Article 147
Nouveau chapitre III du titre V du livre VI du code de commerce
consacré à la faillite personnelle et aux autres mesures d'interdiction

Supprimé par l'Assemblée nationale par coordination avec l'insertion au projet de loi du tableau II avec l'avis favorable du Gouvernement, cet article a pour objet de créer un chapitre III au sein du titre V du livre VI du code de commerce pour y regrouper les règles applicables aux sanctions civiles encore dénommées sanctions personnelles. Ce chapitre se composerait de onze articles (articles L. 653-1 à L. 653-11).

Ces mesures qui regroupent la faillite personnelle et l'interdiction de gérer visent à assainir le monde des affaires. En effet, la faillite personnelle engendre des conséquences irrémédiables sur le débiteur sanctionné qui sera éliminé de son milieu professionnel. Les sanctions professionnelles sont inscrites au casier judiciaire (article 768 du code de procédure pénale) et sont facultatives, le tribunal disposant d'une totale liberté d'appréciation. Elles sont par ailleurs limitées dans le temps.

La loi du 25 janvier 1985 a modernisé leur régime. D'une part, afin d'en atténuer la sévérité, elle a limité aux fautes graves les cas d'ouverture des sanctions personnelles. D'autre part, elle a renforcé leur efficacité en plaçant sur un pied d'égalité les personnes physiques et les dirigeants de personnes morales.

Le présent projet de loi s'inscrit dans la continuité de cette réforme.

Votre commission vous propose de maintenir la suppression de l'article 147.

Article 148
(art. L. 653-1 nouveau du code de commerce)
Domaine d'application des sanctions professionnelles -
Prescription de l'action aux fins de faillite personnelle

Le présent article, modifié par l'Assemblée nationale, a pour objet d'élargir la liste des personnes passibles de sanctions professionnelles et de fixer un délai de prescription de l'action introduite aux fins de sanction.

1. Le droit en vigueur

Selon l'article L. 625-1 du code de commerce , les sanctions professionnelles peuvent être prononcées en cas d'ouverture d'une procédure de redressement et de liquidation judiciaire. Elles s'appliquent :

- aux commerçants, aux agriculteurs et aux artisans à condition qu'il s'agisse de personnes physiques (1° de l'article L. 625-1 qui deviendrait le 1° du I de l'article L.  653-1) ;

- aux personnes physiques qui sont dirigeants de droit ou de fait de personnes morales ayant une activité économique (2° de l'article L.  625-1 qui deviendrait 2° du I de l'article L. 653-1) ;

- aux personnes physiques, représentants permanents de personnes morales dirigeantes de personnes morales ayant une activité économique (3° de l'article L. 625-1 qui deviendrait le 3° du I de l'article L.  653-1).

2. Les modifications proposées par le projet de loi initial

Le présent article reprend le contenu de l'article L. 625-1 qui deviendrait l'article L. 653-1 du code de commerce sous réserve de quelques modifications.

Le paragraphe I du présent article proposait d'étendre à la procédure de sauvegarde le champ d'application des sanctions personnelles.

Son paragraphe II élargissait la liste des personnes susceptibles d'être passibles d'une sanction professionnelle à « toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante », permettant ainsi de viser les artisans de fait et les professionnels libéraux.

Il prévoyait cependant d'exclure du champ d'application des sanctions professionnelles les professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé sans autre précision. Cette dérogation se justifiait par le souci de tenir compte des règles disciplinaires propres à certaines professions réglementées comme les avocats ou les officiers publics et ministériels, afin de laisser aux ordres professionnels leurs compétences en matière de sanction disciplinaire.

3. Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Sur la proposition de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a réécrit le présent article pour y apporter, outre des corrections de pure forme, quatre modifications tendant à :

- exclure toute possibilité de prononcer des sanctions personnelles dans l'hypothèse d'une procédure de sauvegarde . Les députés ont souhaité exonérer le chef d'entreprise en difficulté qui demande spontanément l'ouverture d'une procédure collective de toute sanction professionnelle, et ainsi rendre attractive la procédure de sauvegarde. M. Bernard Field, président de la commission juridique du MEDEF, a approuvé cette initiative lors de son audition devant votre commission 335 ( * ) ;

- limiter la dérogation applicable aux professions réglementées aux seuls professionnels libéraux soumis à des règles disciplinaires propres . Les députés ont fait valoir que certaines professions libérales soumises à un statut législatif comme les agents commerciaux 336 ( * ) n'obéissaient à aucune règle disciplinaire particulière et par conséquent devaient pouvoir être passibles d'une sanction professionnelle. En outre, l'Assemblée nationale a préféré faire référence aux personnes exerçant « une activité professionnelle indépendante » plutôt qu'aux professions libérales soumises à un statut législatif ou règlementé afin d'englober l'ensemble des professionnels libéraux ;

- corriger une inégalité de traitement résultant du champ de la dérogation accordée aux professionnels libéraux qui se limitait aux personnes physiques et omettait de faire référence « aux dirigeants de personne morale ». L'Assemblée nationale a fait légitimement valoir que les compétences disciplinaires des instances ordinales devaient être maintenues indépendamment du mode d'exercice du professionnel, y compris lorsque celui-ci exerce au sein d'une société ;

- ajouter un paragraphe pour y regrouper les règles de prescription applicables aux sanctions professionnelles et harmoniser la durée de la prescription avec ce qui prévaut pour les actions en responsabilité spéciales à l'égard des dirigeants et pour les sanctions pénales.

Actuellement, le code de commerce prévoit la possibilité de saisir le tribunal pour demander une sanction professionnelle jusqu'à la clôture de la procédure (avant l'arrêté d'un plan de continuation, jusqu'à la clôture des opérations de cession ou jusqu'à la clôture des opérations de liquidation).

Faute de précision sur la prescription de l'action, la jurisprudence a dégagé des solutions différentes. La cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 30 avril 1993, a estimé que la prescription trentenaire de droit commun s'appliquait. Cette solution a été contredite par un arrêt plus récent de la cour d'appel de Caen du 7 février 2002 laquelle avait jugé contraire aux exigences du droit à un procès équitable défini par l'article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une mesure d'interdiction de gérer prononcée onze ans après l'ouverture de la procédure.

Le projet de loi initial modifiait le droit en vigueur en instituant une prescription d'une durée de cinq ans à compter du jugement d'ouverture de la procédure et en supprimant, par coordination, le principe selon lequel la clôture de la procédure constitue la limite du prononcé de la faillite personnelle. Le texte initial proposait de décliner cette règle au cas par cas mais omettait de la mentionner dans toutes les hypothèses de faillite personnelle 337 ( * ) .

Sur la proposition de leur commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, les députés ont, par souci de clarté, regroupé ces règles au présent article afin qu'elles s'appliquent à tous les cas de sanctions professionnelles. En outre, ils ont jugé nécessaire d'harmoniser le délai de prescription des sanctions avec celui - plus court (trois ans) - applicable aux actions en responsabilité à l'égard des dirigeants et aux sanctions pénales. Ils ont jugé paradoxal de prévoir une règle plus sévère pour les faits passibles de sanctions professionnelles que pour les faits, plus graves, donnant lieu à la banqueroute, rappelant que l'article 8 du code de procédure pénale disposait une prescription triennale pour les délits. Au cours de son audition devant votre commission, M. Bernard Field, président de la commission juridique du MEDEF, s'est félicité de cette initiative.

Cet ajout s'appliquerait à toutes les sanctions professionnelles régies par le chapitre III, à savoir la faillite personnelle prononcée tant à l'égard des débiteurs personnes physiques que des dirigeants de personnes morales et l'interdiction de gérer prononcée à l'encontre de ces mêmes personnes. Par coordination, la mention relative aux règles de prescription serait supprimée dans tous les articles du code de commerce figurant sous ce chapitre.

Votre commission souscrit à ces modifications qui tendent à définir un régime de sanctions proportionné à la gravité des fautes commises par les débiteurs.

Elle vous soumet un amendement de cohérence avec ce qui prévaut pour les actions tendant à mettre en cause la responsabilité pécuniaire des dirigeants et l'interdiction de gérer pour étendre le champ d'application des sanctions professionnelles aux dirigeants de toutes les personnes morales et non plus seulement celles ayant une activité économique. Dans un souci d'harmonisation avec des amendements qu'elle vous a précédemment soumis, votre commission vous propose dans ce même amendement, d'indiquer que les professions réglementées sont incluses par la référence aux personnes physiques exerçant une activité professionnelle indépendante au 3° du I du texte proposé pour l'article L. 653-1.

Elle vous propose d'adopter l'article 148 ainsi modifié .

* 335 Voir Bulletin des commissions n° 22 - audition du mercredi 30 mars 2005, p. 4319.

* 336 Dont le régime est encadré par les articles L. 134-1 à L. 134-16 du code de commerce.

* 337 Comme par exemple en cas de faillite prononcée à l'encontre des dirigeants d'une personne morale (texte proposé par l'article 151 du projet de loi initial pour l'article L. 653-4).

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