CHAPITRE II - COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : « AIDES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES »

Faisant suite aux conclusions du « Grenelle de l'environnement » de 2007, le système bonus/ malus écologique vise à récompenser, via un bonus, les acquéreurs de voitures neuves émettant le moins de dioxyde de carbone (CO 2 ), et à pénaliser, via un malus, ceux qui optent pour les modèles les plus polluants. Ce dispositif concerne les voitures particulières neuves, achetées en France ou à l'étranger, comportant au maximum 9 places assises (place du conducteur comprise). Les voitures de société sont aussi concernées. Toutefois, avec les dernières modifications des barèmes du bonus et du malus, la plupart des véhicules neufs se retrouve dans la « zone neutre », c'est-à-dire qu'ils ne sont concernés ni par la bonus, ni par le malus.

Le bonus et le malus sont tous deux déterminés sur la base d'un barème, dont le tarif est fonction du taux d'émission de CO 2 en grammes par kilomètre. En cas d'absence de mesure du taux d'émission, la puissance fiscale (chevaux-vapeur) est prise en compte.

Tandis que le barème du bonus est réglementaire 42 ( * ) , le malus est fixé, en tant que taxe, par la loi de finances. Il relève ainsi de l'article 1011 bis du code général des impôts et a connu plusieurs ajustements depuis sa création.

En outre, depuis le 1 er avril 2012, un « superbonus » est accordé lorsque l'acquisition ou la prise en location d'un véhicule bénéficiant d'un bonus est accompagnée du retrait de la circulation d'un véhicule de plus de quinze ans , à des fins de destruction. Son montant, forfaitaire, est actuellement de 200 euros et n'a pas rencontré le succès escompté 43 ( * ) . La nature de ce superbonus est cependant appelée à être modifiée profondément .

Enfin, le Fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres, adossé à un compte d'affection spéciale (CAS) 44 ( * ) créé à cet effet, a été instauré pour la mise en oeuvre du dispositif de bonus/malus. Sa gestion est confiée à l'Agence de services et de paiement (ASP).

I. UN DISPOSITIF STRUCTURELLEMENT DÉFICITAIRE

A. UN DISPOSITIF RENOUVELÉ DEPUIS 2008 MAIS TOUJOURS DÉFICITAIRE

Initialement, les recettes du malus devaient équilibrer les dépenses résultant de l'obtention du bonus écologique. Or, du fait de la crise économique, les niveaux de ventes de véhicules neufs se sont avérés inférieurs aux prévisions et l'existence d'un malus écologique a détourné un nombre supérieur aux prévisions d'acheteurs de véhicules plus polluants vers des véhicules électriques et hybrides.

Aussi, l'année 2013 a été marquée par un exercice déficitaire du bonus-malus qui a atteint 4,9 millions d'euros, déjouant ainsi les projections qui avaient surestimé les recettes et les dépenses de ce dispositif.

L'exigence de redresser les comptes du dispositif a également conduit à modifier, via l'article 56 de la loi de finances pour 2012 45 ( * ) , l'organisation budgétaire du bonus/malus, en substituant au compte de concours financiers un compte d'affectation spéciale dont l'équilibre est une obligation 46 ( * ) .

En 2013, le niveau des crédits consommés par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale avait été seulement de 70 %. Cet écart résultait d'un niveau de recettes collectées de 283 millions d'euros - dont 6,7 millions d'euros de report du solde 2012 - inférieur à la prévision. Les recettes du CAS n'avaient permis de financer les deux bonus qu'à hauteur de 281,5 millions d'euros au lieu des 403,6 millions d'euros prévus.

Comme l'a relevé la Cour des comptes dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire du bonus-malus, « le montant des crédits consommés affichés dans le CAS (281,5 millions d'euros) ne reflète donc pas le coût réel du dispositif ». En effet, « afin de compenser l'insuffisance des recettes du malus, un versement complémentaire de 80 millions d'euros a été réalisé en provenance du budget général au profit de l'ASP, dont seuls 50 millions d'euros ont été autorisés en loi de finances initiale » 47 ( * ) .

Autrement dit, en 2013, l'équilibre du CAS n'a été atteint, contrairement à ce que prévoit la LOLF, que grâce à une subvention du budget général à l'Agence de services de paiement.

Une telle pratique est contrainte au droit budgétaire. En réponse à votre rapporteur général qui lui demandait si le projet de loi de finances pour 2015 prévoyait une dotation budgétaire pour abonder l'ASP, le Gouvernement a indiqué les éléments suivants : « Afin d'accompagner la baisse des émissions moyennes de CO 2 des véhicules neufs vendus en France, différents scénarios d'ajustement du dispositif de bonus-malus automobile sont en cours d'évaluation. Les aides destinées à l'acquisition des véhicules les plus vertueux devraient toujours être importantes, en cohérence avec les objectifs de développement de la mobilité électrique et de commercialisation de véhicules consommant moins de 2 litres de carburant aux 100 km à horizon 2020 ».

« Les différents scénarios envisagés prévoient que les dépenses du bonus soient compensées entièrement par les recettes du malus, sans mise en oeuvre prévisionnelle d'une subvention d'équilibre. »


* 42 Décret n° 2013-971 du 30 octobre 2013 modifiant le décret n° 2007-1873 du 26 décembre 2007 instituant une aide à l'acquisition des véhicules propres.

* 43 Pour preuve, le nombre de véhicules bénéficiaires du super-bonus a enregistré une forte baisse entre 2012 et 2013 et demeure très en-deçà de la cible initialement fixée par la loi de finances initiale (soit 5 893 sur 8 000 véhicules prévus).

* 44 Le CAS retrace, en recettes, le produit de la taxe instituée à l'article 1011 bis du code général des impôts (malus), déduction faite des frais d'assiette et de recouvrement et, en dépenses, des contributions au financement de l'attribution d'aides à l'acquisition de véhicules propres ou au retrait de véhicules polluants (bonus et super-bonus).

* 45 Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011de finances pour 2012.

* 46 Article 21 de la LOLF : « Les comptes d'affectation spéciale retracent, dans les conditions prévues par une loi de finances, des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées. Ces recettes peuvent être complétées par des versements du budget général, dans la limite de 10 % des crédits initiaux de chaque compte [...] Les autorisations d'engagement et les crédits de paiement disponibles en fin d'année sont reportés sur l'année suivante, dans les conditions prévues aux II et IV de l'article 15, pour un montant qui ne peut excéder le solde du compte ».

* 47 Voir l'analyse de l'exécution du budget de l'État par mission et par programme, exercice 2013, compte d'affectation spéciale « Aides à l'acquisition de véhicules propres », Cour des comptes, mai 2014.

Page mise à jour le

Partager cette page