B. LA FIXATION D'UN CADRE PROCÉDURAL COMMUN À TOUTES LES TECHNIQUES DE RENSEIGNEMENT

Le titre II du livre VIII définit ensuite le cadre procédural permettant la mise en oeuvre, sur le territoire national, des techniques de renseignement soumises à autorisation du Premier ministre. La demande, dont le formalisme est précisément détaillé, émane du ministre de tutelle du service de renseignement ( article L. 821-2 ).

Cette demande est ensuite transmise à la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) qui émet un avis, soit par l'un de ses membres (le président ou son suppléant) dans un délai de vingt-quatre heures, soit par la commission dans son ensemble qui dispose alors d'un délai de trois jours ouvrables ( article L. 821-3 ). Sur proposition de la commission des lois de l'Assemblée nationale, ont été introduites dans le texte une obligation d'informer les membres de la CNCTR des décisions rendues par le président ou son suppléant et la possibilité pour deux membres de demander la réunion plénière de la commission dans les vingt-quatre heures suivant cette transmission.

L'avis de la commission est ensuite transmis au Premier ministre qui délivre l'autorisation de mise en oeuvre de la technique de renseignement (article L. 821-4 ). Les députés ont ajouté une disposition imposant au Premier ministre d'indiquer, le cas échéant, les raisons le conduisant à ne pas suivre l'avis de la commission.

Dans certains cas exceptionnels, qualifiés d'« urgence absolue », le Premier ministre a la possibilité de délivrer l'autorisation de mise en oeuvre sans avis préalable de la commission ( article L. 821-5 ). Sur proposition du Gouvernement, l'Assemblée nationale a également instauré une procédure d'urgence opérationnelle permettant aux agents des services de mettre en oeuvre deux techniques de renseignement ( IMSI catcher et balise) sans autorisation préalable ( article L. 851-9-1 20 ( * ) ).

La CNCTR se voit reconnaître la possibilité de formuler des recommandations tendant à l'interruption de la mise en oeuvre d'une technique de renseignement ainsi qu'à la destruction des renseignements collectés dans les cas où elle estime qu'une autorisation de mise en oeuvre d'une technique de recueil de renseignement a été accordée en méconnaissance des dispositions législatives ou qu'une technique a été mise en oeuvre de manière irrégulière. Le Premier ministre est alors tenu d'informer la commission des suites données à ses recommandations. Si le Premier ministre ne donne pas suite à ces recommandations ou si la commission estime que les suites données sont insuffisantes, cette dernière a la possibilité de saisir le Conseil d'État (article L. 821-6).

Enfin, sur proposition du Gouvernement, des dispositions ont été introduites dans le texte afin de prévoir un régime procédural spécifique pour les professions « protégées » (avocats, magistrats et journalistes) et les titulaires d'un mandat parlementaire. L'avis de la CNCTR devrait être rendu de manière collégiale et la commission bénéficierait de la transmission des retranscriptions des renseignements collectés afin de s'assurer que les atteintes portées le cas échéant aux garanties attachées à l'exercice de ces activités professionnelles et mandats sont proportionnées ( article L. 821-7 ).

Un statut juridique est donné aux renseignements recueillis grâce à la mise en oeuvre des techniques de renseignement. Ainsi, le Premier ministre est chargé de la traçabilité de la mise en oeuvre des techniques de renseignement et de définir les modalités de la centralisation des renseignements ainsi recueillis. Chaque mise en oeuvre ferait l'objet d'un registre mentionnant les dates de début et de fin ainsi que la nature des renseignements collectés ( article L. 822-1 ). Des durées de conservation des renseignements collectés, différentes selon leur nature, sont définies dans la loi. Le projet de loi initial renvoyait la définition de ces durées à un décret, tout en prévoyant un délai maximum de douze mois, exception faite des interceptions de communication et des données de connexion dont la durée de conservation est respectivement fixée à 30 jours et cinq ans. Si les députés n'ont pas modifié les délais applicables aux interceptions de communication et aux données de connexion, ils ont prévu que ces délais seraient appréciés à compter de la première exploitation des renseignements collectés, et non à partir de leur recueil ( article L. 822-2 ).

A l'instar de la CNCIS, la CNCTR aura pour mission de contrôler les opérations de collecte, de transcription, d'extraction et de destruction des renseignements ( articles L. 822-3 et L. 822-4 ).


* 20 Inséré au titre V du livre VIII.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page