D. L'INFLUENCE D'UNE ACTIVITÉ RÉMUNÉRÉE SUR LA RÉUSSITE UNIVERSITAIRE

L'enquête Conditions de vie des étudiants réalisée par l'observatoire national de la vie étudiante (OVE) au printemps 2000 montrait que près d'un étudiant sur deux (48 %) exerçait un travail rémunéré en période d'étude , cette proportion étant très variable selon l'âge : guère plus d'un étudiant sur cinq chez les moins de 18 ans, les deux tiers à 25 ans, les étudiants les plus jeunes exerçant surtout des petits boulots occasionnels sans grande incidence budgétaire et sans conséquences scolaires, tandis que leurs aînés pratiquaient plus fréquemment des activités régulières, avec des chances inégales, en fonction notamment du type d'études suivies, du niveau atteint dans le cursus, et de l'origine sociale et scolaire, d'exercer ces activités dans le cadre de leur formation ou, au contraire, en concurrence avec elle.

Taux d'activité rémunérée (en % de l'ensemble des étudiants)

Âge

Toutes activités

Dont activité régulière

Moins de 18 ans

21,5

0,7

18 ans

26,3

2,2

19 ans

35,9

4,6

20 ans

39,3

7,3

21 ans

46,3

10,7

22 ans

50,6

15

23 ans

56

24,8

24 ans

61,8

30,7

25 ans

66,44

38,7

26 ans

70,7

47,8

Plus de 26 ans

74,2

59,4

Ensemble

52

19

Source : OVE

Montants mensuels (en €) et structure (en %) des ressources monétaires selon l'âge

Âge

Euros

Activité rémunérée

Bourses et allocations

Versements parentaux

Moins de 18 ans

240

10,7

34,3

55

18 ans

295

12

39,9

48,1

19 ans

338

18,9

37,8

43,3

20 ans

396

20,4

39

40,6

21 ans

443

25,1

34,3

40,7

22 ans

493

28,3

32,4

39,3

23 ans

542

36

28,8

35,2

24 ans

632

44,4

24,5

31

25 ans

705

51,4

22

26,6

26 ans

797

63,6

20,3

16,1

Plus de 26 ans

1107

79,9

12,7

7,4

Source : OVE

Deux chercheurs de l'observatoire national de la vie étudiante, Louis Gruel et Béatrice Tiphaine, se sont alors attachés à mesurer l'influence de l'activité rémunérée sur les performances scolaires, « toutes choses égales par ailleurs », c'est à dire en l'espèce en neutralisant l'éventuelle incidence du sexe, des revenus et diplômes parentaux, du type de baccalauréat obtenu (général ou technique, acquis avec ou sans mention, avec ou sans retard), du type d'études suivies en 1998-1999, du mode de logement en 1998-1999, enfin de certains comportements retracés dans l'enquête de l'OVE : le respect scrupuleux ou non d'un agenda, le fait de réviser régulièrement ou d'attendre l'approche des examens, le fait de travailler ou de ne pas travailler au moins une fois par semaine à la bibliothèque ou au CDI, le fait de regarder la télévision tous les jours ou d'en avoir un usage plus sélectif, le fait de sortir en discothèque ou de passer une soirée au concert classique ou à l'opéra, le fait de consommer ou non du tabac, enfin le fait de prendre régulièrement ou non des déjeuners au restaurant universitaire, c'est à dire des repas en principe conformes aux normes alimentaires et servis sur le campus.

Leurs conclusions sont les suivantes : « les résultats obtenus montrent de façon nette qu'à partir d'un certain seuil, et seulement à partir d'un certain seuil, une activité non intégrée aux études est une activité vraiment concurrente des études, une activité qui compromet le succès aux examens. Les étudiants de 1er et 2ème cycles, exerçant une activité non intégrée aux études mais à temps très partiel (moins d'un mi-temps) et/ou de façon irrégulière (moins de six mois par an), ont des chances de réussite totale qui ne se distinguent pas de façon statistiquement significative de celles des inactifs .

En revanche, lorsque l'activité rémunérée non intégrée aux études est pratiquée au moins à mi-temps et au moins six mois par an, les probabilités de réussite totale diminuent de 29 %.

Pour bien mesurer les conséquences à terme d'un tel écart de réussite entre étudiants inactifs et étudiants assujettis à une activité réduisant sensiblement la disponibilité studieuse, il faut se rappeler que l'allongement du temps mis pour réussir aux épreuves d'un niveau du cursus réduit les chances de succès aux étapes ultérieures. Plus les étudiants sont âgés, plus ils sont socialement incités à prendre en charge le financement de leurs études; et plus ils sont en retard à un niveau de cursus donné, moins ils ont de chances d'accéder à une activité intégrée aux études, donc de s'autofinancer sans compromettre les résultats scolaires.

Autrement dit, s'il est vrai que le travail concurrent des études accroît les risques d'échec, l'échec accroît en retour les risques d'exercer un travail concurrent des études, de telle sorte que le processus de dégradation des chances scolaires est cumulatif ».

A cet égard, il convient d'observer que, « tous types d'activités confondus, les boursiers sont presque deux fois moins actifs que les étudiants qui ne reçoivent pas d'aides monétaires publiques. Cet écart se creuse encore lorsqu'il s'agit des activités qui empiètent sur les études. Les boursiers disposent en effet déjà d'un revenu et les boursiers sur critères sociaux (soit 70% de l'ensemble des boursiers) ne peuvent dépasser un certain montant d'activité rétribuée ».

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