Article L. 631-12 nouveau du code de
commerce
Mission dévolue à l'administrateur
judiciaire
Intervention des experts en gestion opérationnelle
Faisant, en quelque sorte, écho à l'article L. 622-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'article 23 du présent projet de loi, l'article L. 631-12 définirait la mission dévolue à l'administrateur judiciaire au cours de la procédure de redressement judiciaire. Il tendrait par ailleurs à déterminer les conditions d'intervention des experts en gestion opérationnelle.
1. La mission de l'administrateur
Le premier alinéa de l'article L. 631-12 reprendrait les dispositions figurant actuellement au premier alinéa de l'article L. 621-22 du code de commerce. Ainsi, en plus des pouvoirs qui leur seraient conférés par les dispositions du titre III du livre VI, le ou les administrateurs judiciaires désignés par le tribunal verraient leur mission fixée par ce dernier.
Contrairement au droit actuel, le ou les administrateurs ne pourraient accomplir, à la discrétion du tribunal, ensemble ou séparément, que deux types de missions :
- une mission d' assistance du débiteur concernant tous les actes relatifs à la gestion de l'entreprise, ou certains d'entre eux seulement. Dans cette hypothèse, le débiteur ne pourrait participer à la conclusion de certains actes qu'avec le concours de l'administrateur ;
- une mission d' administration , en tout ou partie, de l'entreprise. Lorsque le tribunal opte pour ce type de mission, le débiteur est dessaisi de tout ou partie de ses prérogatives dans la gestion de l'entreprise , l'administrateur agissant alors en ses lieu et place.
Ainsi, par rapport au droit positif, l'administrateur ne pourrait être chargé d'assurer une simple mission de surveillance. Celle-ci serait en effet dorénavant réservée à l'administrateur désigné dans le cadre d'une procédure de sauvegarde 191 ( * ) .
Le troisième alinéa de l'article L. 631-12 reprendrait la rédaction qui figurerait au III de l'article L. 622-1, tel qu'il résulterait de l'article 23 du présent projet de loi, en précisant que l'administrateur serait tenu au respect des obligations légales et conventionnelles incombant au débiteur.
S'inspirant du IV de l'article 622-1 précité, le quatrième alinéa de l'article L. 631-12 autoriserait le tribunal à modifier, à tout moment, la mission de l'administrateur, à la demande de celui-ci, du mandataire ou du ministère public. A la différence de la procédure de sauvegarde, il pourrait également se saisir d'office à cette fin.
A l'instar du V de l'article L. 622-1 précité, le dernier alinéa du texte proposé donnerait compétence à l'administrateur pour faire fonctionner, sous sa signature, les comptes bancaires ou postaux dont le débiteur est titulaire quand ce dernier fait l'objet de l'interdiction d'émettre des chèques, prévue aux article L. 131-72 et L. 163-6 du code monétaire et financier.
2. L'intervention d'experts en « gestion opérationnelle »
A la suite d'un amendement présenté par M. Jérôme Chartier, l'Assemblée nationale a, avec l'avis favorable du Gouvernement, déterminé les conditions d'intervention des experts en gestion opérationnelle dans le cadre de la procédure de redressement. Selon les propos de l'auteur de cet amendement, il s'agirait d'« institutionnaliser cette profession » 192 ( * ) .
En l'état du droit, l'administrateur judiciaire peut, aux termes de l'article L. 811-1 du code de commerce, décider de confier à des tiers, dans le cadre de la mission qui lui est assignée par le tribunal et sous sa responsabilité, une partie des tâches résultant de cette mission. Il ne peut néanmoins recourir à ces tiers que « lorsque le bon déroulement de la procédure le requiert et sur autorisation motivée du président du tribunal ». Dans ce cas, ces personnes sont rétribuées sur la rémunération perçue par l'administrateur judiciaire pour l'exercice de sa mission. Le recours à ces tiers est donc laissé à l'appréciation de l'administrateur, sous le contrôle du juge.
Dans la pratique, les administrateurs ont donc recours à des tiers qu'ils chargent d'assurer, en particulier, les tâches de gestion de l'entreprise qui résultent de leur mission, notamment lorsqu'il s'agit d'une entreprise importante.
Le dispositif retenu par l'Assemblée nationale, tout en conservant la faculté prévue à l'article L. 811-1, prévoirait une intervention directe du tribunal qui nommerait, sans demande formelle de l'administrateur judiciaire en ce sens, un expert ayant pour tâche d'assister ce dernier dans sa mission de gestion de l'entreprise .
L'intervention d'un expert en gestion opérationnelle serait obligatoire sous réserve de deux conditions cumulatives :
- d'une part, le ou les administrateurs seraient chargés d'assurer seuls et entièrement l'administration de l'entreprise ;
- d'autre part, les seuils de chiffre d'affaires et d'effectif salarié, prévus à l'article L. 621-4 dans sa rédaction issue de l'article 18 du projet de loi, devraient être tous deux atteints .
A défaut, la désignation de tels experts serait laissée à la discrétion du tribunal.
Dans tous les cas, il reviendrait au tribunal lui-même de fixer la rémunération des experts désignés, le texte précisant qu'une telle rémunération serait mise à la charge de la procédure . En d'autres termes, elle ne serait pas prélevée, comme à l'heure actuelle, sur les émoluments de l'administrateur.
Votre commission ne conteste pas l'utilité de l'intervention d'un expert dans la gestion quotidienne de grandes entreprises faisant l'objet d'une procédure de redressement. Elle vous soumet cependant un amendement destiné à supprimer l'expression d'expert en gestion opérationnelle, dès lors qu'il ne s'agit aucunement de viser un membre d'une profession réglementée mais simplement une personne ayant l'expérience et la formation lui permettant d'assurer la gestion d'entreprise.
* 191 Voir supra, le commentaire de l'article 23 du présent projet de loi.
* 192 Débats du 8 mars 2005, 2 ème séance, JOAN du 9 mars 2009, p. 1758.