B. L'AVENIR DE LA POLITIQUE SOCIALE EN FAVEUR DES ÉTUDIANTS

Le mouvement sans précédent de démocratisation de l'enseignement supérieur observé depuis quelques années s'est traduit par une demande accrue de formations émanant des étudiants issus de milieux sociaux moins favorisés que par le passé.

Compte tenu du fait que l'échec universitaire, ou l'abandon d'étude, résulte fréquemment de difficultés d'ordre social, le Gouvernement envisage d'examiner prioritairement le futur statut de l'étudiant lors de la prochaine consultation sur la réforme de l'enseignement supérieur, des mesures concrètes devant être proposées avant la fin du premier trimestre de 1996, soit trois mois avant la présentation du dispositif d'ensemble appelé à réaménager notre système universitaire.

1. L'état actuel du système d'aides aux étudiants

La politique d'aide aux étudiants engagée depuis plusieurs années s'est élargie à l'ensemble des domaines de la vie étudiante (santé, aide sociale, prêts, participation à la vie des établissements, restaurants, résidences universitaires, bourses et logement).

a) Les aides à la santé

Le dispositif mis en place s'attache à répondre aux difficultés d'adaptation et de santé rencontrées par les étudiants au cours de leurs études.

Les services de médecine préventive et de promotion de la santé mis en place par les établissements ont pris ainsi une part de plus en plus active dans la réalisation de campagnes de prévention et d'éducation sanitaire portant notamment sur le SIDA et les MST, le tabagisme et autres toxicomanies, la contraception, l'information et les conseils dans les domaines de la nutrition et de la diététique.

b) La simplification des formalités administratives

La création d'un guichet unique au sein des CROUS a permis de regrouper l'aide directe et l'aide indirecte en faveur des étudiants.

Dans cette perspective, les services gestionnaires de bourses ont été transférés des rectorats vers les CROUS, ce transfert bénéficiant d'ores et déjà à 21 académies.

Enfin, la mensualisation du paiement des bourses est devenue effective dans 20 académies.

c) Les prêts aux étudiants

Le système actuel de prêt d'honneur en vigueur permet d'accorder aux étudiants en difficulté un prêt sans intérêt remboursable au plus tard dix ans après la fin des études pour lesquelles il a été consenti.

d) L'association des étudiants à la gestion des établissements et des oeuvres universitaires

Les étudiants participent à la gestion de leur établissement au travers des différents conseils (conseil d'administration, conseil des études de la vie universitaire, commission sociale d'éducation, conseil scientifique). Ils participent également à la gestion des oeuvres, et notamment au conseil d'administration du CNOUS et des CROUS, ainsi qu'au fonds d'aide à la vie étudiante.

e) Les restaurations et l'hébergement universitaires

A la rentrée 1995, 8.954 places de restaurant ont été ouvertes dans les CROUS dont plus de 5.000 à Versailles, Rennes, Lyon et Créteil.

S'agissant des universités nouvelles, un restaurant de 1.000 places a été ouvert à Marne-la-Vallée. Cet effort s'est traduit aussi par l'ouverture de structures délocalisées (400 places près de Cherbourg, 400 places à Saint-Brieuc, 300 places à Lorient) et par l'installation de structures dans de nouveaux locaux (Lyon III).

Dans le domaine de l'hébergement, 3.048 lits supplémentaires seront gérés par les CROUS, principalement ceux de Grenoble, Lille, Rennes, Toulouse et Lyon.

f) Les bourses universitaires

La population boursière est actuellement estimée à 400.000 étudiants et le taux des bourses de l'enseignement supérieur a été augmenté de 1,5 % à la rentrée de 1995. Le système des bourses universitaires est organisé ainsi qu'il suit :

- Les bourses attribuées sur critères Sociaux

Ce dispositif tient compte des ressources et des charges familiales appréciées selon un barème national. Les ressources prises en compte sont celles qui figurent à la ligne revenu brut global du dernier avis fiscal détenu par la famille de l'étudiant.

A la rentrée 1995, le montant des bourses selon les échelons s'établissait entre 7.020 francs et 18.936 francs par an.

- Les aides individualisées exceptionnelles

Les AIE permettent sous certaines conditions, et en fonction de crédits contingentés, à des étudiants redoublants ou en situation de réorientation de continuer à bénéficier d'une aide financière.

- Les bourses sur critères universitaires

Ces bourses sont accordées par les recteurs sur proposition des présidents d'université, en fonction de critères universitaires et sociaux selon trois modalités :

* bourses de diplômes d'études approfondies et de diplômes d'études supérieures spécialisées ;

* bourses pour la préparation de l'agrégation du second degré ;

* bourses de service public : ces aides sont accordées pour la préparation de certains concours externes de recrutement de l'administration (concours d'entrée à l'École nationale d'administration ou à l'École nationale de la magistrature, concours d'accès à des corps de fonctionnaires de catégorie A, concours d'accès aux écoles du commissariat de l'armée de Terre, de l'Air ou de la Marine).

2. Une poursuite de l'effort en faveur de l'aide sociale aux étudiants en 1996

Les crédits consacrés aux bourses et aux oeuvres universitaires augmentent de 601 millions de francs et atteindront près de 8 milliards de francs (+8,1 %) en 1996.

a) Les aides directes : l'augmentation des crédits affectés aux bourses

Les crédits des bourses augmenteront ainsi en 1996 de 482 millions de francs (+8,7% contre 420 millions de francs en 1995), et permettront, sans préjuger des résultats de la concertation en cours sur le statut de l'étudiant, de prendre en compte l'augmentation du nombre d'étudiants bénéficiaires et l'évolution des prix.

Cette évolution budgétaire se double d'amélioration du système des bourses recentré sur l'étudiant lui-même. Depuis la rentrée 1993, l'étudiant qui est éloigné de plus de 250 km de son domicile bénéficie d'un point de charge supplémentaire (ce point de charge n'étant jusqu'alors accordé qu'à compter de 300 km) ; les étudiants boursiers d'Île-de-France bénéficient d'un complément de bourse au titre de la prise en charge partielle de leurs frais de déplacement.

Les mesures précédemment mises en oeuvres sont par ailleurs confirmées :

- réduction du nombre d'échelons de bourses de neuf à cinq ;

- prise en compte de la situation des étudiants handicapés, qui ont besoin d'une tierce personne, par l'attribution d'un point de charge supplémentaire ;

- complément de bourse après retour de maternité ;

- bourse cumulable avec un emploi occasionnel ;

- le revenu brut global de l'année de référence est pris en compte pour les ressources des familles.

En outre, un nouveau dossier social étudiant regroupant les demandes de bourse et de logement a été expérimenté dans trois académies pilotes (Bordeaux, Limoges, Grenoble) au cours de l'année universitaire 1994-1995. Ce nouveau dossier permet aux étudiants de connaître avec précision leurs droits à bourse et au logement en fonction des académies choisies. Cette expérience devrait se généraliser à la rentrée 1996.

Enfin, au cours de l'année universitaire 1995-1996, la mensualisation des bourses sera poursuivie pour être étendue à terme à l'ensemble des académies.

b) L'augmentation des crédits affectés à l'hébergement et à la restauration universitaire

L'accroissement des capacités d'hébergement et de restauration universitaire se traduit par une progression des crédits qui leur sont consacrés : 1,03 milliard de francs en 1996 contre 943,1 millions de francs en 1995, soit une progression de 9,2 %.

Plus de 32.500 logements ont été construits de 1988 à 1995 et 3.458 logements en 1995 ; 3.500 logements supplémentaires devraient s'y ajouter en 1996.

Il est prévu d'ouvrir 3.500 places supplémentaires de restaurant en 1996. Des mesures sont par ailleurs à l'étude pour permettre d'aligner le repas offert aux étudiants à un niveau de qualité préconisée par les spécialistes de la restauration collective, le prix du ticket ayant par ailleurs été augmenté de 12,70 F à 13,20 F à la rentrée 1995.

Il convient enfin de remarquer que l'objectif fixé dans le plan Université 2000 en 1991 de 50.000 places supplémentaires de restaurant et de 30.000 logements nouveaux est dépassé.

c) L'accueil prioritaire des étudiants handicapés

Une action de sensibilisation est entreprise auprès des établissements d'enseignement supérieur pour que l'accueil des étudiants handicapés figure au rang de leurs priorités. Le nombre d'étudiants handicapés recensés dans l'enseignement supérieur est en effet en nette augmentation, passant de 2.132 en 1990-1991 à 4.048 en 1994-1995.

Chaque établissement doit désormais désigner un responsable de l'accueil des handicapés et la circulaire du 22 mars 1994 a permis de nouvelles avancées dans le domaine des examens : utilisation de micro-ordinateurs, période de repos entre deux épreuves, extension de ces dispositions aux concours.

d) Le fonds d'amélioration de la vie étudiante

Les établissements peuvent depuis la rentrée 1991, par le biais d'un fonds d'amélioration de la vie étudiante, abondé par un prélèvement minimum de 45 F à compter de la rentrée 1995 sur les droits d'inscription, mener des actions complémentaires en faveur de l'ensemble de leurs étudiants.

e) L'aide aux associations étudiantes représentatives

Conformément aux dispositions de la loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989, une subvention de 3 millions de francs est versée chaque année depuis 1990 aux associations représentatives, ayant obtenues des sièges au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche ou au conseil d'administration du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires.

3. La réflexion ouverte sur le statut de l'étudiant

Comme il a été dit, l'élaboration d'un statut de l'étudiant devrait constituer la première priorité dans la réflexion générale qui va être engagée sur la réforme de l'enseignement supérieur et des mesures concrètes devraient être proposées sur ce point avant la fin du premier trimestre de 1996.

D'après les indications fournies par le ministre à la commission, le futur statut de l'étudiant ne devrait pas aboutir à mettre en place une fonction publique étudiante mais plutôt un système d'aide adapté, juste, simple et transparent et prenant également en compte le rôle de l'étudiant-citoyen dans les structures universitaires, cette réflexion devant par ailleurs s'inscrire dans une perspective de comparaison avec les situations étrangères.

4. Le problème de l'allocation de logement sociale aux étudiants

a) La dérive d'une aide à la personne

La réflexion sur le statut social de l'étudiant ne pourra également éluder le problème préoccupant de l'allocation de logement sociale (ALS) aux étudiants, qui certes ne relève pas des crédits de l'enseignement supérieur, mais de ceux du logement, et qui enregistre comme l'ensemble des aides au logement à la personne, une explosion qui devra un jour être contenue.

L'ALS bénéficiera en effet en 1995 à 500.000 étudiants, soit près du quart des effectifs de l'enseignement supérieur, et son coût est évalué à 4,5 milliards de francs auquel il convient d'ajouter celui de la demi-part supplémentaire de l'impôt sur le revenu.

Le régime actuel de versement de l'ALS aux étudiants a en effet suscité de vives critiques du fait de l'absence de prise en compte des situations diverses de chaque étudiant.

Alors que cette aide avait dû être dégressive en fonction du revenu et progressive en fonction des charges familiales et du loyer payé, l'ALS a été en fait distribuée aux étudiants sans conditions de ressources, même si leurs parents disposent de revenus élevés, et sur simple déclaration attestant que leurs enfants ne disposent pas de revenus personnels. Ce dispositif s'est traduit par la généralisation d'une aide maximale, soit 945 F par mois en province et 1.047 F en région parisienne, quelles que soient les ressources de la famille.

La poursuite de l'évolution aujourd'hui enregistrée, à régime constant, devrait se traduire à court terme par un coût équivalent au quart du budget de l'enseignement supérieur.

b) Les tentatives d'inflexion

Afin de stopper la dérive de cette prestation, le précédent ministre chargé de l'enseignement supérieur avait envisagé une réforme qui a été abandonnée du fait de l'opposition du monde étudiant.

Il convient également de rappeler que les mesures techniques entrées en vigueur en juillet 1995 se sont traduites par une réduction significative des dépenses relevant de l'ALS, estimée à un milliard de francs et se traduisant par une réduction du montant de l'allocation versée aux étudiants colocataires de l'ordre de 30 %.

Dans le même sens, la commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté le 11 octobre 1995 un amendement tendant à imposer le choix entre le rattachement de l'étudiant au foyer fiscal de ses parents ou le bénéfice de l'ALS, sauf dans le cas des étudiants boursiers.

A la suite de l'intention exprimée par le Gouvernement d'intégrer l'éventuelle réforme de l'ALS étudiante dans la prochaine réflexion sur le statut social étudiant, cet amendement a été retiré.

c) Une allocation qui devrait tenir compte de la situation individuelle des étudiants

L'enquête publiée en juillet 1995 par l'observatoire de la vie étudiante a révélé une certaine inadaptation du système d'aide sociale à la diversité des besoins des étudiants.

Cette enquête constate en effet que les conditions de vie des étudiants se sont profondément transformées et diversifiées.

Elle révèle notamment que 35 % des étudiants travaillent au cours de l'année universitaire et que la moitié déclarent une activité rémunérée pendant l'été, un tiers d'entre eux exerçant une activité occasionnelle au cours de l'année.

Si la combinaison scolarité et activité professionnelle apparaît marginale dans les premiers cycles, et notamment dans les CPGE, plus de 60 % des étudiants de troisième cycle déclarent une activité rémunérée ; à partir de 26 ans, 75 % des étudiants exercent une activité au moins pendant six mois ou à mi-temps.

Par ailleurs, les 3/5e des étudiants n'habitent plus dans leur famille : leur loyer moyen est de 2.663 F à Paris, 1.932 F dans les grandes villes, 1.685 F dans les villes moyennes et 1.655 F dans les petites villes.

En outre, près de 7 % des étudiants de premier cycle habitent à plus de 300 km du domicile de leurs parents, contre 15,8 % pour le 2e cycle et 38 % pour le troisième cycle. Cet élément constitue donc un obstacle à l'accès à l'enseignement supérieur pour les familles défavorisées, notamment en milieu rural où les enfants étudiants résident pour plus de 80 % hors du domicile familial.

Compte tenu de ces évolutions, il conviendrait donc que le futur statut de l'étudiant permette de définir les modalités d'une aide au logement juste et efficace et plus particulièrement ciblée sur les populations qui en ont le plus besoin.

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