LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Les seules modifications sont intervenues lors de la seconde délibération.

I. MINORATION DES CRÉDITS À TITRE RECONDUCTIBLE

Une minoration de 8 635 749 euros en AE et en CP des crédits de la mission « Enseignement scolaire » a été adoptée afin de gager les ouvertures de crédits opérées lors de la discussion de la seconde partie. Elle se répartit comme suit entre les différents programmes qui composent la mission :

- 95 749 euros sur le programme « Enseignement scolaire public du premier degré » ;

- 450 000 euros sur le programme « Enseignement scolaire public du second degré » ;

- 5 630 000 euros sur le programme « Vie de l'élève » ;

- 270 000 euros sur le programme « Enseignement privé du premier et du second degrés » ;

- 2 000 000 euros sur le programme « Soutien de la politique de l'éducation nationale » ;

- 190 000 euros sur le programme « Enseignement technique agricole ».

Toutes ces diminutions concernent les crédits hors titre 2. Hormis l'enseignement agricole et, dans une moindre mesure, l'enseignement privé, tous les programmes sont touchés d'une manière quasi équivalente : la réduction représente 0,04 % des dotations inscrites dans le projet de loi pour l'enseignement agricole, 0,17 % pour l'enseignement privé et est comprise entre 0,24 % et 0,33 % pour les quatre autres programmes qui composent la mission.

II. MAJORATION DES CRÉDITS À TITRE NON RECONDUCTIBLE

L'Assemblée nationale a majoré, à titre non reconductible et conformément au souhait de la commission des finances, le plafond de la mission « Enseignement scolaire » de 1 303 048 euros en AE et en CP.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 13 novembre 2012, sous la présidence de M. Albéric de Montgolfier, vice-président, la commission a procédé à l'examen du rapport de MM. Thierry Foucaud et Claude Haut, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Enseignement scolaire ».

M. Claude Haut , rapporteur spécial . - Je voudrais, à titre liminaire, excuser Thierry Foucaud, qui ne peut pas être présent aujourd'hui parmi nous, pour des raisons familiales.

L'examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire » intervient dans un climat radicalement différent de ce qu'il était l'année dernière à la même époque. En 2013, cette mission bénéficiera de la priorité donnée par le Gouvernement à la jeunesse en général et à l'éducation en priorité.

Comme d'habitude, avec mon collègue Thierry Foucaud, nous nous sommes partagés les très nombreux sujets couverts par la mission. En son absence, après mes propres observations, je vous ferai part de son appréciation sur ce budget.

Un mot tout d'abord des grandes masses budgétaires. Hors CAS pensions, les moyens passeront de 45,4 milliards d'euros en 2012 à 45,7 milliards en 2013 puis 46,1 milliards en 2014 et 46,6 milliards en 2015. En moyenne, entre 2013 et 2015, la progression des crédits s'établit donc à + 0,86  % par an. Contrairement à ce que certains ont pu dire, cette évolution ne représente pas une fuite en avant en faveur de toujours plus de moyens, sans s'interroger sur les finalités pédagogiques des dotations budgétaires. Le Gouvernement n'a pas fait le choix de la quantité contre la qualité.

L'examen des crédits montre simplement que 2013 est une année de transition entre la période que l'on pourrait appeler de « vaches maigres » mise en oeuvre par le précédent Gouvernement et la refondation voulue par le Président de la République.

Au total, les crédits des cinq programmes de la mission « Enseignement scolaire » qui relèvent du ministère de l'éducation nationale inscrits au projet de loi de finances pour 2013 s'élèvent à 62,7 milliards d'euros, contre 60,9 milliards d'euros en 2012, soit une progression de 2,92  %.

Avant d'entrer plus en détail dans leur présentation, je rappellerai d'un mot les mesures d'urgence prises cet été pour la rentrée 2012 dans la loi de finances rectificative de juillet dernier. En juin, les opérations de préparation de la rentrée étaient évidemment très avancées et il était difficile de modifier les choses en profondeur. C'est d'ailleurs pour cette raison que plusieurs des initiatives du précédent Gouvernement sont poursuivies avant de faire l'objet, au cours des mois à venir, d'une évaluation approfondie. Je pense par exemple aux internats d'excellence ou à l'opération « cours le matin, sport l'après-midi ». Il aurait été absurde de remettre en cause dans l'urgence des orientations déjà décidées. Sur le plan pédagogique, on ne peut arrêter brutalement la réforme du lycée sans rien proposer à la place. Si le livret de compétences doit évoluer, on ne peut pas le faire sans réflexion préalable. Tout cela, le Gouvernement l'a bien compris et je crois que nous pouvons tous nous en féliciter.

Mais le calendrier ne l'empêchait pas de prendre de premières mesures. Le collectif de l'été a donc revalorisé de 25  % le montant de l'allocation de rentrée scolaire, qui est versée aux parents de 5 millions d'enfants. La dépense correspondante a été évaluée à 370 millions d'euros, à comparer à une dépense totale d'un milliard et demi d'euros. Le collectif a également majoré les crédits de la mission d'un peu plus de 89 millions d'euros, ce qui a permis de dégager des moyens supplémentaires. Je pense en particulier au recrutement de 1 000 professeurs des écoles, 1 500 auxiliaires de vie scolaire pour les élèves handicapés et 2 000 assistants d'éducation. Toutes ces personnes ont reçu une affectation dès cette rentrée.

J'en viens maintenant au contexte dans lequel nous examinons les crédits de la mission « Enseignement scolaire ». Ils constituent la première traduction législative de la refondation voulue par le Gouvernement et dont le Président de la République a défini les grandes lignes le 9 octobre dernier à la Sorbonne. Celles-ci trouveront leur traduction législative au sein de la loi d'orientation annoncée par le Gouvernement.

J'évoquerai néanmoins une des questions auxquelles une réponse a d'ores et déjà été apportée, celle des rythmes scolaires. Le nombre élevé d'heures passées en classe, la concentration du calendrier scolaire sur le plus petit nombre de semaines et son corollaire, la longueur de la journée, font de l'enseignement français du premier degré un cas à part parmi les pays de l'OCDE. Parallèlement, les résultats des élèves, tels qu'ils ressortent des comparaisons internationales, ne sont guère favorables.

Hier, les élèves ont retrouvé le chemin de leurs classes au terme des premières vacances de la Toussaint de deux semaines entières. Mais l'essentiel de la nouvelle organisation du temps scolaire est à venir à la rentrée 2013. Comme vous le savez, les élèves passeront quatre jours et demi en classe, contre quatre jours actuellement. En contrepartie de l'accueil le mercredi matin, la journée sera raccourcie. Bien évidemment, cette nouvelle organisation du temps scolaire aura une incidence directe sur les dépenses de nos communes et départements : il faudra bien financer l'accueil des enfants le mercredi matin, leur encadrement pendant l'heure dégagée en fin de journée ainsi que les modifications de l'organisation des transports scolaires.

Pour en revenir au budget, les moyens supplémentaires permettront en priorité de financer le remplacement de tous les enseignants ainsi que les recrutements annoncés, qu'il s'agisse d'enseignants, de personnels administratifs ou d'accompagnement. Ces recrutements se dérouleront dans le cadre d'une refonte complète de la formation des enseignants.

Dans le détail, les chiffres mentionnés dans la presse, voire dénoncés par certains, méritent qu'on s'y attarde un instant. D'aucuns ont joué à se faire peur en assimilant volontairement recrutements et créations d'emplois. Premier élément, l'intégralité des personnels partant en retraite sera remplacée. C'est un renversement complet par rapport aux années précédentes, au cours desquelles le ministre de l'éducation nationale s'était efforcé d'être le bon élève de la classe en appliquant avec rigueur la règle du « 1 sur 2 ». Le simple remplacement des départs prévus à la rentrée 2013 représente déjà 22 100 recrutements.

En juin 2013, une seconde série de concours sera organisée afin de recruter les enseignants destinés à pourvoir les postes de la rentrée 2014. 21 350 postes seront ouverts aux étudiants.

En tout, ce sont donc plus de 43 000 nouveaux enseignants qui seront recrutés en 2013. Ces chiffres paraissent très élevés. Mais, au total, le schéma d'emplois n'évolue guère. C'est encore plus vrai du plafond d'emplois, qui n'augmente que de 1 963 équivalent temps plein travaillés, à comparer à un total de 970 031.

Un mot de l'enseignement technique agricole. Les crédits sont reconduits en autorisations d'engagement et progressent de 30 millions d'euros en crédits de paiement, pour atteindre 1,33 milliard d'euros, soit guère plus de 2  % des crédits de la mission. L'année dernière, beaucoup, parmi nous, s'étaient inquiétés de l'hémorragie des emplois. Après les cinquante nouveaux emplois de la rentrée 2012, 200 postes d'enseignants seront créés en 2013. C'est un début de rattrapage après les coupes des dernières années, dont celles de 2012, qui avaient représenté 280 emplois. Le budget 2013 de l'enseignement agricole permet également d'opérer un rééquilibrage entre l'enseignement public et l'enseignement privé. Comme nous avions eu l'occasion de le dénoncer, l'enseignement public avait payé le plus lourd tribut à la politique de réduction des effectifs d'enseignants, puisqu'il avait dû supporter 60  % des suppressions d'emplois, alors qu'il ne représente que 37  % des effectifs. A l'inverse, à la rentrée 2013, l'enseignement public bénéficiera en priorité des postes supplémentaires : 140 sur les 200 prévus.

Le projet de budget permet également de financer, en années pleines, les revalorisations des bourses intervenues à la rentrée 2012, ainsi que celles prévues pour la rentrée 2013. L'accroissement des crédits, qui passent de 619,5 à 634,5 millions d'euros, tient également compte de l'accroissement du nombre d'élèves boursiers.

Pour terminer, je mentionnerai que la mission n'échappe pas à l'effort de maîtrise des dépenses de fonctionnement courant demandé à l'ensemble des départements ministériels. Evidemment, les masses budgétaires en cause sont sans commune mesure avec les dépenses du titre 2, qui représentent à elles seules 59,55 milliards d'euros sur les 64 milliards de la mission. Mais, ici comme ailleurs, les emplois des opérateurs diminuent et ils sont appelés à rationnaliser leurs dépenses, tout comme les services du ministère.

En conclusion, ce budget témoigne d'un engagement et d'une ambition pour notre système éducatif. Je vous propose donc de donner un avis favorable à son adoption.

Après la présentation très détaillée des grandes orientations de la mission « Enseignement scolaire », je voudrais me faire le messager de notre collègue Thierry Foucaud en portant un éclairage particulier sur la politique de formation des enseignants et des personnels d'accompagnement.

2013 sera une année transitoire et deux concours de recrutement seront successivement organisés. A la rentrée 2013, les enseignants nouvellement affectés devant les classes auront été recrutés selon les modalités encore en vigueur, c'est-à-dire au niveau Master 2. Le précédent Gouvernement avait, en effet, choisi le « tout théorique », sanctionné par un diplôme élevé, au détriment de l'apprentissage du terrain complètement laissé de côté. Des jeunes professeurs se retrouvaient devant les classes, y compris les plus difficiles d'entre elles, avec pour seul soutien l'aide que pouvaient leur apporter leurs collègues.

Le nouveau système prendra ensuite le relais, pour les enseignants appelés à être affectés à la rentrée 2014. Le Gouvernement a annoncé la mise en place d'écoles supérieures du professorat et de l'éducation, sans revenir aux IUFM. Les étudiants seront recrutés en fin de Master 1 et effectueront leur année de Master 2 dans ces établissements d'un genre nouveau, au sein d'un cursus à la fois théorique et pratique. Le contenu précis de cette formation, ainsi que le contour exact des ESPE restent à définir.

Certains de ces étudiants seront recrutés en emplois d'avenir professeur. Le seul point commun avec les emplois d'avenir en général est le public auquel il s'adresse, c'est-à-dire de jeunes boursiers issus en priorité des zones défavorisées. En revanche, bien évidemment, les emplois d'avenir professeur ne sont pas ce qu'on appelle généralement des décrocheurs ou de jeunes diplômés qui n'arrivent pas à s'insérer sur le marché du travail.

Ces emplois constituent à la fois une mesure sociale et une forme de pré-recrutement dès la licence, qu'on peut rapprocher de ce qui existait autrefois pour les écoles normales ou, à un autre niveau, pour les écoles normales supérieures. L'étudiant est rémunéré, jusqu'à 900 euros par mois, contre l'engagement de se présenter aux concours de recrutement de l'éducation nationale. Les crédits inscrits au projet de budget de la mission s'élèvent à 13,8 millions d'euros, pour financer 6 000 emplois d'avenir. Le système devrait monter en puissance en 2014 puis 2015, à raison de 6 000 emplois supplémentaires chaque année.

La question sous-jacente est celle de la crise du recrutement que connaît l'éducation nationale. Selon le ministre, la baisse du nombre des candidats aux concours et la désaffection vis-à-vis des métiers de l'enseignement étaient liées à la diminution des perspectives de recrutement et au manque de considération dans lequel le Gouvernement tenait les enseignants. Nous verrons bien. En tout état de cause, un cap a été fixé. Lors de la conclusion des réflexions sur la refondation, le Président de la République a clairement rappelé ses engagements en faveur de la création de 60 000 emplois pour l'éducation sur la durée du quinquennat.

Autre recrutement financé sur les crédits de l'action « Vie scolaire et éducation à la responsabilité », celui de 2 500 assistants d'éducation, dont 500 pour, selon le projet annuel de performances, exercer une nouvelle mission dite de prévention et de sécurité au sein des « établissements les plus exposés aux incivilités et aux violences, en complément du travail des équipes de vie scolaire et des équipes mobiles de sécurité ».

Autre point d'interrogation pour l'avenir, la place de la formation continue des enseignants au sein des futures écoles supérieures du professorat et de l'éducation. Cela devrait constituer une de leurs missions. Toujours est-il que les crédits sont simplement reconduits au centime près (12,95 millions d'euros).

L'examen de la politique de formation me fournit une transition pour évoquer l'accompagnement des élèves handicapés. Le nombre des auxiliaires de vie scolaire a été sensiblement augmenté dès la rentrée (1 500 emplois) et le sera encore à la rentrée 2013. Pour autant, les élèves handicapés et leurs parents ont, semble-t-il, rencontré beaucoup de difficultés à la rentrée. Entre l'absence d'AVS le jour J, l'affectation provisoire d'un AVS et son changement au bout de quelques semaines, l'inadéquation de la personne avec l'emploi proposé, les remontées du terrain sont assez négatives. Je crois qu'il existe un véritable problème de formation des personnes dont la mission est d'accompagner les élèves handicapés. Des dispositifs existent mais si vous recrutez la personne à la rentrée, par définition elle n'a pas bénéficié des 60 heures de formation auxquelles elle a droit.

Le projet de budget comporte un effort en faveur de la formation des enseignants référents des élèves handicapés. C'est une bonne chose mais il faut rapidement se pencher sur la formation des AVS, d'autant que nous devons faire face à une triste réalité : les enfants handicapés sont nombreux dans les petites classes mais un décrochage se produit vers 15-16 ans et le taux de scolarisation est beaucoup plus faible à partir de cet âge. C'est aussi le moment où le rôle des AVS change. Il relève moins de l'aide technique et plus d'un soutien éducatif. Encore faut-il que les personnes qui occupent ces emplois soient formées. N'oublions pas, par ailleurs, qu'il s'agit d'emplois précaires le plus souvent. Tout comme les élèves handicapés, les AVS ont besoin de stabilité.

En matière d'aide, il faut aussi évoquer l'éducation prioritaire. Plusieurs rapports récents ont souligné l'empilement des dispositifs, qu'il s'agisse des établissements de réinsertion sociale, des internats d'excellence mentionnés tout à l'heure, du programme Clair puis Eclair (écoles, collèges et lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite), des réseaux ambition réussite (RAR). Il faut mettre tout cela au clair et revoir le zonage de l'éducation prioritaire. Le ministre estime pouvoir le faire pour la rentrée 2014. J'espère que cela sera aussi l'occasion de s'interroger sur les moyens des RASED, qui ont beaucoup souffert des réductions de moyens des dernières années. Ce à quoi le Gouvernement répond que l'objectif de « plus de maîtres que de classes » permettra de répondre aux besoins spécifiques des élèves en difficulté.

Affaire à suivre, d'autant que la Cour des comptes a transmis à notre commission des finances un référé pour le moins édifiant. Selon l'analyse de la Cour, non seulement le système éducatif ne corrige pas les inégalités de départ, mais il contribue même à les renforcer. Je sais bien qu'il n'est pas toujours facile de déterminer le bon niveau d'allocation des moyens ou de faire bouger les choses, mais cela doit nous amener à réfléchir, surtout quand on connait le niveau du décrochage scolaire : 150 000 jeunes quittent chaque année le système éducatif sans diplôme.

Enfin, je voudrais évoquer la situation du régime additionnel de retraite des personnels enseignants et de documentation des établissements d'enseignement privé sous contrat. Dans un référé qu'elle vient d'adresser à notre commission des finances, la Cour des comptes a constaté sa situation financière préoccupante. Tant la ministre des affaires sociales que le ministre de l'éducation nationale ont annoncé leur volonté de définir, d'ici à la fin de l'année, les mesures à mettre en oeuvre pour assurer la pérennité de ce régime, dont l'objectif est, rappelons le, de garantir le même niveau de retraite aux enseignants du privé qu'à leurs collègues du public. Je crois qu'il faut que nous restions attentifs à ce dossier.

Sous le bénéfice de ces observations, notre collègue Thierry Foucaud, comme je l'ai fait à l'instant, vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire » pour 2013.

M. Serge Dassault . - Je ne vois pas ce qui vous permet de parler d'échec de la politique éducative du précédent Gouvernement et d'approuver ce projet de budget car il s'agit de la même politique. Les dépenses de personnel représentent déjà l'essentiel des crédits de la mission. Faut-il vraiment aller plus loin en créant des postes supplémentaires ? La situation globale de notre système éducatif s'aggrave, comme le montre le taux de maitrise du français et des mathématiques en fin d'école primaire. Je ne vois pas en quoi vous changez quoi que ce soit à cette situation. Chaque année, 150 000 jeunes sortent du système scolaire sans diplôme ; ils deviennent des chômeurs, voire des délinquants. Je crois qu'il faut remettre en cause le collège unique, en distinguant collège à vocation diplômante, destiné à ceux qui poursuivront leurs études, et collège à vocation professionnelle. Car il est évident que le collège unique ne forme pas aux métiers actuels. Il faut également en finir avec le mythe du baccalauréat pour tous. A quoi sert le baccalauréat si les jeunes ne disposent pas d'une véritable formation à leur sortie du système scolaire ?

M. Roland du Luart . - Je trouve bienvenue la création d'emplois d'assistants de vie scolaire pour l'accompagnement des élèves handicapés. Quelles sont les mesures permettant de sortir de l'impasse que constitue le taux élevé d'absence de maîtrise du français et des mathématiques à l'issue de l'école primaire ? Pensez-vous qu'il faille davantage proposer le redoublement des élèves en difficulté ? S'agissant des emplois, quel est le nombre d'enseignants qui n'enseignent pas, par exemple parce qu'ils bénéficient d'une décharge syndicale ?

M. Yannick Botrel . - Je m'interroge sur la modification de l'organisation du temps scolaire. Ce n'est pas une nouveauté car, il y a quelques années, la semaine a été raccourcie. Les communes ont dû trouver des solutions à cette décision prise sans concertation, notamment pour résorber les surnombres. La question des transports scolaires va nécessairement se poser, comme l'a souligné notre rapporteur spécial. Je crois donc qu'il convient de mettre en oeuvre une véritable concertation avec les collectivités territoriales, voire d'envisager les modalités d'une compensation des surcoûts qu'elles devront sans doute supporter.

M. Éric Doligé . - Je m'inquiète également des incidences financières de la réforme des rythmes scolaires pour les collectivités territoriales. Dans quelques mois, nous aurons à en supporter les effets. Y a-t-il eu une véritable analyse financière de l'impact prévisionnel des mesures annoncées et probablement déjà prises en réalité, au moment où nos collectivités vont décider de leur budget pour l'année prochaine et se trouvent déjà dans une situation difficile ? L'Etat va-t-il se reposer entièrement sur les collectivités territoriales ? Je souhaiterais, par ailleurs, appeler votre attention sur la situation des enseignants titulaires sans affectation et qui sont, par conséquent, payés tout en restant chez eux. Existe-t-il des statistiques à ce sujet, au moment où le Gouvernement procède à de nouvelles embauches ?

M. Dominique de Legge . - Mon propos s'inscrit dans le prolongement des remarques des deux orateurs qui m'ont précédé. Je m'interroge sur les conclusions qui pourraient être tirées des réflexions en cours sur les rythmes scolaires, notamment en termes financiers. D'autant que la nouvelle organisation du temps scolaire entrera en vigueur dès la rentrée 2013 et que, dans le cadre de la programmation pluriannuelle des finances publiques, les dotations de l'Etat aux collectivités territoriales sont appelées à diminuer à compter de 2014. Tout ceci va créer un effet de ciseaux. Enfin, comment s'expliquent les différences entre l'évolution des dépenses de personnel dans l'enseignement public et dans l'enseignement privé ?

M. Vincent Delahaye . - Je m'associe aux remarques qui viennent d'être formulées sur les déséquilibres que vont engendrer les nouvelles charges imposées aux collectivités territoriales, qui ont déjà eu à supporter l'impact financier des contributions mises à leur charge pour assurer l'équilibre du CNFPT et de la CNRACL. Je formulerai une suggestion : faire figurer en début de rapport une synthèse sur l'évolution du nombre d'élèves ainsi que du nombre de classes par niveau. Tout cela reste assez confus. Disposer de telles données permettrait de mieux évaluer la nécessité de créer ou de supprimer des emplois d'enseignants. S'agissant des comparaisons internationales menées à bien par l'OCDE, j'avais noté l'année dernière que la France fournissait un effort financier important pour l'éducation mais que le nombre d'élèves par classe était élevé. J'en avais tiré la conclusion que les moyens n'étaient pas forcément mis au service direct de l'enseignement mais affectés à d'autres tâches. Cela confirme la nécessité de statistiques précises sur les affectations des personnels rémunérés par le ministère de l'éducation nationale. Je m'inquiète par ailleurs de la baisse du taux de scolarisation des 15-19 ans, mise en lumière par l'OCDE.

M. Joël Bourdin . - Je souhaiterais formuler deux observations. La fonction de production de l'éducation n'a pas varié depuis plusieurs décennies. On en reste toujours à plus de personnel, alors que la pédagogie devrait évoluer, à l'image des technologies. Tout se passe comme si on n'avait pas inventé l'ordinateur. Des pédagogies différentes existent. A l'université, les étudiants rendent souvent leurs devoirs imprimés. Cela commence à se faire en terminale et ce sera la règle dans dix ans. Pourquoi ne pas prélever une petite partie du facteur travail en faveur du capital, pourquoi ne pas utiliser davantage les possibilités de l'informatique dans l'éducation nationale ? Ma seconde observation découle des conclusions du rapport Gallois. L'inadaptabilité des formations professionnelles aux besoins de l'industrie n'est pas nouvelle. On a recruté des enseignants dans des filières très pointues qui se sont révélées obsolètes. Dans l'enseignement technique, il reste encore des professeurs de couture recrutés il y a trente ans. Il faut s'interroger sur les capacités des enseignants à s'adapter aux évolutions des techniques, notamment dans l'enseignement professionnel.

Mme Michèle André . - Je suis frappée de la façon dont certains d'entre nous abordent la question de l'évolution des rythmes scolaires. J'ai en mémoire les conditions dans lesquelles Xavier Darcos a procédé unilatéralement à une modification en profondeur de l'organisation de la semaine dans le premier degré. Je n'ai pas le souvenir que cette décision ait soulevé autant d'interrogations qu'aujourd'hui. En outre, il ne faut pas perdre de vue que l'accueil des enfants en dehors du temps scolaire n'incombe pas aux seules communes. Beaucoup de familles trouvent une nouvelle organisation. La vie scolaire est avant tout faite pour répondre aux besoins des élèves. S'agissant de l'accompagnement des élèves handicapés, les créations d'emplois sont une bonne chose mais je crois qu'on ne pourra pas faire l'économie d'une réflexion d'ensemble sur la formation des auxiliaires de vie scolaire. On ne peut tout faire reposer sur leur bonne volonté. N'oublions pas que la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a eu pour objectif d'améliorer les conditions de la scolarisation des élèves handicapés. Prenons garde à ce que, dans quelques années, les parents qui ont été encouragés à scolariser leurs enfants en milieu ordinaire nous reprochent l'inadéquation des personnels d'accompagnement aux tâches qui leur ont été confiées, faute d'une formation adéquate.

M. Jean Arthuis . - Les effectifs recensés par le ministère de l'éducation nationale ne comprennent pas les personnels qui sont directement employés par les établissements publics locaux d'enseignement que sont les collèges et les lycées. Dispose-t-on de données précises à ce sujet ? Deuxième observation, je m'interroge une nouvelle fois sur la difficulté à assurer la coordination entre le ministère de l'éducation nationale et celui de l'agriculture. Pourquoi les personnels qui s'occupent de l'enseignement technique agricole ne sont-ils pas détachés auprès du ministère de l'éducation nationale, plutôt que de dépendre de celui de l'agriculture, afin d'assurer le caractère véritablement interministériel de la mission ? Sur le plan pédagogique, où en est la scolarisation à deux ans ? Peut-on véritablement parler de projet éducatif à cet âge ? Quelle serait l'incidence financière d'une éventuelle généralisation de l'accueil des enfants de deux ans ?

M. Gérard Miquel . - Comme beaucoup d'entre nous, je suis sensible au coût engendré par l'évolution à venir des rythmes scolaires pour les départements. A-t-on une idée de ce qu'il représente globalement, au niveau national ?

M. Yann Gaillard . - Je suis très attaché à l'école. Malheureusement, je ne suis pas sûr que la situation évolue aussi favorablement que ce qui est indiqué dans la note de présentation. Aussi, je m'abstiendrai lors du vote des crédits de la mission.

M. François Fortassin . - Je m'inquiète de l'accroissement du nombre de jeunes déscolarisés de manière de plus en plus précoce. Dispose-t-on de données précises sur ce phénomène ?

M. Claude Haut , rapporteur spécial . - Je constate que les questions sont nombreuses. S'agissant du décrochage scolaire, question posée par nos collègues Serge Dassault et François Fortassin, le ministre entend faire de l'enseignement primaire une priorité. Former les enfants dès le plus jeune âge est essentiel. La loi d'orientation qui sera prochainement soumise au Parlement permettra de préciser les choses. Ce sera également l'occasion de s'interroger sur la place du collège au sein de notre système éducatif.

La modification à venir des rythmes scolaires est un sujet qui préoccupe beaucoup d'entre nous. A ma connaissance, il n'existe pas de chiffrage précis de l'incidence financière du passage de quatre jours à quatre jours et demi pour les collectivités territoriales. Je n'ai pas, non plus, entendu le ministre parler de compensation. L'assemblée des départements de France doit se saisir de la question, surtout dans le contexte de réduction des dotations de l'Etat.

Pour répondre à la question de Roland du Luart, il ne me semble pas que les redoublements constituent en soi une réponse aux lacunes des élèves en fin de premier degré. C'est plutôt par une détection précoce des difficultés qu'il faut agir.

S'agissant des enseignants qui ne sont pas affectés devant une classe, les crédits aux associations s'élèvent à 48,8 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 66,1 millions d'euros en crédits de paiement. En revanche, je ne dispose pas d'information particulière sur le nombre de personnes concernées.

M. Jean-Claude Frécon . - La plupart des postes mis à disposition ont été supprimés il y a deux ans. Il est donc impossible de connaître le chiffre des personnes qui travaillent au sein d'associations ou autres organismes.

M. Claude Haut , rapporteur spécial . -- Notre collègue Dominique de Legge s'est inquiété de la différence de traitement éventuelle entre enseignement public et enseignement privé. Il est vrai que le nombre de personnes rémunérées dans le privé diminue légèrement. C'est l'effet, en année pleine, des mesures de suppression qui avaient été décidées par le précédent Gouvernement. Dès lors, les crédits ne progressent pas, malgré les créations d'emplois, qui bénéficient aussi à l'enseignement privé.

Notre collègue Joël Bourdin s'est interrogé sur l'utilisation des nouvelles technologies dans l'enseignement. A ce sujet, un crédit de dix millions d'euros, première étape d'un plan en faveur du numérique, est inscrit au budget.

Je partage la préoccupation exprimée par notre collègue Michèle André quant aux conditions de scolarisation des élèves handicapés. J'y consacre un point particulier dans mon rapport écrit et j'ai déjà eu l'occasion d'appeler l'attention du ministre au sujet de la formation des personnels d'accompagnement.

Le nombre d'assistants éducatifs au sein des établissements publics locaux d'enseignement est stable depuis quatre ans. Il s'élève à 84 000 personnes.

L'articulation entre le ministère de l'éducation nationale et celui de l'agriculture est une question récurrente. L'enseignement technique agricole présente des spécificités, qui tiennent notamment à la place de l'enseignement privé ainsi qu'à l'enseignement dit du rythme approprié.

Enfin, la scolarisation des enfants à deux ans pourra être abordée lors des débats sur la loi d'orientation.

M. Albéric de Montgolfier . - J'en viens maintenant au vote sur les crédits de la mission. Vos rapporteurs spéciaux proposent l'adoption des crédits.

M. Éric Bocquet . - Le groupe CRC votera les crédits de la mission, compte tenu de l'inflexion nette qu'elle marque, tout en souhaitant qu'elle puisse se généraliser aux autres missions du budget.

A l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 22 novembre 2012, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.

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