N° 604

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 juillet 2015

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de règlement , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , du budget et d' approbation des comptes de l' année 2014 ,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Sénateur,
Rapporteur général.

Tome I : Exposé général et examen des articles.

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel .

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) :

2813 , 2921 et T.A. 561

Sénat :

596 et 604 (2014-2015)

EXPOSÉ GÉNÉRAL
PREMIÈRE PARTIE - L'EXERCICE 2014 ET SON CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER

Une fois encore, la faible vigueur de la croissance économique, associée à un ralentissement significatif de l'inflation, est venue freiner la consolidation des finances publiques. Pour autant, si les efforts budgétaires consentis ont été minorés dans leurs effets par une conjoncture défavorable, ceux-ci se sont révélés insuffisants eu égard aux enjeux , conduisant à une amélioration limitée du déficit public effectif, qui s'est établi à 4 % du PIB en 2014, contre 4,1 % du PIB en 2013.

I. UNE PROGRESSION MODÉRÉE DE L'ACTIVITÉ, DANS UN CONTEXTE DE RECUL DE L'INFLATION

L'exercice budgétaire 2014 s'est inscrit dans un contexte de progression modérée du produit intérieur brut (PIB), qui a crû de 0,2 % . La hausse de l'activité observée a essentiellement reposé sur la consommation des ménages qui a connu une légère accélération ; toutefois, l'investissement a, lui, continué de reculer en 2014. Un nouveau ralentissement de l'indice des prix à la consommation a également été observé , celui-ci ayant crû de 0,5 % seulement, après avoir progressé de 0,9 % en 2013.

À titre de rappel, dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances pour 2014, le Gouvernement retenait une hypothèse de croissance du PIB de 0,9 % en 2014 et de progression de l'indice des prix à la consommation de 1,3 % .

A. UNE LÉGÈRE CROISSANCE DE L'ACTIVITÉ PORTÉE PAR LA CONSOMMATION DES MÉNAGES

La progression de 0,2 % du PIB en 2014 a été principalement portée par la consommation des ménages , qui a crû de 0,6 %, après avoir augmenté de 0,4 % en 2013. Celle-ci a évolué en lien avec le pouvoir d'achat de ces derniers ; en effet, le revenu disponible brut 1 ( * ) a progressé de 1,1 %, contre une hausse de 0,7 % l'année précédente, et ce dans un contexte d'augmentation limitée des prix à la consommation (cf. infra ). Le pouvoir d'achat au niveau individuel 2 ( * ) , qui permet de tenir compte de la croissance de la population, s'est également accru de 0,7 % en 2014 , alors qu'il avait diminué lors des trois années antérieures.

Selon les données publiées par l'Insee en mai dernier 3 ( * ) , la croissance du revenu disponible brut des ménages a été essentiellement due au dynamisme des prestations sociales en espèces et des revenus d'activité , ainsi qu'au ralentissement du dynamisme des impôts ; certes, les impositions courantes sur le revenu et le patrimoine ont contribué négativement à l'évolution du revenu disponible brut, augmentant de 1,4 % 4 ( * ) , mais de façon moins marquée qu'en 2013, année au cours de laquelle elles avaient progressé de 4,3 %.

La masse salariale nette reçue par les ménages a crû de 1,3 % après avoir augmenté de 0,5 % en 2013, reflétant une modeste reprise de l'emploi en 2014 (+ 0,3 % après - 0,2 % en 2013), ainsi qu' une hausse du salaire moyen brut par tête de 1,2 % - soit une évolution identique à celle observée en 2013.

Graphique n° 1 : Évolution du PIB et contributions à cette évolution

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données de l'Insee)

Toutefois, il convient de relever que la progression du revenu disponible brut des ménages, de 1,1 %, ne s'est pas intégralement reportée sur la consommation finale, dont la hausse n'est que de 0,6 % ; aussi le taux d'épargne des ménages s'est-il accru de 0,5 point pour atteindre 15,1 % en 2014 . Cette évolution n'est probablement pas sans lien avec la faiblesse de la confiance des ménages observée en 2014 ; en effet, l'indicateur synthétique de confiance des ménages 5 ( * ) de l'Insee a affiché un niveau moyen de 87 en 2014, alors que sa moyenne de long terme est de 101. Il est donc probable que la situation économique dégradée en 2014 ait encouragé les ménages à renforcer leur épargne de précaution . À cet égard, force est de constater que l'investissement des ménages a fortement reculé en 2014 (- 5,3 % après - 1,5 % en 2013), en particulier dans la construction.

La contraction de l'investissement des ménages est venue contribuer à la baisse de 1,2 % de la formation brute de capital fixe (FBCF) constatée en 2014 , plus marquée qu'en 2013 (- 0,6 %). Cette évolution est aussi à attribuer au recul de l'investissement des administrations publiques de 6,9 % , après une progression de 0,1 % en 2013, qui a avant tout concerné les administrations publiques locales (- 9,6 %), à la suite des élections municipales notamment (cf. infra ), ainsi que les administrations publiques centrales (- 5,9 %), essentiellement sous l'effet des moindres livraisons de matériels militaires.

À l'inverse, l'investissement des entreprises non financières a progressé plus vigoureusement en 2014, croissant de 2 % , après une hausse de 0,5 % en 2013. Néanmoins, cette évolution ne paraît pas refléter une amélioration globale de la situation des entreprises et de leurs perspectives, celle-ci étant principalement imputable, selon l'Insee, « à la nette reprise dans les matériels de transport (+ 4,2 % après - 1,7 %) et les services d'information-communication (+ 2,2 % après - 0,1 %), ainsi qu'à l'accélération dans la construction (+ 3,0 % après + 1,2 %) » 6 ( * ) ; en effet, l'indicateur de climat des affaires 7 ( * ) de l'Insee s'est dégradé tout au long de l'année 2014 , avant d'afficher un rebond à compter du mois de novembre (cf. graphique ci-après). En outre, le taux de marge des sociétés non financières s'est de nouveau dégradé, perdant 0,3 point par rapport à 2013 , pour atteindre 29,4 %, soit son niveau le plus faible depuis 1985 8 ( * ) ; l'impact du crédit pour la compétitivité et l'emploi (CICE), qui a significativement abaissé les impôts sur la production nets des subventions 9 ( * ) , n'a pas suffi à compenser la hausse des salaires, qui se sont montrés plus dynamiques que la valeur ajoutée. Aussi le contexte ne semblait-il pas favorable à une franche reprise de l'investissement des entreprises .

Graphique n° 2 : Évolution de l'indicateur de climat des affaires de l'Insee

Source : commission des finances du Sénat (données de l'Insee)

En outre, l'augmentation des stocks des entreprises a contribué positivement à l'évolution du PIB en 2014 . Selon les informations disponibles à ce jour, ceci serait essentiellement lié à un phénomène de restockage des entreprises 10 ( * ) , les enquêtes mensuelles de conjoncture dans l'industrie faisant, en effet, apparaître que les stocks de produits étaient jugés inférieurs à la normale par les chefs d'entreprise interrogés et ce, jusqu'à la fin de l'année.

Enfin, en 2014, les importations en volume se sont révélées plus dynamiques, progressant de 3,8 % après avoir crû de 1,7 %, que les exportations, qui ont augmenté de 2,4 %, contre 1,7 % en 2013. Le commerce extérieur a donc contribué négativement à l'accroissement du PIB en 2014 .


* 1 Le revenu disponible brut (RDB) est le revenu à la disposition des ménages pour consommer et épargner ; il intègre les revenus d'activité, les revenus du patrimoine ainsi que les prestations sociales, desquels sont soustraits les impôts directs et les cotisations sociales.

* 2 Le pouvoir d'achat au niveau individuel correspond au pouvoir d'achat par unité de consommation.

* 3 Insee, « Les comptes de la Nation en 2014. Le PIB croît légèrement, le pouvoir d'achat des ménages accélère », Insee Première , n° 1549, mai 2015.

* 4 La hausse de 1,4 % des impôts sur le revenu et le patrimoine acquittés par les ménages est imputable, en particulier, à la contribution sociale généralisée (CSG), à la taxe d'habitation, ainsi qu'à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) qui a augmenté en raison des recouvrements effectués par le service de traitement des déclarations rectificatives (STDR).

* 5 Construit à partir de données recueillies mensuellement par l'Insee auprès des ménages, l'indicateur synthétique de confiance des ménages décrit, en une variable unique, la composante commune des soldes d'opinion sélectionnés (niveau de vie passé et futur en France, situation financière personnelle passée et future, perspective de chômage, opportunité de faire des achats importants, capacité à épargner actuelle et dans les mois à venir).

* 6 Insee, op. cit. , n° 1549, Insee Première , mai 2015, p. 2.

* 7 L'indicateur de climat des affaires est calculé par l'Insee sur la base d'enquêtes réalisées auprès des chefs d'entreprise des principaux secteurs d'activité. Il s'agit d'un indicateur d'un intérêt tout particulier dès lors qu'il apparaît que les indicateurs de climats des affaires sont assez fortement corrélés aux grandeurs macroéconomiques, et notamment à l'évolution du PIB.

* 8 L'évolution du taux de marge des sociétés non financières, de même que les incidences attendues de la mise en oeuvre du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et du Pacte de stabilité et de responsabilité, font l'objet d'une analyse approfondie dans le tome I du rapport n° 159 (2014-2015) sur le projet de loi de finances rectificative pour 2014 fait par Albéric de Montgolfier au nom de la commission des finances du Sénat, p. 13-31.

* 9 En comptabilité nationale, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) est enregistré en subvention sur les rémunérations.

* 10 D'autres facteurs peuvent être envisagés afin d'expliquer l'augmentation des stocks en 2014, parmi lesquels figure, notamment, la chute des prix du pétrole - et d'autres matières premières - engagée à l'été dernier, qui a pu encourager l'accroissement des stocks de matières premières des entreprises.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page