B. 1999, UNE ÉTAPE DÉCISIVE DANS LE PROCESSUS DE PROFESSIONNALISATION

Le processus de professionnalisation entrera en 1999 dans une phase décisive, avec la mise en oeuvre effective du service national rénové (appel de préparation à la défense et volontariat dans les armées), et avec une évolution des composantes de l'armée de terre qui se situe à mi-chemin entre la physionomie de l'armée de terre en 1996, à la veille des réformes, et le modèle défini pour 2002, au terme de la période de programmation. 1999 est donc le moment propice pour dresser un bilan des évolutions en cours.

1. Bilan d'étape de la professionnalisation : un bilan en demi-teinte

Si l'évolution des effectifs de l'armée de terre depuis 1997 est conforme à la professionnalisation, et permet aux forces terrestres de se rapprocher du modèle élaboré pour 2002, le bilan de la professionnalisation paraît, en dépit des évolutions favorables constatées s'agissant des personnels militaires, d'ores et déjà altéré par les inquiétudes que suscite l'insuffisante montée en puissance des personnels civils.

a) L'évolution des effectifs de l'armée de terre : la professionnalisation à moitié accomplie

L'évolution des effectifs de l'armée de terre par catégorie, entre 1996, dernière année de "l'armée mixte", et 2002, dernière annuité de la programmation, fait ressortir que 1999 se situe à mi-chemin entre les deux modèles. Par conséquent, les efforts qui resteront à accomplir entre 2000 et 2002 seront équivalents aux efforts qui auront été accomplis en 1997, 1998 et 1999.

Evolution des effectifs de l'armée de terre entre 1996 et 2002

 

1996 (rappel)

1997

1998

1999

2002

Evolution 1999/1996

Evolution 2002/1996

ACTIVE

 
 
 
 
 
 
 

Officiers

17 461

17 242

17 013

16 783

16 080

- 3,9 %

- 7,9 %

Sous-officiers

56 644

55 608

54 455

53 235

50 365

- 6,0 %

- 11,0 %

Sous-total cadres

74 105

72 850

71 468

70 018

66 445

- 5,5 %

- 10,3 %

EVAT

30 202

36 077

41 956

47 835

66 681

+ 58,4 %

+ 120,0 %

Sous-total active

104 307

108 927

113 424

117 853

133 126

+ 13,0 %

+ 27,6 %

Composante service national

132 319

appelés

111 039

appelés

89 790

appelés

68 891

(dont 1 361 2( * ) volontaires)

5 500

volontaires

- 47,9 %

- 95,8 %

Sous-total effectifs militaires

236 626

219 966

203 214

186 744

138 626

- 21,0 %

- 41,4 %

Personnels civils

31 946

32 276

32 620

32 794

34 000

+ 2,65 %

+ 6,4 %

TOTAL

268 572

252 242

235 834

219 538

172 626

- 18,2 %

- 35,7 %

- En ce qui concerne les officiers, le nombre de postes à supprimer entre 1996 et 2002 s'élève à 1 381. Le nombre de postes effectivement supprimés entre 1996 et 1999 (678) équivaut au nombre de postes dont la suppression est prévue pendant la période 1999-2002, soit 703.

- La situation n'est pas sensiblement différente pour les sous-officiers : sur les 6 279 postes à supprimer entre 1996 et 2002, plus de la moitié (3 409) auront été supprimés entre 1996 et 1999, 2 870 postes restant à supprimer à l'échéance de 2002.

- En ce qui concerne les militaires du rang engagés (EVAT), alors que 36 479 postes doivent être créés en 2002 par rapport aux effectifs de 1996, l'année 1999 se situe à mi-parcours de la professionnalisation, puisqu'à la fin de cet exercice auront été créés 18 239 postes d'EVAT, 18 846 restant à pourvoir entre 1999 et 2002.

- s'agissant, enfin, des personnels appelés , les suppressions d'emplois seront, là encore, à moitié opérées fin 1999.

La contraction de 98 000 emplois militaires prévue par la loi de programmation pour la période 1997-2002 sera ainsi à moitié achevée à la fin de 1999 (49 882 suppressions nette d'emplois auront été effectuées à cette date, soit l'équivalent de l'objectif restant, de 48 117 suppressions d'emplois).

Les remarques ci-dessus ne valent pas pour les effectifs civils, dont la montée en puissance sera plus rapide entre 1999 et 2002 (+ 1 206 emplois) qu'entre 1996 et 1999 (848 emplois créés).

L'évolution des effectifs civils appelle des commentaires particuliers, sur lesquels votre rapporteur reviendra ci-après.

La montée en puissance des effectifs de volontaires ne se situera pas non plus à mi-parcours en 1999, compte tenu des 1 361 postes ouverts en 1999, sur lesquels 26 seront mis à disposition des services du Premier ministre, soit un effectif réel de 1 335 volontaires dans l'armée de terre en 1999 (voir infra, 2).

b) Officiers et sous-officiers : d'importantes mutations en cours

Les effectifs de cadres de l'armée de terre diminueront de 10,3 % pendant la période de la programmation (- 7,9 % pour les officiers et - 11 % pour les sous-officiers). Cette évolution suppose une déflation maîtrisée des effectifs, fondée notamment sur l'encouragement des départs volontaires, tandis que la professionnalisation inspire d'importantes réflexions sur l'adaptation des cursus d'officiers et de sous-officiers.

(1) L'amélioration du taux d'encadrement de l'armée de terre professionnelle

La diminution des effectifs militaires (- 41 % pendant la période de programmation), simultanément à la baisse rapide de la composante appelée (- 95 %) et à la diminution régulière, mais plus limitée, des effectifs de sous-officiers et officiers (- 10,3 %), a pour effet mécanique d'améliorer le taux d'encadrement de l'armée de terre (rapport entre le nombre total de cadres et les effectifs militaires).

De 35 % en 1998, ce ratio devrait atteindre 50,4 % à l'échéance de 2002. Il sera de 37,5 % en 1999.

L'accroissement du taux d'encadrement est rendu nécessaire par la professionnalisation (ainsi était-il, au premier semestre 1998 dans les armées de terre professionnelle des Etats-Unis et de Grande-Bretagne, respectivement de 56,5 % et de 51,7 %).

Les récentes évolutions des missions confiées à l'armée de terre militent, également, pour cet accroissement, qu'il s'agisse :

- de l'engagement des forces terrestres dans des opérations extérieures qui impliquent un encadrement important, qualifié et expérimenté ;

- de la participation accrue à des structures militaires internationales (Eurocorps et Eurofor en particulier) ;

- de la création de nouvelles structures compétentes dans le domaine du renseignement (Direction du renseignement militaire, commandement des opérations spéciales, montée en puissance des moyens spatiaux).

Par ailleurs, le progrès technologique et l'apparition de nouveaux systèmes d'armes sont à l'origine de besoins accrus en personnel d'encadrement : ainsi la part des cadres dans l'équipage d'un char Leclerc est-elle de 66 %, alors qu'elle se limitait à 25 % à l'époque de l'AMX 30 (et à 20 % à l'époque du Patton M 47). L'évolution de l'artillerie inspire un commentaire similaire, puisque la part des cadres dans l'équipage servant un LRM est de 66 %, alors qu'elle se borne à 50 % pour le canon de 155 AUF1, et qu'elle n'était que de 10 % à l'époque du 155 F3.

En ce qui concerne l'aviation légère de l'armée de terre, on remarque que, depuis le début des années 1990, les équipages sont composés de deux officiers au lieu de deux sous-officiers pendant la période antérieure.

(2) Les officiers : une déflation programmée des effectifs, parallèlement à une réforme du cursus adaptée aux impératifs de la professionnalisation

. Malgré la baisse des effectifs d'officiers (- 1381 postes pendant la période de programmation), le volume de recrutement demeurera inchangé, afin de limiter le vieillissement de cette catégorie, et de garantir le maintien de la qualité du corps des officiers.

Le volume annuel de recrutement est stabilisé à 800 officiers environ, toutes origines confondues (direct, semi-direct, promotion interne et ORSA), comme le montre le tableau suivant :

Recrutement des officiers par origine

Recrutement

1996

1997

1998

1999*

Direct (dont Saint-Cyr)

195

198

201

200

Semi-direct

308

285

280

280

Tardif (OAEA, OAES et rang)

110

120

119

120

Sous-total officiers de carrière

613

603

600

600

ORSA 3( * )

245

364

275

non déterminé

TOTAL

858

967

875

non déterminé

* prévision

. Les départs volontaires doivent donc être encouragés pour assurer la déflation des effectifs d'officiers tout en maintenant un flux régulier de recrutement.

Ainsi la loi n° 96-1111 du 19 décembre 1996 relative aux mesures en faveur du personnel militaire dans le cadre de la professionnalisation des armées a-t-elle prévu :

- la reconduction, jusqu'en 2002, des modalités d'aide au départ prévues initialement par les articles 5 et 6 de la loi du 30 octobre 1975, et du dispositif d'accès des militaires aux corps de la fonction publique défini par la loi 70-2 du 2 janvier 1970,

- l'attribution d'un pécule constituant une incitation financière au départ,

- des changements d'armée proposés chaque année à plusieurs dizaines d'officiers en direction de la gendarmerie et de la marine,

- le bénéfice d'une période de reconversion destinée à faciliter l'accès à une "seconde carrière" dans le civil.

816 départs volontaires ont ainsi été enregistrés en 1996 (sur un total de 1093). En 1997, la mise en oeuvre de la loi n° 96-1111 précitée s'est traduite par une augmentation du nombre de départs volontaires (941, soit une hausse de 15,3 %). Notons que ces statistiques intègrent les données relatives aux ORSA (officiers de réserve en situation d'activité, dont la durée de service est limitée à vingt ans). Selon les informations transmises à votre rapporteur, on compte en moyenne annuelle 210 départs environ dans cette catégorie.

Compte non tenu des ORSA, le nombre d'officiers quittant chaque année le service est estimé à 1 000 en moyenne, dont 800 environ de manière volontaire, ce qu'illustre le tableau ci-après.

Prévisions relatives aux départs des officiers

 

Départs volontaires

Autres départs

TOTAL

1997

817

235

1 052

1998

815

235

1 050

1999

800

200

1 000

2000

760

190

950

2001

760

190

950

2002

760

190

950

En ce qui concerne plus particulièrement les pécules rénovés , dont 127 officiers de l'armée de terre ont bénéficié en 1997 et 116 en 1998, on relève un taux de satisfaction des demandes de 57 % en 1997, et de 44,5 % en 1998. Ce taux est plus important, pour des raisons évidentes, dans les grades élevés (colonel : 63 % en 1997 et 1998 ; lieutenant-colonel : 81,5 % en 1997 et 58,5 % en 1998).

Les prévisions pour 1999 font état d'un besoin de 152 pécules pour les officiers de l'armée de terre , induisant un coût prévisionnel de 83 millions de francs (contre 56,17 millions de francs en 1997 et 52,1 millions de francs en 1998).

. L'un des aspects de la "refondation" de l'armée de terre est l'adaptation du profil de carrière des officiers aux nouvelles missions et aux nouvelles structures de l'armée de terre. Les orientations en cours depuis 1998 visent donc à tirer les conséquences de la diminution du nombre d'unités des forces terrestres. Celles-ci induisent, en effet, une diminution des temps de commandement des officiers, tandis que le besoin est apparu de compétences non pas dans les domaines opérationnels traditionnels (combat des blindés, feux dans la profondeur, combat de l'infanterie ...), mais dans des domaines actuellement moins maîtrisés tels que la communication, le renseignement, la conception logistique, les relations internationales ...

L'objectif est donc de créer, à partir du cadre spécial , un corps d'experts, dont le cursus serait différent de celui des officiers des armes. La montée en puissance du cadre spécial en tant que "corps d'experts" sera progressive, afin d'être dans un premier temps harmonieusement répartie entre les grades.

Le cursus des officiers sera probablement appelé à se différencier, dans la seconde partie de la carrière, entre la voie commandement (corps des officiers des armes) et la voie expertise (cadre spécial).

Cette diversification des carrières devrait intervenir à l'issue du temps de commandement d'unité élémentaire, après le passage à l'Ecole d'état-major 4( * ) . Notons que le commissariat de l'armée de terre peut d'ores et déjà être considéré comme un corps d'experts, dont les compétences spécifiques s'exercent dans les domaines de l'administration et du soutien de l'homme, des finances et techniques budgétaires, ainsi que des réglementations et activités juridiques. Dans le même ordre d'idée, les officiers du corps technique et administratif (CTA) peuvent être recrutés dans le cadre spécial, tandis que la réflexion sur la gestion des carrières des officiers se poursuit parallèlement à la professionnalisation et à la réduction du format de l'armée de terre.

A terme, la répartition des officiers pourrait être de 60 % pour le corps des officiers des armes et de 40 % pour le cadre spécial. Les ajustements en cours conduiront donc à une augmentation du nombre d'officiers servant sous statut du cadre spécial. La répartition actuelle est de 80 % pour le corps des officiers des armes, et de 20 % pour les autres corps (commissariat, corps technique et administratif, cadre spécial).

(3) La déflation maîtrisée des effectifs de sous-officiers

La réforme des limites d'âge mise en oeuvre dans le cadre de la loi n° 91-1241 du 13 décembre 1991 5( * ) s'est traduite de manière mécanique par un ralentissement des départs et par un certain vieillissement du corps des sous-officiers.

. Les conséquences de cette évolution ont été, d'une part, l'apparition de tensions à l'avancement dues à des déséquilibres internes de la pyramide des grades (sureffectif en adjudants-chefs et en adjudants, sous-effectif en sergents) et, d'autre part, une réduction temporaire des recrutements , dans le cadre du plan de résorption des sureffectifs mis en oeuvre en 1995. Celui-ci s'est traduit par une diminution brutale du nombre de sous-officiers recrutés entre 1994 (2 809) et 1995 (1 480).

. On observe néanmoins une tendance récente (liée à la mise en oeuvre de la loi n° 96-1111 précitée du 19 décembre 1996 et, notamment, au dispositif rénové des pécules) à l' augmentation du nombre de départs volontaires de sous-officiers (1 313 en 1996, 1 599 en 1997).

Notons que les pécules permettent de rééquilibrer le corps des sous-officiers en encourageant les départs dans les grades où le sureffectif est le plus important. C'est ainsi que les pécules accordés aux adjudants-chefs et aux adjudants, au nombre de respectivement 651 et 157 en 1997, sont passés à 861 et 378 en 1998 (avec un taux de satisfaction des demandes qui, de 29,5 % pour les adjudants-chefs et 22 % pour les adjudants, s'est élevé à 42 % et 60 %).

. C'est ainsi que l'armée de terre a pu reprendre un niveau équilibré de recrutement en 1998, susceptible de mettre fin aux classes creuses chez les jeunes sous-officiers. Le tableau ci-après montre qu'en 1999 devraient être confirmées les tendances observées en 1998.

Recrutement des sous-officiers depuis 1990

 

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998*

1999*

Voie école

2020

1 945

2 094

1 998

1 932

890

909

970

1 284

1 200

Voie corps de troupe

1595

1 520

1 357

824

877

590

730

790

1 040

1 200

TOTAL

3 615

3 465

3 451

2 822

2 809

1 480

1 639

1 760

2 324

2 400

* Prévisions

On observe, en outre, une diminution, dans les prévisions pour 1999, de la part du recrutement par la "voie école" au profit de la voie "corps de troupe". Notons que, depuis la dissolution, à l'été 1998, de l'Ecole nationale technique des sous-officiers d'active implantée à Issoire, le recrutement par la filière des écoles relève exclusivement de l'Ecole nationale des sous-officiers d'active de Saint-Maixent.

. Il est certain que la reprise d'un flux équilibré de recrutements, jointe à une tendance (à confirmer) à l'augmentation du nombre de départs volontaires, impose un effort tout particulier en vue de favoriser la reconversion des sous-officiers . Rappelons, par ailleurs, que les limites d'âge s'établissent parfois très tôt (42 ans pour les sergents et les sergents-chefs, 47 ans pour les adjudants), et que les retraites des sous-officiers ne permettent pas, surtout après des carrières courtes (jusqu'à onze ans de service), de subvenir aux besoins d'une famille.

Le dispositif d'aide à la reconversion des sous-officiers présente donc un intérêt évident.

- Le pécule instauré par la loi précitée du 19 décembre 1996 a, en 1997, bénéficié à 1 062 sous-officiers (avec un taux moyen de satisfaction de 31 %), compte tenu d'un nombre élevé -3 430- de demandes). En 1998, 1 366 pécules ont été attribués à des sous-officiers, le taux de satisfaction ayant été de 44,5 % (3 075 demandes ont été enregistrées). Il serait envisagé, en 1999, d'attribuer un pécule à quelque 1 180 sous-officiers.

- Les sous-officiers peuvent également bénéficier de congés de conversion d'une durée maximale de six mois, leur permettant de préparer, sous statut militaire, leur seconde carrière.

Des stages de formation professionnelle en milieu militaire (au centre militaire de formation professionnelle de Fontenay-le-Comte) et en milieu civil (dans les 180 centres de l'Association pour la formation professionnelle des adultes, et dans les entreprises ou centres de formation agréés) leur sont en outre accessibles.

- Les majors et adjudants-chefs ont aussi vocation à accéder à des emplois de la fonction publique (en application de la loi 70-2 ci-dessus évoquée à l'égard des officiers).

- Des facilités peuvent enfin être offertes pour l'accès à certains prêts relevant de l' aide à la création d'entreprise.

c) Les militaires du rang engagés de l'armée de terre : un pari qui doit être gagné

La catégorie des militaires du rang engagés joue un rôle essentiel dans la réussite de la professionnalisation , puisque c'est l'augmentation très substantielle des effectifs d'EVAT (+ 120 % entre 1996 et 2002), qui doit compenser l'extinction progressive de la composante appelée. Rappelons que les militaires du rang engagés représentaient en 1996, à la veille de la mise en oeuvre de la professionnalisation, 12,76 % des effectifs militaires des forces terrestres à une époque où les appelés en représentaient 56 %, et que les EVAT constitueront, en 2002, 48 % des effectifs militaires de l'armée de terre, soit pratiquement la moitié.

Les militaires du rang engagés sont donc destinés à devenir une catégorie à part entière des personnels militaires des forces terrestres , ce qui équivaut pour celles-ci à une véritable mutation.

.
Dans cette perspective, le cursus des EVAT a été profondément remanié, pour répondre aux exigences d'une armée de terre professionnelle.

Deux types de carrière coexistent désormais : les carrières courtes et les carrières longues .

Les premières concerneront les personnels affectés à des tâches d'exécution dans un cadre opérationnel. Leur limite sera de onze années, y compris les congés de conversion destinés à la préparation, sous statut militaire, de la reconversion des personnels.

La distinction de 1ère classe pourra être accordée dès six mois de service (au lieu de dix mois actuellement), à la fin de la période probatoire. Cette distinction matérialisera l'aptitude à détenir un poste "projetable".

Les carrières longues (entre onze et vingt-deux ans) seront accessibles aux caporaux-chefs ayant réussi le CT1 (certificat technique du premier degré). Le choix du CT1, de préférence au CAT2, très critiqué en raison d'une sélectivité jugée excessive, constitue un changement substantiel dans les perspectives de carrière ouvertes aux EVAT.

Les carrières longues sont destinées plus particulièrement aux personnels susceptibles d'occuper des emplois de spécialistes . Cette seconde phase de la carrière d'EVAT s'appuie sur une certaine mobilité (fonction "opérationnelle projetable", puis fonction "base" ou "soutien"), à l'instar du cursus des autres catégories.

Ce nouveau cursus paraît plus attractif . Selon les informations transmises à votre rapporteur, la prolongation de la durée des services paraît répondre à une réelle attente de la part des intéressés (celle-ci n'est peut-être pas étrangère au fait que quinze ans de service permettent l'accès à une pension de retraite à jouissance immédiate).

Ainsi les carrières longues pourraient-elles concerner 20 % de la ressource globale, car les conditions d'avancement n'ont pas été durcies. Par ailleurs, l'accès au corps des sous-officiers est maintenu, 56 % de sous-officiers devant à terme être issus des corps de troupes (cette orientation est cohérente avec la diminution de la part de la "filière écoles" dans le recrutement des sous-officiers).

. Les besoins croissants en militaires du rang engagés ont conduit à la mise en place d'une stratégie de recrutement dont les résultats paraissent, à ce jour, positifs.

En effet, l'évolution des effectifs d'EVAT pendant la période de programmation fait apparaître un besoin d'accroissement annuel net d'environ 6 000 emplois. Ce besoin sera satisfait par :

- l'allongement de la durée moyenne de service, qui passera de cinq à huit ans, parallèlement au développement des carrières longues (voir supra),

- l'augmentation des flux de recrutement, portés à près de 8 000 à 9 000 engagés chaque année : 8 946 en 1997 à rapprocher des 3 000 EVAT recrutés en 1994, 5 000 en 1995, et 6 695 en 1996).

Ce volume croissant de recrutements s'explique par la nécessité de compenser un flux important de départs d'EVAT . Ainsi le nombre de départs s'est-il élevé à 3 876 en 1996, et à 3 855 en 1997. L'allongement de la durée du service prévient toutefois une croissance des départs proportionnelle à l'augmentation des effectifs d'EVAT.

A ce jour, l'armée de terre paraît relever avec succès le défi du recrutement d'un effectif croissant de militaires du rang engagés, contrairement aux prévisions les plus pessimistes formulées avant la mise en oeuvre des réformes. Il est cependant possible que la persistance d'un taux de chômage élevé, joint au rythme soutenu des interventions en opérations extérieures ou en outre-mer, se trouvent à l'origine de nombreuses vocations.

Par ailleurs, la ressource appelée jouait encore le rôle, en 1997, de vivier de recrutement des engagés, comme l'atteste le maintien d'une forte proportion d'engagés recrutés à l'issue du service militaire obligatoire. La part du "recrutement ultérieur", à l'issue du service national, reste ainsi décisive, en 1997, par rapport à la part du "recrutement initial" ce qu'illustre le tableau ci-après. Rappelons le choix de l'armée de terre de privilégier le recrutement ultérieur pendant la montée en puissance des effectifs d'EVAT, afin de garantir un flux de recrutement conforme aux objectifs de la programmation.

Recrutement des EVAT depuis 1990

 

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Recrutement initial

2 380

2 155

2 263

2 342

1 930

2 566

2 602

3 572

Recrutement ultérieur

2 710

2 095

1 480

1 765

1 218

2 369

4 093

5 374

Total

5 090

4 295

3 743

4 107

3 148

4 935

6 695

8 946

Part du recrutement ultérieur

53,2 %

49,3 %

39,5 %

42,9 %

38,6 %

48 %

61,1 %

60 %

Notons aussi que l'effort de communication , essentiellement télévisuelle, accompli ces derniers mois par l'armée de terre, a pu contribuer à mettre en valeur une image technologique particulièrement valorisante de l'armée de terre, et encourager des vocations authentiquement militaires.

Dans cette perspective, il serait intéressant de vérifier si les statistiques de 1998 et, surtout, de 1999, confirment l'existence d'une proportion non négligeable d'EVAT de niveau BAC et plus (31,9 % en 1996, 29 % en 1997, à comparer à la faible proportion de 14,6 % enregistrée en 1993), la majorité (50,5 % en 1996 ; 56,9 % en 1997) disposant d'un niveau BEPC.

Le bilan de 1997-1998 paraît, en dépit de nombreuses interrogations sur l'avenir du recrutement des militaires du rang engagés, autoriser un certain optimisme. En effet, la ressource semble correspondre, sur le plan qualitatif, aux attentes de l'armée de terre. Le taux de sélection actuel (un engagement souscrit pour trois dossiers de candidature) est, en effet, satisfaisant. Sur le plan quantitatif, 60 % des objectifs définis pour 2002 auraient été atteints au ler juin 1998 6( * ) . La réorganisation de la chaîne de recrutement, désormais fondée sur l'initiative des corps de troupe -à l'instar de la méthode retenue au Royaume-Uni- se trouve probablement à l'origine de cette évolution positive. Notons que la montée en puissance de la "chaîne recrutement", avec l'ouverture, en 1998 et 1999, de centres de sélection et d'orientation (CSO) relevant de l'armée de terre, s'inscrit dans une logique de recrutement gérée par les "régions terre", au siège desquelles sont implantés ces centres. La décentralisation du recrutement joue un rôle important dans la stratégie retenue par l'armée de terre. Celle-ci pourrait ainsi permettre de garantir une ressource suffisante dans le cadre du recrutement dit "initial", lorsqu'il ne sera plus possible de s'appuyer sur la ressource appelée.

. Si la professionnalisation passe nécessairement par une augmentation substantielle des effectifs d'EVAT, elle implique également un effort soutenu de reconversion. En effet, les carrières de militaire du rang engagés ne dureront pas plus de vingt-deux ans, dans l'hypothèse du cursus le plus long, et s'interrompront dans de très nombreux cas après huit à onze années de service.

La loi n° 96-1111 du 16 décembre 1996 relative aux mesures en faveur du personnel militaire dans le cadre de la professionnalisation a mis en place un dispositif de reconversion spécifique pour les militaires du rang engagés :

- congé de reconversion d'une durée maximale de douze mois, permettant aux intéressés de préparer leur seconde carrière sous statut militaire ;

- indemnité de départ revalorisée (d'un montant de 24 mois de solde brute non imposable) pour les militaires du rang engagés quittant l'armée à partir de quatre années de service (sans droits à pension de retraite) ;

- possibilité, à partir de quatre ans de service, de bénéficier du dispositif d'aides déjà existantes avant la mise en oeuvre de la professionnalisation (préparation aux concours d'accès à la fonction publique, admission à un stage de formation professionnelle en milieu militaire ou civil, participation aux sessions d'orientation approfondies et aux sessions de techniques de recherche d'emploi organisées dans les unités...).

L'évaluation du coût des aides à la reconversion des EVAT prend en compte :

- la durée moyenne de la reconversion (six mois) ;

- les effectifs annuels des bénéficiaires des diverses mesures (2 330 EVAT, soit environ 70 % des engagés ayant vocation à bénéficier de ce dispositif).

Le coût de la reconversion s'élèverait à 144 000 francs par engagé , soit un budget total de 335 millions de francs 7( * ) , compte tenu des effectifs concernés.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, ce coût global est dû, pour l'essentiel, aux soldes des stagiaires (168 millions de francs, soit la moitié du budget), alors que le coût des actions de reconversion stricto sensu ne représente que 15 millions de francs, soit 4,5 % seulement de l'ensemble.

Il est clair qu' aucune économie ne saurait être effectuée, dans les années à venir, sur la reconversion des personnels engagés. En effet, l'accès à une seconde carrière dans le domaine civil est un aspect indispensable de l'attractivité des carrières militaires dont la caractéristique est d'être courtes.

.
Mentionnons enfin, parmi les mesures destinées à rendre attractifs les engagements dans l'armée de terre, la récente revalorisation des rémunérations des EVAT.

Conformément à la loi de programmation, la rémunération totale des militaires du rang engagés est, depuis le ler juillet 1997, assise sur le SMIC , soit une rémunération mensuelle nette de 5 600 francs comprenant en outre les avantages en nature (hébergement, réduction SNCF et alimentation) dont bénéficie traditionnellement cette catégorie.

L'accord salarial de février 1998 se traduit par une nouvelle augmentation, puisque la solde indiciaire brute minimale est désormais portée au niveau du SMIC, niveau auquel s'ajoutent les rémunérations accessoires et les avantages en nature.

d) Un défi à relever : la féminisation de l'armée de terre

La nécessité d'accroître substantiellement les flux d'engagés pose, à l'évidence, la question de la féminisation des personnels militaires de l'armée de terre, surtout dans la perspective de la disparition prochaine du service militaire obligatoire, qui constitue encore aujourd'hui un important vivier de recrutement. Le recours aux vocations féminines permettrait ainsi probablement d'obtenir un niveau équilibré et régulier d'engagements chaque année.

Certes, les statistiques montrent que la féminisation de l'armée de terre peut encore progresser dans toutes les catégories. Cependant, si les récentes évolutions statutaires autorisent désormais l'accès des femmes à une grande diversité d'emplois dans les armées, force est néanmoins de reconnaître que les besoins suscités par la professionnalisation ne sauraient, compte tenu de la spécificité du métier des armes, permettre de concevoir à l'identique les cursus masculin et féminin.

(1) Un taux de féminisation encore modeste

Les statistiques ci-après illustrent que, si le taux de féminisation de l'armée de terre (8 %) est très comparable au taux moyen de la Défense (7 %), il se situe néanmoins très en retrait du taux de féminisation de l'armée de l'air (11,3 %) et, surtout, du service de santé (37,6 %). Le faible taux de féminisation des effectifs de l'armée de terre est patent dans la catégorie des militaires du rang engagés (1 952 EVAT, soit 3,7 % de la catégorie) et dans celle des officiers (442, soit 2,5 % de la catégorie). On relève en revanche une proportion plus importante de femmes parmi les sous-officiers (5 830, soit 13 % de la catégorie), plus importante que dans les deux autres armées (air : 10,2 % ; marine : 6,8 %). Notons, par ailleurs, un taux de féminisation particulièrement bas dans la gendarmerie (3,75 %).

La féminisation de la Défense (1er semestre 1998)

 

Terre

Air

Marine

Gendarmerie

Essences

DGA

Santé

TOTAL

Officiers

17 683

7 219

5 021

2 961

228

3 554

3 634

36 438

Nombre de femmes

440

292

164

17

10

186

572

1 099

Féminisation

2,49 %

4,04 %

3,27 %

0,57 %

4,38 %

5,23 %

15,74 %

3,02 %

Sous-officiers

57 483

41 366

33 757

80 490

342

-

3 830

211 920

Nombre de femmes

7 513

4 227

2 311

3 116

8

-

2 234

16 422

Féminisation

13,07 %

10,22 %

6,85 %

3,87 %

2,34 %

-

58,33 %

7,75 %

Militaires du rang engagés

44 754

7 165

8 394

-

475

-

-

60 313

Nombre de femmes

1 666

1 777

822

-

9

-

-

4 265

Féminisation

3,72 %

24,8 %

9,79 %

-

1,89 %

-

-

7,07 %

Total des effectifs

119 920

55 750

47 172

83 451

1 045

3 554

7 464

308 671

Nombre de femmes

9 619

6 296

3 297

3 133

27

186

2 806

21 786

Moyenne par armée

8,02 %

11,29 %

6,99 %

3,75 %

2,58 %

5,23 %

37,59 %

7,06 %

Le taux de féminisation des officiers de l'armée de terre est comparable au taux moyen de la Défense pour cette catégorie (3,02 %). Le taux de féminisation des EVAT (3,72 %) est, en revanche, nettement inférieur à la moyenne de la Défense pour la catégorie des militaires du rang engagés. Enfin, la féminisation des sous-officiers de l'armée de terre (13,07 %) est très supérieure au taux de la Défense (7,75 %).

Des progrès restent à accomplir, s'agissant des catégories des officiers et militaires du rang engagés, si l'on considère que les armées professionnalisées connaissent, en général, un taux de féminisation de l'ordre de 15 %.

(2) Une ouverture statutaire récente

Un décret récent (décret n° 98-86 du 16 février 1998) a fait prévaloir le principe d'égalité entre hommes et femmes pour l'accès aux différents corps militaires. Il s'agit d'une étape importante dans la féminisation des armées.

En effet, avant cette date, l'accès des femmes aux carrières militaires a tout d'abord été déterminé par les décrets portant statuts particuliers des différents corps d'officiers et de sous-officiers , qui réglementaient l'accès à ces carrières par le biais de quotas , ou d'arrêtés annuels de recrutement répartissant la proportion d'hommes et de femmes admis à intégrer les différents corps.

Entre 1982 et 1985, une deuxième génération de mesures a tendu à instaurer une formation initiale commune aux militaires des deux sexes, et à autoriser l'accès des femmes à tous les concours de recrutement et à toutes les armes , même les armes de mêlée , selon un système de quotas par arme.

En 1998 (décret précité du 16 février 1998) ont été levés ces quotas restrictifs, en application du droit communautaire . En effet, la directive n° 76/207 du 9 février 1976 relative à la mise en oeuvre du principe d'égalité de traitement entre hommes et femmes autorise les Etats à exclure certaines activités professionnelles du champ d'application de ce principe, pour autant que le sexe constitue une condition déterminante de l'exercice des activités considérées, en raison de leur nature ou des conditions d'exercice. Or le contrôle de la cour de justice des communautés européennes porte sur la nature de l'emploi, et non le corps d'agents publics concernés. C'est ainsi que la CJCE n'a pas retenu les arguments présentés par la France pour justifier certaines restrictions à l'accès des femmes aux carrières de la police nationale.

Le ministère de la défense a donc, conformément de surcroît au principe d'égal accès aux emplois publics réaffirmé par le Conseil d'Etat , mis en place une nouvelle réglementation de l'accès des femmes aux carrières militaires. Le décret du 16 février 1998 s'appuie ainsi sur le principe de l'égalité entre hommes et femmes, autorisant, à titre exceptionnel, certaines restrictions quand la nature des emplois ou leurs conditions d'exercice le justifient. Ce décret met donc fin au système antérieur des quotas. Un arrêté interarmées énumère limitativement les emplois inaccessibles aux personnels féminins. Il s'agit, pour l'Armée de terre, des emplois impliquant un contact direct et prolongé avec des forces hostiles.

La réforme statutaire de 1998 ouvre aux femmes plus de 80 % des emplois répertoriés par l'armée de terre. Notons que la proportion est sensiblement la même pour la marine, qui exclut l'affectation de personnels féminins à bord de sous-marins, aux formations de fusiliers marins et de commandos, et aux équipages d'avions embarqués. On remarque, en revanche, que l'armée de l'air n'a pas déterminé d'emplois susceptibles d'être inaccessibles aux personnels féminins.

(3) Un cursus féminin spécifique ?

La mise en conformité du statut des personnels féminins de la Défense avec les moeurs du temps ne saurait conduire à déterminer les cursus masculin et féminin à l'identique.

On remarque, en effet, que si plus de 80 % des femmes militaires sont globalement satisfaites de leur vie professionnelle 8( * ) , tous les personnels féminins ne se distinguent pas par une vocation spécifiquement militaire. La tendance à se détourner des postes de terrain est ainsi directement liée à la situation familiale des intéressées. Dans le même ordre d'idée, on observe une très faible proportion de personnels féminins âgés de plus de 40 ans et volontaires pour servir en unité de combat.

Or la professionnalisation suscite des besoins dans les domaines des soutiens et de l'environnement des forces. Rappelons notamment que le nouveau cursus proposé aux EVAT prévoit la possibilité d'affectations en fonction "base" ou "soutien", susceptibles de convenir aux personnels -hommes ou femmes- qui ne seraient pas intéressés par des postes en unités de combat.

En ce qui concerne plus particulièrement les officiers, la création du corps des experts (voir supra, b-2) pourrait offrir des perspectives aux officiers de sexe féminin souhaitant, de préférence à une affectation dans une arme de mêlée, servir dans l'environnement des forces terrestres (filières communication, gestion des ressources humaines, logistique...).

La période actuelle devrait donc permettre aux besoins de l'armée de terre et aux attentes des candidates féminines de se rencontrer. Il n'est par ailleurs pas exclu qu'un rééquilibrage du taux de féminisation des armées contribue, dans une certaine mesure, à renforcer le lien armées-nation en améliorant la représentativité des personnels des forces terrestres.

e) Une attente : la réforme des réserves

Composante à part entière de l'armée de terre professionnelle, la réserve est destinée, en cas de besoin, à participer aux missions de l'armée de terre dès le temps de paix.

La professionnalisation a considérablement modifié les besoins de l'armée de terre en forces de réserve , par rapport au schéma de l'armée mixte.

Sur le plan quantitatif , les besoins sont passés de 195 500 hommes à 30 000 hommes, constituant la première réserve ou réserve opérationnelle, qui est destinée à l'emploi.

Sur le plan qualitatif , les personnels de réserve peuvent être affectés, soit en compléments individuels dans les états-majors (forces ou régiments), soit au sein d'une unité de réserve intégrée aux régiments professionnalisés.

Il reste donc à adopter un statut adapté à ces nouvelles modalités de recours aux réserves , qui visent à faire des réservistes des "militaires à temps partiel", afin que les obligations professionnelles et la protection sociale de ces personnels ne pâtissent pas de leur contribution à la défense de leur pays. Rappelons, en effet, que ce statut devra notamment préciser les conséquences du temps de service effectué par les réservistes sur leurs droits à pension de retraite.

f) Une inquiétude : la trop lente montée en puissance des personnels civils

La diminution du format des forces terrestres et la professionnalisation rendent pertinent un partage des tâches entre personnels civils et militaires de l'armée de terre qui réserve aux militaires les emplois opérationnels et projetables et qui affecte aux fonctions de soutien les personnels civils. Ceux-ci disposent également de débouchés dans les régiments des forces , où peuvent leur être confiées des fonctions sédentaires , de nature technique ou administrative. Le besoin est ainsi important dans les domaines de l' alimentation et de l' entretien.

Selon un schéma "idéal", les effectifs rendus disponibles par les dissolutions et restructurations de nombreux organismes de la défense, notamment de la DGA, devraient être affectés aux formations où la professionnalisation crée des besoins par redéploiements internes au Ministère de la Défense.

. Entre 1997 et 2002, la loi de programmation militaire a prévu la création de 9 276 postes civils (dont les effectifs devraient ainsi augmenter de 12,6 %). 1710 emplois civils devraient être créés pour la seule armée de terre. En 2002, les personnels civils devraient représenter quelque 20 % des effectifs de l'armée de terre , au lieu de 12,8 % en 1997.

. L'effectif de civils inscrits au projet de budget pour 1999 s'élève à 78 660 emplois . Il intègre notamment les évolutions induites par la substitution de "l'appel de préparation à la défense" au "rendez-vous citoyen", alors que c'est sur cette seconde hypothèse, plus "consommatrice" d'emplois, qu'avait été conçue la loi de programmation militaire.

. On remarque, en 1998, une reprise des recrutements de fonctionnaires civils (attachés, secrétaires administratifs, agents de service hospitalier, adjoints...) : 159 recrutements en 1996, 384 en 1997, et 1 496 en 1998 (auxquels s'ajoutent 681 nominations effectuées au titre de 1997).

Cette situation favorable contraste avec le sous-effectif chronique en ouvriers d'Etat , qui contribue à faire de la montée en puissance des effectifs civils un élément désormais théorique du schéma de professionnalisation des armées.

Cette situation est, en effet, à l'origine d'un sous-effectif de 3 350 postes dans l'armée de terre, qui contraste avec le sureffectif observé à la DGA. Le taux de vacances en ouvriers d'Etat est de 11 % dans les armées , et de 9 % dans l'armée de terre.

. Or divers facteurs se conjuguent pour compromettre la montée en puissance des effectifs civils :

- Les personnels civils ne sont pas soumis, à la différence des militaires, à l'obligation de mobilité géographique : l'affectation des personnels nécessaires aux régiments des forces terrestres prend donc d'autant plus de temps que les besoins de l'armée de terre se situent essentiellement dans les unités de l'Est modérément attractives (Mourmelon, Mailly, Sissonne...). En revanche, la Marine est théoriquement en mesure de procéder au recrutement de nombreux personnels civils par des transferts de postes de la DCN, sans changement de résidence.

- Il existe un important décalage chronologique entre la création des postes budgétaires , l'organisation des concours, et les nominations effectives. Ces délais d'affectation freinent considérablement la "civilisation" des forces.

- Enfin, on peut déplorer les effets des blocages et mises en réserve de poste opérés par le ministère du budget, qui constituent une entrave au recrutement.

Ces facteurs cumulent donc leurs effets pour compromettre l'ajustement des ressources aux besoins. Comme votre rapporteur le faisait observer à l'occasion de l'examen du précédent projet de loi de finances, on ne peut exclure que la trop lente croissance des effectifs civils, dans laquelle les raisons d'ordre statutaire jouent un rôle évident, conduise à compromettre la professionnalisation de l'armée de terre , en justifiant l'affectation à des fonctions de soutien d'une proportion d'EVAT trop importante pour que cette catégorie de personnels puisse se consacrer à des missions opérationnelles. Cette situation pourrait conduire, de manière très regrettable, à la mise en sommeil (même temporaire) de régiments ou de compagnies de l'armée de terre 9( * ) . En d'autres termes, on peut craindre que l'insuffisante disponibilité des personnels civils oblige à affecter de trop nombreux engagés à des emplois non opérationnels, en contradiction avec le "contrat opérationnel" fixé à l'armée de terre.

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