire résiduel (0,5 SMIC quand le couple gagne au total 1,5 SMIC).

Source : réponses au questionnaire du rapporteur pour avis

Cas type : couple biactif avec deux enfants

Note : dans le cas d'un couple biactif, les ressources totales du foyer correspondent à la somme des salaires des deux membres du couple. Jusqu'à 1 SMIC, on considère que les deux membres du couple perçoivent le même salaire (chacun 0,25 SMIC quand le couple gagne au total 0,5 SMIC). À partir de 1,5 SMIC, l'un des membres du couple est supposé percevoir 1 SMIC et l'autre le salaire résiduel (0,5 SMIC quand le couple gagne au total 1,5 SMIC).

Source : réponses au questionnaire du rapporteur pour avis

Il convient de noter l'importance des montants de la prime d'activité pour les couples qui se trouvent dans la cible des bonus individuels . L'effet de la familiarisation associé aux bonus individuels contribue ainsi à ce qu'un couple mono actif avec deux enfants, et disposant pour ressources totales d'un SMIC , bénéficie de 448 euros, correspondant à 22 % de son revenu disponible mensuel (contre 20 % pour un même couple disposant de 0,5 SMIC et 369 euros de prime d'activité).

De nouveaux effets des seuils sont également créés puisqu'un couple biactif avec deux enfants, dont le montant des ressources augmenterait de 2 à 2,5 SMIC passerait d'une prime d'activité de 221 euros à rien, alors qu'avec le système actuel, il subissait une perte de seulement 46 euros 71 ( * ) .

Les tableaux mettent également en évidence la perte engendrée par cette réforme pour ceux qui, disposant d'au moins deux SMIC, bénéficiaient de la PPE mais ne se verront pas verser de prime d'activité ou bien pour un montant très faible . Ainsi, le couple biactif sans enfant passe, de 100 euros de PPE à 33 euros pour la prime d'activité, ou encore le couple biactif avec deux enfants ne perçoit plus rien avec 2,5 ou 3 SMIC mensuels, alors qu'il percevait auparavant 60 euros par le biais de la PPE. Ces situations sont la conséquence du fait que la prime d'activité est volontairement plus ciblée, afin d'éviter le « saupoudrage » .

La prime d'activité serait servie mensuellement , pour un montant minimal fixé par décret. Selon l'étude d'impact, celui-ci s'établirait à 15 euros.

Le projet de loi prévoit enfin une revalorisation annuelle du montant forfaitaire et du montant maximum de bonification en fonction de l'évolution des prix à la consommation hors tabac au cours des douze derniers mois.

Les règles de revalorisation de la prime d'activité

Aux termes de l' article L 842-3 du code de la sécurité sociale , créé par l'article 24 du présent projet de loi, les deux principaux éléments de calcul de la prime, c'est-à-dire le montant forfaitaire et le montant maximal de la bonification, sont « revalorisés annuellement en fonction de l'évolution des prix à la consommation, hors tabac, au cours des douze derniers mois ».

Cette règle innove par rapport à la revalorisation en deux temps actuellement utilisée pour la plupart des prestations sociales. En effet, selon la règle en vigueur, la revalorisation annuelle intègre la prévision d'inflation pour l'année n , retenue par la commission économique de la nation (CEN) avant le 15 avril de l'année n , sur laquelle s'impute un ajustement au titre de l'année n-1 . Cet ajustement correspond à l'écart entre le taux d'inflation définitif constaté par l'INSEE pour l'année n-1 et la prévision initiale de la CEN.

La revalorisation en fonction de l'évolution des prix des douze derniers mois permettra d'éviter un décalage entre le niveau de revalorisation de la prestation et l'évolution effective des prix à la consommation.

3. Une base simplifiée des ressources du foyer prises en compte

Les revenus professionnels et les autres ressources du foyer qui sont pris en compte afin de calculer le montant de la prime d'activité sont, en vertu de l'article L. 842-4 du code de sécurité sociale, les suivants :

« 1° les ressources ayant le caractère de revenus professionnels ou qui en tiennent lieu ;

« 2° les revenus de remplacement des revenus professionnels ;

« 3° l'avantage en nature que constitue la disposition d'un logement à titre gratuit, déterminé de manière forfaitaire ;

« 4° les prestations et aides sociales, à l'exception de certaines d'entre elles en raison de leur finalité sociale particulière ;

« 5° les autres revenus soumis à l'impôt sur le revenu. »

La « base ressources » de la prime se trouve simplifiée comparée à celle du RSA « socle », qui tient compte de toutes les ressources du foyer, à quelques exceptions limitativement prévues.

À l'inverse, la « base ressources » de la prime d'activité énumère précisément la liste des ressources prises en compte dans le calcul de la prestation. Elle exclut les autres ressources, et notamment les avantage en nature autre que le logement mis à disposition gratuitement, les libéralités, les capitaux qui ne produisent pas de revenus, les revenus du capital non imposables, les biens immobiliers non loués ou encore certaines aides comme l'allocation d'entretien versée par l'aide sociale à l'enfance aux tiers de confiance.

Cette différence entre les deux prestations tient au fait que la prime d'activité est versée aux travailleurs justifiant de revenus tirés de leur activité professionnelle et est destinée à les compléter. Pour le RSA « socle », il s'agit de déterminer les ressources du foyer afin de fixer le montant permettant d'atteindre un revenu garanti, dans le cadre d'un minimum social.

Le dispositif prévoit qu'un décret en Conseil d'État devra déterminer les modalités d'application de l'article L. 842-4 ainsi que l'évaluation des ressources.

Comme indiqué supra, les revenus professionnels et assimilés devraient recouvrir les salaires, traitements et autres revenus définis actuellement à l'article R. 262-8 du code de l'action sociale et des familles pour le RSA. Les revenus des travailleurs en ESAT devraient également appartenir à cette catégorie. Ces revenus professionnels se verront appliquer un abattement de 62 % pour le calcul de la prime.

Les « revenus de remplacement des revenus professionnels » font référence aux revenus perçus en remplacement d'une rémunération issue du travail. Il s'agit principalement des allocations de chômage ou de préretraite, des pensions de retraite et des pensions d'invalidité ainsi que les indemnités journalières de sécurité sociale au-delà de trois mois d'arrêt de travail.

Comme pour le RSA, la disposition d'un logement à titre gratuit constitue un « avantage en nature déterminé de manière forfaitaire » , qui est pris en compte dans les ressources du bénéficiaire de la prime.

Les autres revenus soumis à l'imposition sur le revenu entrent également dans le champ des ressources retenues pour déterminer la prime d'activité. Il s'agit notamment des pensions alimentaires, des revenus fonciers ou encore des revenus imposables des capitaux.

Certaines prestations et aides sociales seraient, en revanche, exclues du champ des ressources prises en compte « en raison de leur finalité sociale particulière », comme pour le RSA pour lequel l'article R. 262-11 du code de l'action sociale et des familles établit une liste de 23 prestations parmi lesquelles figurent notamment la prime à la naissance ou à l'adoption, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, l'allocation de rentrée scolaire, la majoration pour âge des allocations familiales ou encore des bourses d'études.

Selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, la liste dressée pour le RSA serait reprise à l'identique pour la prime d'activité. À ces 23 prestations exclues du fait de leur finalité sociale particulière, s'ajouterait également le RSA « socle » .

En vertu de l'article L. 842-5 du code de la sécurité sociale, le conjoint, le concubin ou le partenaire lié à un pacte civil de solidarité doit répondre aux mêmes exigences que le bénéficiaire.

Selon les informations fournies par le Gouvernement, les informations concernant les ressources des foyers ne devraient pas être trop difficiles à vérifier, y compris en cas de concubinage. Ainsi, les revenus d'activité et de remplacement des allocataires feraient l'objet d'une déclaration trimestrielle, tandis que le montant forfaitaire établi pour les aides au logement et les prestations sociales seraient déjà connues des Caisses d'allocations familiales. Les autres revenus imposables pourraient quant à eux être préremplis à la suite d'échanges avec la DGFiP, « sur la base d'une requête individualisée pour chacun des membres du foyer ».

Selon l'étude d'impact, 5,6 millions de personnes actives seraient éligibles à la prime d'activité, correspondant à 4 millions de ménages et 11 millions de personnes au total.

Le Gouvernement retient un taux de recours de la prestation de 50 %, quand le RSA « activité » n'atteint actuellement que 32 %. 2 millions de ménages seraient ainsi allocataires. Le montant d'allocation mensuel moyen serait de 160 euros.

B. LES MODALITÉS D'APPLICATION

1. Une prestation gérée par les caisses d'allocations familiales, versée à des bénéficiaires dont les droits seraient « figés » pour un trimestre et financée par le budget de l'État

Le chapitre III du titre IV du huitième livre du code la sécurité sociale, qui comprend six articles, est consacré à l'attribution, au service et au financement de la prime d'activité.

a) Une fois ouverts, les droits des bénéficiaires de la prime d'activité sont « figés » pour un trimestre

Sous réserve de remplir les conditions de son attribution, le droit à la prime d'activité est ouvert à compter de la date de la demande (article L. 843-2 du code de la sécurité sociale). Ainsi, quel que soit le temps d'instruction du dossier, la personne éligible pourra en bénéficier à compter de cette date.

Contrairement au RSA « activité », la prime d'activité ne verra pas son montant varier à chaque évolution des ressources du foyer . En effet, le projet de loi prévoit l'introduction d'un « effet figé » des droits , avec un réexamen prévu « selon une périodicité définie par décret ». Celle-ci devrait, selon les informations fournies par l'étude d'impact, être fixée à trois mois .

Ainsi, entre chaque réexamen, la prime d'activité restera identique, sans qu'il ne soit tenu compte de l'augmentation ou de la baisse des ressources du foyer.

Le fait de prévoir des droits « figés » pour un trimestre constitue une modification notable et bienvenue par rapport au RSA « activité » qui tenait compte chaque mois du changement de niveau de situation des bénéficiaires. Cette disposition était ainsi source de complexité et engendrait des indus pour de nombreux dossiers.

Le projet de loi prévoit également que la prime d'activité peut être réduite ou suspendue dans l'hypothèse où l'un des membres du foyer est admis dans un établissement de santé ou relève de l'administration pénitentiaire, selon des conditions fixées par décret. Il précise que « la date d'effet et la durée de la réduction ou de la suspension ainsi que, le cas échéant, la quotité de la réduction varient en fonction de la durée du séjour en établissement » (article L. 843-3 du code de la sécurité sociale).

Enfin, en l'absence de versement de la prestation ou du RSA pendant une certaine période, fixée par décret, le bénéficiaire de la prime d'activité est radié (article L. 843-5 du code de la sécurité sociale).

b) La gestion de la prime d'activité, une compétence confiée aux caisses d'allocations familiales

La gestion de la prime d'activité sera assurée par les caisses d'allocations familiales (CAF) et, pour ceux qui relèvent de leur compétence, par les caisses de mutualité sociale agricole (article L. 843-1 nouveau du code de la sécurité sociale).

Déjà compétentes s'agissant du RSA « activité », les CAF devraient toutefois connaître une hausse de leur activité . En effet, le nombre des bénéficiaires devrait être sensiblement plus important , non seulement car le nombre de personnes éligibles au dispositif est supérieur à celui du RSA « activité », compte tenu notamment des jeunes actifs de 18 à 25 ans et du fait qu'elle est censé englober davantage de salariés à temps complet et de couples bi-actifs, mais aussi en raison du taux de recours attendu de 50 %, contre 32 % actuellement constaté pour le RSA « activité ».

Parallèlement, les efforts de simplification annoncés, s'agissant en particulier de la base de ressources prises en compte, l'effet « figé » des droits pour un trimestre ou encore du développement de la dématérialisation des procédures, devraient permettre de faciliter le travail des CAF. S'agissant de l'informatique, l'étude d'impact précise également que les systèmes d'information des CAF devront être adaptés et qu'un simulateur permettant à chaque personne de tester son éligibilité avant de demander la prime d'activité devrait être mis en place. Enfin, la déclaration de ressources du RSA « socle » devrait, le cas échéant, pouvoir être utilisée par les CAF pour calculer la prime d'activité des bénéficiaires qui seraient éligibles aux deux dispositifs.

L'étude d'impact du projet de loi indique qu'« une estimation des impacts sur l'activité des CAF et des moyens nécessaires à la mise en oeuvre de la prime d'activité sera réalisée dans le cadre de la mission d'évaluation à mi-parcours de la convention d'objectifs et de gestion de la [caisse nationale d'allocations familiales (CNAF)] : cette mission sera réalisée conjointement par l'inspection générale des affaires sociales et par l'inspection des finances. »

c) Une prestation financée par le budget de l'État

La prime d'activité devrait être intégralement financée par le budget de l'État (article L. 843-6 du code de la sécurité sociale), dans le cadre de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

À l'occasion d'une prochaine loi de finances, l'étude d'impact indique qu'il conviendra de « statuer sur l'évolution ou le devenir du Fonds national des solidarités actives, concourant au financement du RSA « activité » [et] géré par la Caisse des dépôts et consignations ».

Selon les informations fournies par le Gouvernement, une enveloppe de 4,1 milliards d'euros est ainsi prévue pour l'année 2016. Cela correspond à un effort supplémentaire de 300 millions d'euros par rapport à ce qu'aurait représenté la somme des budgets consacrés à la PPE et au RSA « activité » à cette date, compte tenu du gel du barème de la PPE en vigueur depuis 2008.

Cette enveloppe budgétaire a été calculée sur l'hypothèse d'un taux de recours de 50 %, représentant 66 % de la masse financière potentielle de la prime - puisque, selon l'étude d'impact, ce sont les personnes éligibles pour les plus petits montants qui devraient le plus souvent renoncer à s'engager dans les démarches administratives pour obtenir la prime d'activité.

Misant sur une montée en charge rapide, le Gouvernement devrait, selon l'étude d'impact, prévoir 4 milliards d'euros de crédits consacrés à la prime d'activité dans le projet de loi de finances pour 2016, puis 4,2 milliards d'euros en 2017 et 4,3 milliards d'euros en 2018.

2. Contrôle, récupération de l'indu et lutte contre la fraude

Dans le chapitre IV, les cinq articles concernent le contrôle de l'attribution de la prime d'activité, l'éventuelle récupération de l'indu et la lutte contre la fraude.

En vertu de l'article L. 844-1, il est prévu que les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité sociale agricole disposent des règles, procédures et moyens d'investigation déjà applicables par ces organismes pour procéder à des contrôles et des enquêtes.

Préalablement à l'exercice d'un recours contentieux, il est prévu qu'une réclamation doit faire l'objet d'un recours auprès de la commission de recours amiable, qui est composée et constituée au sein du conseil d'administration de l'organisme concernée pour connaître des réclamations relevant du contentieux général de la sécurité sociale. Ensuite, le recours contentieux est éventuellement porté devant la juridiction administrative (article L. 844-2 du code de la sécurité sociale).

En se fondant sur les dispositions actuellement applicables pour le RSA, l'article L. 844-3 prévoit également les modalités de répétition des sommes indument perçues par le bénéficiaire.

Ainsi, les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité sociale agricole sont compétentes en la matière.

La répétition de l'indu peut être réalisée en une seule fois, si le bénéficiaire fait ce choix, sinon, la caisse d'allocations familiales ou la caisse de mutualité sociale agricole compétente recouvre la somme « par retenues sur les montants à échoir ». À défaut de le pouvoir, elle procède à des retenues sur les versements d'autres prestations sociales : les prestations familiales, l'allocation de logement sociale, l'allocation pour adulte handicapé, l'aide personnalisée au logement ou encore le revenu de solidarité active.

Dans l'hypothèse où l'indu aurait été constitué sur une prestation versée en tiers-payant, l'organisme concerné peut recouvrer l'indu sur d'autres prestations versées directement à l'allocataire « dans des conditions précisées par décret ».

Les retenues opérées sur les montants des prestations à échoir sont déterminées selon les règles fixées pour les prestations familiales par l'article L. 553-2 du code de sécurité sociale, et notamment « en fonction de la composition de la famille, de ses ressources, des charges de logement, des prestations servies par les organismes débiteurs de prestations familiales, à l'exception de celles précisées par décret ».

Le présent article prévoit également que l'article L. 161-5-1 du code de la sécurité sociale est applicable, permettant ainsi au directeur de l'organisme compétent de délivrer une contrainte pour le recouvrement des sommes indument perçues, laquelle, « à défaut d'opposition du débiteur devant la juridiction compétente, comporte tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire ».

Un décret doit déterminer le montant minimal en-deçà duquel les sommes indument versées au titre de la prime d'activité ne donne pas lui à répétition.

L'organisme peut également décider de remettre ou réduire la créance, « en cas de bonne foi ou de précarité de la situation du débiteur, sauf si cette créance résulte d'une manoeuvre frauduleuse ou d'une fausse déclaration. »

L'article précise également le caractère suspensif de toute réclamation portée par un bénéficiaire contre une « décision de récupération de l'indu », mais aussi du « dépôt d'une demande de remise ou de réduction de créance » ainsi que des « recours administratifs et contentieux, y compris en appel, contre les décisions prises sur ces réclamations et demandes ».

En renvoyant à l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale applicable aux prestations familiales, l'article L. 844-4 prévoit un délai de prescription de deux ans pour la prime d'activité.

Enfin, en référence à la peine déjà prévue à l'article L. 554-2 du code de la sécurité sociale, une amende de 4 500 euros d'amende est prévue par l'article L. 844-5 pour punir le « fait d'offrir ou de faire offrir ses services à un allocataire, moyennant émoluments convenus d'avance, en vue de lui faire obtenir la prime d'activité ».

3. Transmission à l'État de données à des fins statistiques

Reprenant les dispositions déjà prévues pour le RSA « activité », le chapitre V est relatif au suivi statistique, à l'évaluation et à l'observation comprend deux articles qui prévoient la transmission par la caisse nationale des allocations familiales et la caisse nationale de la mutualité sociale agricole à l'État, dans des conditions fixées par décret :

- les informations concernant « la situation sociale, familiale et professionnelle des bénéficiaires de la prime d'activité et aux dépenses engagées à ce titre » (article L. 845-1 du code de la sécurité sociale) ;

- les informations relatives « aux personnes physiques destinées à la constitution d'échantillons statistiquement représentatifs en vue de l'étude des situations et des parcours d'insertion des personnes physiques figurant dans ces échantillons » (article L. 845-2 du code de la sécurité sociale).

Enfin, le chapitre VI, à l'article unique et relatif aux dispositions finales, prévoit que, sauf disposition contraire, les modalités d'application de la prime d'activité sont fixées par décret en Conseil d'État (article L. 846-1 du code de la sécurité sociale).

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En commission des affaires sociales, huit amendements ont été adoptés dont :

- cinq amendements du rapporteur , Christophe Sirugue . Un amendement vise à compléter les objectifs de la prime d'activité, en mentionnant explicitement le soutien aux pouvoir d'achat . Un autre amendement vise à corriger un oubli au nouvel article L. 843-3 du code de la sécurité sociale, en précisant qu'il est tenu compte des charges de famille du bénéficiaire lorsque celui-ci est hospitalisé ou emprisonné. Un amendement prévoit l'information « par tout moyen » du bénéficiaire de la prime d'activité concernant les modalités de réclamation et de recours fixées par le présent projet de loi.

Le rapporteur, Christophe Sirugue, a également inséré un nouvel article L. 845-1-1 du code de la sécurité sociale prévoyant, par symétrie avec la disposition existante en matière de RSA socle, la transmission mensuellement par Pôle emploi à l'État des inscriptions des bénéficiaires de la prime d'activité sur la liste des demandeurs d'emploi et de leur radiation de cette liste. L'exposé sommaire de l'amendement indique qu'il est nécessaire de prévoir cette mesure « car il est vraisemblable qu'une partie au moins des bénéficiaires de la prime d'activité connaîtra des allers-retours entre l'emploi et la recherche d'emploi ». Enfin, un dernier amendement du rapporteur, adopté au stade de la commission, prévoit que Pôle emploi, à l'instar de la CNAF et de la CCMSA, doit transmettre à l'État les informations nécessaires au suivi du parcours des bénéficiaires de la prime (situation sociale, familiale et professionnelle).

- un amendement du Gouvernement tendant à inclure parmi les bénéficiaires de la prime d'activité les étudiants, stagiaires et apprentis dont la rémunération excède un certain plafond , correspondant au seuil de rattachement au foyer dans le cadre des prestations familiales (soit 0,78 SMIC ou environ 900 euros mensuels nets). L'exposé sommaire de l'amendement précise que cette modification du champ de la prime d'activité vise « davantage des travailleurs qui par ailleurs poursuivent des études que des personnes en formation initiale ». Ce dernier ne donne toutefois aucune indication concernant le nombre de personnes concernées et le coût de cette mesure. Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, 70 000 apprentis et 80 000 étudiants auraient ainsi accès à la prime d'activité, pour un coût d'environ 100 millions d'euros ;

- un amendement de notre collègue députée Sandrine Mazetier, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes , qui vise à compléter les informations transmises par la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) à l'État, afin d'assurer le suivi statistique des bénéficiaires, par des « indicateurs sexués ». L'objectif est ici notamment de vérifier si la prime d'activité favorise bel et bien la bi-activité des couples, qui est l'un de ses objectifs. Un sous-amendement du rapporteur Christophe Sirugue, procède à l'ajout de la mention des indicateurs sexués à l'article L. 845-2 du code de la sécurité sociale relatif à la constitution d'échantillons statistiques de bénéficiaires de la prime d'activité par la CNAF, la CCMSA et Pôle emploi et à la transmission de ces informations à l'État.

En séance publique , 17 amendements ont été adoptés, dont neuf amendements rédactionnels du rapporteur, Christophe Sirugue.

Trois amendements « d'allègement rédactionnel », adoptés à l'initiative du rapporteur, avec un avis favorable du Gouvernement, suppriment le renvoi explicite à un décret en Conseil d'État s'agissant des règles de calcul de la prime pour les travailleurs salariés et les travailleurs indépendants et agricoles et de la définition de la « base ressources ». Il est en effet considéré que l'article L. 846-1 du code de la sécurité sociale, créé par le présent projet de loi, est suffisant dans la mesure où il indique que les modalités d'application de l'ensemble du titre relatif à la prime d'activité « sont déterminées par décret en Conseil d'État sauf disposition contraire ».

Cinq amendements adoptés en séance publique apportent des modifications plus substantielles à l'article 24 du présent projet de loi :

- un nouveau chapitre III bis a été inséré, à l'initiative du rapporteur Christophe Sirugue, avec un avis favorable du Gouvernement, créant un « droit à un accompagnement adapté à ses besoins » au profit de chaque bénéficiaire de la prime d'activité lorsqu'il est en recherche d'emploi. Ce principe « souple et non contraignant », selon les termes de l'exposé sommaire de l'amendement, pourrait notamment trouver une traduction dans le cadre de l'expérimentation relative à l'adaptation de l'offre de services de Pôle emploi en direction des salariés en activités réduites subies, prévue dans le cadre de la convention avec l'État et l'Unédic ;

- à l'initiative de notre collègue députée Dominique Orphé, il est proposé de tenir compte de la surface agricole exploitée au lieu du montant du bénéfice agricole pour le calcul de la prime d'activité des exploitants agricoles dans les départements d'outre-mer et les collectivités de Saint-Martin et de Saint Barthélémy. Une disposition semblable existe pour l'assujettissement au régime social agricole en outre-mer. Cet amendement a reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement ;

- deux amendements identiques , l'un du rapporteur pour avis de la commission des finances, Dominique Lefebvre, et l'autre de Michel Liegott et des membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, adoptés avec un avis favorable de la commission et du Gouvernement, ont pour objet de rendre la prime d'activité incessible et insaisissable . Il s'agit d'aligner le régime de la nouvelle prime sur celui du RSA socle, prévu par l'article L. 262-48 du code de l'action sociale et des familles, et de garantir ainsi le versement de la prime même en cas de saisie par un créancier ;

- à l'initiative de notre collègue député Michel Pouzol et des membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, un amendement prévoit la mise en place d'une campagne dématérialisée d'information auprès des actuels bénéficiaires du RSA « activité » et de la PPE par les CAF et la DGFiP . Cette disposition a pour but de renforcer le taux de recours à la future prime d'activité. Il convient toutefois de noter qu'elle n'est réellement pertinente que pour les actuels bénéficiaires de la PPE dans la mesure où le projet de loi prévoit le basculement automatique des allocataires du RSA « activité » vers la prime d'activité.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN CIBLAGE DE LA PRIME ENTRAÎNANT UNE CONCENTRATION DES GAGNANTS PARMI LES MÉNAGES LES PLUS PAUVRES

1. Moins d'un quart des ménages concernés gagnants à la réforme

Selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, environ 4,5 millions de ménages verront leur situation financière modifiée à la suite du remplacement du RSA « activité » et de la PPE par la prime d'activité. Toutefois, la répartition entre « gagnants » 72 ( * ) et « perdants » 73 ( * ) à la réforme varie selon la prise en compte ou non des effets de la réforme de l'impôt sur le revenu adoptée fin 2014.

Ainsi, en intégrant les effets de la réforme du « bas de barème » de l'impôt sur le revenu , la répartition serait la suivante :

- environ 1,24 million de ménages seraient gagnants et bénéficieraient d'une augmentation de leurs revenus ;

- environ 820 000 ménages seraient perdants et verraient donc leur revenu diminuer ;

- enfin, 2,45 millions de ménages ne verraient pas d'évolution significative de leur revenu ; pour ces derniers, les effets combinés des différentes réformes seraient neutres.

La réforme de l'impôt sur le revenu permettrait notamment de compenser les effets négatifs de l'instauration de la prime d'activité pour environ 370 000 ménages.

Globalement, le montant mensuel moyen de gain s'élève à 99 euros pour l'ensemble des ménages gagnants, tandis que le montant mensuel moyen de perte s'élève à 53 euros . Pour mémoire, le montant moyen de prime d'activité serait de 160 euros mensuels parmi les recourants, contre 38 euros pour la PPE et 183 euros pour le RSA « activité » en 2012.

Ménages concernés par la réforme par décile de niveau de vie

(en milliers)

Impact de la réforme seule

Total en tenant compte de la réforme de l'impôt sur le revenu

Décile

1

2

3

4

5

6

7 à 10

Total

Gagnants

270

324

201

65

40

27

42

969

1 245

Perdants
(hors non-recourants)

76

164

241

246

200

145

124

1 197

824

Neutres

304

376

382

337

287

262

398

2 347

2 444

Champ : ménages ordinaires de France métropolitaine

Note : Parmi les 10 % ménages les plus modestes (1 er décile), 270 000 ménages sont gagnants 76 000 sont perdants, et 304 000 voient leur revenu disponible être modifié de moins de 1 %. Le total en tenant compte de la réforme IR a été calculé sur le champ des ménages qui touchaient l'ancien RSA-activité ou la PPE.

Source : étude d'impact annexée au présent projet de loi

Par ailleurs, le nombre de perdants à la réforme est supérieur si l'on tient compte du phénomène de non-recours à la future prime d'activité. En effet, selon l'hypothèse retenue pour le Gouvernement pour l'année 2016, seuls 50 % des ménages éligibles à la prime devraient effectivement y recourir. Ainsi, après prise en compte du non recours, en particulier parmi les actuels bénéficiaires de la PPE, environ 560 000 ménages supplémentaires seraient perdants à la réforme.

En tenant compte à la fois des effets de la réforme du « bas de barème » et du non-recours, le nombre de ménages perdants (environ 1,4 million) serait donc supérieur au nombre de ménages gagnants (environ 1,2 million). La réforme resterait neutre pour environ 2,4 millions de ménages.

2. La concentration des gagnants dans les premiers déciles de niveau de vie

Les effets positifs de la mise en place de la prime d'activité devraient se concentrer sur les ménages appartenant aux trois premiers déciles de niveau de vie, c'est-à-dire chez les ménages dont le revenu mensuel est inférieur à 1 363 euros. Ainsi, en tenant compte des effets de la réforme de l'impôt sur le revenu, hors non-recourants, 48 % des gagnants se trouvent parmi les 20 % des ménages les plus pauvres .

Selon le Gouvernement, la mise en place de la prime d'activité s'adresse en priorité aux travailleurs qui n'ont bénéficié ni du plan de lutte contre la pauvreté (en particulier de la revalorisation du RSA socle), ni de la réforme de l'impôt sur le revenu, dans la mesure où ces ménages étaient déjà non imposables.

Le montant mensuel moyen de gain serait de 116 euros pour les 10 % de ménages les plus pauvres , de 87 euros pour les ménages du deuxième décile et de 79 euros pour ceux du troisième décile.

Ventilation des gagnants par décile de niveau de vie
(après prise en compte de la réforme de l'IR et hors non-recourants)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'étude d'impact annexée au présent projet de loi et des données transmises par le ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes)

Plusieurs catégories de personnes devraient notamment voir leurs revenus augmenter grâce à la prime d'activité :

- les jeunes travailleurs, âgés entre 18 et 25 ans , qui étaient auparavant exclus du RSA « activité », auxquels s'ajouteraient les étudiants et les apprentis dont le revenu d'activité est supérieur à 0,78 fois le SMIC ;

- la moitié des allocataires actuels du RSA « activité » (soit environ 480 000) qui percevraient une prime d'activité plus importante grâce aux bonus individuels ;

- les familles monoparentales , qui, en principe, bénéficieront à la fois de la familiarisation de la prime d'activité et de la prise en compte individuelle des revenus d'activité.

Toutefois, si l'on analyse plus en détail la situation des ménages situés parmi les 30 % des plus pauvres, il s'avère que 400 000 à 800 000 d'entre eux - selon que l'on tient ou non compte du non-recours - verraient leur revenu diminuer après la réforme.

3. Entre 820 000 et 1,4 million d'actuels bénéficiaires de la PPE seraient perdants

Les résultats des simulations de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) présentés dans l'étude d'impact, indiquent que les quelques 820 000 perdants de la réforme seraient concentrés entre les deuxième et quatrième déciles de niveau de vie , y compris après avoir pris en compte la réforme du « bas de barème » de l'IR. Le montant moyen mensuel de perte serait d'environ 50 à 60 euros tous déciles de niveau de vie confondus.

Ventilation des perdants par décile de niveau de vie
(après prise en compte de la réforme de l'IR et hors non-recourants)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'étude d'impact annexée au présent projet de loi et des données transmises par le ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes)

Si l'on tient compte des personnes actuellement éligibles à la PPE et qui ne recourront pas à la prime d'activité, il est encore plus flagrant que la majorité des perdants se situeront également dans les premiers déciles de niveau de vie : sur 1,4 million de perdants, en tenant compte du non recours et de la réforme de l'IR, environ 830 000, soit 60 % des perdants feraient partie des 30 % des ménages les plus pauvres.

Cette situation s'explique par la redistribution opérée par la prime d'activité entre certains bénéficiaires de la PPE, d'une part, et les allocataires du RSA « activité » et les personnes qui entreront dans le champ de la nouvelle prime, d'autre part. En effet, les allocataires du RSA « activité » verront tous leur revenu augmenter à l'issue de la réforme, tandis que 25 % des bénéficiaires de la PPE seront perdants (55 % auront un gain ou une parte de revenu inférieur à 1 % et seuls 20 % seront gagnants).

Répartition des gagnants et des perdants parmi les bénéficiaires de la PPE
(après prise en compte de la réforme de l'IR)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'étude d'impact annexée au présent projet de loi)

Plus précisément, l'étude d'impact décompose les quelques 820 000 perdants de la façon suivante :

- 40 % seraient des bénéficiaires actuels de la PPE vivant en concubinage , c'est-à-dire des ménages constitués de plusieurs foyers fiscaux. En cas d'imposition séparée, il est en effet possible pour l'un des concubins de bénéficier de la PPE, même si son partenaire perçoit des revenus plus élevés ;

- 55 % seraient des bénéficiaires de la PPE qui perdraient du fait de la modification du mode de calcul de la nouvelle prime (base trimestrielle à la place d'une base annuelle) ou de l'élargissement des ressources prises en compte (revenus d'activité pour la PPE et « base ressources » plus large pour la prime d'activité) ;

- 5 % seraient des bénéficiaires de la PPE éligibles à la prime d'activité, mais pour un montant inférieur.

Par ailleurs, la fixation du seuil de versement de la prime d'activité à 15 euros mensuels , contre 6 euros mensuels pour le RSA « activité » et 30 euros annuels pour la PPE, explique l'existence d'un certain nombre de perdants parmi les bénéficiaires de faibles montants d'aide.

B. UNE OUVERTURE DU CHAMP DES BÉNÉFICIAIRES AUX ÉTUDIANTS DONT LES EFFETS SONT HASARDEUX

En intégrant, sous certaines conditions très restrictives, les étudiants parmi les bénéficiaires de la prime d'activité, l'Assemblée nationale a apporté une mauvaise réponse aux difficultés financières, bien réelles, rencontrées par certains étudiants .

La mesure, issue d'une initiative gouvernementale et tendant à concrétiser une annonce du Président de la République, prévoit que les étudiants et les apprentis pourront bénéficier de la prime d'activité s'ils justifient percevoir des revenus professionnels qui seraient fixés à 0,78 SMIC net mensuels (soit environ 900 euros) et exercer leur activité professionnelle pendant une période minimale qui devrait être de trois mois.

Lors de l'examen, par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, de l'amendement ayant introduit ce dispositif, Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a précisé que le seuil de 78 % du SMIC avait été retenu car il était « cohérent avec la notion de foyer social : les jeunes en formation initiale qui bénéficient d'un revenu d'activité supérieur à 0,78 SMIC ne peuvent plus dépendre du foyer de leurs parents pour la caisse d'allocations familiales et sont considérés comme des actifs pour le calcul des allocations familiales ou des allocations logement » .

Il semble pour le moins paradoxal que la prime d'activité soit servie aux étudiants alors que le principal objectif de cette prestation est d'inciter à l'exercice ou à la reprise d'une activité professionnelle . Ces personnes devraient plutôt être encouragées à réussir leur cursus . C'est d'ailleurs ce qui était indiqué dans l'étude d'impact du projet de loi pour justifier l'exclusion des étudiants du bénéfice de la prime d'activité.

Certes, certains étudiants rencontrent d'indéniables difficultés financières pour mener à bien leur scolarité. Toutefois, sans méconnaître cette réalité , leur octroyer la prime d'activité n'est pas une solution adaptée à leur situation. Il paraîtrait préférable de s'appuyer sur un système de bourses sur critères sociaux efficace et une offre de logements adaptée pour y répondre aux besoins constatés.

En outre, il pourrait exister un risque que la perspective de bénéficier de la prime d'activité puisse inciter certains étudiants à augmenter leur temps de travail salarié, au détriment de leurs activités scolaires.

Le dispositif proposé cible les personnes qui ont vraisemblablement le temps de travail le plus difficilement compatible avec un cursus de l'enseignement supérieur et qui rend difficile de suivre des cours avec assiduité. Des études économiques ont d'ailleurs démontré que l'activité salariée était susceptible d'avoir un impact négatif sur la réussite scolaire . Ainsi en est-il notamment d'une étude publiée par l'INSEE, de novembre 2009, qui établit que « travailler plus de 16 heures par semaine a un effet très significativement négatif (en moyenne de près de 49 points) sur la probabilité d'obtenir son diplôme. En revanche, l'effet du travail salarié est réduit de moitié et peu significatif lorsque l'étudiant travaille moins de 16 heures par semaine » 74 ( * ) .

Il convient également de rappeler que l'enveloppe budgétaire consacrée à la prime d'activité est d'ores et déjà contrainte . Or l'ouverture du bénéfice de cette prestation aux étudiants et aux apprentis, estimés respectivement à 80 000 et 70 000 d'après les informations reçues du Gouvernement, conduirait à une dépense supplémentaire de 100 millions d'euros .

Pour toutes ces raisons, la commission des finances a adopté un amendement de votre rapporteur pour avis tendant à exclure les étudiants du bénéfice de la prime d'activité, en ne la maintenant que pour les apprentis qui répondraient aux critères fixés par le présent article tel qu'adopté par l'Assemblée nationale : disposer d'une rémunération de plus de 0,78 SMIC et exercer leur activité pendant une période d'au moins trois mois. Les apprentis concernés sont alors considérés comme ayant suffisamment avancé dans leur scolarité et seraient les plus susceptibles à bénéficier d'une prestation tendant à encourager et à faciliter l'intégration dans le monde du travail. En effet, selon le Gouvernement, sont visés par le dispositif les apprentis majeurs de troisième année ainsi que la majorité des apprentis de deuxième année de plus de 21 ans.

Votre rapporteur pour avis a conscience que la solution proposée fait débat. Elle ne tient, notamment, pas compte de la situation des étudiants salariés qui, tout en exerçant une activité professionnelle, poursuivraient une formation initiale, notamment par des cours universitaires du soir. Des dispositions spécifiques leur permettent toutefois déjà de souscrire au régime général de la sécurité sociale et de ne pas cotiser à celui des étudiants.

En tout état de cause, l'amendement proposé par votre commission met en évidence les contradictions du Gouvernement : tout en affirmant que la prime d'activité a pour principal objectif d'inciter à l'exercice ou la reprise d'une activité professionnelle, il prévoit qu'elle serait également servie aux étudiants et aux apprentis, sous réserve d'une rémunération si élevée qu'elle conduit à cibler, parmi ces publics, les plus à même de renoncer à leur scolarité !

C. UN DISPOSITIF ENCORE FLOU ET COMPLEXE

1. Un dispositif législatif flou, qui renvoie à nombreuses dispositions règlementaires

Le dispositif de la prime d'activité, tel que détaillé dans le présent article, demeure flou. Si les grands principes de fonctionnement et d'attribution de la prime sont présentés, de nombreux éléments pourtant substantiels sont renvoyés au pouvoir réglementaire . Ainsi, l'article mentionnait dans sa version initiale 16 décrets d'application devant être pris afin de préciser la manière dont la prime sera calculée et versée à ses bénéficiaires.

Les principaux éléments devant être déterminés par décret sont les suivants :

- les règles de calcul de la prime d'activité, dont les modalités de calcul de la bonification ;

- le montant forfaitaire et la fraction des revenus professionnels des membres du foyer pris en compte dans le calcul de la prime ;

- les ressources non prises en compte dans le calcul de la prime ;

- la périodicité selon laquelle il est procédé au réexamen du montant de la prime d'activité ;

-  le montant minimum de la prime d'activité en-dessous duquel celle-ci n'est pas versée.

Le Gouvernement aura ainsi toute latitude pour ajuster les modalités de calcul de la prime ainsi que le ciblage du bonus « individuel », qui constitue la véritable nouveauté du dispositif proposé par rapport au RSA « activité ». Le projet de loi se contente en effet d'indiquer que le montant de cette bonification est « une fonction croissante des revenus situés entre un seuil et un plafond ».

Il est difficile pour le législateur de pouvoir se prononcer sur la pertinence du dispositif proposé, compte tenu de l'importance des renvois au pouvoir réglementaire ; ils concernent en effet les montants de revenus garantis, les publics faisant l'objet d'un soutien financier majoré, le point de sortie du dispositif, ou encore les types de ressources exclues du calcul de la prime. Il s'agit pourtant d'éléments essentiels, qui conditionnent non seulement l'efficacité du dispositif envisagé, mais également son coût pour les finances publiques.

Votre rapporteur pour avis regrette donc que la réforme proposée, bien que nécessaire, n'ait pas fait l'objet d'une expérimentation préalable , à l'instar de celle qui avait été conduite préalablement à la mise en place du RSA « activité ». Ceci est d'autant plus regrettable que le nombre de personnes concernées et les montants en jeu sont très significatifs. Une réforme d'une telle ampleur, compte tenu des nombreux paramètres d'incertitude qui l'accompagnent, aurait mérité mieux que des simulations et des modélisations dont l'administration reconnait elle-même les limites.

La question du cumul intégral du RSA « socle »
et des revenus d'activité pendant trois mois

Dans l'état actuel du droit, une personne percevant le RSA « socle » qui reprend un emploi bénéficie d'un cumul intégral du RSA « socle » et de ses revenus d'activité pendant une durée de trois mois .

Ce mécanisme constitue une sorte de « sur-intéressement » temporaire. Il résulte d'une disposition règlementaire inscrite à l'article R. 262-12 du code de l'action sociale et des familles qui prévoit : « Les ressources mentionnées à l'article R. 262-8 [soit les revenus d'activité et les indemnités journalières] ne sont pas prises en compte pendant les trois premiers mois suivant le début ou la reprise d'un emploi, d'une formation ou d'un stage. La durée cumulée de bénéfice des dispositions du premier alinéa, pour chaque personne au sein du foyer, ne peut excéder quatre mois par période de douze mois ».

La Cour des comptes , dans son rapport public de 2013 75 ( * ) , recommandait la suppression de ce dispositif , en rappelant qu'il ne correspond pas à la logique du RSA « activité », fondé sur la suppression des effets de seuil lors de la reprise d'un emploi. En effet, à la fin de cette période de trois mois de cumul, le passage au RSA « activité » induit une perte relative de revenu pour l'allocataire. Selon la Cour, « il s'ensuit, pour certains allocataires, une mauvaise compréhension du RSA « activité » qui apparait comme un intéressement dégradé » 76 ( * ) .

La mise en place de la prime d'activité ne modifie pas cette possibilité de cumul . Il sera donc possible, pour une personne reprenant un emploi, de bénéficier intégralement du montant de son RSA « socle » pendant trois mois et de faire parallèlement une demande de prime d'activité dès son premier mois d'activité. Ceci conduit à brouiller les objectifs , pourtant différents, de ces deux prestations. En effet, comme le Gouvernement l'a affirmé à plusieurs reprises, la future prime d'activité a pour vocation à apporter un soutien financier à la reprise ou au maintien dans l'emploi. Pour aller dans le sens de cet engagement, il conviendrait de distinguer le RSA « socle », un minimum social versé en l'absence de revenus d'activité, et la future prime d'activité, versée dès le premier euro gagné afin d'apporter un soutien financier aux travailleurs modestes. Il serait donc opportun de mettre fin au cumul intégral entre RSA « socle » et revenus d'activité pendant trois mois , afin que seule la prime d'activité constitue la mesure d'intéressement lors de la reprise d'un emploi.

2. Une prestation dont les modalités d'attribution et de mise en oeuvre demeurent complexes

Bien que dans le cadre de la réforme proposée, des éléments de simplification soient mis en avant, comme l'instauration d'un effet « figé » de trois mois ou encore la simplification de la base des ressources prises en compte pour le calcul de la prime d'activité, il apparait que cette nouvelle prestation, successeur du RSA « activité » et de la PPE, demeure, par de nombreux aspects, complexe .

Ainsi, la formule de calcul envisagée par le Gouvernement et développé supra est d'une telle complexité, sous l'effet à la fois de son caractère familialisé et individualisé, qu'elle fait l'objet d'une définition législative pour le moins illisible . Il sera vraisemblablement indispensable pour la personne susceptible d'être éligible à la prime d'user du simulateur qui devrait être mis à disposition sur Internet pour connaître ses droits.

Ensuite, même si les droits sont « figés » pour trois mois et la base de ressources simplifiée, les bénéficiaires doivent toujours fournir chaque trimestre des documents justifiant de leurs revenus professionnels . Les CAF auront, de leur côté, nécessairement un important travail de vérification et d'instruction des demandes, ce qui pourrait également s'avérer être un exercice difficile. Le risque d'indus reste a priori élevé . En outre, si des échanges d'information entre la DGFiP et les CAF sont prévus, ils ne seront pas immédiatement automatisés.

Enfin, le fait de différencier désormais les bases de ressources applicables au RSA et à la prime d'activité est également source de complexité .

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il est également permis de douter du fait que le taux de recours de 50 % soit rapidement atteint, ainsi que l'espère le Gouvernement .

Comparaison des « bases ressources » du RSA et de la prime d'activité

RSA

Prime d'activité

Ressources faisant l'objet d'un abattement de 62%

Ressources prises en compte à 100%

Ressources non prises en compte

Ressources faisant l'objet d'un abattement de 62%

Ressources prises en compte à 100%

Ressources non prises en compte

Traitements et salaires

X

X

Rémunération des stages de formation professionnelle

X

X

Rémunération dans le cadre d'un chèque emploi service universel (CESU)

X

X

Indemnités journalières de maternité, paternité, d'adoption

X

X

Indemnités journalières de maladie, accident du travail, maladie professionnelle des 3 premiers mois

X

X

Indemnités de chômage partiel

X

X

Revenus des travailleurs non salariés

X

X

Rémunération des aidants familiaux faisant partie du foyer du bénéficiaire

X

X

Indemnités journalières de maladie, accident du travail, maladie professionnelle, à partir du 4 ème mois

X

X

Indemnités de chômage

X

X

Rémunération garantie perçue en ESAT

X

X

Pensions alimentaires

X

X

Allocation journalière d'accompagnement de personne en fin de vie

X

X

Rentes viagères imposables (retraites, etc .)

X

X

Dédommagement versé aux victimes de l'amiante

X

X

Libéralités

X

X

Revenus fonciers

X

X

Revenus de valeurs mobilières (actions, obligations)

X

X

Capitaux placés non producteurs de revenus

X

X

Capitaux non placés et non producteurs de revenus

X

X

Biens immobiliers non loués

X

X

Avantages en nature

X

X *

Forfait logement

X

X

Prestations familiales et sociales incluses dans la « base ressources » (allocations familiales, etc. )

X

X

Prestations familiales exclues de la « base ressources »

X

X

* Autres que le logement mis à disposition à titre gratuit.

NB : Les lignes grisées identifient les ressources qui sont différemment prises en compte pour le calcul du RSA et de la prime d'activité.

Source : ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes

Votre rapporteur pour avis considère qu'une réforme plus ambitieuse des prestations sociales aurait pu conduire à aligner les bases de ressources en les rapprochant par ailleurs de l'assiette fiscale.

D. UNE GRANDE INCERTITUDE SUR LE COÛT RÉEL DU DISPOSITIF

Comme l'indique l'étude d'impact annexée au projet de loi, le montant prévu de la dépense associée à la prime d'activité correspond au budget consacré au RSA « activité » et à la prime pour l'emploi en 2014, soit 4,1 milliards d'euros (en tenant compte de l'inflation entre 2014 et 2016). Il intègre le montant de la prime d'activité versée aux jeunes actifs éligibles entre 18 et 24 ans, estimé à environ 800 millions d'euros.

Ce montant correspond à une hypothèse de taux de recours à 50 % , pour une dépense correspondant à 66 % de la masse financière potentielle 77 ( * ) , en supposant que ce taux soit atteint dès le 1 er janvier 2016. Pour justifier cette cible de 50 %, soit un niveau bien plus élevé que l'actuel taux de recours du RSA « activité » (estimé à 32 %), l'étude d'impact mentionne le dispositif britannique « working tax credit », comparable à la prime d'activité, et dont le taux de recours serait de 61 %. Surtout, le Gouvernement met en avant plusieurs mesures destinées à favoriser le recours à cette prestation : la simplification des démarches par rapport au RSA « activité » (cf. supra ), la déconnection de la prime d'activité du RSA « socle », ainsi que la campagne d'information qui sera menée auprès des anciens bénéficiaires de la PPE lors de l'envoi de l'avis d'imposition aux contribuables. Le basculement automatique des actuels bénéficiaires du RSA « activité » vers la prime d'activité est également un élément devant crédibiliser cette hypothèse.

Il est prévu qu'à l'instar d'autres prestations sociales, la prime d'activité fasse l'objet d'une période de montée en charge assez rapide . Selon l'étude d'impact, le coût de la prime d'activité s'établirait ainsi à 4,2 milliards d'euros en 2017 et à 4,3 milliards d'euros en 2018 .

Pourtant, plusieurs incertitudes demeurent quant au coût réel que représentera la prime d'activité en 2016 , dont le financement repose intégralement sur des crédits budgétaires de l'État.

D'une part le taux de recours retenu par le Gouvernement, qui conditionnera le montant qui sera inscrit en loi de finances pour financer la prime d'activité, parait incertain , en l'absence d'expérimentation locale du dispositif. L'incertitude porte en particulier sur le recours à la prime d'activité par les actuels bénéficiaires de la prime pour l'emploi.

D'autre part, la prime d'activité constituant une prestation de « guichet », il n'existera par définition aucun moyen de pilotage et de maîtrise de la dépense . Ainsi, si le taux de recours à la prime d'activité était inchangé par rapport à celui du RSA « activité », la dépense totale s'élèverait en 2016 à 3,3 milliards d'euros. En revanche, en cas de montée en charge plus rapide que prévue, le montant pourrait être supérieur à 4,1 milliards d'euros. Il existe donc un aléa important sur le coût réel que représentera ce dispositif.

Afin de réaliser un premier bilan de la prime d'activité, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a inséré dans le projet de loi, en première lecture, un nouvel article 28 tendant à prévoir la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement relatif à l' évaluation de la prime d'activité , dix-huit mois après son entrée en vigueur. La commission des finances a adopté, à ce même article, un amendement de votre rapporteur pour avis visant à préciser le contenu de ce rapport, afin de permettre un meilleur contrôle du coût budgétaire de ce dispositif 78 ( * ) .

Il conviendra en tout état de cause de demeurer vigilant , au cours des prochaines années, sur le coût engendré par cette nouvelle prestation dans le cadre de l'examen, en loi de finances, des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Décision de votre commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.

ARTICLE 25 (Art. L. 262-1 à L. 262-4, L. 262-9, L. 262-10, L. 262-24, L. 262-25, L. 262-27-1, L. 262-28, L. 262-38, L. 262-40, L. 262-45, L. 262-46, L. 262-53 et L. 522-12 du code de l'action sociale et des familles) Suppression du RSA « activité » et mise en cohérence législative

Commentaire : le présent article procède à la suppression du volet « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et à une mise en cohérence de certaines dispositions relatives au RSA « socle ».

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à opérer les modifications législatives nécessaires au sein du code de l'action sociale et des familles , afin de supprimer le volet « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et de mettre en cohérence certaines dispositions relatives au RSA « socle », consécutivement à la création de la prime d'activité à l'article 24 du projet de loi.

Il opère ainsi plusieurs modifications au chapitre II du titre VI du livre II du code de l'action sociale et des familles, en particulier :

- il supprime l'objectif du RSA mentionné à l'article L. 262-1 d'inciter à l'exercice d'une activité professionnelle pour le restreindre au fait d'« assurer à ses bénéficiaires des moyens convenables d'existence, de lutter contre la pauvreté et de favoriser l'insertion sociale et professionnelle » ;

- il supprime à l'article L. 262-2 la notion de « revenu garanti » , associée au RSA « activité », ainsi que ses modalités de calcul ;

- il supprime les dispositions à l'article L. 262-24 confiant au Fonds national des solidarités actives (FNSA) le financement du RSA « activité » et prévoit que celui-ci finance les charges de gestion de la prime d'activité supportées par les caisses d'allocations familiales (CAF) et de mutualité sociale agricole (MSA).

Par ailleurs cet article insère un nouvel article L. 262-27-1 dans le code de l'action sociale et des familles qui prévoit que tout bénéficiaire du RSA qui exerce, prend ou reprend une activité professionnelle est réputé avoir sollicité le bénéfice de la prime d'activité, sauf mention contraire de sa part. Cet article permet que les actuels bénéficiaires du RSA « activité » n'aient pas à faire une nouvelle demande pour bénéficier de la prime d'activité lors de son entrée en vigueur.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

En ce qu'il se contente de tirer les conséquences de la création de la prime d'activité en supprimant le RSA « activité » et en mettant en cohérence les dispositions relatives au RSA « socle », cet article ne présente pas d'enjeu majeur .

Il permet aux bénéficiaires du RSA « activité » de ne pas devoir faire une nouvelle demande lors de l'entrée en vigueur de la prime d'activité, ce qui est indispensable pour faciliter la transition entre l'ancienne et la nouvelle prestation, et éviter une diminution du taux de recours.

Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

ARTICLE 26 (Art. 28 et 30 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion, art. 4 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, art. L. 115-2, L. 121-7, L. 131-2, L. 14-10-6, L. 262-29, L. 262-32 et L. 262-33 du code de l'action sociale et des familles, art. L. 114-16-2, L. 141-17, L. 167-3, L. 412-8, L. 523-1, L. 553-1, L. 553-2, L. 821-5-1, L. 835-3, L. 861-2 et L. 865-1 du code de la sécurité sociale, art. L. 3252-3, L. 5132-3-1, L. 5134-30-2, L. 5134-72-2 et L. 6325-1 du code du travail, art. L. 3334-6-1, L. 3334-16-2 et L. 3335-4 du code général des collectivités territoriales, art. 81 du code général des impôts, art. L. 98 A du livre des procédures fiscales, art. L. 331-2 et L. 334-5 du code de la consommation, art. L. 351-11 du code de la construction et de l'habitat, art. L. 120-11 et L. 120-21 du code du service national, art. 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, art. 13-2 (nouveau) de l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales) Coordinations et dispositions diverses

Commentaire : le présent article procède aux coordinations et adaptations des codes et textes législatifs existants afin de tenir compte de la création de la prime d'activité. Il fixe également le régime fiscal de la prime d'activité : tout comme le RSA « activité », celle-ci sera exonérée d'impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée, mais sera soumise à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) .

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article procède à diverses coordinations afin de tirer les conséquences de la suppression du RSA « activité » et de la création de la prime d'activité dans le code de l'action sociale et des familles, le code de la sécurité sociale, le code du travail, le code des collectivités territoriales, le code général des impôts, le code de la consommation, le code de la construction et de l'habitat et le code du service national. Il modifie également loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion et l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

Trois adaptations méritent plus particulièrement l'attention de votre commission des finances :

- le VI rétablit, à l' article 81 du code général des impôts listant les revenus exonérés d'impôt sur le revenu , un quinquies faisant référence à la prime d'activité créée par l'article L. 841-1 du code de la sécurité sociale. Pour mémoire, l'exonération de l'actuel RSA « activité » et du RSA socle est prévue par le 9° de l'article 81 précité. La mention des « allocations, indemnités et prestations servies, sous quelque forme que ce soit, par l'État, les collectivités et les établissements publics, en application des lois et décrets d'assistance et d'assurance » englobe en effet les deux volets du RSA.

De plus, le 3° du III de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale prévoyant que les revenus mentionné au 9° quinquies de l'article 81 du code général des impôt sont exclus de l'assiette de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus d'activité et de remplacement, la prime d'activité est également exonérée de CSG ;

- le VII ajoute la prime d'activité à la liste des prestations mentionnées à l'article L. 98 A du livre des procédures fiscales. Cet article impose aux organismes débiteurs de certaines prestations sociales (allocation pour adulte handicapé, allocation supplémentaire d'invalidité et revenu minimum d'insertion) de transmettre à l'administration fiscale , avant le 31 décembre de chaque année, la liste des personnes auxquelles l'allocation a été attribuée ou supprimée au cours de l'année précédente. Il supprime également la référence, obsolète, au revenu minimum d'insertion ;

- le XI prévoit d' assujettir la prime d'activité à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) , comme c'est actuellement le cas pour le RSA « activité ».

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative du rapporteur, Christophe Sirugue, quatre amendements ont été adoptés, avec un avis favorable du Gouvernement :

- trois amendements visent à remplacer des références au RSA « socle » , qui n'existera plus en tant que tel à l'issue de la suppression du volet « activité » du RSA, par une simple référence au RSA ;

- un amendement vise à préciser les références aux articles du code pénal relatifs aux faux et usages de faux au 1° du III relatif aux sanctions applicables en cas de fraude dans l'obtention de la prime d'activité.

Deux amendements , adoptés à l'initiative du rapporteur pour avis de la commission des finances, Dominique Lefebvre, avec un avis favorable du Gouvernement, modifient le VII afin de supprimer la référence à la prime d'activité à l'article L. 98 A du livre des procédures fiscales . La transmission de la liste des bénéficiaires prévue par cet article, utilisée par l'administration fiscale pour identifier les foyers éligibles à certaines mesures fiscales, serait en effet inutile pour les bénéficiaires de la prime d'activité.

Enfin, à l'initiative du Gouvernement, le présent article a été complété par un XII prévoyant l' application de la prime d'activité à Saint-Pierre-et-Miquelon .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article propose de calquer le régime fiscal de la prime d'activité sur celui du RSA « activité » : il prévoit ainsi une exonération d'IR et de CSG mais un assujettissement à la CRDS. Cette différence entre IR et CSG, d'une part, qui sont les deux grandes impositions sur le revenu des personnes physiques en France, et CRDS d'autre part, tient à la conception de la CRDS comme un prélèvement obligataire temporaire, qui a vocation à être payé par tous, tant que subsiste une dette de la sécurité sociale. À ce titre, la CRDS a une assiette plus large que celle de la CSG (elle inclut notamment les prestations familiales). Toutefois, il convient de signaler que le RSA « socle » est exonéré à la fois d'IR, de CSG et de CRDS.

À titre personnel, votre rapporteur pour avis considère que l'ensemble des revenus d'activité et de remplacement, y compris les prestations sociales, devraient en principe être soumis à l'IR et à la CSG.

Par ailleurs, le coût total de la prime d'activité étant estimé à plus du double de celui du RSA « activité », son assujettissement à la CRDS entraînera mécaniquement une hausse des recettes de cette contribution, affectée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES). L'étude d'impact annexée au présent projet de loi ne précise toutefois pas le surcroît de recettes attendu.

Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

ARTICLE  27 Entrée en vigueur et application à Mayotte

Commentaire : le présent article fixe la date d'entrée en vigueur des articles 24 à 26 créant la prime d'activité au 1 er janvier 2016. Il prévoit également que les bénéficiaires, au 1 er janvier 2015, du RSA seront réputés avoir déposé une demande de prime d'activité. Enfin, il habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, les mesures permettant de mettre en oeuvre la prime d'activité à Mayotte.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Selon le I du présent article, les articles 24 à 26 instaurant la prime d'activité entrent en vigueur au 1 er janvier 2016 . Cette date est cohérente avec la suppression de la prime pour l'emploi (PPE) 79 ( * ) , à compter de l'imposition des revenus perçus en 2015. Cette dernière cessera donc de produire ses effets à la fin de l'année 2015 (au titre des revenus perçus en 2014).

Par souci de simplification et d'allègement des démarches pour les bénéficiaires, le II prévoit que les personnes bénéficiant du revenu de solidarité active (RSA) au 31 décembre 2015 sont réputées avoir déposé une demande de prime d'activité. Cette mesure vise à garantir le transfert « automatique » des actuels titulaires du RSA « activité » vers la prime d'activité , dans la mesure où ces derniers remplissent en principe les conditions d'éligibilité au nouveau dispositif. Elle vient en complément de l'article L. 262-27-1 du code de l'action sociale et des familles , créé par l'article 25 du présent projet de loi, selon lequel tout titulaire du RSA exerçant, entamant ou reprenant une activité professionnelle est réputé avoir formulé une demande de prime d'activité, sauf mention contraire de sa part.

Le présent article fait référence aux bénéficiaires du RSA, sans distinguer le RSA « socle » du RSA « activité ». La prime d'activité n'étant toutefois ouverte qu'aux travailleurs ayant perçu des revenus tirés d'une activité professionnelle, elle concernera uniquement les personnes qui auraient, en théorie, bénéficié du RSA « activité » en 2016.

Enfin, le III habilite le Gouvernement à adapter par voie d' ordonnance , dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi, la mise en oeuvre de la prime d'activité dans le département de Mayotte . Jusqu'à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, le RSA « activité » continue de s'appliquer à Mayotte.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative du Gouvernement, un amendement a été adopté dans le texte établi par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale visant à créer une ouverture rétroactive du droit à la prime d'activité au 1 er janvier 2016 pour toutes les personnes ayant déposé leur demande avant le 1 er avril de cette même année. Les personnes déposant leur dossier de demande de prime d'activité en retard ne seront donc pas pénalisées. Cette disposition transitoire vise à faciliter le basculement des bénéficiaires de la PPE vers la prime d'activité et, ainsi, à encourager le recours à la nouvelle prime.

En séance publique, cinq amendements supplémentaires ont été adoptés au présent article :

- quatre amendements du rapporteur , Christophe Sirugue , ayant reçu un avis favorable du Gouvernement, dont trois amendements rédactionnels et un amendement prévoyant que les indus non recouvrés, les rappels de droits et les frais de contentieux relatifs au RSA « activité » continueront à être pris en charge par le fonds national des solidarités actives (FNSA) après la suppression du RSA « activité ». Cet ajout a pour but d'éviter que les départements, qui financent le RSA « socle », n'aient à assumer les frais liés au RSA « activité » lorsque la distinction entre les deux volets du RSA aura disparu dans les textes législatifs et réglementaires ;

- un amendement de nos collègues députés Monique Orphé et Boinali Said réduisant le délai d'adoption de l'ordonnance relative à l'adaptation de la prime d'activité à Mayotte de dix-huit à six mois . Cet amendement a reçu un avis favorable du Gouvernement.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Certaines dispositions du présent article visent à répondre à quelques-unes des difficultés liées à la transition entre l'ancien système et la nouvelle prime d'activité , qui doit entrer en vigueur dans moins de sept mois. Le basculement automatique des actuels bénéficiaires du RSA « activité » vers la prime d'activité apparaît comme une mesure de bon sens afin de minimiser les charges, tant pour les bénéficiaires que pour les caisses d'allocations familiales (CAF).

Il n'en demeure pas moins que l'enjeu essentiel réside dans la mise en place par la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), dans des délais très brefs, d'un nouveau système d'information adapté à l'instruction et à la gestion de la prime. Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, dans un premier temps, un simulateur sera mis en place d'ici septembre 2015, puis le nouveau logiciel de calcul de la prestation sera utilisé à compter de janvier 2016. L'intégration en temps réel des données fiscales détenues par la direction générales des finances publiques (DGFiP) n'est prévue que pour la fin de l'année 2016.

Enfin, il apparait logique que l'État, via le FNSA, assume les charges liées aux indus non recouvrés, aux rappels de droits et aux frais de contentieux du RSA « activité », qui pourront s'étaler sur environ deux ans. La correction de cet oubli du projet de loi initial est donc la bienvenue.

Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

ARTICLE 28 (nouveau) Rapport d'évaluation de la prime d'activité

Commentaire : le présent article sollicite du Gouvernement la remise d'un rapport au Parlement permettant de dresser un bilan de la prime d'activité, dix-huit mois après son entrée en vigueur.

I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Cet article a été inséré par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, avec un avis favorable du Gouvernement. Il vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport d'évaluation de la prime d'activité , dix-huit mois après son entrée en vigueur, c'est-à-dire au 1 er juillet 2017 .

Ce rapport devra dresser un premier bilan de la prime d'activité sur les aspects suivants : le taux de recours à la prime d'activité, son coût budgétaire, le nombre de ses bénéficiaires, la ventilation des bénéficiaires par décile de niveau de vie, ses effets sur le taux de pauvreté monétaire, la situation des bénéficiaires sur le marché de l'emploi, notamment la durée moyenne des contrats des bénéficiaires salariés, ainsi que l'impact de la création de la prime d'activité sur les femmes et leurs parcours d'insertion.

Un amendement présenté en séance par notre collègue députée Sandrine Mazetier et adopté avec un avis favorable du Gouvernement prévoit que ce rapport mesure en outre l'impact de la création de la prime d'activité sur les femmes et leurs parcours d'insertion, après consultation du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes. Cet amendement prévoit également que toutes les évaluations contenues dans ce rapport soient sexuées , notamment afin de connaitre la proportion de femmes bénéficiaires de la prime d'activité et les montants correspondants, ainsi que leurs parcours d'insertion.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Dans la même logique que ce qui a prévalu pour le revenu de solidarité active (RSA), dont l'évaluation a été réalisée sous l'égide du comité national d'évaluation du RSA trois ans après la création de cette prestation 80 ( * ) , cet article prévoit dresser un bilan de la prime d'activité.

L'évaluation des dispositifs sociaux au regard de leurs objectifs est un impératif , afin de s'assurer qu'ils atteignent leurs objectifs en termes de public ciblé, de montant des versements ou de taux de recours. Une telle évaluation est a fortiori nécessaire s'agissant d'une prestation qui n'a pas seulement vocation à soutenir le pouvoir d'achat des travailleurs modestes, mais qui doit aussi avoir un effet incitatif sur le maintien ou le retour à l'emploi.

À l'initiative de son rapporteur pour avis, votre commission a adopté un amendement visant à préciser les informations relatives au coût de la prime d'activité , contenues dans le rapport. Ce dernier devra ainsi analyser l' impact de la part familialisée, de la bonification individuelle et des autres composantes de la prime sur le coût total de la prime d'activité ainsi que l' « effet volume », lié à l'évolution du nombre de bénéficiaires .

En cas de dépassement important de l'enveloppe budgétaire prévue pour les trois années à venir (entre 4,1 milliards d'euros en 2016 et 4,3 milliards d'euros en 2018), la question de la révision des conditions d'attribution de la prime et de son barème devra en effet être posée. Les précisions apportées par cet amendement pourraient alors s'avérer utiles pour mieux comprendre les raisons d'un éventuel dépassement et identifier les ajustements à opérer , en vue de contenir son coût, le cas échéant.

Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.

ARTICLE 29 (nouveau) Rapport concernant l'exclusion des pensions alimentaires des ressources prises en compte pour le calcul de la prime d'activité

Commentaire : le présent article demande au Gouvernement la remise d'un rapport sur les ressources incluses dans le calcul de la prime d'activité et sur la possibilité d'en exclure les pensions alimentaires .

I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Cet article a été inséré en séance publique par l'Assemblée nationale, à l'initiative de notre collègue députée Sandrine Mazetier, avec un avis favorable du Gouvernement. Il vise à demander au Gouvernement la remise , dans un délai de quatre mois suivant la promulgation de la loi, d' un rapport présentant les ressources prises en compte dans le calcul de la prime d'activité « à l'exception de la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant en raison de sa nature particulière ».

Sandrine Mazetier a indiqué en séance publique qu'il s'agissait « d'un amendement d'appel, visant à ouvrir le débat sur la prise en compte de ce que l'on appelle en français courant la pension alimentaire . Nous sommes plutôt hostiles à une telle prise en compte dans la mesure où elle réduirait voire annulerait l'effet de la prime d'activité pour les femmes qui élèvent seules les enfants nés d'un couple désormais divorcé. Elles seraient pénalisées puisque le montant qui pourrait leur être versé au titre de la prime d'activité s'en trouverait réduit. »

Le 4° de l'article L. 842-4 du présent projet de loi prévoit en effet que « les autres revenus [que les revenus professionnels, les revenus de remplacement des revenus professionnels, l'avantage en nature que constitue la disposition d'un logement et les prestations et aides sociales] soumis à l'impôt sur le revenu » sont inclus dans la base des ressources de la prime d'activité . Or les pensions alimentaires reçues d'un ex-conjoint pour l'entretien de l'enfant sont soumises à l'impôt sur le revenu, dans la limite du montant qui peut être déduit par le conjoint versant la pension, et avec un abattement de 10 %.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Si le versement irrégulier des pensions alimentaires peut soulever des difficultés pour certaines familles monoparentales, leur exclusion de la base des ressources de la prime d'activité n'apparaît pas être une bonne solution. Elle soulève en effet des questions d'équité entre allocataires , qui, à niveau de revenu égal, percevraient une prime d'un montant différent. De plus, la prime d'activité , à la fois familialisée et individualisée, est censée tenir compte de la situation spécifique des familles monoparentales qui devraient figurer parmi les principaux bénéficiaires de la réforme.

Enfin, l'exclusion des pensions alimentaires de la base des ressources, en augmentant le montant de prime perçue par les parents élevant seuls leur(s) enfant(s), aurait un coût non négligeable 81 ( * ) . Entendue par la commission des affaires sociales du Sénat le 3 juin 2015 sur le présent projet de loi, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Marisol Touraine, a indiqué que le surcoût lié à l'exclusion des pensions alimentaires de l'assiette des ressources prises en comptes pour calculer la prime « pourrait s'établir entre 330 et 350 millions d'euros par an environ, ce qui implique nécessairement une révision du barème ».

Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.


* 38 Loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001.

* 39 Décision n° 2000-437 DC du 19 décembre 2000.

* 40 Article 3 de la loi n° 2002-1575 du 30 décembre 2002 de finances pour 2003.

* 41 À condition d'avoir coché la case correspondante sur sa déclaration d'impôt.

* 42 Cependant, la prime n'est pas due lorsque son montant total avant imputation est inférieur à 30 euros.

* 43 Rapport du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, juin 2011.

* 44 Article 3 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004.

* 45 Article 6 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 46 Loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

* 47 Ordonnance n° 2010-686 du 24 juin 2010.

* 48 Ordonnance n° 2011-1641 du 24 novembre 2011.

* 49 Article 1 er de la loi n° 2008-1249.

* 50 En particulier le cumul intégral du RMI et du revenu d'activité lors des trois premiers mois suivant une reprise d'emploi.

* 51 L'article 135 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 a permis aux jeunes actifs âgés de moins de 25 ans de pouvoir bénéficier du RSA sous certaines conditions. Celles-ci ont été précisées par le décret n° 2010-961 du 25 août 2010 : avoir exercé une activité professionnelle pendant au moins deux ans à temps plein (soit au moins 3 214 heures) au cours des trois années précédant la date de la demande du RSA - cette durée est prolongée dans la limite de six mois pour ceux qui ont connu des périodes de chômage indemnisé.

* 52 Cette condition n'est toutefois pas applicable aux réfugiés, aux bénéficiaires de la protection subsidiaire, aux apatrides et aux étrangers titulaires de la carte de résident ou d'un titre de séjour prévu par les traités et accords internationaux et conférant des droits équivalents.

* 53 Cette condition n'est toutefois pas applicable aux personnes exerçant une activité professionnelle déclarée.

* 54 Le décret n° 2010-1783 du 31 décembre 2010 précise les prestations sociales non prises en compte dans le calcul du RSA. Il s'agit d'un ensemble varié de 24 prestations comme l'allocation de rentrée scolaire, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ou encore la prime à la naissance ou à l'adoption.

* 55 Depuis le 1 er janvier 2015, les montants forfaitaires retenus pour les aides personnelles au logement et les avantages en nature liés à la disposition d'un logement sont les suivants : 61,67 euros pour un foyer composé d'une personne ; 123,33 euros pour un foyer composé de deux personnes ; 152,62 euros pour un foyer composé de trois personnes ou plus.

* 56 Cette majoration du montant forfaitaire est prolongée jusqu'à ce que le plus jeune enfant à charge ait atteint l'âge de trois ans.

* 57 Dominique Lefebvre et François Auvigne, « Rapport sur la fiscalité des ménages », avril 2014.

* 58 Toutefois, le RSA « activité » n'est pas versé lorsque le montant dû est inférieur à six euros.

* 59 Depuis la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, cette fraction était de 1,37 %, pour un montant affecté au FNSA d'environ 1,5 milliard d'euros en 2014. La forte volatilité des prélèvements de solidarité fragilisait le budget du FNSA. Ainsi, pour 2014 le rendement attendu était estimé à 1 840 millions d'euros, mais il n'a été que de 1 573 millions d'euros (soit 267 millions d'euros de moins), obligeant l'État à ouvrir des crédits supplémentaires à destination du FNSA dans le cadre de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificatives pour 2014.

* 60 Cette contribution de 1 % sur les rémunérations des fonctionnaires et agents publics alimente le Fonds de solidarité, qui finance le régime de solidarité des personnes privées d'emploi ou n'ayant pas droit à l'allocation chômage.

* 61 Rapport de la commission « Familles, vulnérabilité, pauvreté », avril 2005.

* 62 Christophe Sirugue, Rapport au Premier ministre relatif à la réforme des dispositifs de soutien aux revenus d'activité modestes, juillet 2013.

* 63 Ibid.

* 64 Cf. infra l'article L. 842-7 du code de la sécurité sociale.

* 65 Au sens de l'article L. 124-1 du code de l'éducation : « Les enseignements scolaires et universitaires peuvent comporter, respectivement, des périodes de formation en milieu professionnel ou des stages. Les périodes de formation en milieu professionnel sont obligatoires dans les conditions prévues à l'article L. 331-4 du présent code.

« Les périodes de formation en milieu professionnel et les stages ne relevant ni du 2° de l'article L. 4153-1 du code du travail, ni de la formation professionnelle tout au long de la vie, définie à la sixième partie du même code, font l'objet d'une convention entre le stagiaire, l'organisme d'accueil et l'établissement d'enseignement, dont les mentions obligatoires sont déterminées par décret.

« Les périodes de formation en milieu professionnel et les stages correspondent à des périodes temporaires de mise en situation en milieu professionnel au cours desquelles l'élève ou l'étudiant acquiert des compétences professionnelles et met en oeuvre les acquis de sa formation en vue d'obtenir un diplôme ou une certification et de favoriser son insertion professionnelle. Le stagiaire se voit confier une ou des missions conformes au projet pédagogique défini par son établissement d'enseignement et approuvées par l'organisme d'accueil.

« L'enseignant référent prévu à l'article L. 124-2 du présent code est tenu de s'assurer auprès du tuteur mentionné à l'article L. 124-9, à plusieurs reprises durant le stage ou la période de formation en milieu professionnel, de son bon déroulement et de proposer à l'organisme d'accueil, le cas échéant, une redéfinition d'une ou des missions pouvant être accomplies. »

* 66 Au sens de l'article L. 6211-1 du code du travail : « L'apprentissage concourt aux objectifs éducatifs de la nation. Il a pour objet de donner à des jeunes travailleurs, ayant satisfait à l'obligation scolaire, une formation générale, théorique et pratique, en vue de l'obtention d'une qualification professionnelle sanctionnée par un diplôme ou un titre à finalité professionnelle enregistré au répertoire national des certifications professionnelles. »

* 67 Cf infra le 2° du présent A.

* 68 Au sens de l'article L. 1261-3 du code du travail : « Est un salarié détaché au sens du présent titre tout salarié d'un employeur régulièrement établi et exerçant son activité hors de France et qui, travaillant habituellement pour le compte de celui-ci, exécute son travail à la demande de cet employeur pendant une durée limitée sur le territoire national dans les conditions définies aux articles L. 1262-1 et L. 1262-2. »

* 69 Article R. 262-1 du code de l'action sociale et des familles : « Le montant forfaitaire mentionné au 2° de l'article L. 262-2 applicable à un foyer composé d'une seule personne est majoré de 50 % lorsque le foyer comporte deux personnes. Ce montant est ensuite majoré de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer et à la charge de l'intéressé. Toutefois, lorsque le foyer comporte plus de deux enfants ou personnes de moins de vingt-cinq ans à charge, à l'exception du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin de l'intéressé, la majoration à laquelle ouvre droit chacun de ces enfants ou personnes est portée à 40 % à partir de la troisième personne.
« Dans le cas des personnes isolées au sens de l'article L. 262-9, le montant majoré est égal à 128,412 % du montant forfaitaire mentionné à l'article L. 262-2 applicable à un foyer composé d'une seule personne. S'y ajoute, pour chaque enfant à charge, un supplément égal à 42,804 % du montant forfaitaire applicable à un foyer composé d'une seule personne, mentionné à l'article L. 262-2. Le même supplément s'applique lorsque le foyer comporte d'autres personnes à charge que des enfants. »

* 70 Le choix de ces âges permet d'éviter tout effet sur le calcul du revenu disponible mensuel, lié notamment à la majoration pour enfant existant pour les allocations familiales, à partir de 14 ans.

* 71 Actuellement, un couple biactif avec deux enfants bénéficie de 87 euros de RSA « activité » et 19 euros de PPE avec 2 SMIC et de 60 euros de PPE pour 2,5 SMIC.

* 72 Un ménage est considéré comme gagnant lorsque son revenu disponible après réforme augmente de plus de 1 %.

* 73 Un ménage est considéré comme perdant lorsque son revenu disponible après réforme diminue de plus de 1 %.

* 74 INSEE, Économie et statistique, « L'impact du travail salarié des étudiants sur la réussite et la poursuite des études universitaires », Magali Beffy, Denis Fougère et Arnaud Maurel, novembre 2009.

* 75 Cour des comptes, « Le RSA « activité » : une prestation peu sollicitée, un impact restreint » », Rapport public annuel, février 2013.

* 76 Ibid.

* 77 Il est en effet estimé que les personnes qui auront recours à la prime d'activité seront davantage celles dont les revenus sont les plus modestes, qui bénéficient de montants importants, plutôt que celles éligibles à des montants moindres.

* 78 Cf. commentaire de l'article 28 du présent projet de loi.

* 79 Article 28 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.

* 80 L'article 32 de la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion prévoyait ainsi : « Dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement réunit une conférence nationale associant notamment des représentants des collectivités territoriales, les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, des associations de lutte contre les exclusions et des représentants des bénéficiaires du revenu de solidarité active aux fins, d'une part, d'évaluer la performance du revenu de solidarité active et des autres dispositifs sociaux et fiscaux en matière de lutte contre la pauvreté et d'incitation à la reprise d'activité et, d'autre part, d'établir un bilan financier de coûts induits par cette prestation ».

* 81 À cet égard, il convient de rappeler qu'en vertu de l'article 40 de la Constitution, tout amendement qui viendrait exclure certains revenus de la « base ressources » de la prime d'activité créerait une charge publique et serait, à ce titre, irrecevable.

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