EXAMEN EN COMMISSION
MARDI 25 NOVEMBRE 2025
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M. Laurent Lafon, président. - Nous poursuivons nos travaux avec l'examen de l'avis de notre collègue Jacques Grosperrin sur les crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis des crédits relatifs à l'enseignement scolaire. - Je salue la présence de M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission « Enseignement scolaire ».
Dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026, le budget des cinq programmes du ministère de l'éducation nationale s'élève à 63,02 milliards d'euros, hors compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ». Il enregistre une légère hausse de 166 millions d'euros, soit 0,26 %, par rapport à l'an dernier.
Avant de m'arrêter sur les équivalents temps plein (ETP), dont la variation va constituer le coeur de nos débats, je souhaite revenir sur les principales hausses et baisses hors titre 2.
On observe une baisse de 54 millions d'euros pour le renouvellement des manuels scolaires. Si deux manuels doivent être renouvelés pour la classe de cinquième, le ministère estime que l'un des deux renouvellements peut se réaliser à partir des reliquats dont disposent les établissements scolaires au titre des précédents renouvellements de manuels financés.
Par ailleurs, la ligne relative à la gratification des stages professionnels enregistre une baisse de 36 millions d'euros. Le ministère justifie cette décision par la trésorerie importante de l'Agence de services et de paiement (ASP) lors des deux premières années de mise en oeuvre du dispositif.
Deux fonds sont mis en quasi-extinction. Concernant le fonds pour l'innovation pédagogique (FIP) lancé en 2022 par le Président de la République, les travaux de notre commission ont montré une absence de pilotage et de définition précise de l'innovation pédagogique. Les crédits inscrits dans le PLF pour 2026 financent des projets engagés avant décembre 2024. Le fonds de soutien au développement des activités périscolaires (FDSAP), quant à lui, n'existe plus depuis la rentrée 2025, à l'exception des communes de Mayotte pour lesquelles il est maintenu.
Les crédits dédiés à la part collective du pass Culture sont en diminution de 10 millions d'euros. Le ministre a indiqué vouloir recentrer le dispositif, afin de mieux le contrôler et d'éviter les effets d'aubaine. Au-delà du montant de l'enveloppe dans le contexte budgétaire actuel, je souhaite revenir sur les évènements de janvier dernier. Les chefs d'établissement ont appris qu'ils avaient 48 heures pour valider l'ensemble des projets avant la fermeture jusqu'à la fin de l'année scolaire de la plateforme Adage. La raison de ce brusque arrêt est liée à une consommation trop rapide des crédits, le ministère craignant de dépasser le montant de l'enveloppe dédiée.
Lors de l'audition, les personnels de direction ont alerté sur les difficultés entraînées par cette coupure en cours d'année. C'est la deuxième fois qu'un tel procédé est utilisé après l'annonce d'une suspension de l'attribution des heures supplémentaires effectives (HSE) en mai 2024, suivie d'un rétropédalage du ministère. Si des réductions budgétaires peuvent arriver, il est important de donner aux chefs d'établissement et aux équipes pédagogiques une visibilité budgétaire allant au moins jusqu'à la fin de l'année scolaire.
La revalorisation des bourses sociales, à hauteur de 21 millions d'euros, a également retenu mon attention. Celle-ci est liée à l'automatisation de l'attribution des bourses pour les élèves du public depuis la rentrée de 2025, et à son extension à ceux du privé lors de la rentrée de 2026. Par ailleurs, le montant des échelons a été légèrement revalorisé.
Le schéma d'emploi prévoit la création de 5 440 ETP. Celui-ci résulte de deux actions qu'il convient de distinguer : d'une part, la réforme de la formation initiale et, d'autre part, la déprise démographique. Sachant l'avancement du concours à bac + 3, les lauréats poursuivront pendant deux ans leur formation en master sous le statut de fonctionnaire ; je reviendrai plus tard dans mon propos sur cette réforme.
Dans le même temps, nous devons tenir compte de la déprise démographique. La situation est connue de tous : le nombre d'élèves diminue. Dans le premier degré, on prévoit une baisse de 116 000 élèves pour la rentrée de 2026 ; entre 2024 et 2029, on annonce une baisse de 560 000 élèves dans nos établissements. Cette baisse atteint également le collège, avec une diminution de 29 000 élèves en 2026 et de 44 500 élèves l'année suivante.
Par rapport à l'an dernier, la diminution du nombre d'ETP d'enseignants titulaires prévue dans le cadre du PLF - soit 4 000 postes - me semble raisonnable. À trop attendre, nous risquons dans quelques années une cassure nette au moment du rattrapage qui devra nécessairement avoir lieu. Cela aurait des conséquences pour les étudiants avec une forte diminution du nombre de places au concours, ainsi que pour les collectivités territoriales et les équipes pédagogiques, avec des fermetures de classes et une déstabilisation du maillage territorial scolaire.
En revanche, il ne me semble pas opportun d'aller au-delà du schéma d'emploi proposé, car cela entraînerait un nombre important de fermetures de classes dans les territoires, avec de fortes conséquences au niveau social. Les petites écoles seront sans doute préservées, sachant qu'il est difficile de fermer une classe dans une école où l'on en compte seulement deux ou trois. Seront principalement touchées les villes de taille moyenne, qui connaissent déjà un sentiment de déclassement, ainsi que les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) ; c'est la France périphérique qui va souffrir le plus.
Pour amortir le choc, le ministère devra sans doute renoncer à certaines de ses priorités ; je pense au développement des toutes petites sections, aux mesures en faveur des écoles orphelines, à l'accompagnement renforcé de 15 % des collèges les plus défavorisés concentrant la très grande difficulté scolaire, ou encore au développement des unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis). Sans doute sera-t-il tenté également de rogner sur les effectifs des brigades de remplacement, à rebours de l'effort effectué cette année pour les reconstituer.
On peut aussi s'interroger sur les conséquences d'une suppression d'ETP plus importante que prévu sur les recrutements. Cela entraînera une diminution du nombre de places au concours, au moment où le ministère réforme celui-ci pour le rendre plus attractif. Par ailleurs, cela entravera la capacité du ministère à mettre à disposition suffisamment de personnels pour assurer 50 % du volume horaire des cours du nouveau master. Enfin, l'enseignement privé sera touché du fait de l'application du principe budgétaire des 80-20, avec des fermetures d'établissements en prévision.
Je ne serai pas beaucoup plus long sur l'analyse de ce budget, car je souhaite évoquer la mise en oeuvre de la réforme de la formation initiale. Je mentionnerai seulement un effort en faveur du médico-social, avec le recrutement de 300 assistants sociaux, infirmiers et psychologues scolaires. Le ministère souhaite éviter un saupoudrage en concentrant les personnels dans les établissements où les besoins sont les plus importants.
Enfin, le budget prévoit la création de 1 200 postes d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). Cette nouvelle hausse ne satisfait pas pour autant les besoins. Fin octobre 2025, 36 000 enfants bénéficiant d'une notification AESH étaient encore en attente d'attribution. Une réforme systémique de l'école inclusive s'impose.
Mes chers collègues, en l'état, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
Je souhaite maintenant faire un point sur la mise en oeuvre de la réforme initiale au regard des recommandations de la commission. Dans un consensus partagé par tous les acteurs du monde éducatif, nos travaux avaient établi le constat d'une formation initiale inadéquate ; je vous renvoie au rapport de juin 2024 de nos collègues Max Brisson et Annick Billon sur cette réforme.
Nous appelions à une reprise en main par l'éducation nationale de la formation de ses futurs enseignants : le nouveau master éducation et enseignement (M2E) prévoit une présence renforcée de formateurs exerçant dans l'enseignement scolaire, afin de délivrer un enseignement au plus près de la réalité pédagogique et du métier. Par ailleurs, le ministère envisage une formation continue, de la licence aux trois années qui suivent la titularisation, impliquant un développement progressif des compétences professionnelles des enseignants sur un continuum de huit ans.
J'en viens à la nouvelle licence du professorat des écoles (LPE), qui répond aux besoins d'une formation pluridisciplinaire et polyvalente pour les enseignants du premier degré. Celle-ci implique des stages obligatoires en milieu scolaire, notamment dès la fin du premier semestre pour confronter rapidement les étudiants à la réalité du métier et, le cas échéant, leur permettre de se réorienter.
Je rappelle ce chiffre : près de 30 % des lauréats actuels du concours du professorat des écoles n'ont jamais effectué un stage d'observation avant leur prise de poste.
Toutefois, de nombreuses interrogations demeurent, d'autant que cette réforme se réalise dans la précipitation et avance par à-coups en raison de l'instabilité politique.
Il est urgent de finaliser les procédures d'accréditation des universités qui proposeront le nouveau master, ainsi que la carte des formations de la licence. Dans moins de trois semaines, la plateforme Parcoursup sera ouverte afin de présenter l'ensemble des formations disponibles ; il s'agira d'y retrouver l'ensemble des LPE, avec un maillage territorial suffisant. L'enjeu est le même pour les masters avec la plateforme Mon Master, qui sera ouverte début février 2026.
Concernant le concours du premier degré, il convient de préciser rapidement les modalités de passage de celui-ci pour les étudiants issus des LPE. Le ministère souhaite exempter des deux épreuves d'admissibilité les étudiants ayant montré leur maîtrise des connaissances disciplinaires au cours de la licence. Or, le concours prévoit quatre épreuves, avec une note allant de 0 à 20 pour chacune d'elles. Comment noter les étudiants sur ces deux épreuves qu'ils n'auront pas passées ? Les notes d'admissibilité, liées à des oraux, seront-elles les seules prises en compte pour tous les candidats ?
L'échéance est encore lointaine, les premiers concours concernés ayant lieu en 2029. Mais, si la moyenne des trois années de licence est prise en compte, la question se posera plus tôt, dès les examens du premier semestre 2027. Par ailleurs, cela risque de compliquer une intégration de la LPE en cours de formation.
La réussite de cette réforme repose sur la capacité de mobilisation du ministère ; je pense notamment à ces 50 % du volume horaire des cours en master qui devront être assurés par ses personnels. Les services déconcentrés, en lien avec les universités, doivent également proposer aux étudiants en licence et en master un nombre suffisant de stages d'observation et de responsabilité, proches de leur lieu d'études ou de résidence afin de tenir compte de leur faible mobilité.
En conclusion, je souhaite revenir sur la carte scolaire pluriannuelle. Celle-ci restera à l'état de belle idée tant que la définition du nombre d'ETP sera annuelle. Il est essentiel de définir un schéma pluriannuel des ETP permettant de dessiner une trajectoire connue de tous à l'avance. Cela aurait peu de sens de le faire en 2026 en raison des échéances électorales nationales. En revanche, quel que soit notre groupe politique, nous pourrions porter collectivement cette demande à partir de 2027. Sans cela, l'école ne pourra que subir la déprise démographique et se cantonnera à une navigation à vue, année après année.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la commission des finances sur les la mission « Enseignement scolaire ». - Différents éléments ont conduit à l'élaboration de ce budget consacré à l'enseignement scolaire. Premièrement, il y a le contexte financier. Je ne reviendrai pas sur la dette, mais celle-ci a orienté les réflexions du ministère et celles de la commission des finances afin de proposer certains ajustements.
Deuxièmement, j'évoquerai - c'est peut-être le point le plus important - l'effondrement démographique de notre pays. En termes d'effectif scolaire, après une baisse de 100 000 élèves l'an dernier, celle-ci est de 107 000 élèves cette année et sera de 140 000 élèves l'année prochaine, avec l'arrivée dans les écoles maternelles des enfants nés en 2022 et 2023, deux années où l'on avait observé une diminution de 7 % des naissances.
Cet « hiver démographique » n'est pas spécifique à la France ; il est commun à tous les pays industrialisés. En France, le taux de fécondité décline, pour atteindre aujourd'hui 1,6 enfant par femme. Nous sommes obligés de tenir compte de ce phénomène à la fois triste et inquiétant afin de mettre en adéquation notre système scolaire et la démographique de notre pays.
Pour la première fois, entre le 1er juin 2024 et le 31 mai 2025, le nombre des naissances a été inférieur à celui des décès. En 2023, on recensait 653 000 naissances, contre 833 000 en 2010.
Troisièmement, depuis quelques années, le nombre d'enseignants s'est stabilisé. Entre 2015 et 2025, on observe même une légère augmentation, aussi bien dans le premier que dans le second degré.
Quatrièmement, on constate un manque d'attractivité du métier, raison pour laquelle le ministère a engagé une réforme de la formation continue. Le nombre de places vacantes lors des concours s'avère de plus en plus important. Le métier n'attire plus pour de nombreuses raisons, la principale étant financière. Le Gouvernement a fait des efforts ; par exemple, la promesse du Président de la République sur les salaires des nouveaux professeurs, s'engageant à passer la barre des 2 000 euros mensuels, a été tenue.
En revanche, la situation des enseignants en milieu de carrière laisse à désirer, surtout si on la compare à celle de nos voisins européens. Au-delà de la réforme de la formation initiale, il convient d'effectuer un effort financier. Pour cela, dans le contexte budgétaire actuel, la commission des finances propose d'augmenter le nombre de non-renouvellements de postes afin d'utiliser une partie de l'argent dégagé - au moins 25 millions d'euros - pour revaloriser les salaires de cette catégorie d'enseignants ; voilà ce que nous sommes en train de négocier avec le ministre.
Mme Marie-Pierre Monier. - Depuis quelques années, les ministres de l'éducation nationale se succèdent plus rapidement que nos exercices budgétaires. À regarder le nombre de suppressions de postes - 4 018 ETP d'enseignants, dont 1 891 postes dans le premier degré et 1 365 postes dans le second degré -, les crédits de la mission connaissent moins de nouveautés. On a l'impression de revenir à la version initiale du PLF de 2025, que notre mobilisation avait permis d'améliorer au fil de l'examen du budget.
Nous regrettons le choix comptable proposé au nom de l'évolution démographique. La dernière étude de l' Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), parue en septembre 2025, rappelle que la France a un taux d'encadrement plus défavorable que la moyenne des autres pays. À nos collègues qui trouvent raisonnable cette suppression de postes, je rappelle les conséquences d'une fermeture de classes dans les territoires ruraux. Se mobiliser pour préserver des postes au niveau local n'a de sens que si nous luttons, au moment du budget, pour maintenir le nombre de postes nécessaire.
Concernant le second degré, les 1 365 suppressions de postes programmées vont plus loin encore que l'évolution démographique. En 2026, la baisse des effectifs dans le secondaire correspond à seulement 1 000 postes. Je rappelle par ailleurs que lorsque la démographie était en hausse dans le second degré, nous y avons supprimé des postes.
Concernant l'amélioration des conditions de travail des professeurs, dans un contexte où la carrière d'enseignant est confrontée à une crise d'attractivité sans précédent, le budget s'avère défaillant. En 2025, 1 700 postes sont restés vacants à l'issue des concours. Les départs volontaires d'enseignants représentent désormais plus de 15 % des sorties de la fonction publique, contre 2 % en 2012. Et cette année encore, 2 500 enseignants manquaient à l'appel le jour de la rentrée.
Sur le plan de la revalorisation budgétaire des professeurs, aucun nouvel effort significatif n'est prévu. Un rapport de l'OCDE paru en 2024 montre que les salaires des enseignants français n'ont progressé que de 1 % en huit ans, contre 4 % en moyenne dans les pays membres.
Si nous ne voulons pas que nos personnels enseignants renoncent, nous devons davantage les accompagner et les protéger face à la recrudescence des violences et des remises en cause. En 2023-2024, 57 % des enseignants du second degré ont vécu une atteinte à leur personne ou à leur bien. Le nombre de faits graves recensés dans les établissements a doublé en cinq ans. La protection fonctionnelle n'est pas accordée de façon systématique ; au-delà de l'écriture de la loi, des moyens supplémentaires sont nécessaires pour garantir sa mise en oeuvre sur le terrain et s'assurer que le « pas de vagues » ne corresponde plus à une réalité.
Enfin, sur le sujet de l'inclusion scolaire, la commission d'enquête menée à l'Assemblée nationale (AN) sur la prise en charge du handicap a conclu à de nombreuses lacunes. Lors de la dernière rentrée scolaire, près de 50 000 enfants étaient en attente d'un accompagnement malgré une notification en bonne et due forme. Aujourd'hui, 14 % des enfants ne bénéficient pas de l'accompagnement auquel ils ont droit, soit une augmentation de 33 % par rapport à l'an dernier. Face à ce constat dramatique, le recrutement de seulement 1 200 AESH supplémentaires n'est pas à la hauteur des enjeux.
Pour l'ensemble de ces raisons, notre groupe s'oppose à l'adoption des crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - La promesse républicaine de l'école consiste à élever le niveau général et à donner à tous les mêmes chances. Avec un tel budget, nous n'atteignons pas les objectifs fixés par cette promesse. Sachant les conditions de travail des personnels de l'éducation nationale, nous souhaitons que la baisse démographique ne s'accompagne pas d'une baisse des effectifs.
Aujourd'hui, les missions des personnels enseignants sont de plus en plus variées. L'enseignement doit s'adapter aux profils particuliers et aux besoins spécifiques des enfants. Le non-renouvellement des livres annonce également des complications à gérer pour les enseignants.
Concernant la réforme de la formation initiale, je m'interroge sur la capacité du ministère à mobiliser un nombre de formateurs suffisant. Il est précisé que la moitié du volume horaire doit être assuré par des praticiens de l'enseignement scolaire ; or, le ministre a indiqué que la cible ne serait pas atteinte cette année. Par ailleurs, il convient de préciser qui sont ces professionnels de l'éducation nationale.
Une autre interrogation porte sur l'attractivité du métier. Certes, on note une revalorisation des salaires en début de carrière, mais rien n'est fait pour les enseignants en milieu de carrière. Je souhaite également mettre l'accent sur un élément souvent oublié dans l'élaboration des politiques publiques : l'usure du métier.
Je dénonce les baisses budgétaires concernant la formation continue. Celles-ci témoignent d'un abandon des personnels et d'une dégradation des conditions d'accueil des élèves.
Enfin, l'inclusion scolaire repose sur le corps non reconnu des AESH, dont le nombre de recrutements demeure insuffisant.
Au regard de ce budget, l'école de la République subit des décisions précipitées et mal mesurées par le Gouvernement. Aussi, notre groupe s'oppose à l'adoption des crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
M. Max Brisson. - Le rapport de M. Grosperrin permet d'y voir plus clair sur les non-choix du Gouvernement en matière d'éducation. Les débats se focalisent déjà sur la question des postes supprimés. Le rapporteur spécial de la commission des finances a rappelé les enjeux de la baisse démographique. Si l'on appliquait la seule logique comptable, 18 000 postes seraient supprimés en deux ans ; le Gouvernement propose d'en supprimer 4 000, et notre rapporteur souscrit à cette proposition.
J'invite à dédramatiser le débat. Les 4 000 postes supprimés correspondent au nombre de postes non pourvus dans le cadre du concours l'année dernière. On peut vouloir ouvrir des postes, mais encore faut-il des candidats. Par ailleurs, la proposition de revaloriser les salaires des enseignants en milieu de carrière mérite d'être étudiée.
Nous sommes contraints à des rabotages budgétaires, car nous avons toujours refusé de réaliser les réformes structurelles. Les premières victimes sont les écoles rurales. Dans mon département, par le jeu des RPI, 101 professeurs exercent seuls dans leur école. Cela signifie que, si l'on supprime un poste dans ces territoires, on supprime l'école. Il serait donc judicieux de mener une réflexion sur l'offre scolaire en zones rurales. Par exemple, pourquoi ne pas intégrer le collège à cette offre ? Actuellement, celle-ci est le résultat de choix empiriques, avec de nombreuses fermetures de postes, de classes et d'écoles, sans jamais associer les élus à la réflexion.
Alors que s'impose cette réforme de l'offre pédagogique en zones rurales, le ministère de l'éducation nationale a précisé qu'il ne souhaite pas réformer, mais piloter. Jusqu'à présent, nous avons concentré nos réflexions sur les moyens et le nombre de postes ; or, rien ne bouge et tout décline. Faute de réformes structurelles, nous sommes aujourd'hui dans une impasse.
Mme Laure Darcos. - Il est dramatique de constater que 4 000 postes manquent à l'appel et que ce métier souffre encore d'un manque d'attractivité. Le dédoublement des classes a amélioré les conditions d'apprentissage des enfants, à un âge où s'acquièrent les savoirs fondamentaux. Le nombre de postes supprimés correspond à celui des postes non pourvus ; il s'agit de s'en tenir au nombre annoncé.
Je déplore le manque d'AESH, et soutiens l'initiative de mes collègues qui souhaitent créer un corps dédié.
Concernant le secteur paramédical, les infirmières, psychologues et médecins scolaires sont toujours, du fait de la décentralisation, affiliés à l'éducation nationale. Alors que la santé mentale des jeunes est devenue une cause nationale, nous manquons de personnels, le chiffre ne correspond pas à l'ambition fixée.
Comme l'an dernier, ce budget m'inspire un arrière-goût un peu amer. Ce qui m'attriste aujourd'hui, ce sont la résignation des syndicats et le sentiment de mal-être de nos enseignants. Sans doute est-ce dû aussi à la multiplication du nombre de ministres au cours de ces deux dernières années.
Mme Annick Billon. - Sur la base des conclusions données, notre groupe suivra l'avis du rapporteur, avec quelques points de vigilance toutefois. L'enseignement scolaire devient le deuxième budget de l'État, après la défense, en autorisations d'engagement (AE). La baisse démographique est un séisme, qui pourrait entièrement redessiner la carte scolaire. Entre 2025 et 2029, les effectifs du premier degré devraient baisser de 7 %, soit moins de 450 000 élèves en cinq ans. Sur la même période, les effectifs du second degré reculeraient d'environ 4 %.
Nous aurons un débat pour savoir s'il convient de supprimer des postes ou d'améliorer l'encadrement. Je rappelle que les classes françaises sont parmi les plus denses, avec en moyenne 21,6 élèves par classe dans le premier degré - davantage que dans des pays comme l'Allemagne, la Finlande et le Portugal - et 25,9 élèves par classe dans le second degré - seul le Japon, parmi les pays membres de l'OCDE, a un nombre supérieur.
Avec la création de 5 440 ETP dans le PLF pour 2026, du fait des 7 938 postes supplémentaires de stagiaires, le plafond d'emploi s'avère en hausse. Ces créations sont contrebalancées par la suppression d'environ 4 000 emplois titulaires. Le fait de supprimer 8 000 postes, comme le propose M. Paccaud, impliquerait de fermer 1 500 écoles, pour la plupart dans nos territoires ruraux. Aussi, même si cela permettrait peut-être de revaloriser les salaires d'enseignants en milieu de carrière, je ne suis pas favorable à cette suppression de postes.
Le projet de revalorisation des enseignants est resté au fond du cartable. De même, concernant le pacte enseignant, le bilan est mitigé. Celui-ci serait majoritairement utilisé par les hommes, entraînant un accroissement des inégalités de genre.
Sur l'inclusion scolaire, je soutiens une hausse du nombre d'AESH. Lors de la dernière rentrée scolaire, 42 000 enfants ne bénéficiaient pas de l'accompagnement auquel ils avaient droit. Le slogan affiché s'avère en décalage avec la réalité des familles. Dans certains territoires, il arrive que des AESH accompagnent 10 élèves en situation de handicap. Par ailleurs, on observe un manque de places dans les instituts médico-éducatifs (IME), ce qui entraîne une dégradation de la chaîne éducative.
Je souhaite également évoquer l'éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars) ; il en a beaucoup été question lors de la dernière rentrée, avec de nombreuses formations proposées. Encore une fois, le slogan est en décalage avec la réalité, sachant que seulement 15 % des élèves bénéficient de ces cours pourtant inscrits dans la loi.
Mme Monique de Marco. - Comme l'a indiqué ma collègue Annick Billon, pour la première fois, l'enseignement scolaire ne constitue pas le premier poste de dépenses de l'État. Cela illustre un changement dans les priorités de la Nation, et confirme la poursuite de la politique d'austérité menée depuis plusieurs années. Notre pays continue de sous-financer son école. Par ailleurs, l'éducation nationale est aujourd'hui reléguée au neuvième rang protocolaire dans le Gouvernement.
La création de 5 440 ETP cache la suppression massive et sèche de 4 018 postes d'enseignants. Cette dernière est justifiée par une logique comptable à laquelle je ne souscris pas. C'était l'occasion de revenir sur les taux d'encadrement et sur la taille des classes. Les marges de manoeuvre restent importantes, car toutes les études démontrent les effets significatifs de la réduction de la taille des classes sur les résultats scolaires, ainsi que sur le bien-être des élèves et des enseignants.
Cette suppression de postes risque de provoquer la fermeture de classes en zones rurales, notamment au niveau du premier degré. L'école constitue parfois le dernier service public dans ces territoires, et il faudrait réfléchir à une réforme de l'offre pédagogique comme l'a proposé M. Brisson.
La création de postes d'enseignants stagiaires est temporaire. Elle vise à permettre la mise en oeuvre progressive de la réforme initiale des enseignants et des conseillers principaux d'éducation (CPE). Celle-ci, annoncée au mois de mars dernier, reporte à 2026 la mise en place du concours d'entrée à bac + 3 au lieu de bac + 5.
On observe un ralentissement dans la création des postes d'AESH. Le PLF pour 2026 prévoit la création de seulement 1 200 postes, soit deux fois moins que l'an dernier et trois fois moins qu'il y a deux ans. Ces créations de postes s'avèrent donc une goutte d'eau dans l'océan.
J'en viens à la diminution des crédits liés à la formation. Cette importante coupe budgétaire de 1 milliard d'euros dépend d'une logique uniquement comptable. Cela témoigne du moindre intérêt que le Gouvernement accorde à la formation des enseignants, alors que les besoins ne cessent de s'exprimer. Selon une enquête de l'OCDE, 47 % des enseignants français considèrent qu'il n'existe pas de formations appropriées à leurs besoins. Le constat de cette sous-utilisation des crédits aurait dû conduire le Gouvernement à proposer des leviers d'amélioration de la formation continue des enseignants.
Monsieur Paccaud, je m'interroge sur votre proposition de revaloriser le salaire des enseignants en milieu de carrière. Où comptez-vous trouver les 25 millions d'euros nécessaires ? Pourquoi ne pas utiliser l'argent supprimé pour la formation ?
Concernant le pass Culture, on observe une diminution des crédits de 10 millions d'euros par rapport à l'an dernier. Ce dispositif favorise pourtant les sorties pédagogiques et l'accès à la culture dans les zones rurales et périurbaines. En janvier dernier, des projets n'ont pu aboutir faute de financements. Il existe une véritable attente sur ce sujet.
On ne parle plus du « choc des savoirs ». Parfois, on a donc raison avant tout le monde.
M. Bernard Fialaire. - Nous abordons ce projet de budget pour 2026 alors que s'invite dans le débat public la question des rythmes scolaires et des temps de l'enfant. Cela rend d'autant plus pertinentes les réflexions de notre collègue Max Brisson sur la nécessité d'engager une grande réforme de l'éducation nationale.
Je me désole de cette chute démographique, même si celle-ci doit permettre de diminuer les effectifs dans les classes. Par ailleurs, comme l'a rappelé Mme Darcos, nous avons observé le bénéfice des dédoublements de classes partout où cela a pu se réaliser.
Concernant les écoles rurales, il s'agit de ne pas vouloir maintenir à tout prix un service quand tant d'autres font défaut. Le sort des enfants ne doit pas servir d'alibi pour aborder le sujet.
Il n'est plus possible que les compétences du secteur médico-social soient gérées à la fois par les collectivités et l'éducation nationale. Concernant le handicap, la protection maternelle et infantile (PMI) prend en charge le dépistage avant de passer le relais à la médecine scolaire. Avec davantage de cohérence, nous gagnerons en efficacité. De même, concernant les AESH, lorsque les intercommunalités ont pris en main le recrutement, de nombreux postes en attente ont été pourvus. Nous devons clarifier la prise en charge du médico-social dans l'école et en dehors de l'école.
Au-delà de ces points de vigilance, je suivrai l'avis du rapporteur quant à l'adoption des crédits.
Mme Samantha Cazebonne. - Avec 89,6 millions d'euros en AE et en crédits de paiement (CP), les crédits de la mission sont préservés. Leur évolution s'inscrit dans la continuité d'une hausse progressive depuis 2019, de l'ordre de 3,15 milliards d'euros en six ans.
Ce budget traduit des priorités stratégiques essentielles : la maîtrise des savoirs fondamentaux, la lutte contre les inégalités sociales et territoriales, la lutte contre le harcèlement ou encore le soutien à la politique de l'école inclusive. En 2026, la mission portera une réforme d'ampleur, celle de la formation initiale, qui doit permettre de remédier aux difficultés d'attractivité du métier en rémunérant de futurs enseignants encore en formation.
Le PLF pour 2026 prévoit la création de 8 800 postes de fonctionnaires stagiaires. En parallèle, la baisse des effectifs d'enseignants de 4 600 ETP anticipe une diminution importante du nombre d'élèves dans le premier degré qui devrait s'accentuer dans les prochaines années.
J'attire votre attention sur le programme 214 concernant le soutien de la politique de l'éducation nationale. En commission des finances, trois amendements adoptés sur l'initiative du rapporteur spécial ont diminué, de façon importante, les subventions allouées à plusieurs établissements publics administratifs nationaux.
Le réseau Canopé, opérateur clé de la formation des enseignants et des alliances éducatives territoriales qui jouent un rôle particulièrement pour les Français de l'étranger, est déjà concerné par 111 des 142 emplois supprimés au sein des opérateurs de l'éducation nationale. L'adoption d'un amendement tendant à diminuer sa subvention de 20 millions d'euros risque de fragiliser plus gravement encore sa capacité à assurer ses missions de service public. Cela aurait de fortes conséquences sur la trésorerie de l'établissement. Je défendrai en séance un amendement visant à augmenter le budget alloué à cet opérateur, conformément à celui qui a été adopté par la commission des affaires culturelles de l'AN.
Le Centre national d'enseignement à distance (Cned) joue un rôle essentiel dans l'enseignement à distance à tous les niveaux de formation. Cet opérateur a également vu sa subvention diminuer de 15 millions d'euros en commission des finances.
Enfin, l'Office national d'information sur les enseignements et les professions (Onisep), opérateur national de l'orientation, est touché par une baisse de subventions votée par la commission des finances, de l'ordre de 5 millions d'euros.
Ces baisses risquent de fragiliser les opérateurs, dont le rôle est pourtant essentiel en matière de formation et d'enseignement. J'en appelle donc à rester vigilant et à ne pas suivre la position de la commission des finances.
Pour toutes ces raisons, notre groupe préfère s'abstenir concernant le vote des crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
M. Stéphane Piednoir. - Je souhaite mettre l'accent sur la réduction du nombre de postes dans l'éducation nationale. Il s'agit de prendre en compte la déprise démographique qui risque de s'accentuer dans les prochaines années. Quand on examine un budget, on ne peut pas s'exonérer de la logique comptable.
Par ailleurs, il convient d'améliorer la pratique et le quotidien des professeurs confrontés aujourd'hui à des difficultés qui relèvent davantage de l'évolution de la société que des moyens de l'éducation nationale. Le taux d'encadrement, notamment dans le premier degré avec 21 élèves par classe, s'avère en nette baisse. Certes, il existe des disparités importantes, mais la situation s'est améliorée.
La perte d'intérêt pour le métier d'un certain nombre de professeurs est liée à l'absence de motivation. Quand on annonce que, au bout du compte, 96 % des candidats auront le baccalauréat, on dénature l'exercice du métier.
L'an dernier, des mesures de réduction des effectifs avaient été envisagées sans finalement aboutir. Cette année, entre 4 000 et 8 000 suppressions de postes sont proposées. Il s'agit de revaloriser ce métier tout en développant des formations d'accompagnement.
Mme Colombe Brossel. - En complément des observations pertinentes formulées par Marie-Pierre Monier et d'autres collègues qui nous conduiront à ne pas suivre l'avis favorable du rapporteur, je souhaiterais que nous repartions de la situation concrète observée à la rentrée à l'intérieur des écoles, des collèges et des lycées. Je remercie d'ailleurs Jacques Grosperrin pour les auditions qu'il a organisées, car elles nous permettent de balayer largement le sujet et de disposer d'informations utiles.
Nous pouvons ainsi affirmer que l'annulation de la suppression de 4 000 postes, l'année dernière, n'a pas du tout servi à la revalorisation des salaires des enseignants, mais, selon la direction générale de l'enseignement scolaire (Dgesco), à créer 540 ETP en quatrième et troisième pour les groupes de besoins, à prévoir 500 ETP pour la création des pôles d'appui à la scolarité (PAS) - ils ne seront finalement pas généralisés -, 60 ETP pour les toutes petites sections (TPS), 800 ETP pour les remplacements et enfin 100 ETP pour le pilotage et l'encadrement.
La réalité observée dans nos territoires, quelles que soient leurs spécificités, est la suivante : dans le premier degré, les remplaçants sont tous « réservés » dès le premier jour, ce qui réduit à zéro nos capacités à assurer des remplacements ; dans le second degré, il manquait au moins un enseignant dans plus de 60 % des établissements. Dans ce contexte, est-il vraiment raisonnable de continuer à supprimer des postes, en ayant à choisir entre la proposition du ministère de supprimer 4 000 postes et celle de nos collègues de la commission des finances visant à en supprimer le double ? Si elle était retenue, cette dernière aurait, selon moi, de graves conséquences.
Pour ma part, je pense qu'il faut continuer à créer des postes d'enseignants, afin de continuer à réduire le nombre d'élèves par classe. Par ailleurs, nous continuons à payer le fait qu'un certain nombre de réformes n'en ont en fait que le nom et qu'elles sont mal pilotées. Je prends un exemple qui illustre à merveille les travers de notre système que nous payons, encore plus lorsque nous supprimons des postes par milliers : avec la mise en place du pacte enseignant, les heures supplémentaires effectives (HSE) ont quasiment disparu ; néanmoins, du fait du recentrage du pacte sur les remplacements, des séances d'éducation à la vie affective et relationnelle, et à la sexualité, qui étaient précédemment financées par le biais des HSE, ne peuvent plus être effectuées dans un certain nombre d'académies, alors même que l'Evars est rentrée dans les programmes ! Allons-nous continuer longtemps ainsi ?
Pour prendre un autre exemple, et même si je souscris à la nécessité de revaloriser les rémunérations en milieu de carrière, il s'avère que le pacte enseignant a amplifié les inégalités entre les enseignants du premier et du second degré, car ils n'y ont pas tous droit dans les mêmes conditions. De surcroît, le pacte a aussi été un accélérateur des inégalités de genre : alors que la profession est fortement féminisée, les enseignants hommes se positionnent le plus souvent pour effectuer des heures du pacte.
Face à ces dysfonctionnements récurrents, la seule réponse apportée consiste à continuer à supprimer des ETP, ce qui ne contribue en rien à améliorer notre système.
De la même manière, le dispositif « Devoirs faits » est devenu obligatoire dans tous les collèges en sixième, mais les moyens de le financer - qu'il s'agisse des HSE ou du pacte - ne sont ni obligatoires ni prévus dans l'ensemble des établissements : la réponse à ce dysfonctionnement, une fois encore, consiste-t-elle à couper la poire en deux entre une proposition de suppression de 4 000 postes et une autre visant à supprimer 8 000 postes ? Non, je ne le crois pas.
S'agissant enfin du médico-social, on pourrait a priori se satisfaire des créations de postes prévues par le budget, mais celles-ci sont fort éloignées des besoins et des réalités vécues dans les établissements : il n'y a ainsi qu'un psychologue scolaire pour 1 600 élèves, tandis que seuls 7 800 postes d'infirmiers scolaires existent alors qu'il en faudrait au moins le double, et je ne parle même pas des médecins scolaires, dont la rémunération est si faible que personne ne se porte candidat à ce métier. Là résident les véritables sujets et les nécessaires créations d'emplois, et pas à hauteur de 300 postes alors que l'éducation nationale accueille 12 millions d'élèves.
M. Pierre Ouzoulias. - Je m'interroge sur cette notion d' « hiver démographique » censé toucher tous les pays occidentaux : la Chine est peut-être devenue un pays occidental, car le nombre d'enfants par femme s'y élève à 1,15, contre 1,24 enfant par femme en Italie. Je pense que cet hiver est corrélé à un hiver démocratique : en effet, les citoyennes et les citoyens ne procréent plus lorsque la société ne fait plus sens pour eux, et c'est bien ce qui se passe dans cet Occident élargi à la Chine.
Je crois justement que l'éducation et la connaissance pourraient être un levier pour que les citoyens aient de nouveau foi en l'avenir et qu'ils fassent de nouveau des enfants. Au lieu de considérer qu'il faudrait accompagner la baisse démographique par la diminution du nombre de postes, nous pourrions considérer qu'une politique ambitieuse de la connaissance pourrait être un moyen de combattre la diminution de la natalité. Cette solution permettrait notamment d'éviter l' « ultra-métropolisation » de notre territoire, car les territoires ruraux perdront en attractivité du fait du manque d'enseignants, au profit des zones urbanisées.
Bernard Fialaire a évoqué les conclusions de la convention citoyenne sur les rythmes scolaires, que je trouve extrêmement inquiétantes en ce qu'elles révèlent une volonté de diminuer une nouvelle fois le nombre d'heures enseignées. Je me demande s'il ne faudrait pas, à l'inverse, profiter de ce recul démographique pour augmenter le nombre d'heures enseignées : si nos élèves se situent aujourd'hui à une place aussi basse dans les classements, c'est également à cause de la diminution du nombre d'heures à l'oeuvre depuis vingt ans.
S'agissant des professeurs, je vous laisserai le soin de leur proposer de travailler plus ; l'autre solution consiste à en conserver un certain nombre, de manière à disposer d'un plus grand nombre d'enseignants par classe et d'augmenter le nombre d'heures : cette réforme est selon moi indispensable, car il faut arrêter de considérer qu'une baisse du nombre d'heures enseignées peut être une solution viable dans une société « hyper-technologisée » telle que la nôtre.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis. - Je tiens à rappeler qu'il s'agit d'un budget d'urgence, qui ne satisfait logiquement ni les uns ni les autres. N'oublions pas que sept ministres se sont succédé en moins de deux ans et que la dissolution insensée décidée par le Président de la République nous a placés dans une situation très délicate. Partant de ce constat, il nous incombe de faire preuve de responsabilité et de voter un budget.
Je tiens à remercier mes collègues qui étaient présents aux auditions.
Notre collègue Olivier Paccaud a insisté sur la diminution du nombre d'élèves, dont nous sommes tous conscients.
Concernant le métier d'enseignant, les candidats le choisissent d'abord par vocation. Toutefois il regarde aussi la rémunération. Les efforts de rémunération faits sur les débuts et en fin de carrière ne doivent pas nous dispenser de travailler sur la revalorisation des rémunérations en milieu de carrière. J'espère que nous pourrons trouver un chemin pour avancer sur ce sujet, d'autant que vous devez débattre avec le ministre d'un arbitrage sur ce point.
Madame Monier, c'est triste à dire, mais le temps va jouer pour nous concernant le nombre d'élèves par classe. Ne nous leurrons pas : des suppressions de postes auront lieu chaque année, même si la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ne devrait pas être retenue pour l'éducation nationale. Vous avez aussi évoqué la crise de l'attractivité du métier, et je rappelle à tous mes collègues que la suppression de postes n'envoie pas un signal positif à ceux qui souhaitent exercer ce métier : soyons donc prudents en la matière.
Madame Corbière Naminzo, vous avez dressé un tableau assez noir de la situation. Constatons toutefois que des progrès ont été faits en matière d'inclusion scolaire, même si de trop nombreux enfants sont dans l'attente d'une solution de la part d'un pays tel que la France.
Comme le souligne Max Brisson, ce n'est effectivement pas en rajoutant toujours plus de moyens que nous parviendrons à faire mieux. Il faut dédramatiser le débat, notamment autour de la carte scolaire, mais il est vrai que les écoles rurales sont les premières affectées lorsque des postes sont supprimés.
Cela nous renvoie aux travaux que nous avons pu mener sur le maillage territorial, et je suis persuadé que nous devrons travailler différemment : l'école socle que vous évoquiez pourrait être une solution parmi d'autres, car diverses méthodes peuvent être employées afin de proposer une offre pédagogique étoffée.
Madame Darcos, vos réflexions m'invitent à recommander la lecture du livre intitulé Tout se joue avant six ans de Fitzhugh Dodson, tant les années allant de la petite section jusqu'au CE1 jouent un rôle crucial pour l'enfant.
Concernant les organisations syndicales, il est vrai qu'une grande résignation s'est exprimée au cours des tables rondes, mais, pour prendre le côté positif des choses, j'ai apprécié de les voir adopter une approche plus axée sur la proposition que sur la contestation : un changement semble être à l'oeuvre.
Madame de Marco, le budget de l'éducation n'est plus que le troisième budget de l'État, derrière celui de la défense, mais aussi celui du remboursement de la dette. Quant au « choc des savoirs », je pense qu'il a été rendu impossible par la valse des ministres à l'oeuvre depuis deux ans.
Notre collègue Bernard Fialaire a souligné la nécessité de renforcer la cohérence des actions dans le champ médico-social.
Madame Cazebonne, vous avez rappelé à juste titre les diminutions de crédits pour le réseau Canopé, le Cned et l'Onisep pour un total de 40 millions d'euros. Je tiens toutefois à rappeler le contexte budgétaire dans lequel nous nous trouvons.
Monsieur Piednoir, vous avez raison de souligner que la logique comptable n'est pas un gros mot : nous aurons ce débat et chacun défendra ses choix politiques.
Colombe Brossel évoquait l'annulation de la suppression de 4 000 postes. En complément des chiffres qu'elle a donné sur l'utilisation de ces postes, j'ajoute que 170 ETP de CPE ont été créés dans le cadre du plan « tranquillité scolaire ». Par ailleurs, le Pacte est venu renforcer les inégalités de salaire entre le premier degré et le second.
Enfin, monsieur Ozoulias, il faudra en effet augmenter le nombre d'heures dans un certain nombre de matières, car l'avenir de notre Nation passe par l'éducation et par nos jeunes.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à l'enseignement scolaire au sein de la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances pour 2026.