Article 7 (art. L. 632-7 nouveau du code de l'éducation) Création d'un contrat d'engagement relatif à la prise en charge psychiatrique des personnes placées sous main de justice
Cet article vise à compléter le code de l'éducation afin de créer un contrat d'engagement destiné à inciter les internes en psychiatrie, en contrepartie d'une allocation mensuelle, à assurer la prise en charge psychiatrique des personnes sous main de justice en s'inscrivant sur une liste d'experts judiciaires et une liste de médecins coordonnateurs.
Ce dispositif s'inspire de l'article 46 de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (dite « HPST ») qui a instauré un contrat d'engagement de service public (CESP) à destination des étudiants (à compter de la deuxième année d'études) et internes en médecine pour les fidéliser dans des spécialités et des lieux d'exercice où la continuité des soins est menacée. En contrepartie d'une allocation versée jusqu'à la fin de leurs études, les bénéficiaires s'engagent à exercer leurs fonctions à titre libéral ou salarié dans les zones où l'offre médicale fait défaut pendant une durée minimale de deux ans.
Aux termes du premier alinéa du texte proposé par le projet de loi pour le nouvel article L. 632-7 du code de l'éducation les parties contractantes seraient :
- d'une part, les internes ayant choisi pour spécialité la psychiatrie, dont le nombre sera fixé chaque année par arrêté conjoint du ministre de la justice et des ministres chargés de la santé et du budget -vingt internes par an selon l'étude d'impact ;
- d'autre part, le centre national de gestion (CNG), établissement public à caractère administratif institué par l'article 116 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. Placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé, cette structure assure la gestion statutaire et le développement des ressources humaines des personnels hospitaliers et des directeurs de la fonction publique hospitalière.
Les deuxième et troisième alinéas fixent les termes du contrat . Les internes pourraient bénéficier en sus de leur rémunération d'une allocation (dont le montant brut mensuel, équivalent à celui du contrat d'engagement de service public, s'élèvera à 1 200 euros) jusqu'à la fin de leurs études médicales. En contrepartie, ils s'engagent à trois obligations :
- suivre, pendant ou à l'issue de leurs études médicales, une formation en sciences criminelles, en psychiatrie légale ou criminelle, en psychologie légale ou criminelle, relative à l'expertise judiciaire ou à la prévention de la récidive dont la liste est fixée par arrêté -cette première obligation résulte d'un ajout de l'Assemblée nationale ;
- exercer en qualité de psychiatre à titre salarié ou à titre salarié et libéral à compter de la fin de leur formation dans un ressort choisi sur une liste limitative ;
- demander leur inscription sur une liste d'experts près la cour d'appel et sur une liste de médecins coordonnateurs établie par un arrêté conjoint du ministre de la justice chargé de la santé en fonction des insuffisances constatées. La durée de l'engagement est égale au double de celle pendant laquelle l'allocation n'a été versée sans pouvoir être inférieure à deux ans.
Aux termes du quatrième alinéa, le choix du ressort par les internes concernés s'effectue au cours de leur dernière année d'études.
Le cinquième alinéa prévoit que les médecins ou internes ayant souscrit le contrat peuvent se désengager au prix d'une somme dont le montant et les modalités de paiement sont fixées par un arrêté conjoint des deux ministres. Le montant de cette indemnité ne peut dépasser les sommes perçues au titre du contrat.
Un décret d'application (6 ème alinéa) détermine en particulier les conditions dans lesquelles les médecins peuvent, pendant la durée d'engagement, changer de ressort d'exercice et être inscrits sur les listes d'experts ou de médecins coordonnateurs relevant d'autres ressorts. Il précise les modalités selon lesquelles le refus d'accepter les désignations en qualité d'expert ou de médecin coordonnateur ainsi que, comme l'a prévu l'Assemblée nationale, l'absence de formation peuvent être considérés comme une rupture d'engagement.
Le II de l'article 7 rend applicables ces dispositions à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
Le III applique le régime de recouvrement de la cotisation sociale sur l'allocation versée dans le cadre d'un contrat d'engagement de service public à l'allocation créé par le présent article.
A l'instar d'une grande majorité des médecins qu'elle a rencontrés, votre rapporteure est hostile à la possibilité donnée à des psychiatres encore dépourvus d'expérience d'assumer des missions d'expertise ou de médecin coordonnateur 43 ( * ) .
Ces responsabilités impliquent en effet un certain recul que seule peut procurer une pratique professionnelle.
Votre rapporteure estime que les moyens envisagés par le projet de loi de programmation pour répondre à l'insuffisance indéniable du nombre d'experts et de médecins coordonnateurs ne sont ni adaptés, ni suffisants. Elle appelle de ses voeux une revalorisation des expertises dont l'exigence avait pourtant été rappelée par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur l'affaire d'Outreau ainsi qu'une large concertation avec les professionnels de ce secteur.
A la lumière de ces observations, sur proposition conjointe de sa rapporteure, des membres du groupe socialiste et des membres du groupe CRC, votre commission a supprimé l'article 7.
* 43 Dans une contribution remise à votre rapporteur, l'association française des étudiants en psychiatrie redoute que le CESP ne mette en danger de « jeunes collègues dans des zones sous-denses où ils ne pourront ni en référer, ni demander de l'aide à des psychiatres plus expérimentés, et ce dans un domaine d'exercice où l'accompagnement est pourtant indispensable ».