CHAPITRE V - ORGANISER LA PROMOTION DES ACTIVITÉS TOURISTIQUES

Article 18
(art. L. 134-1 du code du tourisme, art. L. 5214-16, L. 5216-5
et L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales)
Dérogation au transfert de la compétence
« promotion du tourisme »
et maintien d'offices de tourisme

L'article 18 du projet de loi vise à instaurer une dérogation au transfert de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme », pour les communes stations classées de tourisme et membres d'une communauté de communes ou d'une communauté d'agglomération.

Prévu par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, le transfert de la compétence tourisme aux communautés de communes et d'agglomération doit intervenir au 1 er janvier 2017 152 ( * ) .

1. L'état du droit en matière de transfert de la compétence relative à la promotion du tourisme

a) La promotion du tourisme, une compétence partagée qui s'inscrit dans le cadre du renforcement de l'intercommunalité

L'article L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales dispose, dans sa rédaction issue de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, que « la répartition des compétences entre les collectivités territoriales et l'État s'effectue, dans la mesure du possible, en distinguant celles qui sont mises à la charge de l'État et celles qui sont dévolues aux communes, aux départements ou aux régions (...). Les compétences en matière de (...) tourisme (...) sont partagées entre les communes, les départements, les régions et les collectivités à statut particulier » .

Tableau récapitulatif des principales compétences en matière de tourisme

État

Région

Département

Commune ou intercommunalité

Compétences

Définit et met en oeuvre la politique nationale de tourisme

Est créé dans chaque région un comité régional du tourisme (CRT)

Peut créer un comité départemental du tourisme (CDT)

Définit la politique locale du tourisme

Réglemente, agrée et classe les équipements, organismes et activités touristiques

Élabore le schéma régional de développement du tourisme et des loisirs

Élabore le schéma d'aménagement touristique départemental

Peut créer un office de tourisme, chargé des missions d'accueil, d'information, de promotion touristique locale et de coordination des divers partenaires, y compris privés, du développement touristique local

Assure la promotion de la « destination France »

Coordonne, dans la région, les initiatives publiques et privées dans le domaine du développement, de l'information touristique et de la promotion sur les marchés étrangers

Élabore le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnées

Favorise la coordination des initiatives publiques et privées

Apporte son concours aux actions de développement touristique des collectivités territoriales

Sources : code du tourisme et commission des lois du Sénat.

La même loi prévoit également, à l'article L. 134-1 du code du tourisme, que l'ensemble des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI) 153 ( * ) exercent de plein droit, en lieu et place de leurs communes membres, la compétence en matière de promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme.

Le transfert de cette compétence est déjà effectif, depuis janvier 2014, pour les communes qui sont membres de communautés urbaines 154 ( * ) ou de métropoles 155 ( * ) , en application de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.

La conséquence de ce transfert de compétence réside dans la substitution d'un seul office de tourisme intercommunal aux différents offices de tourisme municipaux, et dans la définition de la politique du tourisme par l'intercommunalité.

Les offices pré-existants sont alors transformés en bureaux d'information de l'office intercommunal, à l'exception de celui qui devient le siège de cet office 156 ( * ) .

Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ont ainsi la possibilité, comme l'indiquent nos collègues députées Annie Genevard et Bernadette Laclais dans leur rapport au nom de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, « de redéfinir le maillage territorial » 157 ( * ) .

b) Deux possibilités de maintenir un office de tourisme « distinct » ont toutefois été prévues par la loi NOTRe, sans dérogation au transfert de la compétence

Pour les communes membres d'une communauté de communes ou d'une communauté d'agglomération, le maintien d'un office de tourisme « distinct » n'est possible que dans deux cas :

- lorsqu'il y a coexistence de plusieurs marques territoriales protégées 158 ( * ) : sont notamment concernées les intercommunalités où plusieurs communes ont fait une demande de dépôt de marque territoriale auprès de l'Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) ;

- lorsqu'une commune dispose du statut de commune touristique ou de celui de station classée de tourisme : le maintien d'un office de tourisme distinct peut alors être décidé par l'organe délibérant de l'EPCI au plus tard trois mois avant l'entrée en vigueur du transfert de la compétence, soit avant le 1 er janvier 2017 159 ( * ) .

Ces dispositions dérogatoires ne remettent toutefois pas en cause le transfert de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme ».

Comme le précisent nos collègues députées Annie Genevard et Bernadette Laclais dans le rapport précité 160 ( * ) , les offices de tourisme maintenus sont des offices « distincts », mais non municipaux, à compétence territoriale limitée, et relevant de l'office de tourisme intercommunal.

La politique touristique demeure dans ce cas définie au niveau de l'intercommunalité, politique à laquelle devront se conformer toutes les communes, même celles qui auront des offices de tourisme « distincts », qui n'auront donc aucune autonomie dans ce domaine.

2. La possibilité ouverte par le projet de loi de permettre à certaines communes de déroger partiellement au transfert de la compétence en conservant un office de tourisme municipal

L'article 18 du projet de loi tend à permettre aux communes touristiques érigées en stations classées de tourisme, membres d'une communauté de communes ou d'une communauté d'agglomération, de conserver la compétence « promotion du tourisme » et de maintenir leur propre office de tourisme municipal , indépendant de celui de l'EPCI, et de continuer à mener des actions autonomes.

Cette proposition rejoint d'ailleurs la position exprimée par votre commission au moment de l'examen de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République déjà citée, qui avait adopté, sur proposition de ses deux rapporteurs, notre ancien collègue Jean-Jacques Hyest et notre collègue René Vandierendonck, la suppression de la promotion du tourisme des blocs de compétences obligatoires des communautés de communes et d'agglomération, pour l'intégrer au champ de leurs compétences optionnelles 161 ( * ) .

Le régime des communes touristiques

et des communes érigées en stations classées de tourisme

Les communes ayant une activité touristique peuvent bénéficier de deux types de statuts règlementés par l'État : le statut de commune touristique, attribué par arrêté préfectoral pour une durée de cinq ans, et le régime de la station classée de tourisme, attribué par décret pour une durée de douze ans.

1. Les communes touristiques

Les communes touristiques sont définies par la loi 162 ( * ) comme celles qui mettent en oeuvre une politique locale du tourisme, offrent des capacités d'hébergement pour l'accueil d'une population non résidente 163 ( * ) ou bénéficient d'une part supplémentaire de dotation globale de fonctionnement au titre du tourisme.

À ce sujet, plusieurs représentants d'associations d'élus locaux, auditionnés par votre rapporteur pour avis, ont indiqué que le ratio exigé concernant la capacité d'hébergement non permanente, calculé par rapport à la population municipale de la commune pouvait, dans certains cas, constituer un frein à l'obtention du statut de commune touristique, en raison des difficultés rencontrées par certaines communes pour développer davantage de logements destinés à la population non résidente.

2. Les communes érigées en stations classées de tourisme

Seules les communes touristiques qui le souhaitent peuvent ensuite, si elles disposent d'un office de tourisme classé en première catégorie 164 ( * ) , engager une démarche pour devenir des stations classées de tourisme.

La loi prévoit en effet que seules peuvent bénéficier de ce statut « les communes touristiques et leurs fractions qui mettent en oeuvre une politique active d'accueil, d'information et de promotion touristiques tendant, d'une part, à assurer la fréquentation plurisaisonnière de leurs territoires, d'autre part, à mettre en valeur leurs ressources naturelles, patrimoniales ou celles qu'elles mobilisent en matière de créations et d'animations culturelles et d'activités physiques et sportives (...) 165 ( * ) ».

Les critères à respecter sont fixés par l'arrêté du 2 septembre 2008 relatif aux communes touristiques et aux stations classées de tourisme.

Dans sa rédaction initiale, l'article 18 tendait à permettre aux communes déjà érigées en stations classées de tourisme ou en voie de l'être, de conserver leur propre office de tourisme municipal sous réserve, d'une part, d'avoir délibéré en ce sens et, d'autre part, pour celles qui ne le sont pas encore, d'avoir déposé un dossier de classement en station de tourisme avant le 1 er janvier 2017.

Dans son avis sur le présent projet de loi, le Conseil d'État relevait la conformité de cette disposition au principe d'égalité devant la loi au motif « qu'au regard de l'objet du projet de loi, qui est de permettre aux communes qui le souhaitent de pouvoir conserver un office de tourisme propre, l'appartenance à la catégorie des stations de tourisme, en ce qu'elle traduit une démarche volontaire et un dynamisme concrétisé notamment par des travaux et des équipements, constitue une différence de situation de nature à justifier, au regard du principe d'égalité, le périmètre donné à cette mesure dérogatoire » 166 ( * ) .

L'article prévoyait également un dispositif de caducité de la délibération municipale, en cas de rejet de la demande de classement par le préfet, la compétence revenant alors à l'EPCI de rattachement de la commune.

3. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

En première lecture, l'Assemblée nationale a apporté plusieurs modifications à ce dispositif.

En premier lieu, le champ de la dérogation au transfert de compétence a été précisé. Initialement restreint à la création d'offices de tourisme municipaux, il a été étendu en commission, par les rapporteurs de l'Assemblée nationale, à l'ensemble de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme », avec l'avis favorable du Gouvernement, ce qui semble en effet plus cohérent à votre rapporteur pour avis.

En deuxième lieu, deux amendements ont été adoptés en séance publique, malgré l'avis défavorable du Gouvernement, afin d'étendre le dispositif.

Comme indiqué précédemment, pour être érigée en station classée de tourisme, une commune doit à la fois être une commune touristique au sens de l'article L. 133-11 du code du tourisme, et disposer d'un office de tourisme de première catégorie.

Afin de prendre en compte la situation des communes touristiques dépourvues d'office de tourisme de première catégorie, qui ne peuvent avoir déposé une demande de classement en station de tourisme avant le 1 er janvier 2017, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de nos collègues députés 167 ( * ) , deux amendements qui permettent à ces communes touristiques de déposer un dossier de classement de leur office de tourisme en première catégorie jusqu'au 1 er janvier 2018.

L'Assemblée nationale n'a toutefois pas prévu dans quel délai ces communes devaient ensuite déposer un dossier de classement en station de tourisme.

Votre rapporteur pour avis souhaite remédier à cette difficulté, en prévoyant que les communes touristiques qui le souhaitent puissent disposer de deux ans, soit jusqu'au 1 er janvier 2019, pour avoir un office de tourisme de première catégorie, d'une part, déposer leur demande de classement en station de tourisme, d'autre part, et ainsi conserver leur compétence.

Au final, dans l'hypothèse proposée par votre rapporteur pour avis, il y aurait donc le double délai suivant à respecter pour les communes touristiques :

- le 1 er janvier 2017 pour décider par délibération de conserver la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » ;

- le 1 er janvier 2019 pour avoir obtenu un office de tourisme de première catégorie, d'une part, et déposé une demande de classement en station de tourisme, d'autre part.

Schéma des critères requis pour
l'obtention du statut de station classée de tourisme

Sources : code du tourisme et commission des lois du Sénat.

En troisième lieu, le dispositif dérogatoire au transfert de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » a été étendu aux communes membres de la métropole d'Aix-Marseille Provence, à l'initiative des deux rapporteurs du texte à l'Assemblée nationale Annie Genevard et Bernadette Laclais, malgré l'avis défavorable du Gouvernement.

La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République avait fixé jusqu'au 1 er janvier 2018 aux communes membres de cette métropole pour organiser le transfert 168 ( * ) de leur compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme », avant que la métropole ne l'exerce de plein droit 169 ( * ) . Comme l'a indiqué le rapporteur Annie Genevard lors de l'examen du texte en séance publique 170 ( * ) , « dans la mesure où la métropole d'Aix-Marseille, créée le 1 er janvier 2016, dispose d'un statut dérogatoire, le transfert de cette compétence ne sera pleinement effectif qu'au 1 er janvier 2018 : il est donc encore possible d'y déroger ».

Les communes membres de la métropole d'Aix-Marseille Provence, érigées en stations classées de tourisme, ou en voie d'obtenir le classement auront donc, aux termes de l'article 18 du projet de loi, jusqu'au 1 er janvier 2018 pour délibérer afin de conserver leur compétence et, pour celles qui ne l'ont pas encore fait, déposer auprès des services de l'État leur demande de classement en station classée de tourisme.

4. L'avis de votre commission

Votre rapporteur pour avis soutient les dispositions du présent article, de même qu'il souscrit aux modifications introduites à l'Assemblée nationale, sous réserve de son amendement COM-282 de clarification du dispositif, précédemment exposé et adopté par votre commission.

Votre rapporteur tient également à rappeler, pour mémoire, que, lors des débats à l'Assemblée nationale, le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales,  M.   Jean-Michel  Baylet, a indiqué que si la loi n'était pas promulguée au 1 er janvier 2017, des instructions seraient données aux services de l'État pendant la période transitoire, afin que les communes touristiques ne soient pas pénalisées dans l'attente dans la promulgation de la loi 171 ( * ) .

Sous réserve de l'adoption de son amendement COM-282 , votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 18.


* 152 L'article 68 de la loi précitée prévoit en effet que les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, existant à la date de publication de cette loi, doivent se mettre en conformité avec ses dispositions relatives à leurs compétences avant le 1 er janvier 2017.

* 153 Sont concernées : les communautés de communes, les communautés d'agglomération, les communautés urbaines, les métropoles, dont la métropole de Lyon.

* 154 Article L. 5215-20 du code général des collectivités territoriales.

* 155 Articles L. 5217-2 pour les métropoles de droit commun et L. 3641-1 pour la métropole de Lyon.

* 156 Article L. 134-2 du code du tourisme.

* 157 Rapport n° 4067 (2016-2017) de Mmes Annie Genevard et Bernadette Laclais fait au nom de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, sur le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.

* 158 Article L. 133-1 du code du tourisme.

* 159 Article L. 134-2 du code du tourisme.

* 160 Rapport n° 4067 (2016-2017) de Mmes Annie Genevard et Bernadette Laclais fait au nom de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, sur le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.

* 161 Rapport n° 174 (2014-2015) de MM. Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, fait au nom de la commission des lois, déposé le 10 décembre 2014 et Rapport n° 450, tome I (2014-2015) de MM. Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, fait au nom de la commission des lois, déposé le 13 mai 2015. Voir en particulier les commentaires des articles 18 et 19 du projet de loi et le compte rendu de leur examen en commission.

* 162 Article L. 133-11 du code du tourisme.

* 163 Article R. 133-33 du code du tourisme.

* 164 Obligation prévue par l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 2008 relatif aux communes touristiques et aux stations classées de tourisme, modifié par l'arrêté du 10 juin 2011.

* 165 Article L. 133-13 du code du tourisme.

* 166 Avis du Conseil d'Etat n° 391883 sur le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.

* 167 Annie Genevard et Bernadette Laclais pour le premier amendement et Charles-Ange Ginesy pour le second.

* 168 Article L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales.

* 169 Article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales.

* 170 Compte rendu intégral de l'Assemblée nationale, deuxième séance publique du mercredi 12 octobre 2016.

* 171 Compte rendu intégral de l'Assemblée nationale, deuxième séance publique du mercredi 12 octobre 2016.

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