II. LE PROGRAMME 185 « DIPLOMATIE CULTURELLE ET D'INFLUENCE »

Ce programme, placé sous la responsabilité de la directrice générale de la mondialisation, du développement et des partenariats, regroupe « l'ensemble des moyens du MAEDI destinés à la diffusion culturelle, linguistique, universitaire, scientifique et à notre action d'influence sur les enjeux globaux ainsi qu'aux activités liées à la promotion du tourisme », d'après les termes du projet annuel de performances.

1. Le programme en quelques chiffres

Les crédits demandés sur le programme « Diplomatie culturelle et d'influence » dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élèvent à 712,8 millions d'euros en AE et en CP . Ces crédits se répartissent de la façon suivante.

Répartition par action des crédits demandés (AE=CP)

Action

Exécution 2015 (CP)

LFI 2016

PLF 2017

Évolution 2016/2017

Action 01 : Appui au réseau

45,08

42,92

43,03

+ 0,26 %

Action 02 : Coopération culturelle et promotion du français

76,03

67,48

64,03

- 5,11 %

Action 03 : Objectifs de développement durable

8,51

8,13

5,75

- 29,21 %

Action 04 : Enseignement supérieur et recherche

88,32

100,36

95,18

- 5,16 %

Action 05 : Agence pour l'enseignement français à l'étranger

402,68

395,18

396,11

+ 0,24 %

Action 06 : Dépenses de personnel concourant au programme « Diplomatie culturelle et d'influence »

76,51

73,98

75,58

+ 2,15 %

Action 07 : Diplomatie économique et développement du tourisme

33,23

33,35

33,08

- 0,80 %

Total

730,36

721,40

712,77

- 1,20 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017

Les crédits demandés sont en diminution limitée de 1,20 % par rapport à 2016, ce qui traduit deux mouvements en sens contraires :

- une augmentation faible des crédits correspondant à des dépenses de personnel et de fonctionnement, en particulier la subvention à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, les dépenses de personnel et de fonctionnement du réseau des services d'action et de coopération culturelle ;

- une diminution des dépenses d'intervention, notamment les différentes enveloppes de bourses d'attractivité et de recherche, ainsi que les interventions en matière de développement durable.

2. AEFE : un maintien en trompe l'oeil, des réformes indispensables

L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) est l'opérateur pivot du dispositif d'enseignement des programmes français à l'étranger . Pour cela, elle s'appuie sur 74 établissements en gestion directe (EGD), dont elle assure la gestion « en régie », et sur 156 établissements conventionnés. À ces établissements s'ajoutent des établissements partenaires autofinancés, au nombre de 264.

La subvention pour charges de service public à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) représente plus de la moitié des crédits du présent programme (55,6 %) . Elle s'établit en 2017 à 396,11 millions d'euros, en légère hausse de 0,24 % par rapport à 2016 .

Toutefois, cette stabilité est en trompe-l'oeil .

D'une part, les effectifs d'élèves continuant leur progression à environ + 2 % en 2015 et les frais de scolarité ayant connu une importante augmentation (+ 56 % dans les EGD entre 2008 et 2015), la part des crédits publics dans le financement global de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger continuera à se réduire.

D'autre part, le projet annuel de performances précise que cette subvention comporte une enveloppe de 14,7 millions d'euros dédiée à la sécurisation des établissements , dont 9,6 millions d'euros pour les établissements en gestion directe (EGD), 2,1 millions d'euros pour les établissements conventionnés et 3 millions d'euros pour les établissements partenaires, en particulier ceux situés dans les zones les plus sensibles.

La récente enquête de la Cour des comptes, demandée par votre commission des finances et rapportée par votre rapporteur spécial Éric Doligé, a souligné l'importance des besoins en matière immobilière , à la fois pour la sécurisation des emprises et, plus largement, pour la mise aux normes des bâtiments dans un contexte de concurrence accrue avec les établissements anglophones. Elle a conclu à la nécessité d'une stabilité des crédits publics, pour maintenir la double ambition d'excellence et d'universalité du réseau.

À cet égard, le projet de loi de finances pour 2017 n'assure pas un tel maintien, dès lors que la stabilité de la subvention masque en réalité une croissance de l'enveloppe dédiée à la sécurisation .

Par ailleurs, l'exercice 2016 s'est caractérisé par un important prélèvement sur le fonds de roulement de l'agence et des établissements en gestion directe . D'après les données transmises par le directeur général de l'AEFE Christophe Bouchard, ce prélèvement s'établit en 2016 à :

- environ 30 millions d'euros sur les services centraux , en raison de la prise en charge de la part patronale de la pension civile des personnels détachés à l'AEFE, ce qui crée une charge nouvelle durable et même croissante, pour l'établissement ;

- environ 60 millions d'euros sur les établissements en gestion directe , évolution que le directeur général a qualifiée de « logique » compte tenu des dépenses d'investissements réalisés et qui étaient programmées. Sans remettre en cause le montant des dépenses d'investissement réellement engagées en 2016, vos rapporteurs spéciaux souhaitent, en tout état de cause, que le fonds de roulement des EGD, principalement alimenté par les frais de scolarité des parents, ne soit pas utilisé pour compenser le déficit de financement de l'AEFE en matière de dépenses de fonctionnement du réseau.

Ces deux prélèvements expliquent l'importante baisse du fonds de roulement de l'Agence entre 2015 et 2016 , comme l'illustre le tableau suivant.

Évolution du budget de l'AEFE

(en millions d'euros)

2012**

2013**

2014**

2015**

2016***

Budget global

1 113,3

1 146,0

1 188,2

1 199,8

1 245,50

subventions de l'État

581,1

563,5

553,4

535,4

517,8

dont SCSP*

414,8

420,4

409,5

401,9

387,1

ressources propres

532,2

582,5

634,8

664,4

693,00

total produits

1 113,3

1 146,0

1 188,2

1 199,8

1 217,70

fonds de roulement

271,8

308,9

356,1

358,4

218,2

emplois rémunérés****

10 580

10 459

10 720

10 623

10 882

* La subvention pour charges de service public correspond au versement effectif après mise en service

** Les données correspondent aux comptes financiers votés après clôture de l'exercice

*** Données budget initial de l'opérateur, prévision de versement de la SCSP

**** En ETP de 2012 à 2014 puis en ETPT à compter de 2015. Les chiffres de 2016 sont ceux de la LFI

Source : réponses au questionnaire budgétaire

Le ministère souligne, dans ses réponses au questionnaire budgétaire, que « près de 60 % du fonds de roulement est (...) gagé par des engagements pluriannuels » correspondant à la rénovation du parc immobilier inscrite dans le schéma pluriannuel de stratégie immobilière. Ainsi, il estime que « le FDR réellement disponible, à titre d'exemple en 2015, à 61,9 millions d'euros (soit 30 jours de fonctionnement) ». Parvenu à un mois de fonctionnement hors plan d'investissement, le fonds de roulement de l'Agence ne peut donc plus être sollicité .

Pour dégager de nouvelles marges de manoeuvre budgétaires, votre rapporteur spécial Éric Doligé rappelle que des réformes ambitieuses en matière de ressources humaines doivent être menées , comme le suggère la Cour des comptes. Il s'agit, en particulier, de la transformation progressive en postes de résident de postes d'expatriés enseignants, qui présentent un coût deux fois supérieur pour des missions très proches.

3. Des crédits d'attractivité universitaire et de recherche en baisse continue

Le présent programme porte les dépenses d'intervention en faveur de l'attractivité scientifique, culturelle et universitaire, sous la forme de bourses d'étudiants et de chercheurs , ainsi que des crédits d'échanges d'expertise . Ces dépenses permettent de financer la venue de talents étrangers en France, à la fois comme étudiants et comme chercheurs.

Il s'agit, au sein de l'ensemble des crédits de la présente mission, des dépenses d'intervention les plus facilement pilotables , n'étant ni des dépenses de personnel ou de fonctionnement rigides, ni des subventions pour charges de service public aux opérateurs, qui couvrent elles-mêmes des dépenses pour l'essentiel non pilotables.

Les crédits de bourses se sont ainsi caractérisés, depuis cinq ans, par deux mouvements illustrés par le graphique suivant :

- d'une part, une baisse régulière des dotations en loi de finances , à l'exception de l'exercice 2015 ;

- d'autre part, une réduction importante, en cours de gestion, des dotations inscrites initialement . En 2015, cette réduction s'est établie à plus de 12 millions d'euros (exécution de 59,3 millions d'euros, contre 71,6 millions d'euros en dotation initiale).

Le projet de loi de finances pour 2017 prévoit une dotation de 64,6 millions d'euros pour ces bourses , contre 67,6 millions d'euros en 2016.

Évolution des dotations et des consommations des crédits
de bourses d'attractivité

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

Comme l'indiquaient les rapporteurs spéciaux dans leur précédent rapport budgétaire, la baisse des dotations se traduit à la fois par une concentration des bourses sur les pays dont les autorités locales co-financent les programmes et par une réduction du montant moyen de bourse , de manière à maintenir le nombre total de ces bourses d'attractivité. Toutefois, ce mouvement ne saurait se prolonger et s'amplifier sans finir par porter atteinte à la capacité d'attractivité du réseau universitaire et scientifique français.

4. Atout France : une subvention relativement stable, un double défi

Le présent programme porte, depuis la loi de finances pour 2015, la subvention pour charges de service public à Atout France, l'opérateur chargé d'assurer la promotion touristique de la France .

Le budget d'Atout France est composé, pour moitié, de la subvention de l'État portée par le présent programme et, pour moitié, des ressources propres, en particulier des subventions des collectivités territoriales et des contributions du secteur privé (hôteliers, compagnies aériennes, etc.).

La subvention de l'État à Atout France avait augmenté en 2016, passant de 33,1 millions d'euros à 36,7 millions d'euros, dont 31,7 millions d'euros de subvention pour charges de service public et 5 millions d'euros prévisionnels d'attribution de produits de la recette de visas .

Le projet de loi de finances pour 2017 prévoit une subvention de 33,1 millions d'euros ce qui, compte tenu de l'application d'une réserve de précaution de 8 %, reviendrait à une subvention effectivement versée d'environ 30,5 millions d'euros, en légère baisse par rapport à la subvention versée en 2016 . En parallèle, le projet de loi de finances prévoit une baisse de 4 ETPT du plafond d'emplois de l'opérateur, qui passe de 372 ETPT à 368 ETPT.

En tout état de cause, Atout France est confronté, en 2016 et en 2017, à deux principaux défis .

D'un point de vue budgétaire, Atout France devra, en 2017, poursuivre son activité sans l'apport de recettes liées aux visas . En effet, le système d'attribution de produits, que vos rapporteurs spéciaux avaient recommandé et qui a été mis en place en 2016, repose sur l'hypothèse d'une progression des recettes de visas . Or, dans le contexte de la baisse des entrées touristiques (en particulier en provenance de la Chine et de la Russie), les recettes de visas devraient, en 2016, reculer à 183 millions d'euros, contre 186 millions d'euros en 2015 (160 millions d'euros en 2014). Dès lors, aucune recette supplémentaire liée à ce système d'attribution de produits ne devrait bénéficier à Atout France en 2017 sur la base des résultats 2016, contrairement à l'exercice 2016 (cf. infra ). Par rapport à 2016, il s'agit d'un manque à gagner de 5 millions d'euros .

Le second défi, de fond, a trait à l'enjeu majeur de la promotion de la destination France dans le contexte particulier des attentats terroristes de Paris en 2015 et de Nice en 2016 . Ainsi, d'après les chiffres de l'Observatoire économique du tourisme parisien, le nombre de nuitées hôtelières cumulées à Paris entre janvier et juillet 2016 est en recul de 15,9 % pour la clientèle étrangère par rapport à la même période 2015 . Pour la France de façon générale, le recul s'établirait à environ 10 %.

À court terme, cela pose la question du soutien à apporter aux acteurs du tourisme frappés par cette baisse importante de la fréquentation. À cet égard, le ministre des affaires étrangères et du développement international Jean-Marc Ayrault a annoncé, lors de la deuxième réunion du comité d'urgence économique pour le tourisme organisée le 13 septembre 2016, un plan d'urgence de 10 millions pour renforcer les actions de promotion d'Atout France et les mesures de soutien aux professionnels du tourisme 16 ( * ) . D'après les informations recueillies par vos rapporteurs spéciaux, ces fonds seront rendus disponibles par redéploiement en gestion 2016, sans impact pour 2017.

À moyen terme, cela impose à Atout France de développer de nouvelles actions, à destination notamment des clientèles les plus inquiètes , chinoises, japonaises et américaines, afin de les rassurer sur la qualité et la sécurité de la destination France.

5. L'augmentation de la subvention aux alliances françaises pour faire face au défi de la sécurisation

Parmi les dépenses essentielles à l'influence française et à la promotion de la langue française figurent, au sein du présent programme, les subventions aux alliances françaises , partenaires privés, essentiellement autofinancés, qui jouent un rôle de premier plan dans l'apprentissage du français à l'étranger

La subvention aux alliances françaises à l'étranger est relativement stable à 5,5 millions d'euros , contre 5,7 millions d'euros en 2016.

Cependant, la subvention à la Fondation Alliance française à Paris et aux délégations générales de l'Alliance française est en forte progression , passant de 1,4 million d'euros en 2016 à 3,3 millions d'euros en 2017, afin de porter une enveloppe de 2 millions d'euros pour des actions de sécurisation dans les zones de crise ou de forte menace .

6. La baisse des crédits des Instituts français

Le financement des instituts français à l'étranger ou « établissements à autonomie financière » (EAF) combine des ressources propres, qui représentent en moyenne 67 % de leurs recettes en 2015 et qui proviennent essentiellement des tarifs payés par les élèves des cours de français, et des dotations portées par le présent programme.

S'agissant de la dotation de fonctionnement, elle s'inscrit globalement en légère baisse, puisqu'elle passe de 37,6 millions d'euros en 2016 à 35,1 millions d'euros en 2017 . Cette évolution devra être compensée par un fort dynamisme des ressources propres dans les pays de forte demande, présentant une clientèle solvable, et sans concurrence avec l'Alliance française (Allemagne, Japon, Maroc).

La dotation pour opérations, fixée à 4 millions d'euros en 2017, est également en légère baisse par rapport à 2016 (4,2 millions d'euros). Cette réduction traduit la volonté de recentrer les actions des EAF sur l'apprentissage de la langue et, pour les autres actions de partenariat culturel, de davantage solliciter du mécénat ou des partenariats avec des collectivités locales. Le plafond d'emplois, fixé par l'article 35 du présent projet de loi de finances, est stable à 3 449 ETPT.


* 16 Plus récemment, le Gouvernement a annoncé le 7 novembre 2016 un nouveau programme d'urgence de 42 millions d'euros pour le tourisme, centré uniquement sur la sécurité des lieux touristiques et l'accélération des conditions d'accueil et de contrôle à l'aéroport.

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