C. L'ABANDON BRUTAL DU DISPOSITIF « COLOS APPRENANTES », ALORS QUE LE SECTEUR PEINE À RETROUVER SON NIVEAU D'AVANT-CRISE SANITAIRE
1. Une année 2024 encore en deçà des objectifs
Après la chute historique de 2020 et le rebond qui a suivi, l'activité des accueils avec hébergement se stabilise en 2024 mais peine toujours à retrouver les niveaux d'avant-crise sanitaire. Le nombre de séjours organisés s'élève à 47 500 en 2023-2024, soit 7 100 de moins qu'en 2018-2019 (- 13,2 %). Les acteurs du secteur sont pessimistes quant à l'évolution future de ces chiffres, alors que 30 % des structures déclarent avoir une visibilité sur leur avenir à moins de trois mois en 2025.
Le nombre de départs de mineurs suit une évolution comparable : après deux années historiquement basses, il s'établit à 1,34 million en 2023-2024, soit + 1,3 % sur un an, mais encore - 6,3 % par rapport à 2018-2019. Si cette progression doit être saluée, cette croissance marque un net fléchissement comparativement aux années de rattrapage précédentes, qui préoccupe grandement les acteurs du secteur.
Effectifs de départs de mineurs en séjours collectifs selon l'année
Source : Observatoire des Vacances et des Loisirs des enfants et des jeunes (Ovlej)
2. La fin inattendue des Colos apprenantes, à contre-courant des enjeux du secteur
La mise en place des « colos apprenantes » à partir de l'été 2020 a significativement contribué à atténuer la baisse historique d'activité des accueils collectifs de mineurs avec hébergement.
Jusqu'alors financé par redéploiement de crédits puis pérennisé au sein de la LFI depuis l'année dernière, le dispositif poursuit l'objectif de faire partir un maximum de jeunes dans des séjours labellisés par les services de l'État, avec une double ambition pédagogique et de mixité sociale. Ces séjours sont financés localement par les services de l'État ou des associations.
Les « colos apprenantes » ont permis de toucher un nouveau public puisqu'une grande partie des jeunes partis depuis la mise en place du dispositif sont des « primo-partants ». À ce jour, plus de 400 000 mineurs sont partis en « colos apprenantes » depuis leur création, dont 88 000 en 2024.
Or, malgré le succès des Colos apprenantes, le PLF 2026 ne prévoit plus aucun crédit pour permettre leur mise en oeuvre.
Alors que 57 % des familles non-partantes évoquent le coût comme principal frein au départ, le rapporteur déplore cette suppression sèche d'un dispositif non seulement utile pour redynamiser un secteur en grande difficulté, mais également très efficace en termes de mixité sociale et de soutien aux départs.
Le Pass colo doit être encouragé mais ne peut à lui seul parvenir à redynamiser le secteur
Créé dans le cadre du Pacte des solidarités, le Pass colo est un dispositif de l'État permettant de rendre accessibles les départs en colonies de vacances des enfants l'année civile de leurs 11 ans grâce à une aide financière allant de 200 à 350 euros. Doté d'une enveloppe de 9 millions d'euros en 2024 financés par le programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes » relevant du ministère du travail, de la santé et de la solidarité, le Pass colo a permis à 16 000 enfants de partir en colonie de vacances en 2024. L'objectif est fixé à 32 000 bénéficiaires pour 2025.
D'après une évaluation du dispositif menée par l'Injep en 2025, environ 600 000 familles ayant un enfant de 11 ans et un quotient familial (QF) compris entre 0 et 1 500 € étaient éligibles au dispositif en 2024. Or, seuls 29 % des parents éligibles ont entendu parler du Pass colo cette même année, et seulement 3 % s'en sont saisis. Une importante marge de progression existe donc, qui pourrait être obtenue en informant mieux sur le dispositif et sur l'intérêt du départ en colonie de vacances.
Si ce dispositif a été peu mobilisé, il l'a cependant été par un public en potentielle situation de précarité : les familles monoparentales et les familles à faibles revenus, dont les enfants partent généralement moins en colonie de vacances. Il répond ainsi à sa cible principale, mais s'avère réducteur dans la pratique, puisqu'il ne s'adresse qu'aux enfants d'une certaine tranche d'âge, limitant ainsi les départs semi-collectifs (avec un frère ou une soeur, des cousins ou amis plus jeunes ou plus âgés), pourtant de nature à faciliter les premiers départs.
Le rapporteur se félicite donc du succès de ce dispositif essentiel pour garantir à chaque enfant l'accès à des loisirs de qualité. Il encourage le Gouvernement à communiquer davantage sur l'existence du Pass Colo pour permettre à un plus grand nombre d'enfants d'en bénéficier dans les années à venir.
Toutefois, la revitalisation du secteur ne pourra être assurée sans que ne soit instaurée une politique globale de soutien aux séjours collectifs de vacances. Alors que 38 % des 5-19 ans ne sont pas partis en vacances 2024, soit environ 4,8 millions d'enfants, il est plus que jamais urgent de mettre en oeuvre un plan d'action sur le temps long, coordonné avec les prescripteurs de proximité (collectivités, établissements scolaires, associations...), pour sensibiliser davantage les familles et les enfants à l'intérêt des colonies de vacances et redynamiser durablement le secteur.
