TRAVAUX EN COMMISSION

Audition de M. Philippe Tabarot, ministre des transports
(Mercredi 5 novembre 2025)

M. Jean-François Longeot, président. - Nous sommes très heureux d'accueillir le ministre Philippe Tabarot. Vos questions seront nombreuses; je vous serais reconnaissant de bien vouloir être concis.

Je m'applique dès à présent cette règle à moi-même. Monsieur le ministre, savez-vous à quelle échéance le projet de loi-cadre pour les transports sera déposé et soumis au Parlement ?

M. Philippe Tabarot, ministre des transports. - C'est avec une grande émotion que je me présente aujourd'hui devant vous, onze mois après avoir quitté cette commission pour rejoindre le Gouvernement. Même si vous me manquez, j'espère quand même ne pas vous rejoindre tout de suite au Sénat ; j'ai encore beaucoup à faire.

Hier soir, je lisais un article de Public Sénat sur internet qui évoquait les relations entre le Gouvernement et le Sénat. Certains mots employés me paraissaient assez incroyables : mauvais départ, relations limitées, mépris, vexation. Je vous le dis très clairement : je n'ai pas ce sentiment et j'espère que cela est réciproque.

Cette audition me permet de dresser un bilan de l'action conduite ces derniers mois, d'évoquer le projet de loi de finances pour 2026 et de vous présenter ma vision pour l'avenir de nos transports. Mon intervention comportera trois volets : d'abord, les grandes lignes du budget 2026 ; ensuite, les enseignements de la conférence Ambition France Transports, à laquelle plusieurs d'entre vous ont contribué ; enfin, ma feuille de route pour les mois à venir.

Avant d'entrer dans le détail, je me permets un mot sur le contexte. Vous l'avez sans doute remarqué, le ministère des transports est redevenu un ministère de plein exercice pour la première fois depuis 1988 et Louis Mermaz. Ce choix politique traduit la place centrale des mobilités dans notre projet de société. Les transports structurent le quotidien de nos concitoyens, sont la condition de notre compétitivité et constituent un levier majeur pour la cohésion de nos territoires.

Permettez-moi, tout d'abord, de dresser un bilan rapide de l'action conduite au cours de ces derniers mois à la tête du ministère des transports. Je me suis attaché à poursuivre les combats que j'ai déjà menés ici, à vos côtés. Dès ma prise de fonction, j'ai souhaité faire aboutir la proposition de loi relative au renforcement de la sûreté dans les transports que j'avais déposée en tant que sénateur. Nous menons actuellement les consultations nécessaires avec les organismes compétents afin de finaliser les textes d'application et de permettre leur publication dans les plus brefs délais, à commencer par le décret relatif aux « caméras-piétons », tant attendu. Celui-ci est en cours d'examen par le Conseil d'État.

L'actualité nous rappelle malheureusement trop souvent toute l'utilité de ces mesures qui permettront de mieux protéger nos concitoyens, qu'ils soient usagers ou agents des transports. Cette proposition de loi est née au sein de notre commission ; comme souvent ici, nous avions raison avant l'heure. Mais entre la rédaction d'un texte, son inscription à l'ordre du jour, son vote dans les deux chambres, l'examen par le Conseil constitutionnel d'un éventuel recours et la publication des décrets d'application, que le chemin est long !

Je tiens à défendre plusieurs grands projets d'infrastructures, à l'instar de l'A69 ou du Lyon-Turin, même si cela fera sursauter certains d'entre vous. Quel que soit l'avis que l'on porte sur ces infrastructures, il est incompréhensible qu'un projet puisse démarrer et ensuite être interrompu alors qu'il était terminé aux trois quarts ; cela remet en cause la crédibilité de la parole et de l'action publiques.

La question de la sécurité et de la lutte contre les stupéfiants, notamment dans les transports scolaires, est un dossier sur lequel je souhaitais particulièrement m'investir. Le décès de Johanna est un drame qui nous a profondément bouleversés. C'est pourquoi j'ai annoncé, en lien avec le ministère de l'intérieur, un renforcement des mesures de prévention et de contrôle, ainsi que les sanctions. Nous devons à nos enfants et à leurs familles un transport scolaire sûr et exemplaire.

Ces derniers mois ont aussi été marqués par une actualité sociale intense. Ma position est claire et constante, quel que soit le secteur concerné - agents des routes, contrôle aérien, taxis ou autres services publics de transport -, ma porte restera toujours ouverte au dialogue social. En revanche, je ne céderai à aucune forme de chantage.

Dès mon arrivée, j'ai préparé la conférence Ambition France Transports ; plusieurs d'entre vous y ont contribué. J'y reviendrai plus en détail, car celle-ci constitue le socle de ma feuille de route pour le financement de nos infrastructures.

En 2026, les crédits de mon ministère seront globalement préservés. Ce budget reflète la priorité que le Gouvernement accorde aux transports. C'est aussi la traduction concrète des besoins identifiés lors de la conférence. Les autorisations d'engagement (AE) du programme 203 « Infrastructures et services de transports » progressent de 1,1 milliard d'euros par rapport à 2025. Cette hausse s'explique principalement par le lancement de l'appel d'offres pour le renouvellement du matériel roulant des trains de nuit. Dès le début des années 2030 - on les attend même pour 2029, je l'espère -, de nouvelles locomotives et de nouvelles rames remplaceront le matériel vieillissant sur les cinq lignes qui traversent notre pays. C'est la preuve que l'État ne se désengage pas du train de nuit, bien au contraire, conformément à ce qu'avait souhaité à l'époque le Premier ministre Jean Castex, devenu depuis président de la SNCF. Nous avons choisi, dans un contexte budgétaire contraint, de concentrer nos moyens sur le financement des lignes intérieures, essentielles à la desserte de nos territoires. Nous échangerons peut-être sur les trains de nuit à destination d'autres villes européennes.

Cette hausse des autorisations d'engagement comprend aussi une augmentation de 63 millions d'euros pour l'action « Transport aérien », dont 20 millions d'euros sont destinés au nouvel aéroport de Mayotte. L'aéroport actuel présente des fragilités structurelles et une exposition au risque naturel qui ne permettent pas d'envisager sereinement son exploitation sur le long terme. C'est pourquoi le Président de la République s'est engagé à ce que la construction d'un nouvel aéroport sur Grande-Terre soit réalisée - ou puisse débuter -avant la fin de son mandat.

Les crédits de paiement (CP) progressent de 210 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2026, soit une augmentation de 5 %. Cette évolution résulte principalement des hausses de redevances d'accès versées à SNCF Réseau, qui contribuent à la régénération et à la modernisation de notre réseau ferroviaire. Elle traduit également la montée en puissance des investissements dans les aéroports de Pointe-Blanche à Saint-Pierre-et-Miquelon et de Hihifo à Wallis-et-Futuna, ainsi que dans les études préalables à la construction du nouvel aéroport de Mayotte dont je vous parlais à l'instant.

L'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) - un sujet qui a fait couler beaucoup d'encre -, a fait l'objet de nombreuses critiques sur son manque de transparence, que je qualifie d'injustes. L'Afit France compte entre quatre et cinq équivalents temps plein (ETP). Si demain les parlementaires décidaient de la supprimer, ce qui est votre droit, ces quatre ou cinq agents reviendraient dans les services de la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) : cela ne représenterait pas un gain extraordinaire et Bercy reprendrait le contrôle de tous les financements qui transitent aujourd'hui par l'Afit France.

Pour répondre à vos attentes, j'ai intégré les crédits de paiement prévisionnels de l'Afit France dans le projet annuel de performance. Ces crédits demeurent, bien entendu, prévisionnels, puisque le budget de l'agence sera voté par son conseil d'administration à la fin de l'année 2025. Cette démarche constitue cependant un acte de transparence par rapport à la représentation nationale. Nous devons protéger l'Afit France, un acteur essentiel du monde des transports.

Pour 2026, les crédits de paiement prévisionnels de l'agence s'élèvent à 3,8 milliards d'euros, soit une légère progression de 39 millions d'euros. Cette évolution traduit plusieurs dynamiques, d'abord la poursuite des investissements dans le ferroviaire, avec une hausse de près de 40 % des crédits par rapport à 2025. Ces moyens supplémentaires iront en priorité à la rénovation des lignes Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt) et Paris-Clermont-Ferrand, conformément aux engagements pris. Il s'agit déjà des deux plus gros chantiers de SNCF Réseau pour l'année 2025 - je précise que la décision avait été prise avant les opérations médiatiques dites des « trains de la colère ».

Ensuite, j'ai souhaité que les crédits consacrés à la régénération routière et fluviale progressent de 10 % cette année, dans la continuité des conclusions de la conférence de financement des infrastructures de transport - c'est une avancée majeure. En cette période de maîtrise des dépenses, le Gouvernement choisit de continuer à s'attaquer à ce que nous appelons la « dette grise ». En effet, plus l'on tarde à investir, plus la remise en état de l'infrastructure coûtera cher. J'insiste sur un chiffre : 91 % des crédits de paiement de l'Afit France seront consacrés à la régénération ferroviaire, à la modernisation des réseaux existants et au développement des alternatives à la route. Nous privilégions la qualité et la performance de nos infrastructures existantes, qui servent au quotidien l'ensemble des territoires.

S'agissant du secteur aérien, les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (Bacea) sont en hausse de 61 millions d'euros par rapport à l'exercice précédent, pour atteindre 2,8 milliards d'euros en 2026. Les dépenses de personnel demeurent le premier poste budgétaire, à hauteur de 1,4 milliard d'euros, soit une progression de 48,1 millions d'euros par rapport à 2025. Cette hausse vise à renforcer la performance du contrôle aérien français, qui constitue l'une de mes priorités.

Deux leviers principaux y contribuent. D'abord, le financement des mesures du protocole social 2023-2027, qui permet d'améliorer la productivité et d'accompagner l'évolution des métiers du contrôle aérien dans un souci de performance et de sécurité, par exemple avec la mise en place d'une badgeuse biométrique. Ensuite et surtout, la mise en oeuvre d'un plan de recrutement de 78 ETP en 2026. Ces recrutements concerneront principalement les ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne, afin d'anticiper la vague de départs à la retraite prévue à la fin de la décennie et de garantir la continuité du service public.

Hors dépenses de personnel et remboursement d'emprunts, le projet de loi de finances pour 2026 prévoit 984 millions d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 47 millions d'euros par rapport à 2025. Ce renforcement des moyens permettra à la direction générale de l'aviation civile (DGAC) de poursuivre la modernisation de ses équipements, et de répondre pleinement aux enjeux de sécurité et de performance environnementale et opérationnelle du transport aérien.

Enfin, l'École nationale de l'aviation civile (Énac) bénéficiera d'un soutien renforcé. Sa subvention pour charges de service public et d'investissement sera revalorisée de 8,1 millions d'euros. Cette progression permettra d'accompagner l'augmentation du volume de formation, d'accueillir davantage d'élèves et de poursuivre le renouvellement de la flotte d'avions de l'école, notamment avec des avions électriques.

Le transport maritime fait partie de mes attributions, même si le programme 205 « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » relève de la ministre déléguée chargée de la mer et de la pêche. Le transport maritime est un secteur fondamental pour notre commerce extérieur, puisque 90 % du commerce mondial passe par la mer. C'est un élément central de souveraineté et un secteur très exposé à la concurrence internationale. Nous avons obtenu des résultats très encourageants sur le développement du pavillon français, avec une croissance de 23 % du nombre de marins français entre 2018 et 2024 et l'inscription, encore hier, de dix nouveaux porte-conteneurs par CMA-CGM.

Ces succès ne doivent pas nous faire oublier que les coûts salariaux jouent un rôle discriminant pour notre compétitivité. Il importe donc que le régime de la taxe au tonnage applicable aux armateurs soit maintenu, comme dans la quasi-totalité des grands États maritimes. De même, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous devons défendre le mécanisme d'exonérations de charges patronales qui permet à nos armateurs d'employer des marins français.

Pour revenir à la conférence de financement, je salue le travail transpartisan accompli sous la présidence de Dominique Bussereau. Pendant neuf semaines, soixante experts ont été mobilisés, ainsi que des parlementaires - dont vos collègues Didier Mandelli, Olivier Jacquin, Franck Dhersin et Jacques Fernique, notamment -, des élus locaux et des fédérations professionnelles. Près de 300 contributions ont été recueillies.

Cette conférence a confirmé la nécessité de repenser notre modèle de financement. Les recettes issues de la fiscalité carbone vont nécessairement diminuer, il nous faut donc trouver d'autres leviers pour nos infrastructures, qui exigent des financements à long terme. Le projet de loi de finances pour 2026 traduit déjà plusieurs conclusions de la conférence, avec une hausse de 10 % des crédits pour la régénération routière et fluviale dans le budget de l'Afit France. Cela bénéficiera directement à nos routes nationales et à nos voies navigables, des infrastructures vitales pour nos territoires.

La conclusion par la SNCF de marchés de travaux-cadres lors de son conseil d'administration du 29 septembre dernier permettront d'atteindre l'objectif de 4,5 milliards d'euros d'investissement par an dans la régénération du réseau dès 2028 - c'est ce dont nous rêvions depuis plusieurs années. J'espère que le contrat de « sous-performance », comme nous avions coutume de l'appeler, deviendra un véritable contrat de performance.

La prise en charge par l'État de la préfiguration des services express régionaux métropolitains (Serm) par le biais de la Société des grands projets (SGP) est un troisième point concret de ce budget, conformément à l'engagement que j'avais pris lors de la conférence. Cette mesure aidera les collectivités territoriales à développer leurs projets de mobilité du quotidien.

Pour ancrer ces orientations dans le temps long, nous avons besoin d'un cadre législatif stable. Le Premier ministre l'a confirmé lors de sa déclaration de politique générale devant vous le 15 octobre. Notre projet de loi-cadre sera présenté au Parlement en miroir du texte sur la décentralisation, à l'issue de l'examen du projet de loi de finances pour 2026. Il s'appuiera sur les travaux de la conférence, fixera notre stratégie de transport pour les décennies à venir, favorisera de nouveaux mécanismes de financement, précisera la gouvernance de nos infrastructures et hiérarchisera nos priorités.

L'élaboration de cette loi-cadre sera un exercice de co-construction. Je souhaite que les parlementaires ayant participé à la conférence y soient pleinement associés, mais je veux aussi recueillir les contributions de tous dans un esprit transpartisan, car les enjeux de mobilité et d'aménagement du territoire transcendent les clivages politiques. 

Ce texte s'articulera autour de quatre axes majeurs, reflétant les quatre ateliers de la conférence. Il traduira dans la loi les grands principes du nouveau système, à savoir la nécessité de mieux planifier les investissements et de donner une priorité claire à la régénération et à la modernisation de nos réseaux existants.

Il s'agit de garantir que les ressources prélevées sur le secteur des transports soient pleinement réinvesties dans le financement des infrastructures. Le fléchage du produit des taxes portant sur le transport vers le secteur transport, que nous appelions de nos voeux, est la moindre des choses, mais cela n'a pratiquement jamais été le cas.

Ce texte permettra aussi de définir le cadre de référence des futures concessions autoroutières. Près de 90 % des concessions arriveront à échéance entre 2032 et 2036. Nous maintiendrons le principe du modèle concessif, mais sous une forme renouvelée : des concessions de taille plus réduite, de durée plus courte, dans lesquelles l'État retrouvera toute sa place.

Concernant le ferroviaire, cette loi devra acter le renforcement des capacités de SNCF Réseau pour assurer la régénération et la modernisation du réseau, notamment par l'inscription d'un effort de 4,5 milliards d'euros à compter de 2028, contre 3 milliards d'euros aujourd'hui : cette somme ne nous permet pas de régénérer notre réseau, qui continue de vieillir. C'est non pas un choix politique, mais une obligation. Je souhaite revoir ce contrat de performance pour qu'il soit beaucoup plus ambitieux.

Sur les transports collectifs, je souhaite que cette loi marque une nouvelle étape pour le déploiement des Serm grâce à une refonte de la gouvernance - celle de la SGP, notamment -, mais aussi par de nouveaux leviers offerts aux collectivités pour sécuriser des ressources additionnelles.

Enfin, le texte comportera un volet consacré au fret. Je proposerai des mesures pour développer le fret fluvial et des dispositions pour accélérer la décarbonation des flottes de poids lourds. Je rappelle que, dans ce budget, nous avons réussi à maintenir toutes les aides au fret ferroviaire - cela n'a pas été une mince affaire ; je m'y suis investi personnellement.

Je souhaite que ce texte soit présenté en premier lieu devant le Sénat et que votre commission soit saisie au fond.

Le budget de mon ministère porte une vision claire : placer les transports au coeur de notre compétitivité économique, de notre ambition écologique et de l'équilibre de nos territoires.

Face aux contraintes budgétaires, nous avons défini des priorités, que nous assumons : favoriser l'investissement plutôt que les dépenses de fonctionnement ; privilégier la régénération de l'existant plutôt que la construction de nouvelles infrastructures parfois non indispensables ; enfin, rechercher l'excellence et la fiabilité de nos réseaux. Ces orientations ne sont pas conjoncturelles. Elles s'inscrivent dans une vision de long terme mise en avant dans la loi-cadre. Les défis qui se présentent à nous sont immenses et les enjeux pour l'avenir de nos territoires sont cruciaux.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis sur les crédits alloués au transport aérien. - Pour une fois, le projet de loi de finances ne prévoit pas de nouvelles taxes pesant sur le transport aérien, comme lors des deux derniers exercices. On ne peut que s'en réjouir.

Malheureusement, la créativité fiscale de Bercy est inégalable. Je pense aux articles 36 et 43 du projet de loi de finances, qui portent sur la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA). L'article 43 porte sur le stock de produit de la TNSA : il prévoit de ponctionner la trésorerie accumulée pour financer l'insonorisation des logements des riverains d'Orly et de Roissy, en prélevant près de 80 millions d'euros. L'article 36 porte sur le produit de TNSA en 2026 : il en affecte une partie au budget général de l'État. Or je rappelle que cette taxe a déjà été augmentée en 2025 !

Certes, la situation de nos finances publiques est difficile, et Bercy cherche à mobiliser toutes les recettes possibles et imaginables. Comme le dit le fabuliste picard Jean de La Fontaine dans Le Milan et le Rossignol : « Ventre affamé n'a point d'oreilles ». Je vous invite cependant à vous rendre dans un logement non insonorisé à proximité d'un aéroport et à écouter les riverains sous le flux des avions. Détourner le produit de la TNSA des travaux d'insonorisation n'est moralement pas acceptable. Une telle décision se fait au détriment de la santé de nos concitoyens les plus vulnérables.

Il serait bien plus opportun d'assouplir les conditions d'utilisation du produit de TNSA pour que celui-ci soit effectivement utilisé, comme l'ont proposé nos collègues Guillaume Chevrollier et Gilbert-Luc Devinaz, que je salue, dans leur rapport d'information sur la pollution sonore causée par les transports. Monsieur le ministre, vous avez dit tout à l'heure que les taxes sur le transport devaient être fléchées vers le transport. Il doit en aller de même pour les taxes sur l'insonorisation. Confirmez-vous votre opposition à cette disposition regrettable ?

Je tiens également à aborder la question du soutien apporté par l'État à l'aéronautique civile : ce soutien, essentiel pour développer un avion ultra-frugal d'ici à 2035, permettra la décarbonation de l'ensemble du secteur aérien mondial. Le Président de la République s'était engagé en juin 2023 à ce que l'État apporte un soutien de 300 millions d'euros par an jusqu'en 2027 à la filière, via le Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac).

Enfin, j'ai bien compris qu'il y avait une volonté de « flinguer » les biocarburants de première génération, que ce soit l'éthanol ou le biodiesel. Allez-vous vous opposer à cette augmentation de leur taxation ?

M. Philippe Tabarot, ministre. - Monsieur Demilly, je vous remercie d'avoir rappelé que le projet de loi de finances ne comprenait pas de nouvelles taxes sur le secteur aérien. Des amendements ont toutefois été déposés sur le tarif de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) et sur la taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance (TEILD). Celles-ci ont eu des conséquences sur le secteur aérien, qu'il s'agisse de l'aviation d'affaires ou l'aviation commerciale. La France n'a pas la même progression que d'autres pays européens, probablement du fait de ces différentes taxes. J'espère que vous serez très vigilants lors du débat parlementaire sur ces sujets.

Je partage votre point de vue sur la ponction de la TNSA. J'ai déjà eu l'occasion de le dire : il est normal que ces sommes, même excédentaires, reviennent à leur objet initial, c'est-à-dire la réalisation des investissements. Si ces derniers n'ont pas pu se faire, c'est parce que le reste à financer était trop important pour certaines familles. Depuis, le taux a été revu. Ces travaux sont indispensables et les sommes ont été ponctionnées aux compagnies pour les financer. Je ne suis donc pas favorable à ce que Bercy récupère la trésorerie de la TNSA. Le nouveau dispositif permettra d'augmenter le niveau d'investissement et de consommer ces sommes pour la protection des riverains. Une solution juste consisterait à ce qu'une partie des sommes soit récupérée au titre de l'avance accordée durant la crise covid 19, dont le montant doit s'élever entre 28 ou 29 millions d'euros, mais que le reste demeure affecté aux travaux à venir.

Je suis tout à fait d'accord avec votre position sur le Corac. L'an dernier, à l'occasion de l'examen de l'un de vos amendements, je me suis battu pour que l'engagement du Président de la République soit tenu. Le secteur aérien est le premier contributeur à la balance commerciale de la France. Dans cette période si compliquée, il nous paraît indispensable de continuer à l'aider, non pas dans son fonctionnement, mais dans l'anticipation des années à venir, que ce soit en matière de compétitivité ou de décarbonation - un sujet ô combien important.

Les sommes versées par le Corac permettent chaque année à la France de rester un « leader ». Ce n'est pas qu'un slogan, c'est un impératif industriel, climatique et un élément de souveraineté pour notre pays. Je souhaite donc que cette trajectoire se poursuive. Comme vous l'avez rappelé, les sommes sont prévues au programme 190 qui fait partie non pas des crédits de mon ministère, mais de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Je souhaite que cette trajectoire puisse être augmentée par voie d'amendement. Nous obtiendrons des compléments de financement par le biais du programme 424, comme l'an dernier. Ainsi, nous nous rapprocherons d'un total compris entre 250 et 300 millions d'euros, non loin de l'objectif fixé par le Président de la République. Nombre d'entreprises ayant déjà lancé des programmes attendent ce soutien indispensable.

J'en viens aux biocarburants. L'évolution de la fiscalité sur le bioéthanol a sans doute été trop forte. Je souhaite que nous nous en remettions à la sagesse du Parlement. L'Assemblée nationale a été plutôt sage sur ce sujet ; je ne doute pas qu'il en sera de même au Sénat. Ne détruisons pas la dynamique qui s'est créée depuis plusieurs années par des décisions hâtives.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. - Ce n'est pas sans émotion que je prends la parole, puisque je remplace ici, dans cette instance, un sénateur que vous connaissez bien, monsieur le ministre !

En premier lieu, j'aborderai les sujets liés au transport ferroviaire. Monsieur le ministre, vous avez organisé de mai à juillet derniers la conférence Ambition France Transports. Les travaux de la conférence consacrés au réseau ferroviaire ont montré que la régénération et la modernisation du réseau structurant nécessitaient environ 1,5 milliard d'euros supplémentaires par an. À moyen terme, plusieurs recettes, notamment les péages autoroutiers, pourront être mobilisées. Cependant, d'ici là, d'autres leviers doivent être identifiés. Force est de constater que le compte n'y est pas avec ce PLF. Quels moyens de financement pourraient être activés à court terme afin d'éviter une dégradation du réseau ?

L'article 4 du PLF prolonge l'application de la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises. La SNCF sera-t-elle redevable de cette taxe ? Un tel prélèvement aura-t-il pour conséquence de diminuer les sommes versées au fonds de concours ?

J'en viens au financement des autorités organisatrices de la mobilité (AOM) et des Serm. Quel premier bilan tirez-vous de la mise en place d'un versement mobilité régional et rural (VMRR) ? Quels autres moyens de financement les AOM pourraient-elles utiliser pour financer les Serm ?

Monsieur le ministre, vous n'ignorez pas que nous sommes le pays dans lequel les péages ferroviaires sont les plus élevés d'Europe. SNCF Réseau a publié le projet de document de référence du réseau (DRR) 2027-2029, qui prévoit des réductions de péages pour les liaisons non radiales et la desserte par TGV des gares les moins attractives. Je me réjouis de cette disposition qui permet de concilier efficacement le libre accès au réseau ferroviaire pour les opérateurs et l'aménagement du territoire. Je m'interroge seulement sur un point : comment SNCF Réseau pourra-t-il supporter le manque à gagner consécutif à ces réductions ?

Concernant les transports conventionnés, c'est-à-dire les trains express régionaux (TER), les péages versés par les régions se rapprocheront des coûts complets de l'entretien du réseau. Il me paraît donc essentiel de renforcer la performance du gestionnaire de l'infrastructure : quelles mesures comptez-vous prendre pour renforcer son efficacité ?

S'agissant à présent du transport fluvial, le projet de loi de finances pour 2026 propose un abaissement du plafond d'emplois de Voies navigables de France (VNF) de 40 ETP, alors que celui-ci avait déjà diminué en 2025. Pourtant, le contrat d'objectifs et de performance (COP) entre l'État et VNF, révisé en 2023, avait prévu une stabilisation de ce plafond d'emplois jusqu'en 2026 inclus, afin de préserver le climat social de l'établissement. Certes, VNF est engagé dans un ambitieux chantier de modernisation de la gestion de son réseau, mais celui-ci ne permettra véritablement des gains de productivité qu'à compter de 2027. Monsieur le ministre, pour quelles raisons cet engagement n'a-t-il finalement pas pu être tenu ? Concrètement, VNF va-t-il devoir recourir à davantage de contrats à durée déterminée l'année prochaine ?

Ensuite, au fil de décennies de sous-investissement, le réseau fluvial a accumulé une « dette grise » évaluée à plus d'un milliard d'euros fin 2023 par la Cour des comptes. La conférence Ambition France Transports a évalué un besoin annuel supplémentaire en matière de régénération et de modernisation du réseau fluvial à hauteur de 200 millions d'euros. Elle a également mis en avant le potentiel de la redevance hydraulique pour renforcer les ressources de VNF : envisagez-vous des évolutions sur ce sujet ou sur d'autres ressources propres de l'établissement ?

Pour ce qui concerne le transport maritime, François Bayrou, alors Premier ministre, avait annoncé lors du comité interministériel de la mer (CIMer) en mai dernier que le produit du marché carbone européen issu du transport maritime serait mobilisé pour financer la décarbonation du secteur, soit une enveloppe estimée à 90 millions d'euros pour 2026. Or le projet de loi de finances ne comporte aucune mesure prévoyant une telle affectation. Pour quelles raisons cela n'a-t-il pas été inscrit dans le PLF initial ? Seriez-vous ouverts à des amendements en ce sens ?

Enfin, je souhaiterais m'éloigner un peu du projet de loi de finances pour évoquer la compétitivité des grands ports maritimes (GPM). Alors que la recomposition des alliances des armateurs maritimes conduit à une modification de la desserte des ports européens - je pense en particulier à la fusion entre Hapag-Lloyd et Maersk survenue cette année -, comment nos GPM se positionnent-ils sur le trafic de conteneurs ? Avez-vous identifié des pistes pour que les ports français tirent mieux leur épingle du jeu ?

M. Philippe Tabarot, ministre. - Je veux d'abord répondre à la question du président Longeot relative au calendrier de la loi-cadre : la consultation et les arbitrages auront lieu dans le courant du mois de novembre, la finalisation du texte et le passage en Conseil des ministres en décembre, la présentation au Parlement, prioritairement au Sénat, en janvier ou février 2026. Tel est en tout cas mon objectif.

Ensuite, je tiens à rassurer le rapporteur pour avis sur la contribution exceptionnelle : le groupe SNCF n'est pas concerné par cette mesure, car il ne paie pas d'impôt sur les sociétés. Il bénéficie également d'une déduction fiscale pour le versement au fonds de concours.

S'agissant du VMRR, une initiative soutenue par le Sénat et une possibilité ouverte par la loi de finances pour 2025, je me réjouis que deux régions, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Occitanie, aient décidé de le mettre en place dès 2025. Quatre autres régions ont délibéré pour l'instaurer en 2026 : Bretagne, Centre-Val de Loire, Nouvelle-Aquitaine et, plus récemment, Bourgogne-Franche-Comté. Nous attendions un produit de 750 millions d'euros pour ce versement, il est encore trop tôt pour savoir où nous en sommes.

Je me félicite, en tout cas, que les régions se soient emparées de cet outil, car le ferroviaire est probablement le moyen de transport qui coûte le plus cher. Cette nouvelle ressource leur offre la capacité de conduire la politique de transport qu'elles souhaitent. C'est aussi un atout supplémentaire pour le financement des Serm.

En contrepartie, les régions doivent mettre en place des plans de transport adaptés et volontaristes, avec une augmentation de l'offre et une bonne desserte des zones d'activités, puisque ce sont les entreprises qui financent. Vous savez que, pour moi, ce n'est pas aux entreprises de payer la gratuité que souhaitent instaurer certains responsables politiques. La gratuité ne doit donc pas être financée par le versement mobilité.

Concernant les péages, je vous répondrai par écrit, car le sujet est complexe. Je veux cependant déjà vous dire que l'une des augmentations de notre budget s'explique par la prise en charge par l'État d'une partie des péages ferroviaires pour le compte des régions. Certes, les péages sont très élevés, mais si cela peut nous permettre de moderniser et de régénérer notre réseau, nous nous y retrouvons. Je sais néanmoins que, pour obtenir un véritable choc d'offre, il faudrait à terme diminuer le niveau de ces péages.

S'agissant de VNF, 10 % de l'augmentation du budget de l'Afit est destiné au fluvial et au routier. Nous avons toutefois demandé des efforts supplémentaires qui n'étaient pas prévus dans le contrat d'objectifs et de performance, à savoir 40 ETP. Cela représente seulement un écart de 2 % par rapport à ce qui était prévu dans le COP. Nous allons essayer de trouver, avec VNF, des solutions pour lui permettre de continuer à assurer ses missions. Vous avez insisté sur un point très juste : pour le financement des investissements de VNF, la redevance hydraulique, qui représente déjà 20 % de ses ressources, pourrait être augmentée.

Par ailleurs, je souhaite que l'engagement pris le 26 mai dernier par le Premier ministre à l'occasion du CIMer soit tenu. La décarbonation du secteur maritime doit notamment s'appuyer sur l'affectation de recettes du marché carbone européen. Le Président de la République l'a d'ailleurs rappelé hier à La Rochelle. Mes collègues Monique Barbut, Catherine Chabaud et Mathieu Lefèvre et moi-même avons saisi le Premier ministre à ce sujet. Comme je le disais tout à l'heure, ce qui est pris au transport doit revenir au secteur.

Concernant la compétitivité des ports, il est encore difficile d'identifier les impacts spécifiques des évolutions récentes et d'en tirer des conclusions, et je lirai avec beaucoup d'attention votre rapport, notamment en ce qui concerne la recomposition européenne des différentes alliances. Je ne doute pas un instant que, dans la modernisation en cours, les ports français sauront tirer leur épingle du jeu.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports routiers. - Je souhaite vous interroger sur quatre points relatifs au volet du projet de loi de finances pour 2026 consacré aux transports routiers et, plus généralement, à votre feuille de route sur cette thématique au lendemain de la Conférence de financement des transports.

Je commencerai en évoquant le programme national ponts (PNP), qui avait été lancé en 2021 sur l'initiative du Sénat et dont les crédits sont désormais presque épuisés. De fait, si rien n'est fait dans le PLF pour 2026, le dispositif devra être mis à l'arrêt au mois de février prochain, alors qu'il reste beaucoup à faire : selon le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), il faut entre 40 millions et 50 millions d'euros chaque année pour réparer les ouvrages d'art communaux les plus dégradés qui ont déjà été identifiés. Ici comme ailleurs, la politique du stop and go n'est pas judicieuse. Seriez-vous prêt à soutenir une initiative sénatoriale pour pérenniser ce programme dans le PLF pour 2026, grâce à une ligne budgétaire dédiée ?

J'aimerais également évoquer les mobilités en zone rurale, qui demeurent une faiblesse structurelle de nos politiques de transport. La LFI pour 2025 a apporté un début de solution, en instaurant le VMRR, dont 10 % du produit a vocation à être redistribué aux AOM des zones peu denses.

Néanmoins, les AOM locales sont tributaires de la décision des régions et, à ce jour, seules quelques-unes ont manifesté leur volonté d'instaurer le VMRR : dans quelle mesure cet outil va-t-il permettre de répondre aux besoins des zones rurales ? D'autres pistes d'assouplissement des conditions pour lever le VM en zone rurale seraient-elles envisageables ? Je pense notamment à l'amendement que vous aviez porté l'année dernière, avec Olivier Jacquin, visant à assouplir la restriction concernant l'organisation de services de transports réguliers.

S'agissant des aides à l'acquisition de véhicules propres, le PLF pour 2026 prévoit la débudgétisation du bonus écologique, désormais dénommé « coup de pouce véhicules particuliers électriques », et du leasing social. Ces dispositifs ont désormais vocation à être intégralement financés via les certificats d'économies d'énergie (CEE).

L'année dernière, la Cour des comptes avait appelé à refondre en profondeur les CEE, soulignant l'opacité du dispositif, mais aussi un certain dévoiement par l'État qui en a fait un outil de financement de ses politiques publiques, alors qu'il s'agissait, au départ, d'un simple instrument pour inciter aux économies d'énergie. Quel regard portez-vous sur ce sujet ? La future loi-cadre ne pourrait-elle pas être l'occasion de soumettre au Parlement les paramètres structurants de ce dispositif en matière de décarbonation des transports ?

Dernier point : votre prédécesseur avait gelé les crédits du plan vélo et marche 2023-2027 et annulé le septième appel à projets « aménagements cyclables », laissant ainsi plus de 400 collectivités au bord de la route. En janvier 2025, le nouveau Premier ministre d'alors, François Bayrou, avait quant à lui annoncé une enveloppe de 50 millions d'euros à travers le fonds vert, outil qui est à la main des préfets et sur lequel nous n'avons, en tant que parlementaires, que très peu de reporting. Quel montant a été réellement alloué au vélo via ce dispositif en 2025 ?

En tout état de cause, le recours au fonds vert, dont les moyens seront de nouveau rabotés l'année prochaine, de même que l'arrêt des appels à projets « aménagements cyclables » semblent indiquer un désengagement de l'État. Ce retour en arrière risque de mettre en péril non seulement les projets des petites collectivités locales, qui avaient pourtant manifesté un réel engouement pour le dispositif, mais aussi toute la filière cyclable qui commençait tout juste à se structurer.

Les mobilités douces ont pourtant un rôle majeur à jouer dans les mobilités quotidiennes, en particulier dans la perspective du déploiement des Serm. Ne faudrait-il pas, a minima, conserver des appels à projets dédiés aux aménagements cyclables dans les zones rurales et périurbaines permettant un rabattement vers les centres-villes et vers les gares ferroviaires et routières, dès lors qu'ils s'inscriraient dans des schémas de mobilité ? Plus globalement, comment voyez-vous la suite pour le plan vélo ?

M. Jean-François Longeot, président. - J'ai récemment rencontré les représentants de Mobilians, organisation patronale défendant les intérêts des entreprises de l'automobile en France, et il pourrait être intéressant que la commission les auditionne.

M. Philippe Tabarot, ministre. - Concernant les ponts, aucun dossier n'est bloqué par insuffisance de budget. Pour autant, sachant qu'il y a 63 000 ouvrages dans notre pays et que certains posent des difficultés - je compte d'ailleurs parler du diagnostic avec le Cerema -, je m'inquiète évidemment de la situation. J'ai évoqué ce sujet avec le rapporteur général de la commission des finances du Sénat, Jean-François Husson, et je serai particulièrement attentif aux initiatives de votre assemblée sur cette question, qui me paraît prioritaire pour la sécurité de nos concitoyens et pour nos collectivités locales.

S'agissant du VMRR, qui résulte de l'adoption d'un amendement Tabarot-Jacquin, nous attendions une recette potentielle de 750 millions d'euros. Nous avions dit que 10 % devaient revenir à la ruralité, soit environ 75 millions d'euros. Je n'oublie pas cet engagement et le fait que ces 75 millions doivent revenir aux territoires les moins bien desservis. J'étais hier aux Rencontres du transport public à Nantes et j'ai pu voir le nombre de dispositifs novateurs qui sont mis en place, notamment en termes de transport à la demande.

La politique globale des CEE n'est pas gérée par mon ministère. Certes, le leasing social est une réussite, mais nous n'avons pas encore d'évaluation complète et nous devons encore répondre à certaines questions qui se posent à la filière, notamment la sortie de la période de leasing. Il ne faut pas que nous changions d'objectif, même si les CEE financent désormais les aides aux véhicules propres. La question demeure de savoir si la politique du logement doit absorber l'ensemble des crédits ou si les transports peuvent en récupérer une partie.

Concernant le plan vélo, nous avons dégagé 50 millions d'euros grâce au fonds vert. Beaucoup d'argent a été investi pour le vélo ces dernières années et c'est une réussite. Nous voyons maintenant des infrastructures dans nombre de communes et il n'y a pas un nouveau pôle d'échange multimodal sans un abri à vélos. Nous avons enfin la possibilité de mener une véritable politique d'intermodalité. Dans ce contexte, faut-il encore investir autant ? Je ne le crois pas, même si nous ne devons pas casser la dynamique. C'est pourquoi nous avons pris cette décision concernant le fonds vert. Je ne peux pas vous donner aujourd'hui le niveau de consommation de l'enveloppe de 50 millions, mais je vous transmettrai l'information en toute transparence.

Ce qui me tient à coeur, au-delà des questions financières, c'est de pouvoir mettre en place les préconisations de la mission conduite par Emmanuel Barbe, demandée par mon prédécesseur à la suite du décès de Paul Varry le 15 octobre 2024 - la justice qualifiera ce décès causé par un automobiliste. La moitié des préconisations de cette mission est en cours de déploiement. Ce sera plus difficile pour les autres. En tout cas, c'est ma feuille de route.

M. Bruno Rojouan. - Lorsqu'un élu d'Auvergne prend la parole sur le train, on s'attend à ce qu'il évoque la liaison entre Clermont-Ferrand et Paris, qui dessert deux villes de mon département, l'Allier : Moulins et Vichy. Je n'en parlerai pas, car vous venez de confirmer certains éléments dans votre exposé liminaire, et l'horizon semble moins lointain...

J'aborderai un autre sujet. Montluçon, deuxième ville d'Auvergne après Clermont-Ferrand, n'a plus de desserte directe avec Paris depuis longtemps. Il est très préoccupant que ce bassin soit pénalisé et n'ait pas retrouvé cette liaison, malgré les investissements considérables achevés en 2024 pour la rénovation de la voie jusqu'à Vierzon.

Est-ce une utopie de penser à cette liaison directe entre Montluçon et Paris ? Pouvons-nous avoir une perspective ? Nous ne sommes pas gourmands. Il doit y avoir cinq liaisons indirectes aujourd'hui ; nous demandons de rétablir une liaison directe le matin et une le soir, et non que toutes les liaisons le soient.

M. Joshua Hochart. - L'Union européenne a voté la fin de la vente des véhicules thermiques neufs à partir de 2035. Cette mesure est présentée comme une nécessité, mais elle risque de fragiliser notre économie. Pourquoi la France continue-t-elle de soutenir cette directive, alors qu'elle ne tient pas compte des réalités du terrain ?

Dans notre pays, particulièrement dans des territoires comme le Nord, de nombreuses familles dépendent au quotidien de leur véhicule. Imposer un passage en force à l'électrique sans infrastructures adaptées ni accompagnement risque d'accentuer les inégalités et de pénaliser les Français les plus modestes.

Il faut également rappeler que l'industrie automobile française repose encore largement sur les moteurs thermiques. La fin de leur commercialisation d'ici à 2035 pourrait mettre en difficulté des milliers d'emplois et fragiliser des PME locales.

Une transition précipitée, non anticipée et mal accompagnée serait donc injuste et économiquement dangereuse, surtout lorsque l'on constate que certains pays européens, comme l'Allemagne et l'Italie, commencent à hésiter à s'engager pleinement dans cette interdiction stricte.

Pourtant, la France, avec l'Espagne, s'apprête à suivre cette directive tête baissée, sans discussion sérieuse sur les impacts pour nos concitoyens et notre industrie. Nous ne contestons pas la nécessité de réduire les émissions, mais cette politique doit être progressive, réaliste et équitable.

J'ai deux questions à vous poser, monsieur le ministre. Une question politique : pourquoi la France continue-t-elle de soutenir cette mesure, alors que d'autres pays européens émettent des doutes ? Et une question financière : quelle compensation concrète le Gouvernement prévoit-il pour l'industrie automobile et pour les utilisateurs de véhicules thermiques ?

Mme Denise Saint-Pé. - J'avais préparé deux questions, mais comme elles concernent spécifiquement mon département des Pyrénées-Atlantiques, je vous les adresserai par voie électronique, monsieur le ministre. J'espère avoir une réponse relativement rapidement.

Mme Jocelyne Antoine. - Je ferai de même !

Mme Denise Saint-Pé. - Je reste optimiste sur ce que vous nous avez dit concernant les grandes lignes du budget de votre ministère en 2026 : régénération et modernisation des lignes.

M. Franck Dhersin. - Ma première question porte sur le ferroviaire. En renonçant à demander une dérogation au règlement européen sur l'enregistrement, l'évaluation, l'autorisation et la restriction des substances chimiques (Reach) avant 2011, comme l'ont pourtant fait tous les grands pays ferroviaires européens, l'État a placé les régions dans une situation difficile. Aujourd'hui, des trains contenant de l'amiante dans des parties inaccessibles au public et ne présentant aucun danger pour la santé continuent de circuler sous le giron de la SNCF. L'opérateur historique refuse d'en transférer la propriété aux régions, les empêchant ainsi de lancer des appels d'offres. Les conséquences financières sont considérables - plusieurs centaines de millions d'euros pour les régions Hauts-de-France, Grand Est, Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Pour se conformer à la réglementation, il faudrait radier prématurément des rames qui viennent de faire l'objet de rénovations à mi-vie, au risque d'un véritable gaspillage d'argent public. Que comptez-vous faire ? Pouvez-vous vous engager à aller à Bruxelles pour solliciter de la Commission européenne l'ouverture du délai de dérogation au règlement Reach ? C'est la seule solution crédible pour régler ce dossier et économiser des centaines de millions d'euros d'argent du contribuable.

Ma deuxième question porte sur le financement des Serm, une priorité fixée par le Président de la République. Aucun budget, en dehors des études, n'a été prévu pour leur développement et 2,5 milliards d'euros sont attendus des concessions autoroutières, dont 1,5 milliard irait à SNCF Réseau et 1 milliard au réseau routier.

Sachant que le groupe SNCF s'est engagé à financer 500 millions d'euros supplémentaires à destination du fonds de concours, la somme affectée à SNCF Réseau ne devrait plus être que de 1 milliard, ce qui permettrait de dégager une capacité de financement des Serm à hauteur de 500 millions d'euros par an et autoriserait les collectivités à activer un mécanisme de levier via l'emprunt.

Pouvez-vous nous exposer les sources de financement que vous envisagez du côté de l'État pour abonder le développement des Serm ? Comme pour mes collègues à l'instant, vous pouvez me répondre par écrit, monsieur le ministre. En tant qu'élu local, vous savez que ces projets d'envergure ne pourront pas se financer uniquement par la fiscalité locale.

Ma troisième question porte sur l'aérien. Vous vous êtes prononcé contre toute nouvelle hausse de la fiscalité sur l'aérien dans le cadre du projet de loi de finances, ce dont nous pouvons nous féliciter. Pour mémoire, le secteur a déjà connu la création de la taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance en 2024, ainsi que le triplement du tarif de solidarité sur les billets d'avion en 2025. Les effets de cette fiscalité accrue se sont déjà fait sentir, avec un ralentissement du trafic en France par rapport à nos voisins européens.

Je souhaite pour ma part que nous envisagions de baisser la fiscalité spécifique pesant sur le transport aérien français, aujourd'hui la plus élevée d'Europe. Qu'en pensez-vous ? À défaut, ne risque-t-on pas d'aggraver le déclassement du pavillon français en termes de souveraineté, d'emploi et d'attractivité, et de compromettre notre capacité financière à assurer la décarbonation du secteur ?

Ma dernière question porte sur le secteur maritime. Vous avez fait de la lutte contre le dumping social sur les liaisons transmanche l'une de vos priorités. Le dispositif législatif des deux côtés de la Manche est maintenant harmonisé : en France grâce à la loi Le Gac du 26 juillet 2023 ; au Royaume-Uni grâce au Seafarers Wages Act. Quel que soit le pavillon du navire, le salaire minimum doit être respecté et le temps de repos à terre équivalent au temps passé en mer.

Le 15 septembre dernier, la France et le Royaume-Uni ont décidé de renforcer leur coopération en la matière. Les contrôles opérationnels sont la clé pour enrayer le dumping social. Depuis l'entrée en vigueur de la loi Le Gac, les compagnies de ferries potentiellement concernées ont fait l'objet d'un contrôle en 2024 et de deux au premier trimestre 2025. Pouvez-vous nous en dire plus sur l'intensification très attendue de ces contrôles et sur le résultat de ceux déjà effectués ?

M. Alexandre Basquin. - L'idée d'une loi-cadre sur les transports est une avancée, même si nous verrons ce qu'il en sera vraiment à terme... Elle fait suite à la conférence Ambition France Transports, dont les conclusions font largement consensus. Pour autant, je regrette que nous n'arrivions pas à aboutir à une véritable programmation pluriannuelle qui permettrait de définir une trajectoire, d'avoir de la visibilité et, surtout, de sécuriser les financements. Le Gouvernement a-t-il déjà envisagé une telle programmation pluriannuelle ? Des discussions sont-elles engagées avec Bercy ?

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Je voudrais appuyer les propos de Stéphane Demilly concernant, non pas la « nuisance » sonore, mais la « pollution » sonore. Réaliser des protections permet de générer beaucoup d'économies en termes de santé ; il faut faire le lien.

Monsieur le ministre, où en sommes-nous dans la décarbonation du secteur aérien, notamment quant à l'objectif d'atteindre 50 % de carburant d'aviation durable (CAD) d'ici à 2050 ?

Concernant le Lyon-Turin, où en est-on des financements côté français pour l'accès au tunnel ? Sont-ils assurés ? Le projet avance-t-il ? Par ailleurs, quelle est la logique entre ce projet et la rénovation de la ligne Modane-Dijon ? Ces deux projets sont-ils complémentaires ou contradictoires ?

Enfin, un autre projet concerne l'agglomération lyonnaise et touche l'Ain, l'Isère, le Rhône et la métropole de Lyon : le contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise (CFAL). Où en est-on de ce projet ? La question du passage au sud de l'agglomération est-elle tranchée ? Avec mon collègue Paul Vidal, nous voyons deux possibilités : soit le tracé passe dans la vallée de l'Ozon, entre Vienne et l'agglomération lyonnaise ; soit il passe au sud de Vienne, le long de la ligne à grande vitesse. Nous sommes quelques sénateurs à être plutôt favorables à cette dernière perspective...

M. Jacques Fernique. - Je note d'abord que nos collègues députés, pour le même exercice, ont eu beaucoup plus de temps pour approfondir les sujets avec vous, alors même qu'ils étaient beaucoup moins nombreux...

Monsieur le ministre, obtenez-nous les quelque 5 millions d'euros qui sont nécessaires pour maintenir notre seule desserte internationale en train de nuit : Paris-Berlin et Vienne via Strasbourg ! Je sais que les travaux de nuit entraînent des perturbations et que cette ligne est plus coûteuse que les lignes intérieures - j'anticipe déjà votre réponse... Cependant, ce n'est pas tout à fait la faute des Allemands qui, eux, font payer des péages ferroviaires réduits la nuit, contrairement à la France. Comme pour le fret ferroviaire où l'effort a été fait, il faut faire preuve de détermination politique. Ce serait le signal fort, et peu coûteux, que la France veut se connecter au réseau européen des trains de nuit. Nous ne pouvons pas assumer le contraire.

Concernant le projet de loi de finances, la conférence Ambition France Transports a permis que notre scénario de transition de planification écologique des transports ne soit pas lourdement compromis. Il y a même des jalons intéressants : le matériel roulant des trains de nuit pour 2030, l'engagement pour le fret ferroviaire, les bases pour la régénération du réseau - nous en sommes à 3,2 milliards d'euros et la trajectoire devrait nous conduire à 4,5 milliards à partir de 2028. Tout cela est à notre portée, mais il faudra encore beaucoup de ténacité, d'exigence, une programmation robuste, et que le fléchage des sommes vers les modes vertueux s'opère. Il faudra également que les autres opérateurs concourent de façon à rééquilibrer les conditions de concurrence avec la SNCF.

Pour autant, ces signaux ne constituent pas une dynamique suffisamment cohérente.

Hervé Gillé a parlé de l'électromobilité et de l'acquisition de véhicules propres ; j'y ajoute les mobilités solidaires, en pensant à la loi, qui m'est chère, visant à favoriser le réemploi des véhicules au service des mobilités durables et solidaires sur les territoires. Nous restons finalement dans un recul funeste que ne compensent ni le succès contenu du leasing social ni les promesses vagues de CEE.

Hervé Gillé a également évoqué le plan vélo. Si les bonnes propositions du rapport Barbe se concrétisent, c'est très bien, mais la dynamique brisée en 2024 ne retrouvera pas pour autant son élan et ce sont le rural et le périurbain qui en souffrent d'abord.

Sur les mobilités du quotidien en général, j'espère que la loi-cadre sur les transports et la loi de programmation, qui sont annoncées, permettront, si le temps politique le permet, de définir des trajectoires fiables de financement et de mise en oeuvre des Serm. D'ailleurs, sur la question des Serm, qui aurait dû être, comme le souhaitait le Sénat, un plat de résistance pour la conférence Ambition France Transports, nous n'avons encore qu'un hors-d'oeuvre bien léger...

M. Éric Gold. - Comme mon collègue de l'Allier, je vais enfoncer le clou en parlant de la fiabilité des lignes Intercités, notamment le Paris-Clermont qui fait régulièrement la une des médias pour des retards importants et à répétition. Nous en connaissons les causes : manque d'entretien, matériel obsolète ou phénomènes extérieurs.

Nous connaissons aussi les annonces faites depuis plusieurs années pour que cette ligne soit remise à niveau et dotée d'un nouveau matériel. Pouvez-vous nous confirmer les montants consacrés à cette ligne et le calendrier qui lui permettra de jouer - enfin ! - pleinement son rôle d'aménagement du territoire ?

M. Jean-Yves Roux. - En raison du manque de temps, je poserai mes questions au ministre par courriel.

Mme Nadège Havet. - Monsieur le ministre, sauriez-vous m'indiquer à quel moment sera inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale la proposition de loi élargissant la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d'avoir recours au modèle de la société portuaire pour l'exploitation de leurs ports que le Sénat a adoptée en juin dernier ?

Franck Dhersin a évoqué le dumping social sur les liaisons transmanche. Des contrôles ont été effectués. Leurs résultats seront-ils bientôt publiés ?

La question des trains de nuit européens a également été abordée ; j'aimerais avoir votre éclairage sur ce sujet.

Ma dernière question, plus locale, concerne la liaison Brest-Ouessant ; je vous adresserai un courriel à ce propos.

M. Cédric Chevalier. - Je ne veux pas être long, alors, monsieur le ministre, je vous poserai mes questions lorsque vous viendrez dans la Marne pour visiter la plateforme aéroportuaire de Vatry et voir le rôle de ce type d'infrastructure dans l'aménagement du territoire de notre pays et le développement durable.

Je profiterai de votre déplacement pour vous faire visiter la station de recharge électrique pour poids lourds, puisque cela entre pleinement dans la stratégie de transition énergétique du transport routier.

Vous êtes invité ; nous vous attendons !

M. Didier Mandelli. - Monsieur le ministre, vous avez évoqué la question de la décarbonation du transport maritime ; je n'y reviens pas.

Je voudrais insister sur la méthode utilisée pour mener à bien la conférence Ambition France Transports. Le 22 octobre dernier, nous avons reçu Dominique Bussereau, nous avons évidemment parlé du fond, mais je crois que la méthode pourrait inspirer d'autres ministres. C'est sans doute votre fibre sénatoriale qui a permis qu'en trois mois, soixante experts, élus et acteurs des transports et des mobilités travaillent sur un projet qui débouche aujourd'hui, dans des temps relativement courts, sur une loi-cadre.

À une époque où notre pays manque de visibilité, je tiens à mettre en avant cette méthode. Si elle était appliquée à l'ensemble des sujets qui concernent nos concitoyens, nous n'en serions sans doute pas là où nous en sommes... Nous avons besoin de clarté et de vision à moyen et long terme. J'ai, avec plusieurs collègues de cette commission, participé à cette conférence et j'insiste vraiment sur la qualité de cette méthode.

M. Philippe Tabarot, ministre. - Cher Bruno Rojouan, nous avons souvent parlé ensemble de la question de la desserte de Montluçon. Vous connaissez le sujet mieux que personne. Rétablir une liaison directe est une question complexe, notamment parce que cela concerne des TER de plusieurs régions - Auvergne-Rhône-Alpes et Centre-Val de Loire. Hier, en prenant le TER pour aller à Orléans avec le président de la SNCF, Jean Castex, nous nous sommes dit qu'il fallait remettre à plat les dessertes. Je sais qu'il a pris un certain nombre d'engagements auprès de vous. Je veillerai à ce que ces engagements puissent être tenus. J'imagine qu'il vous a dit qu'il voulait faire « plus de trains » et de « meilleurs trains ». Je ferai tout pour l'accompagner sur ce terrain et je sais que nous travaillerons intelligemment ensemble.

Monsieur le sénateur Hochart, le dossier que vous évoquez a occupé le Parlement européen et la Commission européenne la nuit dernière et je vois que vous êtes bien informé de la position italienne... Les choses bougent un petit peu au niveau européen. Je me suis moi-même entretenu avec le commissaire européen chargé du dossier.

Mais je ne voudrais pas que nous donnions l'impression d'être dans une impasse : nous avons écoulé 41 500 véhicules électriques dans les trente premiers jours de la relance du dispositif de leasing social. Les Français ne sont donc pas contre l'électrique ; il y a avant tout une question de coût. Au contraire, l'électrique a de l'avenir dans ce pays.

Bien sûr, il faut accompagner la filière, qui s'est organisée avec 2035 pour objectif. Hervé Gillé a utilisé l'expression stop and go et nous ne pouvons pas là non plus, sans poser des difficultés à cette filière déjà en situation compliquée, laisser planer le doute que nous pourrions revenir sur nos objectifs. En tout cas, si nous le faisons, il faut que ce soit en bonne entente avec nos partenaires européens.

Il ne faut pas tomber dans le piège de prétendre que l'électrique n'a aucun avenir.

M. Joshua Hochart. - Ce n'est pas ce que j'ai dit !

M. Philippe Tabarot, ministre. - Si le véhicule électrique est proposé à un coût raisonnable et que les bornes de recharge sont disponibles - notre pays est d'ailleurs en train de rattraper son retard sur ce sujet -, nous pourrons y arriver.

Cher Franck Dhersin, je partage totalement votre position sur la question des rames amiantées. Trois régions sont concernées : les Hauts-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur. C'est un sujet que je connais, tout comme l'incapacité de mettre en concurrence les services ferroviaires concernés. J'ai engagé des échanges avec la direction générale compétente de la Commission européenne, qui a réaffirmé l'impossibilité d'accorder de nouvelles dérogations. Toutefois, elle s'est déclarée ouverte à des solutions alternatives, à condition que des analyses techniques et des évaluations exhaustives de risques lui soient transmises. Nous allons continuer de travailler sur cette question avec elle et les régions concernées.

Concernant les Serm, l'État veut avancer, en prenant en charge 100 % de leur préfiguration. Certes, ces 34 millions d'euros ne représentent pas grand-chose à côté des 20 milliards que coûteront probablement les Serm, mais c'est un point important. Les contrats de plan État-régions (CPER) permettront également de mobiliser environ 1 milliard d'euros de la part de l'État.

À partir de 2032, nous aurons des financements provenant des concessions autoroutières. D'ici là, une période de transition est à assurer entre 2028 et 2032, et nous y travaillons très intensément. Nous nous sommes engagés, auprès de SNCF Réseau, à porter le niveau des travaux à 4,5 milliards d'euros. Les volets territoriaux des contrats de plan, peut-être insuffisamment mobilisés, pourraient aussi accueillir des actions liées aux Serm. Les grands projets structurants ne font pas partie de ces financements et viendront en supplément. Il est donc possible, avec des financements privés et publics et l'aide de la Caisse des dépôts, de traverser cette période compliquée. La situation sera réglée après 2032 si nous votons la loi-cadre sur les transports, car nous pourrons pérenniser les financements et flécher les recettes des autoroutes vers nos infrastructures, particulièrement vers les projets de SERM.

Concernant le secteur aérien, je fais le même constat que vous et, comme le disait un ancien président américain, « no more taxes, read my lips ». Ce serait trop dommageable pour ce secteur, qui a subi deux augmentations fiscales en deux ans.

J'en viens à la question du dumping social. La loi Le Gac a beaucoup apporté, mais à mon arrivée, il n'y en avait aucune application : zéro contrôle ! Depuis que je suis en fonction, cinq contrôles ont eu lieu. Je m'y étais engagé et nous avons tenu cet engagement : des contrôles ont été menés, tant pour les compagnies étrangères que pour les compagnies françaises. Ces dernières étaient les premières à demander que l'on contrôle leurs collègues étrangers, mais quand on les contrôle, cela les déstabilise un peu... Pour autant, les contrôles se sont passés dans les meilleures conditions possible et cela va beaucoup nous aider.

Avec mon homologue anglaise, nous avons signé en septembre dernier une déclaration conjointe et nous allons travailler ensemble sur la durée du travail, les congés payés, le salaire minimal, ainsi que sur la sécurité et la santé au travail.

Monsieur le sénateur Basquin, je vous remercie pour votre question. Ma demande initiale était bien une loi de programmation. Finalement, j'ai obtenu que le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) fasse une revue, avant la fin de l'année, des grands projets et nous rende des préconisations sur les infrastructures qui sont indispensables à notre pays et sur celles qui le sont un peu moins. Ensuite, nous ferons une loi-cadre dédiée aux transports qui permettra, je l'espère - et je compte sur votre soutien -, d'inscrire la perspective de voter une loi de programmation pluriannuelle sur les transports tous les cinq ans.

Monsieur le sénateur Devinaz, je vous attends au ministère, avec Guillaume Chevrollier, pour que vous puissiez me présenter votre rapport sur la pollution sonore causée par les transports.

Je ne vais pas revenir dans le détail sur le Lyon-Turin. Je rappelle que nous modernisons d'abord la ligne existante ; d'ailleurs, les travaux avancent très bien, ce qui est une bonne nouvelle. Ensuite, nous réaliserons les accès avec la plus grande capacité possible. Les études sont engagées et nous avons pu réunir tous les partenaires pour cela. Le financement des voies d'accès est un autre sujet.

Concernant le contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise, je sais que c'est un sujet que Paul Vidal et vous suivez avec beaucoup d'attention. Je connais les différents scénarios et j'ai bien compris celui que vous souhaitiez. Le comité de pilotage se réunira dans les jours qui viennent et je demanderai à la préfète de région d'inviter les financeurs ainsi que les parlementaires, ce qui vous permettra de donner votre avis. Je sais que vous connaissez parfaitement le territoire et les attentes des élus.

Concernant les carburants d'aviation durables, c'est une question centrale qui recouvre des enjeux industriels considérables. L'an dernier, nous avons soutenu avec vous différents amendements sur ce sujet. Cela a du sens et je souhaite que nous puissions continuer à travailler avec tous les services concernés pour nous donner les moyens de développer une filière française.

Pour ce qui est des trains de nuit, nous les développons dans notre pays comme peu d'autres le font aujourd'hui, à l'exception, bien sûr, de l'Autriche. Nous relançons des liaisons qui étaient abandonnées. Je me souviens qu'un de mes prédécesseurs, Alain Vidalies, m'avait dit : « Les trains de nuit, c'est fini, c'est trop coûteux. » Puis un Premier ministre, Jean Castex, a décidé de les relancer. Il existe aujourd'hui cinq liaisons ; le taux de fréquentation, environ 70 %, est bon et nous les moderniserons. J'ai pris récemment le Paris-Briançon et il est clair que nous avons besoin de nouveaux matériels. Le PLF pour 2026 prévoit 1 milliard d'euros pour ces nouveaux matériels, il est important d'adopter cette mesure afin qu'ils arrivent avant 2030 sur les lignes et que nous puissions maintenir la fréquence.

En ce qui concerne le Paris-Vienne-Berlin, je comprends certains d'entre vous, en particulier les élus alsaciens, qui sont particulièrement concernés. J'ai voulu privilégier les destinations françaises. Le train de nuit est un moyen de transport pratique pour certaines personnes, et pas uniquement pour des raisons touristiques, car il permet d'arriver le matin à destination. Cependant, le fait que le contribuable français finance à hauteur de 85 euros les jeunes gens qui vont passer le week-end à Berlin ne me semble pas constituer le meilleur usage possible de l'argent public. C'est cela la clientèle principale de ce train de nuit ; ceux qui vont travailler à Berlin prennent le train de jour, qui fonctionne très bien. J'ai voulu partager la facture, mais mon collègue allemand m'a indiqué que l'Allemagne ne financerait pas comme nous le faisions. En outre, du fait de gros travaux d'infrastructure en Allemagne, la situation est assez dégradée et nous n'avons pas pu augmenter la fréquence, qui n'est donc que de trois voyages par semaine. Si, demain, un autre opérateur que la SNCF est prêt à exercer son activité sur cette ligne sans demander au contribuable français de la financer, il est le bienvenu ! Je serais ravi que ce train de nuit fonctionne de nouveau, mais ce n'est pas à la France de le financer sans que l'Allemagne prenne sa part.

S'agissant du plan vélo, je souhaite mettre en place, comme je l'ai dit, les préconisations du rapport Barbe. Plus largement, nous ne savons pas à ce stade si les 50 millions d'euros dégagés à partir du fonds vert ont été utilisés ou non. Je ne veux évidemment pas réduire à néant les investissements qui ont été réalisés ces dernières années, mais cet effort ne pourra pas être maintenu à son niveau précédent.

Quant aux Serm, nous prenons totalement en charge la préfiguration. Ensuite, à travers les différents outils dont nous disposons déjà, mais aussi les financements pérennes à partir de 2032, et à partir de la revue des projets qui sera réalisée par le Conseil d'orientation des infrastructures, nous avancerons avec, le cas échéant, une fiscalité dédiée. Une montée en puissance du versement mobilité régionale et rurale pourrait bien sûr aider.

Éric Gold a évoqué le Paris-Clermont. J'ai dit, dans mon propos liminaire, que cette ligne, comme la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, faisait partie de nos plus gros chantiers. Avec Jean Castex, dans le TER qui nous emmenait à Orléans hier, nous nous sommes dit que nous tiendrions ensemble les comités de ligne, que ce soit à Clermont-Ferrand ou à Limoges, pour avancer sur cette rénovation. Le dernier calendrier que j'ai donné est tenu et je n'ai pas de souci à ce niveau-là. J'ai également rendu visite à l'équipe du constructeur CAF, qui m'a confirmé l'arrivée des rames pour 2027, ce qui, outre les travaux que nous réalisons, constituera un grand avantage. Ce qui me réjouit d'une certaine façon, ce sont les plaintes concernant les travaux ! Cela signifie qu'ils sont en cours... Les travaux avancent, et c'est tant mieux.

S'agissant de la proposition de loi relative aux sociétés portuaires, nous n'avons pas de visibilité sur sa date d'inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale en raison des contraintes d'agenda, mais je ne manquerai pas, madame la sénatrice Havet, de vous tenir informée. J'en reparlerai au ministre chargé des relations avec le Parlement. En tout cas, je souhaite que cette proposition de loi avance. Elle a du sens et elle va beaucoup nous aider.

Plus largement, s'agissant de la réorganisation portuaire, nous ne pourrons pas omettre ce sujet dans le cadre de nos débats sur la prochaine loi de décentralisation. Nous ne pouvons pas continuer à avoir des ports à deux vitesses, entre les grands ports nationaux qui bénéficient d'investissements et d'autres qui sont gérés par des régions ou des métropoles et dont les investissements ne sont pas toujours à la hauteur des besoins. Il faut revoir à la fois la gouvernance de ces sociétés portuaires et la répartition des compétences. Nous devons absolument redonner tout leur éclat à nos ports. Notre pays a une grande histoire maritime et nous devons redevenir une grande puissance en la matière. Pour cela, nous devons moderniser nos ports.

M. Jean-François Longeot, président. - Merci pour toutes ces explications et pour votre présence, monsieur le ministre. Je sais que vous devez nous quitter en raison d'une réunion au sommet qui n'a été fixée qu'hier soir et que, de ce fait, plusieurs collègues n'ont pas pu prendre la parole. Je m'engage donc à tout mettre en oeuvre pour organiser une nouvelle audition. Merci à tous !

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Examen des amendements de séance sur la première partie
(Mercredi 19 novembre 2025)

Après l'article 13

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports routiers. - Jean-Marc Delia et moi-même portons plusieurs amendements en commun. L'amendement DEVDUR.13 vise à abaisser à 5,5 % le taux de TVA sur les services de transports collectifs de voyageurs, qu'ils soient ferroviaires, guidés ou routiers, à l'exception toutefois des services librement organisés.

Il s'agit de dégager de nouvelles marges de manoeuvre financières pour soutenir les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) qui font face à de lourds besoins en investissements afin d'assurer un choc d'offre de transports collectifs et la décarbonation de leurs flottes.

L'amendement DEVDUR.13 est adopté.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. - Je remercie Hervé Gillé pour la qualité de notre travail en commun. L'amendement DEVDUR.14 vise à prolonger d'un an le dispositif permettant aux employeurs de bénéficier d'exonérations sociales lorsqu'ils prennent en charge jusqu'à 75 % du coût des abonnements de transport public de leurs salariés.

Ce dispositif constitue un levier d'incitation au report modal vers les transports collectifs, et il convient donc de le prolonger jusqu'en 2026.

L'amendement DEVDUR.14 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.22 vise à réformer le régime d'amortissement des véhicules de tourisme professionnels, afin de le rendre plus vertueux d'un point de vue tant budgétaire qu'environnemental. Il prévoit donc une réduction progressive des valeurs maximales d'amortissement pour les véhicules, hormis les véhicules « zéro émission » atteignant un score environnemental minimal, tandis que l'amortissement serait réduit à zéro en 2030 pour les véhicules les plus polluants.

En outre, les flottes des sociétés permettent d'alimenter le marché de l'occasion, qui a besoin de véhicules électriques.

L'amendement DEVDUR.22 est adopté.

Après l'article 14

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.18 vise à doubler le plafond de l'exonération des plus-values réalisées lors de la cession de bateaux de navigation intérieure affectés au transport de marchandises, aujourd'hui fixé à 100 000 euros par cession.

Cette restriction constitue une exception par rapport au régime d'exonération applicable chez nos voisins belges, allemands et néerlandais. Il convient donc de rehausser ce plafond, afin d'assurer des conditions de concurrence plus équitables pour nos entreprises fluviales, dans la perspective de la mise en service du canal Seine-Nord Europe.

L'amendement DEVDUR.18 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.23 prévoit d'instaurer une contribution financière pesant sur les chargeurs, et non sur les transporteurs, qui serait assise sur les émissions de CO2 générées par les opérations de transport de marchandises auxquelles ils ont recours.

Il s'agit ainsi de responsabiliser les donneurs d'ordre, de renforcer la demande pour les motorisations peu carbonées, et de favoriser le fret ferroviaire et fluvial. Le produit de cette contribution serait alloué à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), afin de financer ses programmes de soutien à la décarbonation du transport routier de marchandises.

L'amendement DEVDUR.23 est adopté.

Après l'article 15

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.24 vise à assouplir les conditions auxquelles sont soumises les AOM pour lever le versement mobilité (VM), afin d'en faciliter le recours dans les territoires ruraux.

Pour rappel, la possibilité de lever le VM est aujourd'hui conditionnée à l'organisation de services réguliers de transport public de personnes. Cet amendement tend à permettre aux AOM de prélever le VM pour l'organisation d'un panel de services de transport plus large que les transports collectifs réguliers, prenant en compte le transport à la demande et les mobilités partagées et actives. Cette mesure est très attendue par le monde rural.

L'amendement DEVDUR.24 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.25 vise à permettre aux AOM de créer une taxe additionnelle à la taxe de séjour afin de financer des services de mobilité. Il s'inscrit dans la continuité de la conférence de financement « Ambition France Transports », qui a préconisé une diversification des ressources des AOM et la mise à contribution de catégories plus larges de contribuables, au-delà des usagers et des entreprises. En clair, le tourisme contribuera au financement des transports collectifs et de proximité.

L'amendement DEVDUR.25 est adopté.

Article 17

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.26 prévoit de réallouer à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) le douzième du produit de la taxe sur l'exploitation d'infrastructures de transport de longue distance (TEILD) - jusqu'à présent alloué aux communes - afin de financer le programme national Ponts (PNP) : si ce dernier a rencontré un certain succès, son enveloppe financière est désormais presque épuisée.

Il s'agit donc de pérenniser l'enveloppe du PNP à hauteur de 50 millions d'euros, afin de continuer à apporter un appui aux communes dans la réhabilitation de leurs ouvrages d'art. La globalisation des moyens permettrait de rehausser de 50 millions d'euros les moyens accordés à l'Afit France pour agir dans ce domaine.

L'amendement DEVDUR.26 est adopté.

Après l'article 24

M. Pascal Martin, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à la prévention des risques. - Cet amendement DEVDUR.2 a fait l'objet d'un travail commun avec Didier Mandelli, président du groupe d'études Mer et littoral. Il vise à traduire les différentes propositions de recettes formulées par les membres du Comité national du trait de côte (CNTC) et les services de l'État pour financer les actions liées à l'érosion côtière et au recul du trait de côte, deux phénomènes qui soulèvent des enjeux particulièrement sensibles, qu'ils soient fonciers ou territoriaux.

Les financements nécessaires étant considérables, l'amendement prévoit quatre leviers pour abonder un fonds dédié à l'érosion côtière : l'instauration d'une taxe additionnelle aux droits d'enregistrement et d'une taxe de publicité foncière ; la mise en place d'une surtaxe à la taxe de séjour ; une augmentation du plafond de la taxe Gemapi (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) de 40 euros à 60 euros ; enfin, l'affectation du produit de la taxe sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent en mer, pour la part située dans la zone économique exclusive (ZEE).

Je formule le souhait que ces différentes recettes fiscales financent des actions dédiées au recul du trait de côte, notamment en ce qui concerne la fiscalité locale. Lors de l'examen de la seconde partie du PLF pour 2026, je veillerai, en collaboration avec nos collègues de la commission des finances, à la traduction de cet objectif avec la création d'un fonds dédié.

M. Didier Mandelli. - Selon les données du Cerema, l'érosion du trait de côte coûtera, d'ici à 2100, 86 milliards d'euros en aménagements, travaux et relocalisations. En Vendée, par exemple, environ 8,5 milliards d'euros seraient nécessaires pour prendre en charge 43 000 logements et 149 campings, sans oublier les stations d'épuration, les salles de sport, les écoles, etc. Bien évidemment, aucune collectivité locale ne peut à elle seule assumer ces coûts exorbitants, qui résultent du dérèglement climatique.

Avec cet amendement, notre objectif consiste à transcrire les travaux du CNTC et des sujets validés par plusieurs ministres successifs des précédents gouvernements, dont Christophe Béchu et Agnès Pannier-Runacher. En lieu et place du message assez contradictoire envoyé par François Bayrou, alors Premier ministre, selon lequel « le littoral doit financer le littoral » - alors que les usagers du littoral ne se limitent pas aux seuls habitants -, il nous semble préférable de préconiser une solidarité nationale.

La future manne que représentera la taxation sur l'éolien en mer - qui devrait atteindre son plein rendement à compter de 2030 - devrait être comprise entre 1,2 milliard et 1,6 milliard d'euros à horizon 2050, ces recettes non affectées à ce stade devant revenir directement dans le budget de l'État.

Nous proposons donc que la moitié de la taxation de l'éolien en mer dans les ZEE revienne à un fonds dédié à l'érosion côtière : il s'agit non pas de créer un nouvel impôt, mais de faire jouer la solidarité nationale pour prendre en compte les conséquences dramatiques de ces changements, qui ont déjà produit des effets dans la Manche et en Seine-Maritime. Les tempêtes et autres phénomènes météorologiques ont eu pour conséquence, par exemple, un recul des dunes de cinq à six mètres à Saint-Gilles-Croix-de-Vie.

Je remercie Pascal Martin d'avoir porté ce sujet, essentiel pour l'ensemble des départements littoraux.

L'amendement DEVDUR.2 est adopté.

Article 36

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - Une fraction de 271 millions d'euros du produit de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) est aujourd'hui affectée à l'Afit France. L'amendement DEVDUR.15 prévoit de l'augmenter de 250 millions d'euros afin d'accentuer les efforts en faveur du report modal vers les modes de transports massifiés.

L'amendement DEVDUR.15 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.16 vise à rehausser de 250 millions d'euros l'affectation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) à l'Afit France en 2026, afin qu'elle puisse renforcer les efforts en faveur de la régénération, de la modernisation et du développement des infrastructures de transport.

L'amendement DEVDUR.16 est adopté.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.19 vise à supprimer le plafonnement de la redevance hydraulique versée à Voies navigables de France (VNF). Il traduit ainsi une recommandation d'un récent rapport de la Cour des comptes et s'inscrit dans la conférence « Ambition France Transports », qui a préconisé le renforcement du modèle économique de VNF au travers de ses ressources propres.

Cet amendement n'aura aucun effet sur le taux de la redevance et conduira simplement à affecter la totalité de son produit à VNF chaque année, au lieu de l'écrêtement actuellement pratiqué.

L'amendement DEVDUR.19 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.27 vise à tirer les conséquences de l'adoption de l'amendement DEVDUR.26, qui a pour objet de réorienter la fraction d'un douzième du produit de la TEILD. En pratique, il s'agit de rehausser de 50 millions d'euros le plafond d'affectation du produit de la TEILD à l'Afit France.

L'amendement DEVDUR.27 est adopté.

Après l'article 36

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.17 prévoit d'affecter 250 millions d'euros à l'Afit France au titre des recettes du marché carbone européen. Ces recettes n'ont pas une vocation à suivre une logique de rendement budgétaire et doivent être davantage mises à contribution dans le financement de la décarbonation des mobilités.

L'amendement DEVDUR.17 est adopté.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.20 vise à allouer une fraction de 90 millions d'euros issus du produit du marché carbone européen à la décarbonation du transport maritime, afin de traduire l'engagement pris par François Bayrou, alors Premier ministre, lors du comité interministériel de la mer (CIMer) de mai 2025.

L'amendement DEVDUR.20 est adopté.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.21 tend à rendre la rénovation du patrimoine remarquable des gares ferroviaires par SNCF Gares & Connexions éligible au mécénat. Ce patrimoine étant d'intérêt général et participant à l'héritage patrimonial de nos villes, il nous paraît opportun de prévoir cette possibilité.

L'amendement DEVDUR.21 est adopté.

Crédits « Transports ferroviaires, fluviaux et maritimes »
(Mercredi 26 novembre 2025)

M. Jean-François Longeot, président. - Nous en venons au rapport pour avis de notre collègue Jean-Marc Delia sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes inscrits au projet de loi de finances (PLF) pour 2026.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. - Je suis heureux de vous présenter les principales orientations de mon rapport pour avis au PLF pour 2026 sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes.

Avant toute chose, je souhaite aborder la question centrale du financement des infrastructures de transports, au lendemain de la conférence Ambition France Transports.

Comme cela a été mis en avant par Dominique Bussereau, président de la conférence, que nous avons entendu le 22 octobre dernier, et par nos référents Olivier Jacquin et Didier Mandelli, que je salue, les besoins d'investissements en faveur de la régénération de nos infrastructures de transports sont immenses. Ils sont évalués à 2 milliards d'euros supplémentaires chaque année pour régénérer le réseau ferroviaire et le réseau fluvial et apurer la « dette grise » qui s'est constituée après des décennies de sous-investissement. Les efforts financiers en faveur des réseaux de transport sont d'ailleurs destinés à augmenter afin d'accélérer le report modal et la décarbonation des mobilités, déployer les services express régionaux métropolitains (Serm) et renforcer la résilience des infrastructures face au défi du réchauffement climatique.

Or les transports sont soumis à une fiscalité sectorielle élevée, qui ne leur est que très faiblement affectée : taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), taxe de solidarité sur les billets d'aviation (TSBA), marché carbone européen, taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance (TEITLD)... Ils représentent aujourd'hui un tiers des émissions de gaz à effet de serre en France. Leur décarbonation est donc une priorité : elle suppose des investissements massifs qu'il serait légitime et logique de financer par l'affectation de cette fiscalité sectorielle.

Vous ne l'ignorez pas, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) a subi une forte diminution de ses crédits en 2025, exercice considéré comme une « année blanche » pour les transports. Pour 2026, les montants de recettes affectées à l'Agence et ses crédits budgétaires sont évalués à 3,75 milliards d'euros, soit une légère augmentation de 150 millions d'euros. Ce montant reste néanmoins inférieur de 600 millions d'euros à celui de 2024.

C'est la raison pour laquelle je vous ai proposé la semaine passée avec Hervé Gillé trois amendements afin de renforcer l'affectation de recettes à l'Afit France. Il faut le répéter : la fiscalité assise sur les transports doit être mise au service du report modal.

Je vous proposerai également tout à l'heure, avec Hervé Gillé, de renforcer de 1 million d'euros les moyens de l'Autorité de régulation des transports (ART).

J'en arrive à la question du transport ferroviaire. Sur l'infrastructure, il faut passer à la vitesse supérieure : le diagnostic partagé sur son état fortement dégradé appelle un traitement de choc. Nous le savons, 1,5 milliard d'euros supplémentaires par an sont nécessaires pour la régénération du réseau ferroviaire. Si de nombreux financements peuvent se faire jour à moyen terme, du fait de l'arrivée à échéance des concessions autoroutières, le réseau a urgemment besoin de ressources financières afin d'assurer sa régénération d'ici à 2032.

Les moyens consacrés à la régénération du réseau et à sa modernisation sont stables, à hauteur d'environ 3 milliards d'euros. Ils proviennent de financements internes de SNCF Réseau et du fonds de concours versé par SNCF Voyageurs à SNCF Réseau. Les usagers, contrairement au réseau routier non concédé, et les autorités organisatrices de la mobilité (AOM), financent donc le coût de l'infrastructure via les péages ferroviaires et la marge de SNCF Voyageurs. Contrairement aux autres pays européens dans lesquels les opérateurs s'acquittent quasiment uniquement des coûts marginaux de la circulation des trains, la France a fait le choix de faire supporter le coût complet de l'entretien du réseau par les usagers.

Le niveau de péages ferroviaires insoutenable en résultant freine le développement du transport ferroviaire et l'ouverture à la concurrence du secteur. S'est également installée une concurrence faussée entre la route et le rail, aussi bien pour le transport de passagers que de marchandises.

Je vous proposerai donc un amendement afin que le budget général de l'État finance à hauteur de 100 millions d'euros la régénération du réseau en 2026.

Il nous faut en effet répondre à une demande de train qui ne faiblit pas. Le nombre de voyageurs croît dans un contexte d'offre ferroviaire contrainte, due à une pénurie de matériel roulant. Actuellement, SNCF Voyageurs compte en effet environ une centaine de rames de TGV de moins qu'en 2015.

À cette pénurie pourrait également s'ajouter dans les prochaines années une saturation des gares et des centres de maintenance. Adopter une stratégie nationale pour surmonter ces freins au développement de l'offre ferroviaire est donc un impératif.

Dans le même temps, les péages ferroviaires versés par les AOM pour le transport conventionné et les opérateurs ferroviaires pour le service librement organisé (SLO) continuent leur hausse inexorable. Dans ce contexte, afin de redonner des marges de manoeuvre financières aux AOM qui ne pratiquent pas la gratuité des transports publics, je vous proposerai tout à l'heure un amendement pour abaisser de 10 % à 5,5 % le taux de TVA applicable aux transports collectifs du quotidien.

Il me semble également opportun de prolonger d'un an l'incitation aux employeurs à rembourser jusqu'à 75 % de l'abonnement de transport public de leurs salariés.

Je souhaite également aborder les questions d'ouverture à la concurrence et de rentabilité des dessertes d'aménagement du territoire. Selon l'ART, « la question de la rentabilité des dessertes d'aménagement du territoire ne se pose en réalité qu'en raison du niveau élevé des péages ». C'est aussi la conclusion d'un rapport de l'inspection générale des finances (IGF) et de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD), qui observe que l'intégralité des dessertes de train effectuées par SNCF Voyageurs est rentable avant intégration de la majoration tarifaire, ou redevance de marché, perçue par SNCF Réseau. Ce constat a conduit SNCF Réseau à diminuer ses majorations tarifaires sur certaines dessertes d'aménagement du territoire à partir de 2027. Je salue ce premier pas encourageant. Cependant, cette évolution ne devrait pas inverser la tendance pour certaines liaisons déficitaires.

Cette situation génère deux effets pervers dans un contexte d'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs. D'une part, elle conduit l'opérateur historique à supporter le coût de dessertes non rentables et dégrade sa situation financière face à ses concurrents ; d'autre part, elle empêche certains nouveaux entrants de lancer des circulations sur certains créneaux du marché ferroviaire.

Ce niveau non soutenable des péages pourrait réduire les bénéfices à attendre de l'ouverture à la concurrence sur le nombre de gares desservies - contrairement à ce que l'on a pu observer en Italie. J'appelle donc à renforcer l'effort de diminution des péages ferroviaires sur ces liaisons.

J'en viens maintenant au fret ferroviaire. Celui-ci a progressé de 2,9 % en tonnes de marchandises transportées par kilomètre entre le 1er semestre 2024 et le 1er semestre 2025. Le secteur reste néanmoins fragile, et c'est pourquoi, en sus des investissements sur les infrastructures portés par le plan « Ulysse Fret », des aides à l'exploitation des services de fret sont prévues. En particulier, l'exploitation des wagons isolés bénéficie d'un soutien annuel passé de 70 millions d'euros à 100 millions d'euros en 2025. Cependant, l'ensemble des aides à l'exploitation des services de fret n'a augmenté que de 14 millions d'euros en 2025 et 2026 par rapport à 2024 : les autres aides ont été réduites de 16 millions d'euros, notamment celles destinées à la réduction des péages ferroviaires, à l'exploitation des services de transport combiné et au démarrage de nouveaux services.

Je vous proposerai donc tout à l'heure un amendement afin d'affecter 16 millions d'euros supplémentaires au fret ferroviaire.

J'en viens à présent au transport fluvial.

Alors que ce secteur présente de nombreux atouts pour la décarbonation des transports, la part modale du transport fluvial demeure inférieure à 3 % au niveau national. De fait, cette situation s'explique en partie par l'état préoccupant des infrastructures fluviales, après des décennies de sous-investissement. Si le contrat d'objectifs et de performance (COP) signé entre Voies navigables de France (VNF) et l'État a permis un renforcement des moyens dédiés à l'entretien du réseau, la trajectoire d'investissements prévue d'ici à 2032 demeure en deçà des besoins. Aussi, la conférence Ambition France Transports a estimé à 200 millions d'euros par an le besoin supplémentaire pour résorber la « dette grise » accumulée par le réseau fluvial, que la Cour des comptes estime à 1,1 milliard d'euros. Les trois amendements que nous vous avons soumis la semaine dernière pour consolider les ressources de l'Afit France de 750 millions d'euros permettront notamment de rehausser les moyens dédiés à la régénération du réseau fluvial et, ainsi, de mieux tirer parti du potentiel de la voie d'eau dans notre pays.

Renforcer notre ambition fluviale suppose également de garantir à VNF un modèle financier et social robuste. Au plan financier, l'amendement que je vous ai soumis la semaine dernière pour déplafonner la redevance hydraulique va dans ce sens : il permettra d'allouer chaque année l'intégralité du produit de cette redevance à VNF, au lieu qu'il soit écrêté au profit du budget de l'État comme c'est le cas aujourd'hui.

Au plan social, j'émets de vives inquiétudes sur la trajectoire d'emplois de l'établissement : après une baisse de 15 % en dix ans, le plafond d'emplois de VNF doit encore diminuer de 40 équivalents temps plein travaillé (ETPT) l'année prochaine, alors que le COP avait prévu sa stabilité jusqu'en 2026 inclus. Cette situation est de nature à compromettre non seulement la conduite opérationnelle du chantier de modernisation du réseau fluvial qui est à l'oeuvre, mais aussi les négociations en cours avec les organisations syndicales sur la refonte des filières métiers de VNF et la réduction du nombre de ses implantations territoriales. Dans ce contexte, je vous proposerai un amendement visant à garantir la stabilité du plafond d'emplois de VNF l'année prochaine, afin que les baisses d'effectifs ne reprennent qu'en 2027, comme le Gouvernement s'y était engagé.

S'agissant à présent du transport maritime, le secteur est pris en étau entre l'impératif de la décarbonation et celui du maintien de sa compétitivité.

Comme vous le savez, la décarbonation du secteur va nécessiter de lourds investissements, qu'Armateurs de France évalue entre 14 et 18 milliards d'euros dans les dix prochaines années. Le Gouvernement avait annoncé en mai dernier lors du comité interministériel à la mer que 90 millions d'euros issus du produit du marché carbone européen seraient alloués chaque année à la décarbonation du transport maritime. Malheureusement, cette mesure est absente du PLF qui nous est soumis. Je vous ai donc proposé la semaine dernière un amendement pour concrétiser cet engagement dans la première partie du PLF pour 2026.

En tout état de cause, la transition écologique du secteur maritime constitue un défi financier et technique colossal pour nos armateurs qui exercent - il ne faut pas l'oublier - sur un marché mondialisé soumis à une intense concurrence internationale. Dès lors, il me semble important d'exprimer une conviction claire : s'il était légitime que les entreprises maritimes - en l'occurrence, la CMA CGM - contribuent à l'effort de redressement des comptes publics en s'acquittant de la contribution exceptionnelle mise en place en 2025, celle-ci ne doit pas donner lieu à une remise en cause de la taxe au tonnage. Depuis sa mise en place en 2003, ce dispositif est le principal soutien à la compétitivité du pavillon français : de fait, sa suppression mettrait nos armateurs en grande difficulté vis-à-vis du reste de la flotte mondiale qui relève, à 86 %, de ce régime fiscal. Je suggère donc, comme l'année précédente, que notre commission ait une position ferme sur ce sujet.

Dans le prolongement de cette question, une vigilance est nécessaire s'agissant des conséquences sur la compétitivité de l'emploi maritime français de la suppression partielle des exonérations de cotisations patronales instaurées cette année pour la marine marchande. Il a en effet été décidé de recentrer ces exonérations sur les navires de transport de passagers, les navires câbliers et ceux opérant dans les champs éoliens offshore lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025. Si ce recalibrage a été justifié par le contexte budgétaire contraint que nous connaissons, il importe de s'assurer qu'il n'induit pas d'effets d'éviction au détriment de la main-d'oeuvre française, en particulier s'agissant des jeunes officiers de la marine marchande pour lesquels le différentiel de coût salarial par rapport à nos voisins européens est particulièrement élevé.

Je terminerai en abordant un sujet d'alerte relatif au dragage des sédiments dans les grands ports maritimes (GPM). Le PLF pour 2026 acte l'engagement pris par le Gouvernement de financer à hauteur de 20 millions d'euros par an sur vingt ans le régime de pénibilité des dockers, à la suite des accords conclus en 2025 pour donner à ces personnels une année supplémentaire de départ anticipé à la retraite. Si l'on peut se réjouir de l'instauration de ces nouveaux droits, le PLF prévoit, en contrepartie, une diminution de 25 millions d'euros par rapport à 2025 de la subvention dédiée aux opérations de dragage des GPM. Il n'apparaît pas souhaitable de faire ainsi reposer sur les ports le financement de cette réforme, à plus forte raison si cela se fait au détriment des opérations de dragage, qui sont vitales pour leur activité. Cela est d'autant plus problématique que ce surcoût survient à un moment où les ports doivent réaliser des investissements significatifs pour leur transition écologique. Je vous proposerai donc un amendement sur ce point.

Pour conclure, je vous proposerai d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, sous réserve de l'adoption de nos amendements.

M. Jacques Fernique. - En termes de volume, le budget fluvial maritime résiste. La conférence Ambition France Transports a eu au moins cet effet bénéfique. Il n'en demeure pas moins que les progressions nécessaires pour concrétiser les trajectoires d'investissement, qui ont été bien identifiées lors de la conférence, ne sont pas engagées pour l'instant.

Pour le fret ferroviaire, la part modale reste en dessous des 10 %. Au vu des éléments à notre disposition, il est peu crédible que l'objectif, fixé à 18 % pour 2030, soit atteint. La part fluviale, elle, s'établit à 2 ou 3 %.

Il faut en effet un traitement de choc. Cela passe notamment par ces 1,5 million d'euros supplémentaires alloués à la régénération du réseau ferroviaire, afin d'éviter la situation que connaît le réseau allemand. À Strasbourg, nous prévoyons une demi-heure à une heure et demie de retard dès lors que nous envisageons d'utiliser un train allemand ICE.

Le sous-investissement dans le réseau entraîne aujourd'hui un effet brutal qui n'a pas été anticipé il y a quelques années. Ce milliard et demi est annoncé à partir de 2028 : il manque à ce PLF des éléments qui nous inscrivent clairement dans cette trajectoire. Une loi-cadre, puis une loi de programmation ont été promises ; l'essentiel reste donc à mettre en place.

Afin de marquer la nécessité de ce traitement de choc, nous aurons un vote choc, défavorable aux crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes.

Nous relevons toutefois le maintien des engagements pour le fret, et soutenons l'amendement DEVDUR.33, en faveur de l'exploitation des services de transport combiné. Nous savons qu'en doublant la part modale du fret ferroviaire en France, nous augmenterons d'autant celle du transport combiné. Cet amendement est donc nécessaire, bien que nous puissions discuter du gage prélevé sur les crédits du programme « Énergie, climat et après-mines ».

Nous avons abordé le sujet du niveau des péages ferroviaires, qui financent à ce jour la régénération des réseaux, et qui n'est pas soutenable. L'amendement DEVDUR.34, qui tend à demander à l'État de contribuer à hauteur de 100 millions d'euros, nous semble donc important.

Parmi les points positifs, nous relevons le lancement d'un marché public de plus de 1 milliard d'euros pour le matériel roulant sur les trains de nuit. Je ne rappellerai pas mes interrogations sur les liaisons de nuit Paris-Vienne-Berlin via Strasbourg.

Nous sommes en désaccord au sujet de la taxe au tonnage. Ce dispositif est certes nécessaire pour une bonne part de notre fret maritime. Il faut toutefois réguler les profits démesurés d'entreprises géantes ; nous estimons donc qu'un plafonnement de cette taxe serait nécessaire.

M. Hervé Gillé. - Monsieur le rapporteur, votre travail s'inscrit dans notre volonté d'affirmer notre vision en matière de politique ferroviaire, et nous nous retrouvons par ailleurs sur un certain nombre d'amendements.

Nous attendons également impatiemment le rapport de l'ART, qui devrait être assez éclairant, mais nous ne disposons à ce jour que de peu d'éléments sur le calendrier de sa production. L'avis du Conseil d'orientation des infrastructures (COI) sur les priorités soutenues dans le cadre des grands projets à l'échelle nationale est également en suspens. Ces éléments sont importants pour nous positionner sur le projet gouvernemental et sa déclinaison en loi-cadre.

En matière de ferroviaire - nous l'avons souvent déploré -, on a tendance à vouloir tout faire plutôt que de concentrer nos moyens sur des priorités, en particulier l'entretien et la rénovation du réseau. Enfin, nous manquons de reporting et d'évaluation des politiques publiques en ce domaine, ainsi que d'éléments plus précis sur les cadences de production des travaux afin d'évaluer ce qui fonctionne, ou quels sont les points de retard.

De manière générale, les éléments portés par le rapport et les amendements me paraissent pertinents. Devant nos collègues de la commission des finances, j'ai évoqué l'idée de passer à un taux de TVA de 5,5 % : elle n'a pas suscité un franc enthousiasme auprès du rapporteur général. Nous nous battrons sur ce sujet. Le choc d'offre et l'attractivité suscités par cette baisse de TVA pourraient augmenter son produit, à partir du moment où l'usage augmente. Pour les AOM, ce serait une plus-value pertinente pour développer l'attractivité. Je saluer la position de la commission à ce sujet. Il faut tenir bon.

Je salue également sa position sur le maintien des moyens de VNF, qui sont absolument nécessaires. Y renoncer serait une forme d'abandon, alors que nous engageons un véritable plan national, prospectif, de relance du fluvial.

Nous voterons les amendements, y compris l'amendement DEVDUR.34, bien que le montant de 100 millions d'euros nous paraisse un peu faible - nous aurions aimé qu'il soit porté à 200 millions d'euros ! Certes, une montée en charge progressive est normale, l'investissement de 1,5 milliard d'euros étant prévu à l'horizon 2028, mais le montant évoqué, versé au fonds de concours de SNCF Voyageurs, nous paraît quand même un peu insuffisant.

Récemment, le président de la conférence Ambition France Transports, Dominique Bussereau, a évoqué une relance des sociétés de projets et des partenariats publics privés sur les grands projets, notamment le projet de ligne à grande vitesse (LGV) Bordeaux-Toulouse. Au regard du coût des péages, cela me surprend.

Lors de la conférence, des grands projets prioritaires nous ont été présentés. Simultanément, son président nous explique que ces projets, par exemple les nouvelles lignes LGV, ne pourront pas être financés malgré les participations des diverses collectivités et que nous devrons de nouveau faire appel à des sociétés de projet.

Nous avons subi la même chose lors du projet de LGV Bordeaux-Paris, qui, permettez-moi de le rappeler, est toujours déficitaire en raison de coûts de péage beaucoup trop élevés. Ces coûts posent problème dans le cadre de l'ouverture à la concurrence et entraînent des interrogations, voire de réelles pertes de dessertes sur des villes intermédiaires comme Angoulême.

Il est paradoxal de vouloir faire baisser les coûts des péages et d'évoquer dans le même temps une relance des sociétés de projets et des partenariats publics-privés.

Au-delà de ces remarques, nous voterons en faveur des amendements et des crédits.

M. Pierre Jean Rochette. - Les frais de péage sont déjà élevés, et nous votons des crédits supplémentaires. Dans ma commune, lorsque la voie ferroviaire a été fermée, nous avons tenté d'obtenir un chiffrage concurrent à celui réalisé par la SNCF pour la rénovation de la voie. Les cabinets européens que nous avons contactés n'ont pas pu nous le fournir. J'aimerais savoir ce que l'on paye ; car nous versons ces montants les yeux fermés tout en constatant que les frais de péage sont très élevés.

Nous n'avons aucun comparatif du coût du kilomètre de voie ferrée en France et à l'étranger, ni du coût et de la manière dont cette infrastructure est exploitée. Il faudrait creuser cette question. On ne peut se contenter de déplorer, régulièrement, le coût trop élevé de nos frais de péages. Si cela fonctionne ailleurs, pourquoi pas chez nous ? L'une des parties prenantes doit coûter trop cher ou jouer insuffisamment la concurrence, soit sur les travaux, soit sur l'exploitation.

Nous arriverons, tôt ou tard, aux projets public-privé, aux sociétés de projets et aux solutions de portage ; cela reste la solution du pauvre. Lorsque l'État n'est plus en capacité d'agir, il fait porter les projets au privé. Sur le temps long, il s'agit de leasing déguisé d'infrastructures publiques et, en effet, cela coûte le double. Que nous payions cher n'est pas le problème ; je souhaite comprendre ce que finance notre argent, et il me semble que nous ne le savons pas, ni la manière dont ces infrastructures sont ensuite exploitées.

M. Alexandre Basquin. - Sans surprise, nous donnerons un avis défavorable au rapport afin de protester, non contre les propos de notre rapporteur, mais contre le manque structurel de moyens accordés aux transports. Le titre de la conférence Ambition France Transports contient le terme « ambition » ! Il n'a pas été pris en compte, sauf à considérer qu'avoir des crédits stables, en période d'austérité, est ambitieux - ce n'est pas notre avis.

Les politiques de transports - fluviaux ou ferroviaires - doivent être particulièrement structurantes pour contribuer efficacement au développement économique, à l'aménagement du territoire et, surtout, à la lutte contre le réchauffement climatique. On peut regretter que les moyens alloués soient insuffisants. Nous parlons de la future loi-cadre ; comme je l'avais exprimé au ministre Philippe Tabarot, une loi de programmation pluriannuelle d'investissements à la hauteur des enjeux d'aujourd'hui et de demain aurait été préférable.

Nous voterons en faveur des amendements, même si nous considérons qu'ils ne demandent véritablement que le minimum. Vous comprendrez aisément, en revanche, que nous voterons contre la position du rapporteur.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - Monsieur Fernique, effectivement, mon analyse est qu'un traitement de choc est nécessaire ; les amendements vont dans ce sens. Les trois amendements votés la semaine dernière lors de l'examen des amendements au PLF 2026 visent à affecter 750 millions d'euros à l'Afit France ; en y ajoutant les 100 millions d'euros que prévoit l'amendement, nous atteindrons 850 millions d'euros.

Certes, injecter des financements dans SNCF Réseau est une bonne chose ; encore faut-il que cet opérateur soit en capacité de mener ensuite des travaux à hauteur de ces financements. Or nous ne sommes pas certains qu'il puisse immédiatement absorber 200 millions d'euros de crédits supplémentaires, comme vous le proposez : cette augmentation des crédits de 100 millions d'euros est déjà un premier pas pour rappeler à l'État sa responsabilité dans le financement de la régénération des réseaux de transport.

Concernant l'ART, nous avons sollicité un retour sur le calendrier de publication de leur rapport, que n'avons pas encore obtenu.

J'ai souhaité porter l'amendement DEVDUR.32 précisément afin de répondre à l'inquiétude concernant les 40 ETPT de VNF. Cet opérateur a connu l'an dernier des réductions importantes de son plafond d'ETPT, entraînant un climat social difficile. Par ailleurs, VNF et SNCF Réseau sont aussi touchés par des aléas climatiques de plus en plus forts. Ils ont besoin de moyens afin d'adapter et moderniser leur réseau.

Concernant le transport maritime, il est important de garder à l'esprit que les armateurs peuvent très facilement changer le pavillon de leur navire. Nous avons reçu le président des armateurs de France ; il nous a rappelé que la plupart des armateurs sont en réalité de petites structures. Il faut être assez prudent pour éviter de les fragiliser, alors que le secteur est en croissance.

La souveraineté de nos flottes est, par ailleurs, un point d'attention. Soyons prudents avec tout ce qui touche aux exonérations de charges pour les marins : nous formons des marins, mais s'ils ne sont pas embauchés en France parce qu'ils coûtent trop chers par rapport à la concurrence étrangère, c'est regrettable... Des dispositifs d'économies prévus en raison d'un budget contraint peuvent avoir des effets pervers sur l'ensemble du secteur, fragile mais en croissance, et qui s'inscrit dans un contexte économique international.

Monsieur Rochette, il est en effet difficile d'obtenir des comparaisons européennes sur les gestionnaires d'infrastructures. L'ouverture à la concurrence est bénéfique. Lorsque nous avons reçu les concurrents de la SNCF à une table ronde, nous avons découvert que même l'obtention des éléments nécessaires pour répondre à l'appel d'offres, par exemple les données relatives aux ressources humaines, était compliquée à obtenir. Nous espérons que cela changera lors des prochains exercices.

Globalement, selon mon analyse, les dépenses d'investissements - affectées à la régénération des réseaux, à VNF ou aux armateurs - permettent ensuite des économies sur les dépenses de fonctionnement. Les infrastructures, lorsqu'elles vieillissent, entraînent difficultés et retards. Maintenir un niveau d'investissements très fort est donc important.

Soulignons, par ailleurs, que la méthode d'Ambition France transports a été complimentée par l'ensemble des opérateurs que nous avons entendus. On ne peut que le saluer.

J'en viens à présent à l'examen de nos amendements.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 36

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.32 vise à assurer la stabilité du plafond d'emplois de VNF en 2026, en baisse de 40 ETPT dans la version actuelle du PLF. Les baisses d'effectifs pourront reprendre en 2027, comme VNF s'y était engagé dans le cadre de son COP avec l'État.

L'amendement DEVDUR.32 est adopté.

Article 49

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.33 concerne le fret ferroviaire. Lors de la loi de finances pour 2025, les financements à destination du soutien au wagon isolé avaient été augmentés de façon bienvenue de 30 millions d'euros. Cependant, l'ensemble des aides à l'exploitation des services de transport combiné n'a augmenté que de 14 millions d'euros, car d'autres aides ont été revues à la baisse, à hauteur de 16 millions d'euros.

Nous proposons donc d'affecter 16 millions d'euros supplémentaires au fret ferroviaire, afin de soutenir les aides à l'exploitation des services de transport combiné et au démarrage de nouveaux services.

L'amendement DEVDUR.33 est adopté.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.34 propose d'affecter 100 millions d'euros supplémentaires à la sous-action « Régénération du réseau ferré national », afin que l'État participe au financement du réseau ferroviaire.

L'amendement DEVDUR.34 est adopté.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.35, présenté en commun avec Hervé Gillé, a pour objet d'allouer 1 million d'euros supplémentaires à l'ART.

Mme Marta de Cidrac. - Je souhaite une précision sur l'amendement DEVDUR.35. Ce million d'euros d'AE alloués au programme « Infrastructures et services de transport » est enlevé au programme « Énergie ; climat et après mines ». Je voulais m'assurer que ce n'est pas au détriment d'autres missions importantes pour notre commission.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - Nous espérons que le Gouvernement lèvera ce gage.

L'amendement DEVDUR.35 est adopté.

M. Jean-Marc Delia, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.36 propose d'allouer 20 millions d'euros supplémentaires au financement des opérations de dragage portuaire.

L'amendement DEVDUR.36 est adopté.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

Crédits « Transports aériens »
(Mercredi 19 novembre 2025)

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports aériens. - Monsieur le président, mes chers collègues, sans être désobligeant vis-à-vis de mes précédents collègues, je vous propose de prendre un peu de hauteur en étudiant le rapport pour avis au projet de loi de finances (PLF) pour 2026 sur les crédits relatifs au transport aérien.

Je vous présenterai tout d'abord les principaux enjeux concernant le budget de l'administration chargée du contrôle aérien français, la direction générale de l'aviation civile (DGAC), avant d'en venir aux questions de décarbonation du secteur et de pollution sonore. Il est bien question de pollution, plutôt que de « nuisances », comme l'ont bien mis en avant Guillaume Chevrollier et Gilbert-Luc Devinaz dans leur rapport d'information du 25 juin dernier intitulé Prévenir l'exposition au bruit lié aux transports : une politique publique à mettre en musique.

Je commence donc par le contrôle aérien français. Le trafic aérien français est dynamique et devrait dépasser en 2025 son niveau de 2019. Les taxes et redevances perçues par la DGAC étant assises sur le niveau de trafic, il en résulte une augmentation de leur produit.

Une telle situation permet à la DGAC d'accélérer sa trajectoire de désendettement. La chute du trafic et des recettes pendant la crise sanitaire avait en effet généré un lourd endettement du contrôle aérien français, à hauteur de 2,7 milliards d'euros à son point le plus haut. Une trajectoire de désendettement a donc été définie dès la sortie de la crise sanitaire. En 2026, la DGAC vise à atteindre une dette de 1,34 milliard d'euros, ce qui était initialement l'objectif visé pour fin 2027. Je salue donc la rapidité de ce remboursement de la dette.

Cette trajectoire aurait pu être encore plus rapide si la hausse du trafic aérien en France avait été du même niveau que dans le reste de l'Union européenne. Or, après une croissance dynamique aux deux premiers trimestres, elle patine au troisième trimestre, ce qui n'est pas le cas chez nos principaux voisins. La DGAC a récemment publié une étude pour en comprendre les causes. Le premier facteur pourrait être notre croissance économique, plus faible cette année que la moyenne européenne.

La hausse du tarif de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) versé par les compagnies aériennes, prévue par la loi de finances pour 2025, pourrait aussi jouer un rôle dans cette évolution. Pour la DGAC, cela s'observerait notamment pour l'activité d'EasyJet. Cette situation doit nous conduire à la plus grande prudence : le transport aérien, disais-je l'année passée, n'est pas une poule aux oeufs d'or, pour reprendre l'expression de l'écrivain picard Jean de La Fontaine !

Je reviens plus directement à la situation de la DGAC. L'administration reconnaît elle-même que « la France est le pays qui génère le plus de retards en Europe ». Cette situation s'explique par plusieurs facteurs : outils techniques obsolètes, organisation du travail insuffisamment efficiente, manque d'effectifs, conflictualité sociale.

Les systèmes techniques utilisés par le contrôle aérien français sont obsolètes. Devant ce constat, la DGAC a entamé un programme de modernisation, dont les coûts ont connu une forte dérive, dénoncée par plusieurs rapports de notre collègue Vincent Capo-Canellas et de la Cour des comptes.

Ces projets sont cependant enfin en voie d'aboutissement. Accélérer le déploiement de ces nouveaux systèmes est un impératif, car ils permettent de réaliser des gains de sécurité et de productivité marqués. La trajectoire de désendettement de la DGAC ne doit donc pas se faire au détriment de nécessaires investissements d'avenir, afin d'améliorer la qualité du service rendu aux compagnies aériennes et à leurs passagers.

Investir pour l'avenir, c'est aussi recruter de nouveaux contrôleurs. On constate déjà actuellement que le manque d'effectifs engendre de nombreux retards lors des pics de trafic. Or la DGAC va connaître une vague de départs à la retraite de contrôleurs aériens entre 2029 et 2034 : environ 1 000 départs auront lieu, soit un quart des effectifs. Compte tenu du temps de formation des contrôleurs aériens, des élèves contrôleurs doivent d'ores et déjà être recrutés. Les effectifs de contrôleurs, en prenant en compte ces élèves, progresseront de 110 emplois équivalents temps plein (ETPT) en 2026. Il me semble indispensable de renforcer l'effort de recrutement d'élèves contrôleurs aériens dans les prochaines années. Les recrutements en cours ne permettront pas, en effet, de compenser l'intégralité des départs à la retraite.

La DGAC a également lancé un programme de rationalisation de ses emprises territoriales afin de mieux maîtriser ces coûts et de renforcer la résilience du service rendu. Elle s'est fixé l'objectif de fermer vingt à vingt-cinq tours de contrôle d'ici à 2034, réparties en trois vagues - 2028, 2031 et 2034. La première vague, avec un retrait en 2028, concerne les aéroports d'Agen, de Colmar, de Merville, de Quimper, de Saint-Étienne et d'Albert-Bray.

Selon la DGAC, le retrait du contrôle ne signifie pas la fermeture de l'aérodrome, car un service d'information de vol et d'alerte (Aerodrome Flight Information Service, Afis) peut être mis en place par l'exploitant pour un coût moyen compris entre 150 000 euros et 200 000 euros par an, contre 1 million d'euros à 1,5 million d'euros par an pour un service de contrôle classique. Cette réorganisation était probablement nécessaire, même si elle a légitimement suscité des grincements de dents, car elle mène à un transfert des coûts du contrôle aérien de la DGAC vers les exploitants des aéroports, c'est-à-dire les collectivités territoriales propriétaires des équipements aéroportuaires. J'appelle donc à une prise en charge pérenne des services Afis déployés en remplacement du service de contrôle classique.

J'en viens maintenant à la nécessaire défense d'une trajectoire ambitieuse de décarbonation du secteur aérien.

Le premier moyen de décarbonation du transport aérien est la réduction de la consommation de carburant par les aéronefs. La filière aéronautique française et européenne, notamment Airbus et le motoriste Safran, a lancé un programme d'avion ultrafrugal, à échéance 2035. Cette nouvelle génération d'aéronefs pourrait consommer 30 % de carburant en moins que les appareils actuellement en circulation. Ce programme est une opportunité de pérenniser l'excellence industrielle française en aéronautique, dans un contexte concurrentiel particulièrement fort, et de participer à la décarbonation de l'ensemble de l'aviation mondiale.

Afin d'accompagner l'effort de recherche et développement de l'ensemble de la filière, le président de la République s'est engagé en juin 2023 à ce que l'État apporte un soutien annuel de 300 millions d'euros à la filière via le Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac). Un tel niveau de soutien est indispensable pour préparer l'ensemble des « briques technologiques » qui seront mobilisées pour réaliser cet aéronef. Cependant, le PLF actuel ne prévoit que 235 millions d'euros de financements à destination du Corac, dont uniquement 50 millions d'euros sont sécurisés. Les 165 millions d'euros restants, qui relèvent du programme d'investissement France 2030, doivent en effet être consolidés en cours de gestion budgétaire.

Pour corriger cette situation inacceptable, je vous proposerai deux amendements.

Le deuxième moyen de décarboner le transport aérien est le développement des carburants d'aviation durables (CAD). Le règlement européen ReFuel EU Aviation prévoit que les compagnies aériennes doivent incorporer des CAD dans leur carburant à hauteur de 2 % en 2025. Cet objectif devrait être atteint, mais les obligations iront croissant jusqu'en 2050, date à laquelle les compagnies devront incorporer 70 % de CAD.

La filière française de CAD ne répond pas à l'intégralité de la demande des compagnies, qui sont contraintes d'importer une partie du carburant utilisé. Cette situation pourrait s'accentuer dans les années à venir, notamment à partir de 2030, quand les compagnies devront incorporer des CAD synthétiques produits à partir d'électricité bas-carbone. Ces obligations d'incorporation de CAD peuvent constituer une opportunité industrielle, et il est indispensable d'accompagner la mise en oeuvre de projets de production de CAD, notamment synthétiques, sur notre territoire. Je vous proposerai un amendement en ce sens.

J'en viens enfin au sujet essentiel de la pollution sonore causée par le transport aérien. Mieux protéger les riverains est un impératif de santé publique et d'équité sociale et territoriale.

Afin de protéger les riverains des aéroports, en application du principe de « pollueur-payeur », les compagnies sont redevables de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA), qui permet de financer l'insonorisation des logements à proximité des aéroports.

Depuis plusieurs années, les dépenses d'insonorisation sont inférieures aux recettes, si bien qu'une trésorerie de TNSA a été constituée. Cette situation s'explique notamment par le plafonnement de l'aide à l'insonorisation à 80 % de son coût. Le reste à charge est en effet trop important pour des riverains appartenant souvent à des publics défavorisés. À l'inverse, lorsque le reste à charge a été supprimé entre 2012 et 2014, de très nombreuses demandes ont été déposées. Dans leur rapport d'information, Guillaume Chevrollier et Gilbert-Luc Devinaz ont d'ailleurs recommandé (proposition n° 3) de réduire le reste à charge pour les riverains, de rouvrir le droit à insonorisation pour les locaux dont le dispositif d'insonorisation s'est dégradé dans le temps et d'élargir le nombre de locaux éligibles.

Le Gouvernement propose au contraire de prélever environ 80 millions d'euros de trésorerie du fonds de TNSA des riverains des plateformes franciliennes - Paris-Orly, Paris-Charles de Gaulle et Le Bourget. Il entend également plafonner à 40 millions d'euros l'affectation au financement des programmes d'insonorisation du produit de TNSA, qui devrait être d'environ 48,8 millions d'euros en 2026. Ce double détournement de son objet - du stock et du flux - de la TNSA est pour moi une faute morale envers les riverains des aéroports.

La sous-utilisation du produit de TNSA ne doit en effet pas conduire à en dénaturer l'affectation, mais à élargir et assouplir ses conditions d'utilisation, afin de mieux protéger la santé de nos concitoyens, en particulier les plus vulnérables d'entre eux. Toutefois, l'État ayant abondé à hauteur de 20,8 millions d'euros le fonds de TNSA des plateformes franciliennes, je vous propose que cette somme soit reversée au budget général de l'État.

Je vous soumettrai donc un amendement en ce sens, ainsi qu'un second visant à supprimer l'affectation partielle du produit de TNSA au budget général de l'État.

Mes chers collègues, j'espère que nous pourrons remettre le budget du transport aérien sur de bons rails cette année !

M. Ronan Dantec. - Je voterai avec enthousiasme en faveur des derniers amendements, le hold-up projeté par l'État n'ayant aucun sens, sauf à vouloir rendre encore plus insupportable la proximité d'un aéroport pour les riverains.

Pour le reste, nous avons encore plusieurs désaccords. J'ai bien noté la pleine mobilisation de la majorité sénatoriale pour rééquilibrer le budget de la France : de ce point de vue, je crois que nous pouvons nous féliciter collectivement des combats menés en faveur d'une TSBA forte, qui rapportera cette année près de 1,5 milliard d'euros au budget de la France.

Cette taxe n'explique pas la stagnation du trafic, car elle existe également chez nos voisins. Par ailleurs, quelques niches subsistent, le fret échappant ainsi totalement à la « taxation climat » alors que les colis de Shein empruntent ce chemin : il faudrait remédier à cet état de fait en instaurant un niveau raisonnable de taxation, ce qui serait également favorable pour notre balance commerciale.

J'en viens à notre désaccord principal : alors que nous sommes confrontés à d'importantes réductions de la DETR et de la DSIL, encore heureux que nous ne gaspillions pas 300 millions d'euros pour inventer un carburant qui coûtera cinq fois plus cher que le kérosène et qui placerait l'aviation européenne en situation de faillite !

Il est bien question d'un non-sens absolu, car aucune perspective sérieuse n'existe pour les carburants synthétiques et les biocarburants : si nous voulions que l'intégralité de notre aviation vole avec des biocarburants, il faudrait y consacrer la totalité de la surface agricole utile française, ce qui suffirait à peine ! Investir 300 millions d'euros dans la recherche pour une telle impasse représente un véritable gaspillage d'argent public, et je pense que l'État commence à s'en rendre compte, même s'il faudra continuer le combat.

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Je rappelle tout d'abord que le secteur aérien représente un million d'emplois en France, 100 milliards d'euros de chiffre d'affaires et surtout 30 milliards d'euros d'excédent commercial, alors que tous les autres secteurs, à l'exception du luxe, sont déficitaires.

Ensuite, la composition du public qui prend l'avion est intéressante : une étude de l'Ifop menée en 2023 montre que 51 % des usagers sont des femmes et que 45 % des voyageurs sont âgés de 15 ans à 35 ans. En outre, les CSP+ sont en retrait, tandis que les retraités et les étudiants représentent respectivement 8 % et 14 % des usagers.

L'avion est souvent utilisé pour des motifs de loisirs - dans 51 % des cas -, tandis qu'un quart des déplacements vise à retrouver de la famille et des amis ; les déplacements professionnels, quant à eux, sont en fort repli et ne représentent plus que 19 % des vols. J'ajoute que les Français utilisent l'avion pour des vols internationaux dans 94 % des cas, les vols domestiques étant quant à eux en forte baisse avec 6 millions de passagers en moins depuis 2019.

En termes d'activité, enfin, le secteur aérien retrouve en 2025 son niveau de 2019, mais alors que l'offre de sièges progresse de 4,5 % au niveau européen, elle n'augmente que de 1,5 % en France, ce qui doit nous interroger.

Je souscris aux amendements portés par Stéphane Demilly : il faut absolument décarboner ce secteur et donc encourager le renouvellement de la flotte comme l'utilisation de carburants durables, ainsi que le développement de la filière de production de ceux-ci.

Il faut, de plus, que l'enveloppe du Corac retrouve le niveau initialement prévu, car c'est grâce à la recherche que nous pourrons accentuer la décarbonation de ce secteur.

Pour en revenir aux conséquences sonores du transport aérien, le rapport d'information rédigé par Guillaume Chevrollier et moi-même emploie bien l'expression « pollution sonore » et non plus de « nuisances sonores », tant les conséquences sur la santé des riverains sont importantes.

Je pensais que l'Assemblée nationale avait supprimé l'article 43 : s'il devait être réintégré, nous déposerions un amendement de suppression.

Pour ce qui concerne le fait de rendre 20,8 millions d'euros à l'État, il faut formaliser le fait qu'Aéroports de Paris (ADP) accepte de prendre en charge le reste à charge pour les riverains, seul un engagement verbal ayant été pris à ce stade.

Enfin, tous les acteurs du transport aérien doivent faire des efforts afin de faire avancer la décarbonation et de réduire la pollution sonore, y compris le secteur des vols de loisir et les vols privés.

Mme Nicole Bonnefoy. - Dans mon département de la Charente, l'entreprise Verso Energy investit 2,2 milliards d'euros afin de produire du carburant vert pour l'aviation dans le cadre d'un projet intitulé « LiCHEN ». Celui-ci prévoit la construction d'une usine pour combiner l'hydrogène issu des eaux de la Vienne et le CO2 rejeté par une papeterie voisine, afin de développer un carburant vert à l'horizon 2030. Il serait sans doute intéressant pour notre commission de recevoir des représentants de cette entreprise.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - Je partage tout à fait l'avis de Ronan Dantec concernant le hold-up prévu par l'État sur la TNSA : il faudra être solidaires pour éviter que les sommes correspondantes soient affectées à un objectif qui n'était pas celui prévu à l'origine.

Pour ce qui est de la TSBA, la Fédération nationale de l'aviation et de ses métiers (Fnam) estime qu'elle a entraîné une chute du nombre de voyageurs se rendant en France de l'ordre de 3,5 millions, et des pertes de dépenses sur le sol français à 2,3 milliards d'euros. Toujours selon la Fnam, l'État aurait perdu 800 millions d'euros de recettes fiscales touristiques, c'est-à-dire l'équivalent de ce qu'aurait dû rapporter la TSBA.

Cette taxe a donc des répercussions, y compris dans les territoires puisque le PDG de Ryanair, Michael O'Leary, a mis ses menaces à exécution en réduisant son offre de sièges de 13 % à 15 % pour la France, tandis que les dessertes de Brive-la-Gaillarde, de Bergerac et de Strasbourg ont été fermées ; faisons donc attention aux conséquences de la fiscalité.

S'agissant des CAD, dont la première génération sera bien sûr confrontée à des limites naturelles, il nous faudra encourager le développement des carburants synthétiques.

En outre, je remercie Gilbert-Luc Devinaz d'avoir rappelé le poids économique du secteur aérien. Je précise que le groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) regroupe 525 membres, emploie 222 000 salariés directs et génère une dynamique de recrutements comprise entre 25 000 et 30 000 emplois par an. En 2023, Airbus a effectué 17 milliards d'euros d'achats auprès de 3 400 entreprises françaises, chaque avion nécessitant 3 à 4 millions de pièces, dont l'essentiel est heureusement produit en France.

Enfin, madame Bonnefoy, je suis intéressée par votre proposition d'inviter des représentants de Verso Energy pour éclairer ce sujet technique.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial de la commission des finances sur le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». - La TSBA devait rapporter environ 950 millions d'euros supplémentaires, soit un choc assez important pour le secteur. Plus précisément, elle a représenté 100 millions d'euros sur l'aviation d'affaires, une étude de la DGAC ayant montré que la taxe a fortement dégradé la compétitivité de ce segment d'activité.

La part du pavillon français dans le trafic d'affaires, qui n'était déjà plus que de 10 %, a encore été réduite de 21 % depuis l'instauration de la TSBA en avril, cette quasi-disparition devant nous interroger alors que des compagnies étrangères viennent récupérer les parts de marché sur notre sol : le gain obtenu en termes de développement durable est donc plus qu'incertain alors que ces compagnies organisent des vols depuis la Suisse et l'Italie, notamment.

En réalité, la TSBA rapportera 40 millions d'euros pour cette activité, au prix de la mort d'une filière française qui vend pourtant des avions - les Falcon et les TBM - au monde entier. Je vous invite donc à réfléchir à ce risque de mort des compagnies françaises. Parallèlement, le trafic intérieur est toujours inférieur de 25 % à son niveau de 2019. Je renvoie, plus globalement, à l'excellente étude de la DGAC consacrée aux effets de la TSBA.

Concernant la TNSA, on a le sentiment que Bercy a voulu se venger sur les riverains ; je soutiens les amendements portés par le rapporteur sur ce sujet. Il est vrai, et je plaide coupable, que j'avais indiqué au moment du covid-19 qu'il fallait éviter que les riverains soient victimes de la crise, ce qui nous avait conduits à ajouter des crédits du budget général pour poursuivre les opérations d'insonorisation : si l'État veut désormais récupérer une partie des montants concernés, il faut que l'opération soit correctement jaugée.

Quant à la navigation aérienne, il y a bien un problème d'effectifs à terme. Plus généralement, il existe un certain paradoxe dans ce domaine puisque nous pilotons la navigation aérienne avec une norme de dépenses et un plafond d'emplois de l'État, alors qu'il est question d'un service quasi industriel dont les recettes sont assises sur la croissance du trafic. Or, si le trafic intérieur est faible, le trafic international est, quant à lui, en plein essor : dans la pratique, les problèmes ne tiennent pas tant à un problème de recettes qu'à une logique de restriction des effectifs et des moyens, alors que le trafic aérien international ne fait que progresser, d'où de très mauvaises performances.

Il faudra donc mener une réflexion sur l'inadéquation des outils à la réalité économique du secteur. Sur les huit derniers mois, le niveau des retards a augmenté de 50 %, soit des performances exécrables qu'il conviendra de redresser.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 15

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - La version initiale de l'article 15 du PLF a pour but de sécuriser les ressources financières d'Île-de-France Mobilités (IDFM) en lui affectant les recettes issues de la majoration de la taxe régionale à l'immatriculation des véhicules.

Lors de son examen à l'Assemblée nationale, cet article a été réécrit. Le dispositif adopté par les députés prévoit d'assujettir certains vols non réguliers à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Ces vols ont pourtant fait l'objet d'une augmentation très forte de la fiscalité pesant sur eux l'année passée, puisqu'ils sont assujettis à la TSBA pour des montants pouvant atteindre 2 100 euros par passager. Alors que la DGAC a constaté une diminution sans précédent de 21 % de la part de marché du pavillon français sur l'aviation d'affaires, il est crucial d'arrêter d'augmenter la pression fiscale sur ce secteur, sous peine de faire considérablement chuter - voire de tuer- son activité. En tout état de cause, une contraction de l'activité aérienne diminuerait la base fiscale de la taxe et amoindrirait son rendement éventuel.

L'amendement DEVDUR.3 tend donc à rétablir l'article dans sa version initiale.

M. Ronan Dantec. - Il faudra nous expliquer pourquoi des compagnies étrangères qui s'acquittent également de la TSBA s'en sortent mieux que les compagnies sous pavillon français.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial de la commission des finances. - Avec la TSBA, nous avons inventé un système qui envoie les touristes français à l'étranger : la taxe étant acquittée par les compagnies aériennes au décollage, elles ont tout intérêt non pas à assurer des vols intérieurs, mais à effectuer des vols les plus longs possible : plus chers, ceux-ci permettent d'amortir au mieux la taxe. Grâce à des vols à destination de l'étranger, les compagnies ne s'acquittent de la TSBA qu'au décollage, mais pas lors du vol retour, d'où le développement de l'offre low cost vers l'étranger, au détriment de vols Paris-Marseille, par exemple.

Par conséquent, alors que les vols étaient par le passé remplis à 80 % de touristes étrangers venant en France, la situation est désormais inverse : avec des vols à destination des pays du sud, les avions transportent 80 % de Français se rendant à l'étranger.

Monsieur Dantec, le marché français est marginal pour les compagnies étrangères, qui peuvent faire des efforts financiers, mais, quand bien même elles y consentent, elles conservent des créneaux pour des vols vers l'étranger, par définition plus longs, ce qui n'est guère favorable d'un point de vue environnemental.

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Nous voterons contre cet amendement, car nous sommes favorables à la rédaction retenue par l'Assemblée nationale. Il serait intéressant d'analyser l'évolution des vols non réguliers et de la flotte des jets privés.

L'amendement DEVDUR.3 est adopté.

Après l'article 16

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - À l'heure actuelle, le moyen le plus efficace pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur est d'accélérer le renouvellement des flottes : les aéronefs d'ancienne génération émettent bien plus de gaz à effet de serre que ceux qui sont actuellement mis sur le marché, puisqu'ils consomment davantage de carburant.

Cette réduction de la consommation de carburant a un effet connexe bénéfique, car elle facilite l'incorporation de CAD.

L'amendement DEVDUR.4 prévoit une mesure d'accompagnement nécessaire en créant un dispositif de déduction d'impôt en faveur des compagnies qui achètent ou louent pour une longue durée des aéronefs émettant moins de gaz à effet de serre que ceux qu'elles utilisaient précédemment.

M. Ronan Dantec. - Quel en sera le coût ?

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - Quelques dizaines de millions d'euros.

L'amendement DEVDUR.4 est adopté.

Article 36

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - Le Gouvernement propose de plafonner l'affectation du produit de TNSA utilisé pour insonoriser les locaux à 40 millions d'euros. Le reste de son produit, environ 8 millions d'euros, serait affecté au budget général de l'État. Je suis en désaccord avec cette proposition, la TNSA devant rester affectée à la lutte contre la pollution sonore.

L'amendement DEVDUR.5 est adopté.

Après l'article 36

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - La loi de finances pour 2025 a prévu la mise en place d'un crédit d'impôt incitatif à l'achat de CAD, mais celui-ci n'est pas entré en vigueur en raison d'une négociation particulièrement complexe avec la Commission européenne.

L'amendement DEVDUR.6 vise donc à ce que le crédit d'impôt ait un effet rétroactif.

L'amendement DEVDUR.6 est adopté.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - Il importe d'aider le Corac à développer une nouvelle génération d'aéronefs qui pourraient consommer 30 % de carburant en moins que les appareils actuellement en circulation. À l'occasion du salon du Bourget, le Président de la République s'était engagé en juin 2023 à ce que l'État apporte un soutien annuel de 300 millions au développement de l'avion ultrafrugal.

Le PLF actuel ne prévoit que 215 millions d'euros de financements à destination du Corac, dont uniquement 50 millions d'euros sont sécurisés. Les 165 millions d'euros restants, relevant du programme d'investissement France 2030, doivent en effet être consolidés en cours de gestion budgétaire.

Afin de protéger le budget du Corac de coupes budgétaires qui fragiliseraient les projets portés par les industriels, lesquels ont besoin d'une visibilité pluriannuelle, l'amendement DEVDUR.7 prévoit d'affecter une fraction de 150 millions d'euros de TSBA au Corac, par l'intermédiaire du budget annexe de l'aviation civile.

L'amendement DEVDUR.7 est adopté.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.8 vise à affecter une fraction des recettes issues du marché de quotas carbone européen relatif à l'aviation à l'IFP Énergies nouvelles afin d'accompagner l'industrialisation de projets de CAD français. Cet établissement public est en effet à la pointe du développement des technologies utilisées dans les CAD et dispose d'un savoir-faire reconnu pour porter à l'échelle industrielle de nouvelles technologies dans ce domaine.

L'amendement DEVDUR.8 est adopté.

Article 43

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - Une somme de 20,8 millions d'euros doit être reversée à l'État au titre du remboursement des sommes qu'il a versées à l'occasion de la crise sanitaire.

L'amendement DEVDUR.9 vise à supprimer le prélèvement d'environ 80 millions d'euros de trésorerie de TNSA au bénéfice de l'État, car ces montants doivent être consacrés à l'insonorisation des logements : il en reste 43 000 en région parisienne, me semble-t-il.

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Comme je l'indiquais précédemment, il serait intéressant de faire figurer l'engagement d'ADP à prendre les sommes restantes à sa charge. Cet engagement s'explique par le fait que les riverains demandent que les vols de nuit s'arrêtent à partir de 23 heures, et non pas à 23 heures 30, ce que ne souhaite pas ADP.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - Je partage votre sentiment, mais il me semble qu'un tel ajout devrait être intégré par la voie réglementaire.

L'amendement DEVDUR.9 est adopté.

Après l'article 43

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - Nous avons largement évoqué, par le passé, la taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance. L'amendement DEVDUR.10 prévoit que soit exclu des revenus de l'exploitation d'une infrastructure de longue distance le montant de la répercussion du produit de la taxe sur les usagers. Cette taxe est équivalente à 4,6 % des revenus d'exploitation du gestionnaire d'infrastructure, ce qui représente environ 120 millions d'euros pour ADP, qui répercute ce coût sur les compagnies aériennes : du fait du principe d'une taxation sur les recettes, on risque d'aboutir à un système dans lequel on crée une taxe sur la taxe, d'où ma proposition.

L'amendement DEVDUR.10 est adopté.

Article 44

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - L'article 44 du PLF prévoit d'assujettir les plus petits aéroports qui reçoivent moins de 6 000 passagers par an au versement du tarif de sûreté et de sécurité (T2S), qui est de 1,35 euro par billet. Les recettes anticipées seraient d'environ 100 000 euros.

Toutefois, compte tenu du nombre de plateformes concernées, le coût de collecte de ce prélèvement sera en toute probabilité supérieure à son produit. L'amendement DEVDUR.11 tend donc à supprimer cette disposition.

L'amendement DEVDUR.11 est adopté.

Article 42 (État B)

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.12 vise à relever de 100 millions d'euros les moyens de l'action nº 14 « Recherche et développement dans le domaine de l'aéronautique civile » du programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables », afin de garantir le respect de la cible visée en 2026, sans dépendre trop fortement d'arbitrages effectués en cours d'année sur le programme France 2030.

L'amendement DEVDUR.12 est adopté.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports aériens de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

Information - Examen des amendements
(Mercredi 26 novembre)

M. Jean-François Longeot, président. - Avant de clore nos échanges du jour sur le PLF 2026, je tenais à vous informer du dépôt des amendements adoptés la semaine dernière par la commission sur la première partie du projet de loi de finances pour 2026. L'amendement de Stéphane Demilly, qui consistait à rétablir l'article 15 du texte dans sa version initiale, n'a logiquement pas été déposé. Le texte transmis au Sénat étant le texte initial du Gouvernement, et non le texte amendé par les députés, l'amendement précité est devenu sans objet. La semaine dernière, en effet, la commission a examiné des amendements sans connaître quelle version du PLF 2026 serait transmise par le Gouvernement au Sénat. Cependant, pour des raisons de procédure tenant au délai limite de dépôt des amendements, elle ne pouvait attendre cette semaine l'examen de ces amendements pour en sécuriser leur dépôt auprès de la direction de la séance.

Pour votre bonne information, également, un autre amendement de Stéphane Demilly, qui portait sur la taxe sur l'exploitation des infrastructures de longue distance, a fait l'objet d'une amélioration rédactionnelle. La version déposée diffère donc légèrement de celle que nous avons examinée. Pour rappel, cet amendement vise à éviter que les redevances versées par les compagnies aériennes aux exploitants d'aéroports pour compenser le coût de la taxe entrent dans l'assiette de celle-ci, et ce pour éviter un effet « boule de neige » qui conduirait à une taxe sur la répercussion de la taxe, qu'il faudrait à son tour taxer, et ce à l'infini...

Crédits « Transports routiers »
(Mercredi 3 décembre 2025)

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - J'ai le plaisir de vous présenter ce matin les principales orientations de mon rapport pour avis sur les crédits relatifs au transport routier du projet de loi de finances (PLF) pour 2026.

Avant toute chose, et dans la perspective de la future loi-cadre, j'aimerais aborder la question cruciale du modèle de financement des infrastructures de transports : ce sujet, désormais récurrent pour notre commission, prend une dimension vraiment particulière cette année puisqu'il a pour toile de fond les conclusions de la conférence Ambition France Transports qui ont été rendues en juillet dernier. Nous allons vivre, dans les semaines et mois à venir, des séquences intéressantes et importantes sur ces sujets.

Le rapport d'Ambition France Transports a en effet mis en exergue l'écart considérable entre, d'une part, la trajectoire actuelle d'investissement dans nos infrastructures de transport ferroviaire, fluvial et routier et, d'autre part, les besoins constatés pour résorber la dette grise - c'est-à-dire les investissements nécessaires, mais non engagés -, qui s'y est accumulée au fil de décennies de sous-investissement, et qui nous préoccupe fortement.

Sur la période 2026-2031, le besoin d'investissement supplémentaire s'établit à environ 2 milliards d'euros par an pour le transport ferroviaire et fluvial et à 1 milliard d'euros par an rien que pour le réseau routier national non concédé (RRNNC) - il nous faut donc avoir une attention particulière à ce sujet.

À partir de cet état des lieux détaillé, qui ne peut être que partagé par la commission, le rapport de la conférence identifie de nouvelles pistes de financement, au premier rang desquelles un renforcement du fléchage vers les transports des recettes issues de la fiscalité pesant sur ce secteur qui, pour l'heure, alimentent surtout le budget général de l'État.

La perspective de l'arrivée à échéance des concessions autoroutières, qui s'étalera de 2031 à 2036, doit également être intégrée à cette réflexion : d'une part, le produit des péages des futures concessions pourrait en effet contribuer à financer la route et les autres modes de transport et, d'autre part, le périmètre des futures concessions pourrait intégrer des portions du réseau routier non concédé - y compris décentralisé - afin de permettre une péréquation financière.

À plus court terme, la gestion de la fin des concessions nécessite une vigilance renforcée pour assurer le retour en bon état d'entretien des infrastructures concédées : cette phase critique va nécessiter un suivi attentif de la part du Parlement - et en particulier de notre commission.

Ces éléments liminaires étant posés, j'en viens aux lignes directrices du projet de budget qui nous est soumis s'agissant des infrastructures de transport. Malheureusement, le budget de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) pour 2026 est très en deçà du cap fixé par la conférence Ambition France Transports : s'il est en légère hausse par rapport à 2025 - année blanche pour les transports, ce qui nous a fait perdre des marges d'intervention -, il reste très inférieur, de 850 millions d'euros, au budget de 2024. Cela confirme la rupture avec la dynamique positive qui avait été impulsée en 2023 à la suite de la présentation du plan d'avenir pour les transports. Les ressources de l'Afit France demeurent en outre incertaines, alors même que les dépenses qu'elle prend en charge s'inscrivent dans une perspective de long terme et nécessitent donc de la visibilité.

Face à ce constat, nous vous avons soumis il y a quinze jours, avec mon collègue Jean-Marc Délia, trois amendements visant à rehausser le niveau des ressources affectées à l'Afit France l'année prochaine au titre de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) et des recettes issues du marché carbone européen. Cette fiscalité assise sur les transports n'a pas vocation à avoir une fonction de rendement budgétaire : il est essentiel qu'elle serve davantage à financer la transition écologique du secteur ainsi que nos politiques climatiques.

J'en viens à la question plus spécifique de l'état des infrastructures routières, sur lequel j'émets un signal d'alerte.

Tandis que le réseau routier national concédé présente un très bon état général, l'état du RRNNC est préoccupant : seule la moitié de ses chaussées sont en bon état et un tiers de ses ouvrages d'art présente un défaut voire une structure altérée. Ces infrastructures continuent en outre à se dégrader et leur dette grise, évaluée à 2,4 milliards d'euros, à s'aggraver.

Face à une telle spirale de dégradation, la quasi-stabilité des moyens alloués à la régénération du RRNNC par le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 est pour le moins inquiétante. Environ 700 millions d'euros sont prévus l'année prochaine pour la régénération de ce réseau, soit la moitié à peine de l'effort annuel préconisé par la conférence Ambition France Transports.

Je vous proposerai donc un amendement visant à allouer 100 millions d'euros supplémentaires l'année prochaine à la régénération de ce réseau, afin d'entamer un rehaussement de la trajectoire d'investissement le concernant. Je vous proposerai également un amendement visant à allouer une enveloppe de 50 millions d'euros à l'entretien des ouvrages d'art de l'État.

S'agissant du réseau routier décentralisé, la situation n'est guère plus rassurante. Les collectivités territoriales sont confrontées à un effet ciseaux entre, d'une part, une baisse de leurs ressources dans un contexte budgétaire contraint et, d'autre part, la hausse de leurs dépenses incompressibles, en particulier s'agissant des départements. La route pèse pourtant très lourdement dans les budgets locaux et on peut craindre, dans ce contexte, une baisse sensible des budgets routiers dès l'année prochaine. Il est urgent qu'un audit national soit réalisé afin d'évaluer de manière fiable et précise l'état du réseau routier décentralisé et les besoins d'investissement associés. Des ressources devront également être identifiées pour sécuriser les investissements en faveur des infrastructures routières locales, qui servent trop souvent de variable d'ajustement budgétaire.

S'agissant des ouvrages d'art, nous disposons d'une vision plus précise de l'état du réseau décentralisé : près de 30 % des ponts communaux et de 10 % des ponts départementaux présentent des désordres structuraux significatifs ou majeurs. Dans ce contexte, il est crucial que le programme national Ponts (PNP), qui permet de soutenir le diagnostic et l'entretien des ouvrages d'art communaux, soit inscrit dans la durée. Or, au rythme actuel de consommation des crédits, l'enveloppe du volet « travaux » du PNP (PNP Travaux) sera totalement épuisée en février prochain. Je vous ai donc soumis un amendement, il y a quinze jours, visant à allouer à ce programme la fraction d'un douzième de la taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance aujourd'hui redistribuée aux communes. Afin de maximiser nos chances de voir des moyens pérennes inscrits dans le PLF en faveur du PNP, je vous soumettrai également un amendement de crédit.

J'en arrive au sujet du modèle de financement des autorités organisatrices de la mobilité (AOM), qui doit être considérablement renforcé pour permettre le choc d'offre de transports collectifs rendu nécessaire par nos objectifs de décarbonation.

Dans un contexte où plus d'une AOM locale sur trois, hors Île-de-France, prélève déjà le versement mobilité (VM) à son taux plafond, il est impératif de donner aux AOM de nouvelles marges de manoeuvre financières. C'est le sens de l'amendement que nous vous avons soumis il y a quinze jours avec mon collègue Jean-Marc Délia, prévoyant d'abaisser à 5,5 % le taux de TVA sur les transports du quotidien.

Il me semble également essentiel d'exploiter les capacités de financement d'un panel de contribuables plus large que les seuls usagers et entreprise : je vous ai donc soumis il y a deux semaines un amendement visant à instaurer une taxe additionnelle à la taxe de séjour au profit des AOM, notamment sur les territoires hyper touristiques. Malheureusement, cet amendement n'a pas été adopté en séance publique. Cette piste me semble pourtant très intéressante et elle s'inscrit dans la droite ligne des conclusions de la conférence Ambition France Transports. Nous pourrions peut-être rouvrir ce débat à l'occasion de l'examen de la future loi-cadre sur les transports.

S'agissant des AOM en zones peu denses, la question du financement des mobilités est devenue un véritable serpent de mer depuis la loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités. Certes, l'instauration d'un versement mobilité régional et rural (VMRR) en 2025, dont une fraction de 10 % sera affectée aux AOM en zones peu denses, constitue une première avancée. Il me semble toutefois qu'elle est loin de purger le problème dans son intégralité : l'instauration du VMRR, de même que le choix du taux et du périmètre d'application, est à la discrétion des régions et le taux maximal du VMRR est, en tout état de cause, limité à 0,15 %.

Compte tenu de ces conditions et du fait que les régions se sont mobilisées de manière très différenciée, je vous soumettrai un amendement visant à assouplir les conditions pour lever le VM, en permettant de prendre en compte un panel de solutions de mobilités plus large que les seuls services réguliers de transports de personnes qui sont, comme chacun sait, rarement adaptés aux zones rurales. Il s'agit d'une solution simple et immédiate, qui répondra aux difficultés de nombreuses AOM situées dans des zones où la dépendance à la voiture est encore plus forte. Ce sujet, à mon profond regret, n'a pas été pris en considération.

S'agissant du VMRR, il serait utile que nous puissions disposer dès les prochains mois d'un premier bilan de sa mise en oeuvre, pour évaluer les montants effectivement alloués aux zones peu denses et les investissements qui pourraient en découler.

Pour terminer, je souhaite aborder la problématique de la décarbonation du parc automobile et du développement des mobilités actives.

S'agissant du verdissement du parc de véhicules, je souscris au renforcement du malus automobile prévu par le présent PLF, qui poursuit notamment la trajectoire de hausse du malus CO2 jusqu'en 2028.

Néanmoins, dans l'objectif d'encourager la sobriété du parc automobile, il serait pertinent que les dispositifs de bonus-malus ne prennent pas seulement en compte le poids et les émissions des véhicules, mais aussi le rapport poids-puissance qu'ils présentent. Nous constatons, à l'heure actuelle, une dérive : des véhicules de plus en plus lourds et de plus en plus puissants arrivent sur le marché. Or plus le véhicule est lourd, plus il est énergivore - cela est vrai aussi de sa puissance. Des véhicules frisent désormais les 200 chevaux, et atteignent les 250 dans le cas de moteurs hybrides. Est-ce bien raisonnable ? Je sais les débats que cela suscitera, mais tenais néanmoins à vous sensibiliser sur le sujet.

Nous pourrions, par exemple, inciter à l'achat de véhicules intermédiaires, légers, à mi-chemin entre le vélo et la petite voiture, présentant une empreinte écologique faible et une efficacité énergétique accrue. Le succès commercial récent du modèle Ami, produit par Citroën, démontre que ce type de véhicule - peu onéreux - peut constituer une solution de déplacement tout à fait adaptée aux besoins de nombreux Français, notamment pour les jeunes et les ménages modestes en milieu urbain - et même rural, où il est de plus en plus utilisé. D'autres constructeurs se sont lancés à leur tour sur ce créneau.

S'agissant plus spécifiquement des aides à l'acquisition de véhicules propres, le PLF pour 2026 prend acte de la débudgétisation du bonus écologique et du leasing social, qui sont désormais financés via les certificats d'économies d'énergie (C2E). Si je ne suis pas hostile, sur le principe, à ce que cet outil contribue au financement de la décarbonation du secteur, il ne doit pas pour autant se substituer à l'élaboration d'une véritable stratégie d'investissement pluriannuelle ni conduire à un affaiblissement du contrôle démocratique en la matière.

À ce titre, je m'inquiète du peu de visibilité dont nous disposons quant au montant et à la consommation des enveloppes correspondant aux programmes C2E, qui se sont d'ailleurs démultipliées ces dernières années. Une réflexion serait également opportune sur le périmètre d'intervention des C2E dont le financement repose, in fine, sur les ménages : les C2E ne disposent pas d'une enveloppe illimitée et l'intégration de dispositifs au budget conséquent, comme le leasing social, se fait nécessairement au détriment d'autres dépenses. Notre commission pourrait se pencher sur ce sujet qui entre pleinement dans le champ de ses compétences.

Bien qu'aucun crédit budgétaire ne soit donc plus prévu par le PLF sur ce sujet, je vous soumettrai un amendement de crédits pour allouer 20 millions d'euros supplémentaires au leasing social l'année prochaine, afin d'y rendre éligibles les véhicules d'occasion. Le marché du véhicule électrique d'occasion est en train de monter en puissance : il faut capitaliser sur cette dynamique pour mieux démocratiser l'accès au véhicule électrique, via les aides à l'acquisition, au profit des ménages modestes.

Je terminerai en abordant le développement des mobilités actives, secteur qui connaît depuis deux ans des stop and go budgétaires et réglementaires qui se révèlent particulièrement préjudiciables. La part modale du vélo demeure deux fois inférieure à la moyenne européenne : le potentiel de report modal vers cette solution de mobilité est donc largement sous-exploité dans notre pays.

Or, la réalisation d'aménagements cyclables sécurisés est le levier le plus efficace pour encourager la pratique du vélo. La mission d'inspection sur les violences routières et le partage de la voirie, lancée à la suite du décès tragique d'un cycliste à Paris en octobre 2024, a d'ailleurs appelé à ne surtout pas réduire les efforts financiers de l'État sur ce sujet. Malheureusement, à rebours de ces recommandations, le PLF pour 2026 témoigne d'un désengagement de l'État en matière de politiques cyclables, comme cela avait été le cas dans la loi de finances initiale (LFI) pour 2025 : pour l'année prochaine, seuls 31 millions d'euros sont prévus en autorisations d'engagement (AE) et 73 millions d'euros en crédits de paiement (CP), alors qu'une enveloppe annuelle de 250 millions d'euros avait été promise lors du lancement initial du plan vélo et marche 2023-2027. Certes, une enveloppe supplémentaire de 50 millions d'euros a été prévue cette année via le fonds vert, mais il est en pratique très difficile de réaliser un suivi de l'utilisation effective de cette enveloppe.

Ces éléments sont d'autant plus dommageables que la filière vélo commençait à peine à se structurer et que le vélo aura un rôle important à jouer dans le cadre du déploiement des services express régionaux métropolitains (Serm). Pour relier efficacement les zones rurales, périurbaines et urbaines, les Serm vont nécessiter la mise en place d'un système inter et multimodal comprenant notamment des systèmes de rabattement cyclable.

Je vous soumettrai donc un amendement visant à allouer 50 millions d'euros supplémentaires au plan Vélo et marche 2023-2027 l'année prochaine, afin de soutenir les AOM locales dans la réalisation d'itinéraires de rabattement cyclable vers des modes de transports collectifs ou partagés. Cela permettra de renforcer la portée des plans de mobilité des intercommunalités, en articulation avec les plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi). Cet élément est bien compris par les parties prenantes et sera, je pense, bien perçu politiquement.

Enfin, je vous proposerai un amendement visant à rétablir le bonus vélo, via une enveloppe de 10 millions d'euros : cette mesure permettait, depuis 2017, de soutenir l'acquisition d'un vélo via une aide de 150 à 2 000 euros. Sa suppression par le Gouvernement en février dernier envoie un très mauvais signal et risque de ralentir - voire d'inverser - la dynamique positive en faveur du développement de la pratique du vélo qui avait été impulsée. Mon amendement vise à remédier à cette situation.

Pour terminer, je vous proposerai d'émettre un avis favorable sur les crédits du PLF pour 2026 relatifs aux transports routiers.

M. Stéphane Demilly. - Je remercie le rapporteur pour l'exposé de son rapport pour avis. Mon intervention portera sur la décarbonation du parc automobile. Vous avez omis d'évoquer un sujet, pourtant important, celui des biocarburants. J'estime que le biocarburant, lorsqu'il est produit intelligemment, est un plus environnemental, économique et stratégique en matière d'indépendance énergétique.

Vous le savez, monsieur le rapporteur, les hausses de taxation initialement prévues sur le superéthanol E85 et le B100 - respectivement de 380 % et de 400 % - ont été proposées sans véritable dialogue avec les acteurs concernés ni d'évaluation de leur impact. J'ai fait annuler cette mise à mort du biocarburant par un amendement qui a été voté à l'article 5.

Les biocarburants issus de productions agricoles françaises jouent un rôle conséquent dans la transition énergétique. Leur filière mobilise 120 000 agriculteurs et 30 000 salariés, tout en participant efficacement - cela a été démontré à maintes reprises par l'Ademe (l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, dite Agence de la transition écologique) - à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

La hausse de taxation envisagée diminuerait donc l'impact de l'incitation environnementale et inviterait surtout les automobilistes, comme les transporteurs, à revenir vers des carburants fossiles importés et nettement plus émetteurs. Les transporteurs ont pourtant investi ces dernières années dans des flottes captives compatibles avec des carburants renouvelables ; cela remettrait donc en cause les efforts de transition qu'ils ont engagés. Cette hausse risquerait également de désarmer nos filières face à des importations à bas coût et d'encourager indirectement des pratiques agricoles et industrielles peu compatibles avec les objectifs climatiques que nous portons au niveau européen.

Quelle est votre opinion sur cette hausse de taxation envisagée pour le superéthanol E85 et le B100 ?

M. Jacques Fernique. - Je remercie le rapporteur pour son travail et pour ces éléments de diagnostic et de perspective. J'avoue mon incompréhension quant à l'avis qu'il nous propose de rendre. Nous exposer tout ce qu'il faudrait faire évoluer pour que le PLF pour 2026 soit utile à la décarbonation et à la transition de nos mobilités et terminer en se déclarant favorable aux crédits proposés par le Gouvernement : quel formidable oxymore !

Premièrement, les éléments nécessaires pour nous inscrire dans la trajectoire de l'entretien et de la régénération du réseau routier en abondant de 700 millions supplémentaires les ressources de l'Afit France, tel que la conférence Ambition France Transport l'a préconisé, font défaut. Le PLF n'inclut pas non plus les financements nécessaires aux AOM afin qu'elles réussissent leur choc d'offre de transports collectifs. Les votes, hier encore, de la majorité sénatoriale en séance publique ne sont pas prometteurs de ce point de vue.

Quant au programme national ponts, il y a vraiment péril en la demeure, et le Sénat s'est suffisamment engagé sur ces enjeux pour ne pas laisser faire : 30 % des ponts communaux, 10 % des ponts départementaux et 7 % des ponts nationaux non concédés sont en mauvais état - et il ne s'agit que des plus dégradés. Les crédits prévus par le PLF seront épuisés dès la fin du mois de février. Par ailleurs, si nous n'agissons pas pour les autres ponts, ils se retrouveront tous en classe 4 d'ici à une dizaine d'années.

En outre, la trajectoire financière du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) s'apparente à terme à une mort programmée ; or nous avons besoin de disposer d'une forte expertise publique en la matière. Si le PNP s'arrêtait, cette expertise disparaîtrait assez rapidement.

Deuxièmement, les aides à l'électromobilité dépendent de la « panacée » des C2E ; nous avons néanmoins besoin d'un pilotage public. À ce sujet, la prime à la conversion manque cruellement. Les dispositifs qui ont été imaginés sont en panne avant même d'avoir démarré. En outre, le dispositif d'aide à l'électromobilité ne prévoit pas de possibilités de leasing suffisamment poussées. L'amendement sur l'électrique d'occasion est, à ce titre, bienvenu.

Enfin, l'élan du plan vélo et marche 2023-2027 a été brisé pour des raisons budgétaires. Nous en observons aujourd'hui les conséquences : la réussite de l'ambition des Serm est compromise. Les amendements sur ce sujet sont donc bienvenus.

Il est également essentiel d'observer le retard que nous prenons, par exemple, sur l'Allemagne. Un vélo électrique sur deux y est acquis par leasing social, avec des réductions des prix de 30 % à 40 %, via un mécanisme de conversion salariale. En France, seulement 2 000 vélos ont été acquis grâce à ce dispositif. Cette filière est en difficulté depuis deux ans du fait d'une baisse importante de ses ventes - notamment celles de vélos à assistance électrique. Favorisons les flottes d'entreprise et le leasing social, afin de préserver l'essor de cette filière !

Aussi, nous voterons tous les amendements proposés, en espérant qu'ils seront adoptés en séance publique. En revanche, nous sommes défavorables à l'adoption des crédits relatifs aux transports routiers.

M. Ronan Dantec. - J'aimerais revenir sur les propos de M. Demilly.

Tout d'abord, les biocarburants sont, en effet, exonérés d'accises, mails ils bénéficient de la taxe incitative relative à l'utilisation d'énergie renouvelable dans les transports (Tiruert), qui, certes, évoluera. Ne livrons pas une vision quelque peu biaisée de la situation, il existe deux systèmes de soutien aux biocarburants à l'heure actuelle.

Lors d'une table ronde avec les services de l'État, il y a quelques jours, j'ai appris que la marge dégagée sur la production de biocarburants a été estimée à environ 40 %, ce qui revient à bénéficier d'une niche fiscale. Il n'y a donc aucune raison que les biocarburants ne participent pas, par l'accise, aux ressources de l'État.

Par ailleurs, la filière des biocarburants n'évoluera plus beaucoup. Elle produit, depuis 2014, à peu près les mêmes quantités : 3 % à 4 % des besoins en carburants en France pour 3 % de la surface agricole utile. Il n'y a aucune raison, pour une filière mature dont la marge est aussi importante, de maintenir un tel cadeau fiscal pour le groupe Avril, d'autant plus dans un contexte de restriction budgétaire et de chasse aux niches fiscales indues par la majorité sénatoriale.

M. Jean-Pierre Corbisez. - Merci, monsieur le rapporteur, pour l'excellence de vos propos.

Vous avez proposé d'allouer 50 millions d'euros supplémentaires au PNP. Cette somme est-elle destinée au PNP, c'est-à-dire aux collectivités locales, ou à la rénovation des ponts et des ouvrages d'art de l'État ?

M. Alexandre Basquin. - Le constat que vous faites est fondé, mais particulièrement amer d'autant que, à l'instar de l'exercice précédent, les budgets sont particulièrement contraints. Cela démontre le manque de moyens dévolus au transport de manière globale et plus particulièrement au transport routier.

Ainsi, nous rétropédalons, si je puis dire, sur le plan vélo et marche 2023-2027 ; les moyens attribués aux AOM sont insuffisants ; un manque d'investissements dû à la réduction des moyens accordés aux collectivités locales ; et les crédits alloués au réseau national ne répondent que pour moitié aux efforts qui devraient être consentis annuellement.

Bref, une fois de plus, les crédits relatifs au transport routier baissent en raison d'une politique de diminution des déficits publics.

Les amendements proposés vont dans le bon sens, mais ils sont loin d'être suffisants pour pallier le manque de moyens. Par conséquent, nous voterons les amendements, mais ne serons pas favorables à l'adoption des crédits.

M. Jean Bacci. - Je remercie le rapporteur pour son travail. Je formulerai quelques remarques.

Premièrement, je rejoins les propos de M. Demilly au sujet de la taxation des biocarburants. Même si la production de biocarburants ne concerne que 3 % de la surface utile agricole, ils permettent souvent à l'agriculteur de rentabiliser son activité.

Deuxièmement, on taxe de plus en plus les véhicules lourds, alors qu'ils sont sécuritaires et confortables. On veut privilégier les véhicules légers, mais les modèles de voiture tels que l'Ami de Citroën, ou la Spring de Dacia sont à la limite de la dangerosité au vu des crash-tests !

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - Mon collègue Jean-Marc Delia et moi-même avons considérablement renforcé les moyens affectés à l'Afit France. Au regard de l'évaluation des moyens financiers nécessaires, une rallonge de 750 millions d'euros est tout de même proposée, ce qui n'est pas rien. C'est la raison pour laquelle j'ai donné un avis favorable au projet de budget. Je vous dis les choses telles qu'elles sont : je pense que nous sommes dans un cheminement constructif, objectif et nécessaire avec le ministre des transports.

Ensuite, le sujet des biocarburants est très sensible. Le Sénat ne prévoit pas, actuellement, d'augmentation de la fiscalité. Cependant, une évolution à la hausse de l'accise - si celle-ci est progressive, acceptable et prend en compte les modèles économiques existants des acteurs de ce marché mature - me paraît justifiée et logique, et j'y suis plutôt favorable.

Monsieur Bacci, les véhicules lourds et puissants sont certes plus sécuritaires et confortables, mais qui est en mesure de les acquérir ? L'Ami correspond à une catégorie de véhicules urbains qui ne dépassent pas 45 kilomètres par heure. Ils rejoignent en quelque sorte les véhicules sans permis ; ces véhicules respectent les normes correspondant à leur puissance et sont soumis à des règles de circulation particulières.

J'alerte simplement sur la dérive croissante vers des véhicules de plus en plus lourds et de plus en plus puissants. Il sera nécessaire de s'intéresser à cette question à un moment donné dans la mesure où le système de bonus-malus écologique ne porte, actuellement, que sur le poids des véhicules. À l'inverse, les véhicules de 250 chevaux sont aussi des bombes en puissance en termes d'accidentologie. Regardez quels types de véhicules sont utilisés par les vendeurs de stupéfiants ! Des véhicules hyperpuissants qu'ils conduisent de manière hyper dangereuse.

Monsieur Corbisez, un amendement concerne bien les ouvrages d'État, tandis que l'autre vise à réaffecter des moyens au PNP à destination des communes.

Article 49 (état B)

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  II-1416 vise à allouer 50 millions d'euros supplémentaires au programme 203 « Infrastructures et services de transports », au profit d'une nouvelle action dédiée au PNP. En effet, au rythme actuel de consommation des crédits, l'enveloppe de 55 millions d'euros dédiée au PNP sera bientôt totalement épuisée.

M. Jean-Pierre Corbisez. - Le budget initial était de 50 millions d'euros. Vous proposez de le porter à 100 millions d'euros ?

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - Les 55 millions d'euros de crédits qui bénéficiaient au PNP Travaux seront épuisés au mois de février prochain et aucun nouveau crédit n'est prévu par le PLF 2026. Il s'agit donc de prévoir une nouvelle enveloppe, à hauteur de 50 millions d'euros.

L'amendement n° II-1416 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  II-1417 a pour objet d'allouer 100 millions d'euros supplémentaires à la régénération du RRNNC en 2026. Ce réseau est dans un état très préoccupant, qui s'aggrave d'année en année.

La conférence Ambition France Transports préconise de porter à 1,4 milliard d'euros les efforts en faveur de la régénération du RRNNC, soit 700 milliards d'euros supplémentaires chaque année. Notre amendement constitue un premier pas vers la résorption de la dette grise du RRNNC, ou permettra du moins d'éviter qu'elle ne s'aggrave davantage.

M. Jean-Pierre Corbisez. - Je m'abstiendrai sur cet amendement.

Permettez-moi de le rappeler : notre commission a mené, en 2018, à la suite de l'effondrement du pont de Gênes, une mission d'information sur la sécurité des ponts, qui a rendu son rapport l'année suivante. Nous étions alors très inquiets à l'idée de placer les collectivités locales devant une nouvelle responsabilité : prévoir un financement dédié à la rénovation de leurs ouvrages d'art. Auparavant, jamais un maire n'avait imaginé se retrouver un jour dans l'obligation de rénover un ouvrage d'art ; certaines communes ignoraient même qu'elles étaient propriétaires d'un tel ouvrage.

Alors que le programme national ponts recense toutes les communes concernées par un ouvrage d'art problématique, on ne peut accepter de ne doter le PNP que de 50 millions d'euros ! Quitte à proposer un financement supplémentaire, pourquoi ne pas l'affecter directement au programme national ponts en faveur des collectivités locales ?...

Dans ma circonscription, le Cerema m'a indiqué que je devrais attendre dix ans minimum avant d'envisager qu'un ouvrage d'art en mauvais état soit rénové. Or nous proposons de donner de l'argent à l'État pour qu'il entretienne ses routes nationales ! Il y a des limites ! Doublons plutôt les 50 millions d'euros affectés au PNP.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - Monsieur Corbisez, j'entends votre argument ; vous pourrez déposer un amendement en ce sens en séance publique. Cela dit, la dette grise du réseau ferroviaire et du réseau routier doit aussi être prise en considération à l'échelle nationale. Si nous ne le faisons pas maintenant, y compris dans le cadre du programme national, nous le paierons de toute façon demain.

Je partage votre avis au sujet du PNP. Nous essayons de trouver une voie pour que notre amendement puisse être accepté par le Gouvernement et la commission des finances.

L'amendement n° II-1417 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  II-1418 a pour objet d'allouer 50 millions d'euros supplémentaires à l'entretien et à la réparation des ouvrages d'art de l'État, dont le tiers présente aujourd'hui un défaut ou une altération de la structure.

L'amendement n° II-1418 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  II-1419 prévoit d'allouer 50 millions d'euros supplémentaires au plan vélo et marche 2023-2027 dès l'année prochaine, après l'année blanche de 2025. Le PLF pour 2026 prévoit des niveaux de crédits très modestes pour le vélo : 31 millions d'euros d'AE et 73 millions d'euros en CP, loin de l'enveloppe de 250 millions par an qui avait été promise.

Cet amendement vise à éviter un désengagement de l'État sur le sujet. Il s'inscrit en outre dans une logique d'appui à l'intermodalité au sein des intercommunalités.

L'amendement n° II-1419 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  II-1420 vise à rétablir le bonus vélo, qui avait été supprimé par le Gouvernement en février 2025. Ce dispositif permettait de soutenir l'achat d'un vélo, notamment électrique, grâce à une subvention pouvant aller de 150 à 2 000 euros. Sa suppression est un mauvais signal et risque d'enrayer la dynamique positive qui avait été impulsée au profit du vélo depuis 2017. Nous proposons de le rétablir grâce à une enveloppe de 10 millions d'euros.

L'amendement n° II-1420 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  II-1421 vise à allouer 20 millions d'euros supplémentaires au leasing social l'année prochaine, afin d'y rendre éligibles les véhicules d'occasion. Il convient de tirer parti de la montée progressive en puissance du marché du véhicule d'occasion pour soutenir l'accès à la mobilité électrique des ménages les plus modestes.

Dans un contexte d'arrivée de véhicules électriques d'occasion sur le marché, cet amendement constituera un signal important adressé aux ménages modestes, qui ne peuvent acquérir un véhicule électrique neuf. Un « coup de pouce » leur est ainsi accordé sous conditions de ressources.

L'amendement n° II-1421 est adopté.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports routiers, sous réserve de l'adoption de ses amendements.

M. Jean-François Longeot, président. - Avant de clore nos échanges du jour sur le PLF 2026, je tenais à vous informer qu'un amendement de première partie déposé il y a quinze jours au nom de notre commission par le rapporteur sur les transports routiers, M. Hervé Gillé, a été rectifié pour être rendu identique à un amendement du Gouvernement.

Il s'agit de l'amendement n°  I-1059 rectifié bis qui vise à flécher vers l'Afit France, au profit du PNP, la fraction d'un douzième du produit de la taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance (Teild) qui bénéficie aujourd'hui au bloc communal pour l'exercice de la compétence voirie.

Le Gouvernement a déposé lundi un amendement suivant le même objectif, qui différait néanmoins sur la forme, et qui a recueilli un avis favorable de la commission des finances. Nous avons donc procédé à la rectification de l'amendement de la commission pour le rendre identique à celui du Gouvernement, qui a toutes les chances d'être adopté en séance publique.

En conséquence, l'amendement n°  I-1060 de la commission a été retiré. Cet amendement, qui visait à rehausser en conséquence le plafond d'affectation à l'Afit France du produit de la Teild, est en effet satisfait par l'amendement I-1059 rectifié bis de la commission.

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