B. LA DIMINUTION DES RECETTES PUBLIQUES DÉDIÉES À L'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER IMPLIQUE D'ORIENTER L'AEFE VERS UN NOUVEAU MODÈLE ÉCONOMIQUE

La subvention pour charges de service public prévue par le PLF pour 2026 diminue de 6 % par rapport à la LFI 2025, passant de 416 000 € à 391 000 €, ce qui aggrave la situation financière de l'agence, déjà fragilisée à l'issue de l'exercice 2025. Concomitamment à cette baisse, l'AEFE supporte l'augmentation de diverses charges :

- sa masse salariale augmente, notamment du fait du glissement vieillesse technicité et de la revalorisation de la rémunération des enseignants ;

- l'AEFE doit combler près de 10 M€ de dépenses supplémentaires, à la fois en 2025 et en 2026, pour financer l'augmentation de 4 points, en 2025 puis en 2026, de la part patronale de pensions civiles qu'elle prend en charge pour ses 5 000 personnels détachés.

L'AEFE avait prévu de supprimer, dès 2025 et pour trois années consécutives, 50 ETPT. Ces suppressions ont été entièrement compensées par l'augmentation du taux de la part patronale de pension civile.

Cette situation amènera la trésorerie des services centraux à 49 M€ au 31 décembre 2025, soit en-dessous du seuil prudentiel de 55 M€ correspondant à un mois de masse salariale, et atteindrait seulement 9,6 M€ fin 2026 en l'absence de correctif.

Pour permettre à l'opérateur de retrouver une stabilité budgétaire, une évolution du modèle économique de l'agence doit être envisagée. Un groupe de travail interministériel institué au cours de l'année 2025 a établi des propositions, en cours d'arbitrage interministériel ; ces pistes d'évolutions induiraient une hausse de la participation des établissements au financement de l'enseignement français à l'étranger et, donc in fine, une augmentation des frais de scolarité :

- dans l'immédiat et pour la seule année 2026, il s'agirait d'augmenter le taux de la participation forfaitaire complémentaire (PFC) de 6 à 10 %. Cette décision peut intervenir à la seule initiative de la directrice générale de l'AEFE ;

- à partir de 2027, l'assiette de la PRRD (participation à la rémunération de résidents et détachés), une contribution proportionnelle au nombre de personnels détachés au sein de l'établissement, inclurait le montant de la pension civile. Cette réforme nécessiterait de signer un avenant contractuel avec tous les établissements conventionnés du réseau.

La part de la contribution des parents d'élèves est donc destinée à augmenter. En 2024, les parents participaient au financement des établissements en gestion directe (EGD) et des établissements conventionnés à hauteur de 64,2 %.

La mixité sociale dans le réseau de l'enseignement français à l'étranger (EFE)

L'EFE est un système éducatif payant pour les familles, qui ne répond pas à l'obligation de la gratuité de la scolarité telle qu'elle existe dans l'enseignement public en France. Même si les droits de scolarité semblent mesurés par rapport aux établissements internationaux concurrents (notamment anglosaxons), le risque demeure que ces droits freinent la mixité sociale du réseau de l'EFE. À la rentrée 2024, la moyenne des droits de scolarité des établissements homologués est de 6 240 € par an, masquant des écarts extrêmes allant de 71 € à Madagascar contre une moyenne états-unienne de 43 336 €. Entre 2018 et 2024, ces droits ont augmenté de 15 %. Les 129 nouveaux établissements homologués entre 2019 et 2024 ont plutôt tendance à se positionner sur des tarifs plus bas que ceux de l'ensemble du réseau, et l'évolution de leur tarif sur cinq ans est inférieure à celle de l'augmentation générale du réseau.

Il n'existe pas d'outil type indice de position sociale (IPS) permettant d'établir et de coordonner des statistiques sur l'origine sociale des parents. Ainsi, seuls 72 % des chefs d'établissements disposent des moyens de connaitre la catégorie socio-professionnelle des parents.

Conformément à l'article 9 de la loi n° 2022-272 du 28 février 2022, visant à faire évoluer la gouvernance de l'AEFE à l'étranger et à créer les instituts régionaux de formation, le Gouvernement a remis au Parlement en avril 2025 un rapport évaluant la mixité sociale dans le réseau d'enseignement français à l'étranger et ses perspectives d'évolution. Le réseau présente une mixité sociale plus étendue pour les élèves de nationalité française que pour les élèves étrangers, essentiellement grâce au dispositif d'aide à la scolarité qui demeure un outil de mixité sociale efficace. Les bourses scolaires sur critères sociaux, dont le montant est fixé au programme 151 (Français à l'étranger et affaires consulaires) continuent à être un véritable levier pour permettre aux familles modestes d'accéder à l'EFE. Ces aides à la scolarité, calculées sur la base des ressources familiales, prennent la forme d'exonération partielle ou totale des droits de scolarité et bénéficiaient à environ 20 000 élèves français en 2023, soit 16 % d'entre eux. Si la quotité moyenne de bourse est de 77 %, plus de la moitié des boursiers le sont à 100 %. Pour les élèves boursiers, la rémunération des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) est prise en charge à 100 %.

La principale problématique demeure celle de la scolarisation des familles à revenus intermédiaires, ne pouvant prétendre à une bourse. La question du départ hors du réseau d'élèves français non boursiers pour des raisons budgétaires semble se poser dans environ 40 % des établissements de l'EFE. Face à ces situations, les chefs d'établissement font part de leur impuissance, ne pouvant que proposer la mise en place d'un échelonnement des paiements.

Le nombre de boursiers mais aussi le nombre de demandes de bourses diminuent fortement depuis deux ans. Le montant des bourses scolaires versé depuis le programme 151 devrait être de 105,4 M€ dans le PLF pour 2026, en baisse de 4 %, du fait d'un recul de 10 % du nombre d'élèves boursiers français.

Depuis 2019, les enseignants ne peuvent plus être maintenus en position de détachement au-delà de six années scolaires consécutives dans le réseau. Le nombre de personnels impactés par les effets de ce bornage ne dépasse pas 20 à 30 personnes en 2025 mais augmentera en 2026 pour atteindre un niveau important en 2027. Le bornage conduit à un renouvellement plus fréquent des personnels, et donc à un processus de recrutement plus intense avec des risques démultipliés de refus de détachement compte tenu de la tension sur les effectifs en France. À chaque rentrée, des personnels sélectionnés par les commissions locales voient leur demande de détachement refusée, ce qui donne lieu à des vacances de postes. C'est particulièrement le cas dans certaines académies en tension, notamment pour les professeurs des écoles. L'objectif pour 2026 est de faire diminuer le nombre de refus de détachement avec la mise en oeuvre d'un nouveau calendrier des comités sociaux d'administration, revu pour l'adapter au calendrier de recrutement des personnels enseignants détachés qui s'organise désormais en décembre à la place du mois de mars.

Il convient enfin de signaler le lancement de la plateforme « Talents » destiné à faciliter le recrutement des personnels de droit local, qui représentent au final l'immense majorité des personnels employés dans les établissements homologués de l'EFE.

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