III. LE PROGRAMME 151 « FRANÇAIS À L'ÉTRANGER ET AFFAIRES CONSULAIRES »

Ce programme, placé sous la responsabilité du directeur des Français de l'étranger et de l'administration consulaire, a pour objet de fournir aux Français établis ou de passage hors de France des services essentiels et de participer à la définition et à la mise en oeuvre de la politique en matière d'entrée des étrangers en France.

1. Le programme en quelques chiffres

Les crédits demandés pour 2017 au titre de ce programme s'élèvent à 386,75 millions d'euros en AE comme en CP . Ils se répartissent en trois actions de la façon suivante.

Répartition par action des crédits demandés (AE=CP)

Action

Exécution 2015 (CP)

LFI 2016

PLF 2017

Évolution 2016-2017

Offre d'un service public de qualité aux Français à l'étranger

202,56

205,49

223,62

+ 8,82 %

Accès des élèves français au réseau AEFE

89,46

115,53

110,00

- 4,79 %

Instruction des demandes de visa

52,21

49,56

53,13

+ 7,19 %

Total

344,23

370,58

386,75

+ 4,36 %

Source : projet annuel de performances de la mission « Action extérieure de l'État » annexé au projet de loi de finances pour 2017

Ces crédits augmentent de 4,36 % par rapport à la loi de finances pour 2016 . Cette hausse est portée par l'action 01 « Offre d'un service public de qualité aux Français de l'étranger », en raison essentiellement des dépenses liées aux élections présidentielle et législatives en 2017 , ainsi que par l'action 03 « Instruction des demandes de visa », qui poursuit son augmentation dans un contexte de renforcement des équipes dédiées à l'instruction des visas.

2. Le montant des bourses scolaires stabilisé à 110 millions d'euros

Le rapport précité de la Cour des comptes est, à la demande de votre commission des finances, revenu sur la question des aides à la scolarité des élèves français. En effet, les évolutions liées d'une part à la suppression de prise en charge de la scolarité des élèves français à l'étranger (PEC) à compter de 2012 et d'autre part à la réforme du dispositif de bourse , dont les critères d'attribution ont été profondément revus, ont modifié la donne et rendu peu lisible l'évolution globale du système d'aide à la scolarité.

En supprimant la PEC et en introduisant un mécanisme d'enveloppe fermée pour les bourses, le Gouvernement avait indiqué que le montant des bourses resterait équivalent au montant cumulé des bourses et de la PEC en 2012, soit 125,5 millions d'euros . Le respect de cette promesse est toutefois difficile à suivre à travers les dotations de loi de finances initiale, compte tenu de la réserve de précaution applicable, ainsi que des réserves de trésorerie dont disposait l'AEFE à l'issue de la réforme des rythmes de campagne des bourses, qui s'élevait à 42 millions d'euros en 2014 et qui a été progressivement apurée. Le tableau ci-dessous retrace ainsi le montant de bourses effectivement versées, compte tenu des dotations initiales, de leur réduction par la réserve de précaution et de l'utilisation des réserves antérieures.

Dotations initiales et consommation de l'aide à la scolarité

(en euros)

2013

2014

2015

2016 (prévisionnel)

2017 (prévisionnel)

Montant inscrit en LFI

110 300 000

118 800 000

125 500 000

115 500 000

110 000 000*

Réserve de précaution

- 6 783 450

- 8 316 000

- 10 400 000

- 9 240 000

- 8 800 000

Annulations en LFR

-

- 4 000 000

- 26 000 000

- 19 000 000

-

Montant versé à l'AEFE

103 516 550

106 484 000

89 460 000

87 260 000

101 200 000

Montant de la réserve de trésorerie

42 000 000

42 000 000

32 000 000

12 700 000

4 400 000

Coût effectif des campagnes de bourses imputées sur l'exercice

99 267 597

95 760 734

99 702 429

106 000 000*

109 500 000 *

Source : direction des Français de l'étranger

Ainsi, le montant des bourses effectivement perçu par les familles n'a jamais dépassé 100 millions d'euros jusqu'en 2015. Les prévisions 2016 et 2017 sont légèrement plus dynamiques, avec un montant de consommation oscillant entre 105 et 110 millions d'euros. En d'autres termes, hors réserves de l'AEFE, la dotation initiale ne permettra pas de couvrir la totalité des besoins en 2017 . La réserve, qui s'établit à environ 12,7 millions d'euros à la fin de l'année 2016, devrait donc être épuisée à l'issue de l'exercice 2017 : un rebasage de la dotation sera donc nécessaire dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018 pour maintenir le niveau de l'aide à la scolarité.

L'enquête de la Cour des comptes, reprenant une analyse menée par un consultant pour le compte de l'AEFE sur la campagne des bourses 2015/2016 du rythme Nord, conclut que « la demande semble satisfaite », en constatant qu'une faible partie des postes (moins de 10 %) ont obtenu in fine des dotations inférieures à leurs demandes et à leurs enveloppes limitatives. Toutefois, votre rapporteur spécial Eric Doligé a souligné que cette analyse est biaisée, dès lors qu'elle dépend des critères d'éligibilité déterminés par chaque poste : la rigueur de ces critères de recevabilité des dossiers ou la quotité des bourses accordées n'est pas retracée .

Malgré l'intérêt de l'évolution mise en oeuvre par la réforme (diminution du nombre de boursiers bénéficiant d'une quotité à 100 %, stabilité du nombre de familles bénéficiant d'une bourse, maîtrise de l'enveloppe budgétaire), cette évolution ne doit donc pas conduire à exercer une pression sur les postes et les commissions locales d'attribution des bourses de nature à réduire le montant des bourses distribuées : comme l'a indiqué votre rapporteur spécial Eric Doligé, « l'enveloppe, pour fermée qu'elle soit, doit être consommée » .

Bien que le niveau optimal des bourses scolaires ne puisse être évalué a priori , il semble évident qu'un montant inférieur à 110 millions d'euros, compte tenu de l'augmentation des frais de scolarité dans le réseau, qui représentent aujourd'hui 1,8 milliard d'euros et qui peuvent aller jusqu'à 30 000 euros par an et par enfant à New York, remettrait en cause les principes d'universalité et de mixité sociale qui font partie de l'identité du réseau de l'enseignement français à l'étranger. Sans parler des phénomènes de déscolarisation, l'autocensure des parents est déjà, d'après les témoignages recueillis par vos rapporteurs spéciaux, très présente.

En conséquence, afin de rétablir le montant effectivement disponible au-dessus de 110 millions d'euros, et afin de préparer le rebasage de la subvention qui sera nécessaire dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018, votre rapporteur spécial Richard Yung vous propose d'adopter un amendement visant à abonder de 5 millions d'euros cette action du présent programme, en provenance des dépenses de fonctionnement du réseau diplomatique (programme 105) , sur lesquelles des économies peuvent être réalisées, en particulier en matière de frais de réception.

3. Des dépenses de fonctionnement des consulats en hausse pour faire face à une année électorale intense

La France dispose de 220 implantations consulaires dans le monde, donnant accès au service public à une population estimée à 2 millions de Français résidant à l'étranger.

Dix-huit de ces postes sont des « postes à gestion simplifiée » (PGS), qui sont des consulats d'influence ayant vocation à faire un travail politique, économique et de coopération culturelle, mais qui ont transféré leurs compétences consulaires (sauf le consulaire d'urgence) à des postes de rattachement. Le dernier poste transformé en PGS est celui d'Edimbourg et, d'après les informations recueillies par vos rapporteurs spéciaux, aucun nouveau poste ne devrait connaître une telle évolution en 2017.

La lente modernisation de l'administration consulaire

Le directeur des Français de l'étranger Nicolas Warnery a souligné, lors de son audition, l'accent mis par le ministère sur la dématérialisation des démarches consulaires , avec l'objectif que la majorité des démarches puissent être effectuées en ligne d'ici à 2020.

La dématérialisation, associée à une simplification des tâches administratives réalisées par les consulats, reste un processus relativement lent. Ainsi, la possibilité de recevoir par courrier son passeport , une fois la demande déposée en personne au consulat, est toujours « en cours de déploiement », compte tenu de la difficulté de mettre en place un système permettant la destruction à distance de la puce électronique en cas de vol ou de non réception du passeport.

De même, la suppression du quittancement des frais de demande de visa , qui faisait partie des recommandations formulées par vos rapporteurs spéciaux dans le cadre de leur rapport d'information sur les visas en 2015 17 ( * ) , a été expérimentée en 2016 à Alger, poste qui souffre d'importants retards compte tenu de l'augmentation continue de la demande. Or, cette expérimentation semble poser un problème d'authentification dans certains cas de contestation de la décision finalement émise. La direction des Français de l'étranger a ainsi indiqué que « un certain nombre de demandeurs, dont le visa avait été refusé, se sont étonnés de ne recevoir qu'un imprimé de notification de refus non signé individuellement de façon manuscrite et ont imaginé que le prestataire n'avait jamais transmis leur dossier au consulat tout en conservant les droits de visas pour lui ».

Source : Direction des Français de l'étranger et des affaires consulaires

La dotation de l'action 01 « Offre d'un service public de qualité aux Français de l'étranger » progresse significativement entre 2016 et 2017, pour s'établir à 223,6 millions d'euros (+ 8,8 %) .

Cette augmentation est portée par deux phénomènes :

- d'une part, la hausse des crédits de fonctionnement liée à l'organisation des élections présidentielle et législatives en 2017, qui représente une dépense estimée à 15,3 millions d'euros. Les frais de préparation des deux tours des deux élections sont couverts par une enveloppe de 11,3 millions d'euros issue d'un transfert du programme 232 de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », auxquels s'ajoute un effort de l'ordre de 4 millions d'euros du présent programme ;

Les élections de 2017 à l'étranger

L' élection présidentielle est une élection « à l'urne » où seul le vote physique (ou par procuration) est possible. Dans ce cadre, 868 bureaux de vote seront ouverts à travers le monde.

Les élections législatives sont des élections qui combinent vote physique et vote électronique. Dans ce cadre, 557 bureaux de vote seront ouverts et un marché public est passé pour organiser le vote électronique et permettre la remontée des résultats le plus rapidement possible. Un module de vote a ainsi été spécialement développé pour cette échéance, pour un coût d'environ 4,5 millions d'euros.

Source : Direction des Français de l'étranger et des affaires consulaires

- d'autre part, l'augmentation des crédits de titre 2 du réseau des consulats et de la direction des Français de l'étranger , qui passent de 172,4 millions d'euros en 2016 à 179,1 millions d'euros en 2017. Cette augmentation, malgré un plafond d'emploi en recul de 19 ETPT entre 2016 et 2017, s'explique principalement par la revalorisation du point d'indice, par le glissement vieillesse-technicité positif et par des mesures catégorielles .

Hors ces deux évolutions, les dépenses de fonctionnement sont en léger repli (11,25 millions d'euros, contre 12,3 millions d'euros en 2016), de même que les dépenses d'intervention qui correspondent aux crédits d'action sociale, stables à 17,9 millions d'euros (contre 18,1 millions d'euros en 2016).

4. La poursuite du renforcement de l'instruction des visas

L'action 03 « Instruction des demandes de visa » porte les dépenses de personnel dédiées à l'instruction des visas dans les consulats à l'étranger , qui sont ainsi isolées des autres dépenses de personnel et de fonctionnement du réseau consulaire (dont les services sont destinés aux Français de l'étranger).

La dotation s'élève à 53,1 millions d'euros pour 2017, contre 49,6 millions d'euros en 2016 . Cette augmentation résulte à la fois de la poursuite de la hausse du plafond d'emploi (864 ETPT, soit + 5 ETPT par rapport à 2016) et des phénomènes qui affectent également les dépenses de personnel du réseau consulaire (point d'indice, GVT, etc.).

Ainsi, le projet de loi de finances pour 2017 s'inscrit dans la continuité de la loi de finances pour 2016, qui avait augmenté de 10 ETPT le plafond d'emploi de cette action . Toutefois, l'absence de recettes liées à l'attribution de produits des visas devrait conduire à la suppression des vacations hors plafond d'emploi , qui avaient permis de soutenir l'activité des consulats pour l'instruction des visas à hauteur de 47 ETPT en 2016.

L'attribution de produits des droits de visas

Une attribution de produits (ADP) intitulée « Produits des recettes additionnelles des droits de visas » était recommandée par le rapport précité de vos rapporteurs spéciaux sur les visas en 2015. Elle a été créée sur le programme 151 en juillet 2016. Cette attribution de produits prévoit que 2/9 de la recette additionnelle de droits de visas d'une année sur l'autre est attribuée aux programmes 151 et 185.

Jusqu'à 1 million d'euros, les sommes sont affectées au titre 2 du programme 151 ; au-delà d'un million d'euros, le solde est réparti entre le titre 2 (10 %) et le hors titre 2 (90 %). Les crédits hors titre 2 sont ensuite virés sur le programme 185 pour versement d'une subvention à Atout France.

Au titre de la gestion 2016, le montant des recettes additionnelles des droits de visas entre 2014 et 2015 s'est élevé à 26 907 254 euros. L'affectation de 2/9 de cette recette a donc représenté un montant de 5 979 390 euros, répartis comme suit :

- 1 497 939 euros de crédits de titre 2 sur le programme 151, pour la rémunération de vacations hors plafond, représentant 47 ETPT ;

- 4 481 451 euros de crédits hors titre 2, reversés à Atout France.

Au titre de la gestion 2017 et compte tenu des projections des recettes de visas pour 2016, les recettes de visas diminueraient (183,2 millions d'euros, contre 186,9 millions d'euros en 2015). Dans ces conditions les crédits à rattacher seront nuls en 2017.

Source : Direction des Français de l'étranger et des affaires consulaires

Il importe que la réduction de la demande de visas, constatée en Chine et en Russie en 2016, ne se traduise pas par une remise en cause du choix de renforcement de l'instruction des visas .

D'une part, cette baisse de la demande n'est pas générale , la demande continuant sa progression dans d'autres zones, notamment le Moyen-Orient et l'Inde.

D'autre part, la durée de l'instruction des demandes de visa reste, comme l'ont montré vos rapporteurs spéciaux, un important levier d'attractivité même auprès de touristes désireux de réaliser un séjour en Europe au-delà du seul territoire français. Il s'agit sans doute du levier d'attractivité touristique le plus aisément maîtrisable pour les pouvoirs publics : dans un contexte de crise du tourisme, les moyens financiers et humains doivent au contraire être renforcés pour compenser, par des délais courts d'instruction des demandes de visa, les hésitations que peut avoir une partie de la clientèle étrangère sur la sécurité de la destination France.


* 17 Rapport n° 127 (2015-2016) de MM. Eric Doligé et Richard Yung : « Faire de la délivrance des visas un outil d'attractivité pour la France », 29 octobre 2015.

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