II. LES  PRINCIPAUX  ENJEUX  DES  NÉGOCIATIONS ACTUELLEMENT EN COURS AU NIVEAU EUROPÉEN

Quels sont les principaux enjeux des négociations menées actuellement au niveau européen ?

Comme l'a indiqué M. Jean-Michel Casa, directeur de l'Union européenne au ministère des affaires étrangères et européennes, lors de son audition devant votre commission, le 17 février 2010, les principaux enjeux portent sur la nature, le périmètre et la composition de ce service.

A. LA NATURE DU SERVICE EUROPÉEN POUR L'ACTION EXTÉRIEURE

Le premier enjeu porte sur la nature même de ce service.

Tous les États membres considèrent que le service européen pour l'action extérieure doit être un service sui generis , à équidistance de la Commission européenne et du Conseil.

Ce service serait, en effet, placé sous l'autorité du Haut représentant mais il devrait également pouvoir assister le Président du Conseil européen, ainsi que le Président et les membres de la Commission européenne, dans l'exercice de leurs fonctions respectives, mais aussi et surtout coopérer étroitement avec les Etats membres.

Pour sa part, le Parlement européen défend l'idée selon laquelle le futur service européen pour l'action extérieure devrait être intégré au sein de la Commission européenne , ce qui permettrait au Parlement européen d'exercer un contrôle étroit sur ce service 1 ( * ) .

Cette demande a toutefois fait l'objet d'un rejet unanime par les Etats membres.

Une autre question essentielle pour les Etats membres tient à l'autonomie de ce service en termes de budget et de gestion du personnel.

En effet, dans le cas contraire, le Parlement européen serait tenté d'utiliser l'arme du budget pour peser sur les orientations de la politique étrangère de l'Union européenne, alors même que les traités ne lui reconnaissent pas une telle compétence.

B. SON PÉRIMÈTRE

Un deuxième enjeu important porte sur le périmètre de ce service.

La France considère que le périmètre du futur service européen pour l'action extérieure devrait être le plus large possible afin de permettre au Haut représentant d'exercer pleinement son mandat.

En vertu du traité, le Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, en sa qualité de vice-président de la Commission, a en effet la responsabilité de la coordination des aspects touchant aux relations extérieures au sein de la Commission européenne.

Cela s'applique en particulier à l'aide au développement et à la politique de voisinage, dans une certaine mesure à la politique commerciale, mais aussi à la réponse de l'Union européenne aux crises. La crise haïtienne, par exemple, a montré que si l'Union européenne a été, de loin, le premier contributeur en termes d'aide matérielle et financière, son action a souffert d'un manque de visibilité et de coordination.

Or, ces portefeuilles, y compris la réponse de l'Union européenne aux crises, ont été confiés à différents Commissaires européens par le Président de la Commission européenne, M. José Manuel Barroso.

Une conception large du service supposerait qu'il comprenne des directions géographiques, couvrant toutes les régions et tous les pays, y compris des pays bénéficiaires de l'aide au développement ou faisant l'objet de négociations d'adhésion, mais aussi des directions thématiques, comme par exemple une structure chargée de coordonner la réponse aux crises ou une direction chargée des relations avec les Nations unies.

La France souhaite également que le service européen pour l'action extérieure joue le rôle de chef de file dans l'élaboration des grandes orientations stratégiques des différents instruments financiers de l'Union européenne , comme l'instrument européen de voisinage et de partenariat, l'instrument de coopération et de développement ou le fonds européen de développement, même si leur gestion annuelle et leur mise en oeuvre devraient continuer de relever de la Commission européenne.

La Commission européenne s'est toutefois montrée réticente à l'idée de confier ce rôle de chef de file au service européen pour l'action extérieure, en ce qui concerne la programmation stratégique des instruments financiers. Elle plaide pour que le travail du service soit réalisé sous le contrôle et la supervision des Commissaires européens compétents.

Rappelons que l'aide publique au développement de l'Union européenne représente 2,2 milliards d'euros, alors que le budget de la politique étrangère et de sécurité commune est de l'ordre de seulement 280 millions d'euros.

En définitive, le compromis trouvé lors du Conseil du 26 avril prévoit que le service européen pour l'action extérieure aura la responsabilité d'établir, en coopération avec les services compétents de la Commission, les propositions relatives à la programmation stratégique des instruments financiers, sous l'autorité du Haut représentant. En ce qui concerne le fonds européen de développement, l'instrument de financement de la coopération au développement et l'instrument européen de voisinage, ce travail sera opéré également sous la supervision et le contrôle des Commissaires européens compétents. Ce rôle de chef de file conféré au service pour la programmation pluriannuelle des instruments financiers permettra de renforcer la cohérence entre les priorités politiques de l'Union européenne et la définition des orientations de son aide financière.

Concernant les structures de la politique de sécurité et de défense commune et de gestion de crises , comme l'Etat-major de l'Union européenne, la direction « gestion des crises et planification », la « capacité civile de planification et de conduite » ou encore le « centre de situation », elles devraient faire partie du service européen pour l'action extérieure, mais elles relèveraient directement de l'autorité du Haut représentant, en sa seule qualité de Haut représentant, afin de préserver la spécificité de leur fonctionnement et leurs procédures, ainsi que l'autonomie de leurs chaînes de commandement.

Enfin, ce service devrait aussi comprendre un nombre limité de fonctions de soutien , en particulier en matière d'informatique ou de gestion des ressources humaines, tout en s'appuyant sur d'autres services, comme ceux de la Commission européenne ou du secrétariat général du Conseil, pour les services de traduction par exemple, par souci d'efficacité et pour limiter les doubles emplois et donc les coûts.

* 1 Résolution du Parlement européen du 22 octobre 2009 sur les aspects institutionnels de la mise en place du service européen pour l'action extérieure

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