2. La Cnav financeur de dernier ressort de l'Etat providence ?

Le recours au régime général constitue une solution de facilité pour assurer le bouclage des finances sociales, au point parfois de faire de la Cnav la victime naturelle des opérations de régulations budgétaires. Par sa taille - 77,5 milliards d'euros de prestations versées en 2006 - et le nombre de ses cotisants (16 millions de personnes), elle fait en effet légitimement figure de référence pour l'assurance vieillesse.

Répartition du nombre des cotisants entre les différents régimes

La Cnav a bénéficié pendant plusieurs décennies d'un contexte économique et d'un rapport démographique très favorables. Tout au long des Trente Glorieuses, son développement a été assuré par l'extension du salariat, du travail féminin et l'extinction ou le déclin de nombreux autres régimes plus petits.

Dans ce contexte, il n'est guère étonnant, et il n'était pas illégitime, que le régime général ait été mis à contribution par les pouvoirs publics au nom de la solidarité nationale. Mais ces prélèvements ont eu tendance à s'accroître au fil du temps, et la Cnav, qui connaît désormais une situation de déficit structurel, se trouve de moins en moins en position de pouvoir les assumer.

Le régime général est ainsi, et de loin, le principal contributeur au titre des transferts financiers entre les régimes d'assurance vieillesse destinés à compenser les différences de structures démographiques.

Cette situation est le fruit d'une longue histoire. Notre système de retraite par répartition a en effet été fondé à la Libération sur les projets du Conseil national de la résistance prévoyant d'instaurer un régime unifié de sécurité sociale regroupant l'ensemble de la population active. Mais, très rapidement, cette volonté d'unification a été abandonnée.

Dès les années 1960, certains régimes anciens, souffrant déjà de ratios démographiques très dégradés, se sont trouvés dans l'impossibilité de dégager un équilibre financier primaire (couverture des prestations par les cotisations). Il a donc fallu corriger cette différence de moyens, en faisant en sorte que les caisses de retraite disposant de ressources versent une contribution à l'équilibre de celles connaissant des difficultés. La création, en 1974, de la compensation généralisée entre les régimes de base de retraite n'a donc fait que tirer les conséquences, avec un retard de trente ans, de l'impossibilité de construire un régime unique. A ce dispositif s'est ajouté, en 1985, celui de la surcompensation , conçu entre les seuls régimes spéciaux.

Bilan de la compensation et de la surcompensation
pour l'ensemble des régimes en 2005

(en millions d'euros)

Le bilan, pour les cinq dernières années, de la situation des différents régimes de retraite au regard des mécanismes de compensation et de surcompensation fait ressortir des évolutions importantes et singulières. Le régime général apparaît en effet comme le grand perdant de la période 2001/2005 dans la mesure où sa contribution s'est accrue de 932 millions d'euros par an (+ 22,4 %). Inversement, l'Etat, au titre des fonctionnaires civils et militaires ainsi que des ouvriers d'Etat, paie 919 millions d'euros en moins (- 35,3 %).

Les adossements de régimes spéciaux illustrent davantage encore cette situation de financeur de dernier ressort de l'Etat providence. En effet, la Cnav n'est pas demandeur de ces opérations, pour lesquelles elle assume d'ailleurs in fine le risque du calcul définitif des droits d'entrée à l'occasion de la signature des conventions d'adossement, en l'absence de clause de rendez-vous. Votre commission considère que le régime général a rendu en l'espèce un immense service à l'Etat, et plus encore aux entreprises nationales sollicitant l'adossement de leur régime de retraite spécial. La Cnav n'a aucun avantage particulier à espérer dans ces opérations qui se chiffrent en dizaines de milliards d'euros d'engagements futurs.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page