Article additionnel après l'article 500 du code civil :
Possibilité de conclure un contrat de fiducie

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article 500-1 dans le code civil afin de permettre, au cours de la tutelle, la gestion des biens du majeur protégé dans le cadre d'un contrat de fiducie.

Lorsque les biens du majeur protégé s'avèrent importants, la fiducie peut en effet constituer un instrument de gestion particulièrement efficace et un outil juridique complémentaire au mandat de protection future créé par le présent projet de loi.

La mise en fiducie des biens du majeur peut être, dans certaines hypothèses, un moyen d'assurer au mieux la protection de son patrimoine tout en lui garantissant un revenu stable et adapté. Ses biens, gérés par un professionnel de la gestion de patrimoine, pourront ainsi être placés dans le cadre d'un patrimoine affecté et géré dans son seul intérêt. Rappelons en effet que la fiducie permet, dans une relation triangulaire, le transfert de biens ou de droits du patrimoine d'une personne (le fiduciant ou constituant) vers celui d'une autre personne (le fiduciaire) pour le bénéfice d'une troisième (le bénéficiaire) 116 ( * ) .

Comme le relevait notre excellent collègue Philippe Marini dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi instituant la fiducie 117 ( * ) , « l'intérêt pour des personnes « vulnérables » de recourir à la fiducie ne peut pas non plus être négligé ; au contraire, il milite même fortement en faveur de l'adoption de la fiducie. »

La proposition de loi instituant la fiducie, adoptée au Sénat le 13 octobre 2006, ne permet toutefois pas de remplir une telle fonction, le Gouvernement ayant souhaité, malgré les réticences de nombreux intervenants au débat parlementaire -dont votre rapporteur-, restreindre la qualité de constituant aux seules personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés.

Aussi votre commission, soucieuse d'assurer au mieux les intérêts du majeur protégé, vous propose-t-elle d'autoriser le recours au mécanisme fiduciaire dans le cadre d'une mesure de protection ordonnée par le juge. Toutefois, dès lors que ce contrat opère transfert de patrimoine, fût-ce à titre temporaire, elle a souhaité particulièrement encadrer ce recours .

En premier lieu, dans le cadre du dispositif qu'elle vous propose, le recours à un contrat de fiducie ne pourra être décidé que si l'importance du patrimoine de la personne protégée le justifie.

En deuxième lieu, le bénéficiaire du contrat de fiducie ne pourra être que la personne protégée elle-même, à l'exclusion de toute autre personne.

En dernier lieu, sur le plan procédural, pour conclure un contrat de fiducie, le tuteur devra avoir obtenu, au préalable, l'autorisation du juge des tutelles . Votre commission a souhaité réserver ce pouvoir à ce seul magistrat en excluant le conseil de famille.

Dans le cadre de l'exécution du contrat de fiducie, le fiduciaire devra rendre compte de sa mission dans les conditions prévues à l'article 513 du code civil tel que rédigé par l'article 7 du présent projet de loi.

Afin de garantir, à tout moment, les intérêts du majeur, le contrat de fiducie pourra, à tout moment et nonobstant toute clause contraire, être résilié au nom de la personne protégée.

Il prendra fin, en principe, par la survenance du terme ou, si ceux-ci interviennent avant le terme, par la réalisation du but poursuivi, la mainlevée de la mesure de protection ou le décès de la personne protégée. Dans ce dernier cas, les biens transférés sont rapportés à sa succession.

Votre commission vous propose également que la fonction de fiduciaire puisse être exercée, outre par les personnes mentionnées dans la proposition de loi adoptée par le Sénat, par les membres de professions juridiques réglementées, sous réserve que ceux-ci satisfassent à des conditions de formation professionnelle et de garanties en cas de mise en jeu de leur responsabilité civile professionnelle.

Si le dispositif proposé s'inscrit dans le cadre des règles relatives à la tutelle, il sera également applicable lorsque la personne est soumise à une curatelle. En effet, compte tenu du libellé général de l'article 467 du code civil tel que rédigé par le présent projet de loi, la personne vulnérable ne pourra faire, sans l'assistance du curateur, aucun acte qui, en cas de tutelle, requerrait une autorisation du juge. Le contrat de fiducie ne sera donc valable pour une personne sous curatelle que s'il a été conclu avec l'assistance du curateur.

Votre commission estime que, sous réserve des spécificités évoquées dans l'amendement proposé, le contrat de fiducie devra obéir au même régime que celui prévu par le texte de la proposition de loi adoptée par le Sénat le 13 octobre 2006. Elle vous proposera néanmoins, avant l'article 20 du présent projet de loi, de prévoir un dispositif fiscal applicable aux personnes physiques constituantes, destiné à assurer une transparence fiscale parfaite de l'opération fiduciaire. En outre, cet amendement prévoira que ces personnes ne pourront opposer le secret en matière de blanchiment de capitaux et de lutte contre le financement du terrorisme 118 ( * ) .

Votre commission a décidé, lors de l'examen du présent rapport, que cet amendement devrait être rectifié, le cas échéant, afin de prendre en considération le texte de cette proposition de loi, dans la rédaction qui aura été adoptée par l'Assemblée nationale lors de sa séance du 7 février 2007.

* 116 Sur la notion de fiducie, voir le rapport n° 11 (Sénat, 2005-2006), p. 9.

* 117 Proposition de loi n° 178 (Sénat, 2004-2005).

* 118 Voir infra, le commentaire de l'article additionnel avant l'article 20.

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