EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 8 novembre 2006 , sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission des finances a procédé à l'examen des principaux éléments de l'équilibre du projet de loi de finances pour 2007 , sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général .

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Philippe Marini, rapporteur général, a tout d'abord souligné le réalisme des prévisions de croissance économique pour 2006 et 2007. Il a ainsi indiqué que la prévision de croissance du gouvernement établie à l'automne 2005 pour l'année 2006, c'est-à-dire 2,25 %, serait vraisemblablement vérifiée in fine, puisque le consensus des conjoncturistes prévoyait désormais une croissance du PIB de 2,3 % du PIB en 2006. Il a précisé que la prévision de croissance du gouvernement pour 2007 était de 2,25 % alors que le consensus annonçait 2 %. Il a rappelé que sur ces 8 dernières années, les erreurs de prévision du consensus avaient été six fois sur huit de l'ordre d'un point de croissance et que plusieurs raisons pouvaient expliquer ces écarts : éclatement de la bulle technologique en 2000-2002, appréciation de l'euro en 2003-2004, prévisions inadéquates de la demande intérieure en 2004, et des exportations en 2005. Dans cette perspective, M. Philippe Marini, rapporteur général, a observé que la croissance économique de 2007 pouvait également être impactée par l'évolution de la croissance américaine, celle du cours du baril de pétrole, ou encore le niveau du taux de change de l'euro. Il a estimé, que pris séparément, ces événements pouvaient être supportables.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a ensuite abordé la question des recettes fiscales en se félicitant de la convergence des prévisions du gouvernement et de la commission quant au montant de plus-values de recettes fiscales attendues en 2006, de respectivement 5,1 milliards d'euros et 5 milliards d'euros. Il a ensuite expliqué que si l'évolution spontanée des recettes fiscales en 2007 était estimée à environ 5 %, soit 13,4 milliards d'euros, les mesures nouvelles résultant de la loi de finances initiale pour 2006 et du présent projet de loi de finances tendaient respectivement à réduire ces recettes de 7,2 milliards d'euros et à les augmenter de 0,6 milliard d'euros, ce qui représentait, au total, une réduction de 6,6 milliards d'euros.

En ce qui concerne l'évolution des recettes non fiscales, il a noté qu'elles devaient augmenter sensiblement en 2007, avec une croissance prévisionnelle de 9,3 %, en raison de la nette amélioration des dividendes des entreprises et des établissements publics. En citant les exemples du dividende de la Caisse des dépôts et consignations, qui augmenterait de 815 millions d'euros, et celui d'EDF, qui augmenterait de 500 millions d'euros, il a souligné le caractère exceptionnel de ces chiffres.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a présenté ensuite dans une deuxième partie l'évolution des dépenses, en estimant que la norme de dépense était ambitieuse et devait être appréciée au regard du champ d'intervention de l'Etat. Après avoir expliqué que la norme de dépense 2006, soit le « zéro volume », serait remplacée en 2007 par le « moins un volume », il a insisté sur le fait que depuis 2003, les normes de dépense avaient toujours été respectées par le gouvernement. Enumérant ensuite les quatre variables au coeur de la problématique des dépenses publiques (dépenses de l'Etat, dépenses sociales, recettes de l'Etat, recettes sociales), M. Philippe Marini, rapporteur général, a noté que si des instruments de maîtrise de la dépense de l'Etat existaient, ce n'était pas le cas en matière de dépense sociale, en l'absence de vote de crédits limitatifs, et du fait que chaque année, l'évolution était seulement constatée. En outre, il a relevé la spécificité des recettes sociales, partagées entre fiscalité et cotisations sociales.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a procédé ensuite à une comparaison de l'évolution de la dépense de l'Etat et de la dépense publique entre la présente législature et la législature précédente. Il a ainsi relevé que le différentiel de croissance de la dépense entre les deux législatures était plus faible pour la dépense publique que pour l'Etat. Il a conclu que l'effort réalisé par l'Etat en matière de dépense permettait de dégager les marges pour honorer les dépenses sociales.

Il a précisé que le niveau des dépenses publiques en 2007 devrait être supérieur à celui établi en 1998. Il a noté que les comparaisons internationales en matière de dépense publique étaient défavorables à la France, le différentiel avec les autre pays ne cessant de se creuser au cours de ces dernières années, ce qui soulevait des questions quant à la compétitivité et l'attractivité de notre pays. M. Philippe Marini, rapporteur général, a ainsi estimé que si la norme de dépense pour 2007 était satisfaisante, les efforts devaient être intensifiés.

En ce qui concerne l'évolution des effectifs de la fonction publique, il a souligné que la moitié de l'effort de réduction sur la présente législature, soit moins 30.000 emplois, serait réalisé en 2007. Il a expliqué que cette baisse compensait les augmentations des dernières années de la précédente législature.

M. Philippe Marini, rapporteur général , s'est également félicité de l'évolution des dépenses d'investissement, qui n'apparaissait toutefois pas clairement dans la nouvelle présentation issue de la LOLF. Il a expliqué qu'il convenait de prendre en compte les subventions pour charge de service public de certaines agences d'investissement, comme l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), afin d'avoir une meilleure appréciation de l'effort de l'Etat dans ce domaine. Il a estimé que l'augmentation de l'investissement témoignait d'une prise en compte de l'avenir, ce dont il se félicitait.

Il a exprimé sa satisfaction concernant le respect des engagements pluriannuels pris par le gouvernement dans le cadre des lois de programmation, mis à part le cas de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, où un déficit de crédits de paiement, de 1,2 milliard d'euros, était noté.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a insisté sur l'importance du budget de la dernière année de la législature en soulignant que l'exécution de la loi de finances initiale pour 2002 avait été marquée par un dérapage des dépenses, conduisant au vote de 5 milliards d'euros de crédits supplémentaires dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2002. Il a estimé que la situation en 2007 s'annonçait différente compte tenu de la prévision réaliste des dépenses, de la mise en réserve de crédits annoncée dans le projet de budget à hauteur de 5,6 milliards d'euros, et d'une meilleure maîtrise des reports de crédits, dont le niveau serait particulièrement faible en 2007. Il a toutefois attiré l'attention sur la fin de l'« effet d'aubaine » résultant du faible niveau des taux d'intérêt, dont la remontée pourrait accroître, au-delà des prévisions, la charge de l'emprunt.

M. Philippe Marini, rapporteur général , s'est également interrogé sur la portée qu'il convenait de donner à ce qu'il a appelé le phénomène d'« agencisation » de l'Etat. Il a observé que ce mouvement pouvait être porteur d'une amélioration de la gestion des fonds publics et de performance, mais il a également noté que le mode de financement de ces agences, par l'affectation de ressources fiscales, pouvait conduire in fine à une croissance de la dépense supérieure à la norme, ce qui n'était pas vertueux.

D'une manière plus générale, il a mis en garde contre la volonté de multiplier les affectations de ressources afin de sanctuariser certaines dépenses, tendance qui, au-delà de sa non-conformité à la LOLF, pouvait à terme poser des problèmes de soutenabilité. Il a ainsi exposé qu'en 2006, 145 impôts et contributions avaient été affectés pour un montant de 165 milliards d'euros, dont 72 % au profit du secteur social.

Dans cette perspective, il a proposé que la norme de dépense soit redéfinie, afin notamment qu'une norme soit fixée à ceux des opérateurs de l'Etat disposant de plus de 80 % de ressources publiques.

Enfin, dans une troisième partie, M. Philippe Marini, rapporteur général , a examiné les différents éléments du solde des administrations publiques. Il a estimé que l'objectif de déficit prévu en 2006 pour l'ensemble des administrations publiques, de 2,7 points de PIB, ne devait pas être considéré comme acquis, en particulier du fait de la disparition de la soulte des industries électriques et gazières, qui avait apporté en 2005 environ 0,5 point de PIB de recettes supplémentaires. Il a jugé en outre que, même sans « scénario catastrophe », divers aléas pouvaient amener le déficit public au-delà des 2,5 % du PIB, niveau que prévoyait le gouvernement. Il a ainsi estimé que la prochaine législature devrait s'attacher, en particulier, à ne pas laisser « filer » la dépense publique.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a également exprimé, comme il l'avait fait lors de l'examen des précédents budgets, un certain scepticisme quant au contenu de la programmation 2008 2010 des finances publiques annexée au projet de loi de finances. Il a noté, d'une part, que cette programmation supposait un fort ralentissement des dépenses d'assurance maladie, et d'autre part, qu'elle prévoyait que les « administrations de sécurité sociale » seraient excédentaires de 0,6 point de PIB en 2010. Alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 prévoyait que les « régimes obligatoires de base » seraient équilibrés en 2010, cela semblait impliquer un excédent de l'assurance chômage de l'ordre de 0,6 point de PIB en 2010, ce qui paraissait peu vraisemblable.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. Jean Arthuis, président , a félicité le rapporteur général pour la clarté de son exposé. Il a considéré que les prévisions de recettes et de dépenses du présent projet de loi de finances traduisaient « une sincérité certaine ». Il a craint que la nature de ce que le rapporteur général désignait comme une « agencisation » de l'Etat, ne soit, avant tout, une manière de contourner la règle de progression des dépenses de l'Etat. Il s'est interrogé sur le montant des soultes éventuellement prévues pour 2006.

En réponse, M. Philippe Marini, rapporteur général , a indiqué que, compte tenu de ses prévisions d'évolution du solde public structurel et du solde public structurel dit « hors soultes » (corrigé en fait de l'ensemble des recettes exceptionnelles), le rapport économique, social et financier pour 2007 supposait implicitement le versement d'une recette exceptionnelle de l'ordre de 0,1 point de PIB, qui améliorerait le solde des administrations publiques en 2006. Il a cependant indiqué qu'à sa connaissance, le gouvernement ne prévoyait le versement d'aucune soulte stricto sensu en 2006. Il a précisé à cet égard que, selon les informations transmises à la commission, le versement d'une soulte pourrait rapporter de 7 à 8 milliards d'euros dans le cas de La Poste, de 500 à 700 millions d'euros dans celui de la RATP, et de 2 milliards d'euros à 2,5 milliards d'euros dans celui de la Banque de France. Il a considéré que le versement, par La Poste, d'un acompte en 2006, pourrait être justifié.

M. Jean Arthuis, président , a douté que La Poste soit capable de financer une soulte, tandis que M. Jean-Jacques Jégou a considéré que tel n'était pas le cas de la RATP.

M. Alain Lambert a exprimé le souhait que les chiffres et graphiques projetés en commission soient également exprimés en milliards d'euros, et non simplement en points de PIB ou en pourcentages d'évolution. Il a souhaité, à cet égard, connaître le supplément d'économie suscité par le « moins un volume » par rapport au « zéro volume ». Il a jugé que les propositions faites par le rapporteur général dans son récent rapport d'information sur les prélèvements obligatoires (n° 41, 2006-2007) étaient « très raisonnables », et a donc souhaité qu'elles soient suivies d'effet.

M. Marc Massion a estimé que le titre de la présentation faite par le rapporteur général, « Un budget pour ménager l'avenir », traduisait le manque d'ambition du projet de loi de finances pour 2007. Il a considéré que la comparaison, effectuée par le rapporteur général, entre les « performances » de la législature actuelle et celles de la législature précédente en matière de finances publiques, n'était pas objective. Il s'est demandé, en particulier, pourquoi le rapporteur général n'avait pas inclus la période 1993-1997 dans sa comparaison. Il a estimé que le projet de loi de finances pour 2007 était un budget « d'expédition des affaires courantes en fin de législature ». Il a jugé que ce projet de loi de finances pour 2007 se caractérisait, en réalité, par un manque de sincérité.

Mme Nicole Bricq a souligné que le déficit public fluctuait autour de 3 points de PIB depuis le début des années 1990, et que cette situation n'avait pas changé avec l'actuelle législature. Elle s'est interrogée, en outre, sur les conséquences, pour l'économie française, d'une moindre croissance de l'économie allemande.

M. Philippe Dallier s'est demandé si le 1,2 milliard d'euros de crédits de paiement qui manquaient en 2007 par rapport à la programmation prévue par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale concernaient, notamment, l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

M. Paul Girod a souhaité obtenir des précisions au sujet des différentes notions d'élasticité des recettes publiques au PIB auxquelles le rapporteur général avait eu recours lors de sa présentation.

M. Serge Dassault s'est interrogé sur les impositions affectées aux administrations de sécurité sociale, ainsi que, de façon plus générale, sur leur mode de financement.

En réponse à M. Alain Lambert, M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué que la norme du « moins un volume » réduisait les dépenses de l'Etat de 2,5 milliards d'euros par rapport à la règle du « zéro volume ». En réponse à M. Marc Massion, il a considéré que le titre de sa présentation, « Un budget pour ménager l'avenir », traduisait non un manque d'ambition de la part de l'actuel gouvernement, mais son respect pour le choix que les Français seraient amenés à faire au printemps prochain, et le souci de ne pas hypothéquer l'action du prochain gouvernement. En réponse à Mme Nicole Bricq, il a indiqué qu'une croissance de l'économie allemande inférieure de 1 point réduisait la croissance de l'économie française de 0,1 point environ, selon les estimations transmises par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il a considéré que la France devrait, peut-être, tirer en 2007 les conséquences de la politique fiscale non coopérative actuellement menée par l'Allemagne. Il a estimé que, si l'effort de réduction du déficit public structurel mené par l'actuelle législature avait été modeste, cela ne devait pas dissimuler le fait que la maîtrise de la dépense de l'Etat avait permis de financer la forte croissance de celle des administrations de sécurité sociale. Il s'est alors déclaré favorable à une « rupture » en matière de finances publiques. En réponse à M. Philippe Dallier, il a indiqué que les crédits manquants par rapport à la programmation prévue par la loi de cohésion sociale précitée concernaient essentiellement la politique de l'emploi, et non l'ANRU. Il a indiqué que son rapport écrit comporterait des développements sur les engagements financiers de l'Etat vis-à-vis de l'ANRU. Il a néanmoins souligné que la programmation budgétaire et la création d'agences ne favorisaient pas la maîtrise de la dépense. En réponse à M. Paul Girod, il a indiqué qu'il convenait de distinguer l'élasticité par rapport au PIB des recettes fiscales de l'Etat, et celle des prélèvements obligatoires dans leur ensemble, la seconde fluctuant moins que la première d'une année sur l'autre, l'élasticité des cotisations sociales par rapport au PIB étant, en effet, assez stable.

A l'issue de ce débat, la commission a donné acte au rapporteur général de sa communication .

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