N° 139

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 novembre 2013

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , autorisant l' approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne pour la réalisation et l' exploitation d'une nouvelle ligne ferroviaire Lyon - Turin ,

Par M. Yves POZZO di BORGO,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Louis Carrère , président ; MM. Christian Cambon, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Gautier, Robert Hue, Jean-Claude Peyronnet, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Daniel Reiner , vice-présidents ; Mmes Leila Aïchi, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Gilbert Roger, André Trillard , secrétaires ; M. Pierre André, Mme Kalliopi Ango Ela, MM. Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Pierre Bernard-Reymond, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Luc Carvounas, Pierre Charon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Jean-Pierre Demerliat, Mme Michelle Demessine, MM. André Dulait, Hubert Falco, Jean-Paul Fournier, Pierre Frogier, Jacques Gillot, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Gournac, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Gérard Larcher, Robert Laufoaulu, Jeanny Lorgeoux, Rachel Mazuir, Christian Namy, Alain Néri, Jean-Marc Pastor, Philippe Paul, Bernard Piras, Christian Poncelet, Roland Povinelli, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Claude Requier, Richard Tuheiava, André Vallini .

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) :

459 , 1475 , 1496 et T.A. 230

Sénat :

115 et 140 (2013-2014)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

L'accord qui est soumis aujourd'hui à l'approbation du Sénat est un projet ambitieux.

Il marque une étape décisive pour un projet d'infrastructure majeur mis à l'étude depuis plus d'une quinzaine d'années par les gouvernements français et italien : la construction d'une liaison ferroviaire nouvelle entre Lyon et Turin. Une large partie de l'itinéraire sera vouée non seulement aux trains de voyageurs, mais également au trafic de marchandises, notamment par ferroutage.

Il s'agit, par cette liaison nouvelle, de répondre aux besoins générés par le trafic entre les deux pays en rééquilibrant sa répartition au profit du mode ferroviaire, aujourd'hui très insuffisamment développé. Les accidents survenus dans les tunnels routiers du Mont-Blanc, en mars 1999, du Gothard, en octobre 2001, et du Fréjus en juin 2005, ont mis en lumière l'acuité des problèmes relatifs aux transports entre l'Italie et le reste de l'Europe au travers des Alpes, et l'urgence de solutions adaptées pour satisfaire aux besoins de transport, tout en satisfaisant aux exigences de sécurité et d'environnement.

L'enjeu du projet Lyon-Turin est donc considérable et dépasse largement les seules relations entre la France et l'Italie, ce qui lui a valu d'être retenu, lors du Conseil européen d'Essen, en 1994, parmi les 14 grands projets d'infrastructures prioritaires. Aujourd'hui, ce projet est toujours considéré comme un maillon essentiel du réseau européen de transport.

I. LA LIGNE FERROVIAIRE LYON-TURIN : UN PROJET AMBITIEUX VISANT A RÉPONDRE À UNE SITUATION ACTUELLE NON SATISFAISANTE

A. ETAT DES LIEUX DU TRAFIC FRANCO-ITALIEN

1. Un trafic actuel principalement routier ...

Le trafic transalpin est principalement un trafic routier. En termes de fret, les chiffres sont particulièrement éloquents : 85% des tonnes de marchandises qui traversent les Alpes sont acheminées par transport routier et 15% par le ferroviaire.

Il faut dire que la ligne ferroviaire du Mont-Cenis est ancienne et inadaptée à nos systèmes de transport actuels : située à une altitude très élevée (1 300m) avec des rampes d'accès en pente forte (jusqu'à 33%o), les convois de fret ne peuvent les passer sans rajouter de locomotive supplémentaire, d'où une utilisation limitée à 17% de ses possibilités.

Les points d'accès entre la France et l'Italie sont actuellement au nombre de 5 :

- Le tunnel du Mont-Blanc ;

- Le tunnel de Fréjus ;

- Vintimille ;

- La voie ferrée du Mont-Cenis ;

- La voie ferrée côtière.

En termes de trafic de marchandises, Vintimille est le point de passage le plus important en France, et le deuxième passage alpin. Les trafics s'élèvent à 1,3 million de poids lourds en 2011 (49,2% des passages transalpins français mais 13,5% de l'ensemble des passages alpins). Les trafics correspondent à des échanges entre le sud de la France et l'Espagne d'une part et l'Italie d'autre part.

Les autres passages sont le Fréjus (0,7 million de poids lourds) et le Mont-Blanc (0,6 million de poids lourds) dont les trafics sont majoritairement locaux (c'est-à-dire entre une zone allant du sud-est de la France à l'Ile-de-France et le nord-ouest de l'Italie).

Source : rapport annuel Alpifret

2. ... qui provoque des nuisances et des risques sécuritaires

Les limites de la situation actuelle sont de deux ordres.

Tout d'abord les nuisances provoquées par le trafic. Entre 1980 et 2005, le volume total de transport de transit a plus que doublé. En 2011, comme en 2010, 2,7 millions de poids lourds ont franchi les passages franco-italiens, soit une moyenne de 7 400 camions par jour. Même si le nombre de poids lourds traversant les Alpes est resté constant ces dernières années, les conséquences sont tout de même ressenties, particulièrement en termes de nuisances sonores et de pollution. Il est urgent de désengorger les Alpes.

Après l'accident du tunnel du Mont-Blanc, des études ont été menées afin d'évaluer la qualité de l'air dans les vallées alpines. Ainsi l'initiative POVA 1 ( * ) a confirmé très largement la grande sensibilité des vallées alpines, parfois plus polluées que les grandes zones urbaines : les émissions y sont plus faibles, mais dans ces sites où la topographie et la météorologie sont parfois très pénalisantes, les niveaux de concentration peuvent localement augmenter par accumulation et une évolution en système quasi fermé.

Ensuite en termes de sécurité. Votre rapporteur rappelle que de tragiques accidents se sont produits ces dernières années : incendies dans le tunnel du Mont-Blanc, provoquant la mort de 39 personnes en 1999, et du Fréjus, faisant 2 victimes. En Suisse, l'accident du tunnel du Gothard a coûté la vie à 11 personnes.

Il est nécessaire de sécuriser les déplacements sur l'arc alpin, dont la vulnérabilité est importante.


* 1 Pollution des vallées alpines - Coordonné conjointement par "L'Air de l'Ain et des Pays de Savoie"(Air-APS) et le Laboratoire de Glaciologie et de Géophysique de l'Environnement (LGGE), ce programme a pour ambition d'accroître significativement les connaissances scientifiques sur cette question.

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