EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 21 octobre 2014, sous la présidence de M. Richard Yung, vice-président, la commission a procédé à l'examen du rapport de Mme Michèle André, rapporteure spéciale, sur la mission « Pouvoirs publics ».

Mme Michèle André , rapporteure spéciale . - En vertu du principe d'autonomie financière des pouvoirs publics, qui découle du principe de séparation des pouvoirs, la mission « Pouvoirs publics » regroupe les crédits dédiés aux différents pouvoirs publics constitutionnels, c'est-à-dire de la Présidence de la République, de l'Assemblée nationale et du Sénat - ainsi que des chaînes parlementaires -, du Conseil constitutionnel et de la Cour de justice de la République.

Les institutions relevant de la mission « Pouvoirs publics » s'astreignent à participer pleinement à l'effort de redressement des comptes publics. Les montants de crédits demandés par ces dernières dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016 mettent en évidence cette démarche.

En effet, pour l'exercice 2016, les crédits demandés au titre de la mission « Pouvoirs publics » s'élèvent à près de 987 millions d'euros, ce qui représente un léger recul par rapport à 2015, après plusieurs années de baisse significative.

Cette évolution recouvre, comme nous allons le voir, une stabilisation des dotations de l'État à la Présidence de la République, aux assemblées parlementaires et à la Cour de justice de la République, ainsi qu'une diminution des crédits du Conseil constitutionnel.

S'agissant de la Présidence de la République, tout d'abord, la dotation demandée est maintenue à 100 millions d'euros, niveau atteint en 2015 conformément aux engagements du chef de l'État. Elle demeure à un niveau inférieur à celui prévu par la loi de finances pour 2008, alors même que, depuis lors, de nombreuses dépenses auparavant supportées par le ministère de la défense, comme le montant des pensions des gendarmes affectés au Palais de l'Élysée, ont été transférées à la Présidence de la République. Au total, en 2016, les crédits de la Présidence auront reculé de plus de 12 millions d'euros par rapport à 2011.

Cette baisse de la dotation a été permise par les efforts réalisés sur les dépenses de la Présidence de la République, dont les charges de personnel ou encore de déplacements sont en nette diminution.

Les dotations versées à l'Assemblée nationale et au Sénat sont de nouveau « gelées » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016. Ainsi, les crédits dédiés aux assemblées s'élèveront à environ 841,5 millions d'euros. La stabilisation en euros courants des dotations des deux Chambres est associée à la réalisation d'efforts en dépenses, notamment afin d'absorber la hausse tendancielle de leurs charges.

Si la dotation de l'État à l'Assemblée nationale demeure à son niveau de 2014, soit 517,9 millions d'euros, ses dépenses reculeraient de 0,04 %. Cette évolution résulterait, en particulier, d'une nette diminution des dépenses de fonctionnement, d'environ un million d'euros. À cet égard, il convient de souligner les efforts consentis sur la masse salariale de l'Assemblée - les charges de rémunération étant réduites de près de 1,7 million d'euros.

Enfin, il convient de relever que l'équilibre du budget de l'Assemblée nationale en 2016 serait permis par un prélèvement sur ses disponibilités financières, d'un montant de près de 15 millions d'euros, comme en 2015.

La dotation de l'État au Sénat au titre de l'exercice 2016 demeure également à son niveau de 2015, soit à 323,6 millions d'euros. Le Sénat poursuit donc les efforts engagés depuis 2008.

Au total, si la dotation de l'État sera stable entre 2015 et 2016, les dépenses du Sénat connaîtraient une baisse substantielle entre ces deux années, marquant un recul de 2,26 %.

Cette baisse est plus prononcée encore si l'on considère isolément les dépenses inhérentes à la mission institutionnelle du Sénat, puisque celles-ci diminueraient de 7,6 millions d'euros. Cette évolution résulte de la « pause » marquée dans les opérations sur les bâtiments, après la réception en 2015 de deux opérations de restructuration concernant les ensembles situés rue Bonaparte et boulevard Saint-Michel, mais aussi des efforts de gestion réalisés par le Sénat. En particulier, il apparaît que les crédits relatifs aux indemnités versées aux sénateurs reculent, à l'instar des dépenses de traitement des personnels.

Les dépenses liées au Jardin du Luxembourg, quant à elles, baissent de 39 600 euros, en raison de la réduction des effectifs, qui permet de compenser la hausse des charges d'investissement liée à la rénovation du chauffage des serres et à la restauration de la fontaine Médicis.

Les charges prévisionnelles du Musée du Luxembourg, enfin, s'élèvent à 90 000 euros en 2016. Pour autant, ce poste demeure profitable pour le Sénat, dès lors qu'il serait associé à des produits d'un montant de 250 000 euros.

Comme l'Assemblée nationale, le Sénat équilibrerait son budget 2015 par un prélèvement sur ses disponibilités financières, d'un montant de 4 millions d'euros.

Pour ce qui est de la chaîne parlementaire, le projet de budget pour 2015 de LCP-Assemblée nationale prévoit une dotation d'environ 16,6 millions d'euros, identique à celle de 2014. La dotation demandée par Public-Sénat est pour la première fois stabilisée en 2016, à 18,85 millions d'euros. Le nouveau contrat d'objectifs et de moyens (COM), en cours de négociation, devrait venir consacrer cette nouvelle trajectoire financière de la chaîne, fondée sur la stabilisation de ses crédits, après plusieurs années de hausse de ces derniers.

Pour la septième année consécutive, la dotation demandée par le Conseil constitutionnel est en baisse. Elle recule de 2,6 % par rapport à 2015, pour atteindre 9,9 millions d'euros. En sept ans, le budget du Conseil constitutionnel aura reculé de 20,4 %, et ce alors même que la réforme constitutionnelle de 2008, avec l'institution de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC), a conduit à une forte hausse de l'activité de la juridiction.

J'en viens, pour finir, à la Cour de justice de la République. À titre de rappel, conformément à l'article 68-1 de la Constitution, la Cour est compétente pour juger les membres du Gouvernement au titre des actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions. Le budget prévisionnel de la Cour de justice de la République s'élève à 861 500 euros, soit un niveau identique à celui prévu en 2015.

En conclusion, je vous propose l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Il me semble que l'exemplarité des pouvoirs publics se doit d'être soulignée. Le montant global des dotations qui y sont consacrées diminue, en dépit de la rigidité de certaines dépenses, en particulier de personnel.

Je souhaiterais toutefois revenir sur les charges immobilières, sujet auquel je suis particulièrement sensible. Je voudrais notamment savoir s'il est bel et bien acté que la Cour de justice de la République sera installée au sein des locaux libérés par le tribunal de grande instance de Paris sur l'île de la Cité. Des charges locatives de 453 000 euros pour un bâtiment qui n'est pas occupé en permanence paraissent en effet élevées ; or, d'importants espaces vont être rendus disponibles du fait de la réorganisation des services judiciaires parisiens. Une économie pourra-t-elle être dégagée de l'utilisation par la Cour des locaux abandonnés par le tribunal de grande instance de Paris, en dépit d'éventuels frais de location ?

M. André Gattolin . - Même si l'on ne peut que se satisfaire, d'un point de vue démocratique, que la Cour de justice de la République connaisse actuellement une activité réduite, je m'interroge sur la nature de son travail quotidien : combien de personnes y travaillent ? Quelles sont leurs missions ? Instruisent-elles par exemple des plaintes, même s'il n'y a pas eu d'affaires au cours des dernières années ?

M. Jean-Claude Requier . - J'ai bien noté que les dépenses du Sénat baissaient de 2,26 % et que la dotation de l'État restait stable entre 2015 et 2016. Cette information n'intéressant pas les journalistes, les journaux n'en feront pas état... L'entretien du Jardin du Luxembourg coûte près de 12 millions d'euros au Sénat, mais le budget qui est consacré marque toutefois une légère baisse.

En ce qui concerne le Conseil constitutionnel, comme l'an passé, je m'interroge sur les indemnités versées à ses membres : sont-elles imposées au titre de l'impôt sur le revenu ?

M. Michel Canevet . - En ce qui concerne les chaînes parlementaires, comment justifier que Public-Sénat perçoive une dotation supérieure à celle de LCP-Assemblée nationale de deux millions d'euros ?

M. Vincent Capo-Canellas . - Pour ce qui est du Jardin du Luxembourg, une réflexion avait été conduite en vue de détacher le budget qui lui est dédié de celui du Sénat. Lorsque l'on analyse les crédits dont bénéficie le Sénat, on a souvent tendance à y inclure ceux du jardin. Pourrait-on les en distinguer dès aujourd'hui ?

M. Éric Doligé . - En réponse à mon collègue, j'indique que nous menons actuellement un travail afin d'isoler le budget du Jardin du Luxembourg. Une étude a été réalisée, qui permettra de comparer les coûts de fonctionnement du Jardin du Luxembourg avec ceux des jardins de Versailles et de la Ville de Paris, qu'il s'agisse des dépenses de personnel, d'entretien et d'investissement, et d'évaluer ainsi la qualité de sa gestion.

M. Roger Karoutchi . - Je suis déjà intervenu sur ce sujet : je ne comprends pas pourquoi le Sénat ne cherche pas à négocier avec la Ville de Paris afin de faire reposer sur cette dernière une partie des dépenses de fonctionnement du Jardin du Luxembourg. Cela est prévu depuis des années, mais rien ne se fait. Or, il y a plus de Français et de touristes que de sénateurs qui se promènent dans le Jardin du Luxembourg !

Mme Michèle André , rapporteure spéciale . - Je souhaite indiquer au rapporteur général que l'installation de la Cour de justice de la République au sein du Palais de justice est un projet qui suit son cours. Les magistrats sont conscients de l'importance des coûts liés à la location des locaux actuels de la juridiction, qui représentent la majeure partie de ses dépenses ; eux-mêmes ne perçoivent d'indemnités que s'ils siègent. Il y a, en réalité, peu de charges de personnel. Les agents permanents sont en nombre limité, ce qui explique que la masse salariale de la Cour soit réduite, l'essentiel des dépenses supportées par cette dernière résultant de son loyer immobilier.

M. André Gattolin . - La surface moyenne par agent doit donc être bien supérieure aux objectifs en la matière !

Mme Michèle André , rapporteure spéciale . - En ce qui concerne les membres du Conseil constitutionnel, je confirme qu'ils sont bien assujettis à l'impôt sur le revenu. Lors de ma rencontre avec le Président du Conseil constitutionnel, Jean-Louis Debré, je lui ai demandé quelle était sa recette pour réduire les dépenses de la haute juridiction alors que son activité augmente. Je tiens à dire que le Conseil constitutionnel est une maison bien tenue, en dépit de sa lourde tâche.

Nous avions déjà abordé la question du Jardin du Luxembourg l'an passé : les résultats de l'étude citée par notre collègue Éric Doligé apporteront certainement un éclairage intéressant sur ce point, qui relève toutefois de la compétence des questeurs et de la présidence du Sénat.

Le budget de la chaîne Public-Sénat partait d'un point haut, ce qui explique peut-être la différence observée avec l'enveloppe dédiée à LCP-Assemblée nationale. Pour autant, les moyens consacrés à la chaîne sénatoriale sont stabilisés cette année. Du reste, l'an passé, j'avais estimé que l'augmentation du budget de Public-Sénat - qui résultait du précédent contrat d'objectifs et de moyens - suscitait des interrogations. Il me semble que la vice-présidente en charge du dossier, notre collègue Isabelle Debré, et les nouveaux responsables de la chaîne y apporteront d'ailleurs une attention particulière.

Aussi pouvons-nous espérer que la stabilisation de la dotation de Public-Sénat est le signe que celle-ci gère mieux les moyens qui lui sont alloués, à l'instar du Sénat qui parvient à réduire certains de ses coûts par une amélioration de son fonctionnement ; à titre d'exemple, la réorganisation des locaux a permis de réduire les dépenses liées à l'hébergement des sénateurs. Par conséquent, je tiens à rendre hommage à nos questeurs, qui se montrent soucieux de ce que le Sénat soit exemplaire.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des dotations de la mission « Pouvoirs publics ».

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Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2015, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.

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