Rapport général n° 140 (2016-2017) de M. Éric BOCQUET , fait au nom de la commission des finances, déposé le 24 novembre 2016

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N° 140

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2016

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2017 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Rapporteur général,

Sénateur.

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES

ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

( Seconde partie de la loi de finances )

ANNEXE N° 31

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

Rapporteur spécial : M. Éric BOCQUET

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Éblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 4061, 4125 à 4132 et T.A. 833

Sénat : 139 et 141 à 146 (2016-2017)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. L'année 2017 est marquée par une baisse des crédits de la mission « Solidarité » (- 2,7 %) , qui s'explique principalement par deux transferts de crédits : le transfert du financement des dotations de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail (ESAT) à l'assurance-maladie et des moyens de fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) à la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) à compter du 1 er janvier 2017. Ces transferts, d'un montant de près de 2 milliards d'euros, traduisent un désengagement regrettable de l'État du financement de la politique du handicap .

2. À périmètre constant, les crédits de la mission progressent de 4,5 % sous l'effet du dynamisme des prestations financées par la mission, en particulier de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), et des mesures de protection juridique des majeurs, structurellement orientées à la hausse en raison du vieillissement de la population. Par ailleurs, les crédits des programmes 137 « Égalité entre les femmes et les hommes et 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » augmentent de respectivement 7,9 % et 0,8 %.

3. La prime d'activité , créée au 1 er janvier 2016 en remplacement de la part « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et de la prime pour l'emploi (PPE) a connu une montée en charge plus rapide que prévue . Son taux de recours était de 60 % en juin 2016. La programmation budgétaire ayant été construite sur une hypothèse de taux de recours de 50 %, les crédits prévus pour 2016 seront insuffisants d'environ 200 millions d'euros. En 2017, la dépense prévisionnelle de prime d'activité s'élève à 4,34 milliards d'euros , et prend en compte l'ouverture de la prime à de nouveaux publics en 2016 (bénéficiaires de l'AAH, de pensions d'invalidité et de rentes d'accident du travail/de maladie professionnelle).

4. Compte tenu de la réforme de la prime d'activité, financée directement par le budget de l'État, l'article 63 rattaché à la présente mission prévoit de supprimer le Fonds national des solidarités actives (FNSA) qui ne finançait plus, en 2016, que le « RSA jeunes », la prime de Noël versée aux bénéficiaires de certaines allocations ainsi que les frais de gestion de la prime d'activité. Les dépenses prises en charge par ce fonds sont mises à la charge du budget de l'État, ce qui conduit à majorer les crédits du programme 304 de 205 millions d'euros.

5. Le coût des mesures de protection juridique des majeurs continue à croître sous l'effet de la progression du nombre de majeurs concernés par des mesures de protection (454 089 mesures attendues en 2017), pour atteindre 647 millions d'euros (+ 1,5 %). La politique de convergence tarifaire des services mandataires se poursuit, et permet de réduire les écarts de dotations allouées aux services.

6. Le nombre d'adoptions internationales réalisées par l'intermédiaire de l'Agence française de l'adoption (AFA) poursuit sa baisse (201 adoptions réalisées en 2015 contre 3 019 en 2009). Cela pose la question de l'organisation de la politique d'adoption en France . Le Gouvernement a annoncé vouloir procéder à la fusion de l'AFA avec le GIP « Enfants en danger » afin de créer un organisme unique de la protection des enfants. Avant d'opérer un tel regroupement, il conviendra de s'assurer que la disparition juridique de l'AFA n'entraînera pas la disparition des accréditations dont elle dispose dans les pays d'origine et ne conduira pas à l'annulation des procédures d'adoptions en cours.

7. Le montant consacré à l'aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leurs pays d'origine (ARFS) , mise en place au 1 er janvier 2016 au profit des travailleurs immigrés âgés qui effectuent des séjours de longue durée dans leurs pays d'origine, est fortement revu à la baisse en 2017 (10 millions d'euros contre 60 millions d'euros en 2016) . Ceci traduit une forte sous-consommation de cette aide par les personnes éligibles et nécessite que le Gouvernement entreprenne une démarche plus ambitieuse d'information des publics concernés.

8. Le financement des dotations globales de fonctionnement des ESAT est transféré à l'assurance-maladie au 1 er janvier 2017 . Seule la garantie de rémunération des travailleurs handicapés (GRTH), qui permet de prendre en charge partiellement la rémunération des personnes travaillant en ESAT, continue d'être financée par le programme 157, pour un montant de 1,3 milliard d'euros. Ce transfert revêt une certaine cohérence, en alignant le financement des ESAT sur celui des autres établissements et services médico-sociaux accueillant des personnes handicapés, mais il pourrait conduire à un affaiblissement du contrôle parlementaire sur ces crédits - ceux-ci ne seront plus présentés de manière claire et distincte dans les documents budgétaires annexés aux projets de loi de finances.

9. Les moyens de fonctionnement des MDPH devraient être transférés, au 1 er janvier 2017, de l'État à la CNSA , pour un montant de 58 millions d'euros, ce qui permettrait de simplifier les modalités de financement des MDPH qui dépendent actuellement de trois financeurs publics. Par ailleurs, le plan de prévention et d'arrêt des départs non souhaités des personnes handicapées vers la Belgique, doté d'un montant de 10 millions d'euros en 2016, est insuffisant pour faire face aux besoins de créer des solutions de proximité pour les personnes handicapées.

10. Les dépenses d'AAH sont en hausse (+ 2,25 %) sous l'effet de la progression du nombre de bénéficiaires . Toutefois cette hausse est moins importante que les années précédentes, en raison de la révision des règles de revalorisation des prestations sociales prévue par l'article 67 de la loi de finance initiale pour 2016 conduisant à ce que l'AAH ne soit plus revalorisée en fonction de l'inflation prévisionnelle mais de l'inflation constatée sur les douze derniers mois (soit une revalorisation de + 0,1 % en avril 2016). Par ailleurs, la politique d'harmonisation des pratiques d'attribution de l'AAH doit se poursuivre .

11. Les crédits du programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » sont en hausse en 2017 (+7,9 %), du fait du renforcement des moyens consacrés à la lutte contre les violences faites aux femmes et à la lutte contre le système prostitutionnel . Ceci s'explique principalement par la création d'une aide financière à la réinsertion des personnes prostituées prévue par la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

12. Les crédits du programme 124, programme « support » des ministères sociaux, sont en légère hausse de + 0,8 %, qui traduit des évolutions contrastées : la masse salariale des administrations centrales et déconcentrées des ministères sociaux est en progression (+ 1,4 %) , du fait principalement de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique, mais elle est contenue par la poursuite de la réduction des effectifs (- 138 ETPT hors mesures de transferts). Les dépenses de fonctionnement baissent en majeure partie à la suite d'un transfert de crédits de 4,68 millions et d'efforts réalisés sur la politique d'achats - hors transfert, elles augmentent de un million d'euros.

13. Les agences régionales de santé (ARS) voient leur subvention augmenter légèrement (+ 0,9 %) du fait de la progression de leur masse salariale . Elles seront à nouveau fortement mises à contribution, en 2017, au titre de la maîtrise des dépenses publiques, puisque leur schéma d'emploi prévoit la réduction de 100 ETPT supplémentaires.

Au 10 octobre 2016, date limite, en application de l'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, 38,5 % des réponses (30 sur 78) portant sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » étaient parvenues à votre rapporteur spécial.

PREMIÈRE PARTIE - LES GRANDS ENJEUX BUDGÉTAIRES DE LA MISSION

I. UNE MISSION DONT LES CRÉDITS BAISSENT EN RAISON D'IMPORTANTES MESURES DE TRANSFERT DE L'ÉTAT À L'ASSURANCE-MALADIE ET À LA CNSA

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » porte les politiques publiques de solidarité et de cohésion sociale de l'État en faveur des personnes les plus fragiles.

Cette mission a connu des changements importants l'année dernière, avec la création de la prime d'activité venue se substituer à la part « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et à la prime pour l'emploi (PPE), la réforme du financement de la protection juridique des majeurs avec un transfert au budget de l'État de dépenses auparavant prises en charge par l'assurance-maladie, la mise en place de l'aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leurs pays d'origine (ARFS) ou encore la création du fonds pour la prévention de la prostitution et l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées.

L'année 2017 pourrait à nouveau être marquée par trois réformes, conduisant à des mouvements de crédits d'ampleur :

- le transfert du financement des dotations de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail (ESAT) à l'assurance-maladie, voté lors de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 et effectif au 1 er janvier 2017, représentant un montant de 1,47 milliard d'euros ;

- le transfert des moyens de fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) actuellement à la charge de l'État à la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) à compter du 1 er janvier 2017, prévu par l'article 26 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017, pour un montant de 58 millions d'euros ;

- la suppression du Fonds national des solidarités actives (FNSA) , prévue par l'article 63 du projet de loi de finances pour 2017, et la prise en charge par le budget de l'État des dépenses qu'il finançait, induisant une majoration des crédits du programme 304 de 205 millions d'euros.

Ces différentes mesures conduisent à minorer les crédits de la mission « Solidarité » de 1,323 milliard d'euros par rapport au montant de crédits ouverts en 2016. Ceci permet de faire participer « artificiellement » la mission « Solidarité » à la maîtrise des dépenses publiques .

Évolution des crédits de paiement de la mission « Solidarité »
entre 2016 et 2017

(en euros, hors fonds de concours et attributions de produits)

Exécutés en 2015

Ouverts en LFI pour 2016

Demandés pour 2017

Évolution 2016-2017

304 - Inclusion sociale et protection des personnes

2 846 635 589

5 143 182 243

5 708 791 651

+ 11 %

157 - Handicap et dépendance

11 911 627 460

11 689 547 816

10 611 261 862

- 9,2 %

137 - Égalité entre les femmes et les hommes

23 391 193

27 631 060

29 826 426

+ 7,9 %

124 - Conduit et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

1 493 223 641

1 497 633 366

1 509 781 694

+ 0,8 %

Total mission

16 274 877 883

18 357 994 485

17 859 661 633

- 2,7 %

dont titre 2 : dépenses de personnel

725 047 269

730 806 165

741 054 986

+ 1,4 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017

En neutralisant l'effet de ces transferts, c'est-à-dire à périmètre constant , la mission « Solidarité » voit en réalité ses crédits progresser de 4,5 % .

Cette augmentation est principalement due au dynamisme des dépenses d'intervention financées par cette mission , qui sont structurellement orientées à la hausse pour des raisons démographiques, le vieillissement de la population ayant notamment un impact sur le nombre de majeurs placés sous mesures de protection, politiques, le recul de l'âge légal de départ à la retraite conduisant à augmenter le « stock » de personnes bénéficiant de l'allocations aux adultes handicapés (AAH) et de l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI), et du fait de la montée en charge de la prime d'activité, dont le taux de recours devrait continuer à croître l'année prochaine.

Les trois principales dépenses sociales financées par la mission que sont la prime d'activité, les mesures de protection juridique des majeurs et l'AAH représentent d'ailleurs 78 % des crédits de la mission .

De manière subsidiaire, la hausse des crédits de la mission « Solidarité » est également liée à :

- la progression des crédits du programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » (+ 7, 8%) , en raison de moyens supplémentaires alloués à la lutte contre les violences faites aux femmes et au système prostitutionnel ;

- l'augmentation de la masse salariale des ministères sociaux et des opérateurs de la mission (au premier rang desquels les Agences régionales de santé), portée par le programme 124, qui est principalement liée à la revalorisation du point d'indice de la fonction publique. Malgré la poursuite de la baisse des effectifs, elle conduit à majorer les dépenses de personnel de 1,4 % par rapport à 2016.

II. LE DÉSENGAGEMENT DE L'ÉTAT DU FINANCEMENT DE LA POLITIQUE DU HANDICAP

Les transferts des crédits de fonctionnement des MDPH et des ESAT à l'assurance-maladie sont des mesures présentant une certaine cohérence .

En effet, les MDPH dépendent actuellement de trois financeurs publics (l'État, les départements et la CNSA). La mesure proposée va donc dans le sens d'une simplification de leurs modalités de financement . La CNSA ayant pour rôle d'assurer l'animation du réseau des MDPH et de leurs équipes et de garantir l'équité de traitement pour tous les handicaps sur le territoire 1 ( * ) , il parait logique qu'elle finance à titre principal ces organismes.

S'agissant des ESAT, le transfert du financement des dotations de fonctionnement de l'État à l'assurance-maladie semble également cohérent, les autres établissements sociaux et médico-sociaux accueillant des personnes handicapées étant déjà financés à travers des crédits de l'ONDAM médico-social, répartis par la CNSA. Cette mesure devrait faciliter les démarches des associations gérant plusieurs types d'établissements pour personnes handicapés, dont des ESAT, et qui dépendent jusqu'à présent de plusieurs financeurs, ce qui complique leurs démarches de contractualisation avec les pouvoirs publics. Cette problématique avait d'ailleurs été portée à la connaissance de votre rapporteur spécial à l'occasion du contrôle budgétaire qu'il a mené en 2015 sur les ESAT 2 ( * ) .

Toutefois, ces transferts, qui amputent les moyens consacrés par l'État à la politique du handicap de deux milliards d'euros , auront pour conséquence de réduire l'information du Parlement quant au financement des ESAT et des MDPH et donc d'amenuiser le contrôle parlementaire. En effet, ces crédits ne seront désormais plus examinés à l'occasion des projets de loi de finances et présentés dans les programmes annuels de performances, mais discutés à l'occasion des lois de financement de la Sécurité sociale et donc « noyés » parmi les montants importants de crédits alloués aux dépenses sociales et médico-sociales.

Votre rapporteur regrette que la clarification du financement des ESAT et des MDPH conduise à un désengagement financier de l'État de la politique du handicap .

DEUXIÈME PARTIE - LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. LE PROGRAMME 304 « INCLUSION SOCIALE ET PROTECTION DES PERSONNES » EST MARQUÉ PAR LA MONTÉE EN CHARGE RAPIDE DE LA PRIME D'ACTIVITÉ

En 2017, les crédits portés par le programme 304 sont en hausse de 11 % par rapport à ceux ouverts en loi de finances initiale pour 2016. Ceci s'explique par la croissance des deux dispositifs principaux financés par ce programme - et qui représentent plus de 98 % de ses crédits :

- la prime d'activité, d'une part, qui poursuit sa montée en charge consécutive à l'accroissement de son taux de recours ainsi qu'à son ouverture à de nouveaux bénéficiaires en 2016 ;

- les dépenses relatives aux mesures de protection juridique, structurellement orientées à la hausse, d'autre part, qui progressent de 2 % par rapport à l'année précédente.

Cette hausse s'explique aussi également une mesure de périmètre : la suppression du Fonds national des solidarités actives (FNSA), prévue par l'article 63 du projet de loi de finances pour 2017 3 ( * ) , qui était jusqu'à présent financé par une dotation du programme 304 ainsi que par une fraction de 15,2 % du produit de la contribution exceptionnelle de solidarité. L'ensemble des dépenses qu'il finance sont reprises par le budget de l'État, majorant les crédits du programme 304 de 205 millions d'euros 4 ( * ) .

Évolution des crédits de paiement du programme 304
entre 2016 et 2017

(en euros)

Exécutés en 2015

Ouverts en LFI pour 2016

Demandés pour 2017

Évolution 2016-2017

Action 11 - Prime d'activité et autres dispositifs

2 525 332 457

4 364 007 000

4 969 000 000

+ 13,9 %

Action 12 - Économie sociale et solidaire

4 177 815

245 000

-

-

Action 13 - Autres expérimentations

890 180

845 639

845 639

0

Action 14 - Aide alimentaire

45 621 341

44 211 902

42 419 677

- 4 %

Action 15 - Qualification en travail social

5 968 029

6 526 335

6 526 335

Action 16 - Protection juridique des majeurs

239 377 505

637 359 975

650 000 000

+ 2 %

Action 17 - Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables

25 268 262

29 984 392

30 000 000

+ 0,05 %

Action 18 - Aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d'origine (ARFS)

-

60 002 000

10 000 000

- 83,3 %

Total programme 304

2 846 635 589

5 143 182 243

5 708 791 651

+ 11 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017

1. Le succès de la prime d'activité entraîne une révision à la hausse des dépenses en 2016 et 2017
a) Une prime ouverte à un nombre important de personnes

La prime d'activité , créée par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, a remplacé au 1 er janvier 2016 la part « activité » du revenu de solidarité active (RSA) ainsi que la prime pour l'emploi (PPE).

Cette prime est versée aux personnes en activité professionnelle dont les ressources sont inférieures à un certain montant garanti - pour une personne célibataire sans enfant, ce montant est environ égal à 1 500 euros net par mois. Son montant est calculé en prenant en compte la composition et les ressources du foyer. La prime d'activité comporte une bonification individuelle, ciblée sur les revenus compris entre 0,6 et 0,95 SMIC et qui progresse jusqu'à un montant maximal d'environ 67 euros par mois.

D'après les estimations réalisées lors de la réforme , 5,6 millions de personnes actives sont éligibles à la prime d'activité , correspondant à 4 millions de ménages.

La prime d'activité est ouverte aux jeunes actifs dès 18 ans, ainsi qu'aux étudiants et aux apprentis ayant perçu, au cours des trois derniers mois, un salaire mensuel supérieur à 78 % du SMIC (soit environ 890 euros). Elle a également été ouverte à compter du 1 er juillet 2016 aux bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé (AAH) qui travaillent en établissements et services d'aide par le travail (ESAT) ou en milieu ordinaire et, depuis le 1 er octobre 2016, aux bénéficiaires d'une pension d'invalidité ainsi qu'aux personnes bénéficiant d'une rente d'accident du travail/de maladie professionnelle en raison d'une incapacité permanente partielle, exerçant une activité professionnelle rémunérée.

b) Le succès de la prime d'activité conduit au dépassement de la prévision budgétaire

La loi de finances initiale pour 2016 avait prévu une enveloppe de 3,95 milliards d'euros au titre de la prime d'activité. Cette programmation budgétaire était réalisée à partir d'une hypothèse de taux de recours de la prime de 50 % (soit 2 millions de foyers bénéficiaires).

Votre rapporteur spécial avait émis des réserves quant à la possibilité d'une montée en charge aussi rapide de la prime d'activité , alors même que le taux de recours du RSA « activité » n'était que de 32 %. Il pouvait en effet être craint que de nombreux bénéficiaires de la PPE qui percevaient cette prime « automatiquement » via une réduction d'impôt sur le revenu du foyer fiscal (ou, le cas échéant, via un chèque adressé par voie postale), n'entreprennent pas les démarches nécessaires à l'obtention de la prime d'activité - a fortiori ceux n'ayant droit qu'à de faibles montants.

Pourtant, force est de constater que la prime d'activité a trouvé son public . D'après la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), 2,37 millions de foyers percevaient une prime d'activité en juin 2016 représentant 4 millions de personnes - soit un taux de recours de 60 % . Parmi ces bénéficiaires, 400 000 personnes étaient des jeunes de moins de 25 ans. Le montant moyen de prime versée est d'environ 160 euros par mois.

En revanche, la prime d'activité a fait un nombre important de perdants . D'après la rapporteure générale de la commission des finances de l'Assemblée nationale Valérie Rabault 5 ( * ) , le nombre de perdants à la création de la prime d'activité est évalué entre 1,2 million et 1,4 million , pour un montant annuel moyen de 610 euros, soit 51 euros par mois. Il s'agit de personnes qui ne sont pas éligibles à la prime d'activité alors qu'elles bénéficiaient de la PPE. En tenant compte de la réforme de la décote de l'impôt sur le revenu réalisée en loi de finances pour 2016, le nombre de perdants est évalué à 740 000 (contre 1,5 million de gagnants et 2,25 millions de ménages pour lesquels la réforme a été neutre).

Ce résultat meilleur qu'escompté s'agissant du taux de recours à la prime d'activité montre que la simplification des minima sociaux et des prestations sociales est un moyen efficace de lutter contre le non-recours . En effet, contrairement au RSA « activité », la prime d'activité se caractérise par des modalités de déclaration et de versement plus simples et efficaces : le formulaire de demande est dématérialisé et un simulateur en ligne permet de vérifier son éligibilité à la prime ; la prime est versée à « droits figés » pendant trois mois 6 ( * ) , ce qui permet de réduire les indus ; la prime d'activité est déconnectée du RSA « socle » ce qui atténue son caractère stigmatisant.

Compte tenu de la montée en charge plus rapide que prévue de la prime d'activité, et de son ouverture à de nouveaux publics, la dépense révisée pour l'année 2016 s'élève à 4,2 milliards d'euros, soit 200 millions d'euros de plus que la prévision initiale. Pour l'année 2017, le présent projet de loi de finances estime la dépense de prime d'activité à 4,34 milliards d'euros . Ce chiffre paraît cohérent avec la poursuite d'une légère augmentation du taux de recours - un nombre de personnes n'y auront de toute façon pas recours compte tenu des montants versés trop faibles.

Contrairement au RSA « activité », la prime d'activité est financée directement sur les crédits inscrits au programme 304 et non par le Fonds national des solidarités actives (FNSA). En 2016, le FNSA ne finance donc plus que le RSA « socle » versé aux jeunes actifs, la prime de Noël versée aux allocataires du RSA et de l'allocation de solidarité spécifique, de l'allocation équivalent retraite et de l'allocation transitoire de solidarité, ainsi que les frais de gestion de la prime d'activité. En conséquence, le présent projet de loi de finances prévoit de le supprimer et d'inscrire au budget de l'État les dépenses qu'il prenait en charge 7 ( * ) .

c) Des réformes paramétriques des minima sociaux prévues par l'article 49 du projet de loi de finances pour 2017

Dans un référé portant sur les minima sociaux de septembre 2015 8 ( * ) , la Cour des comptes soulignait plusieurs dysfonctionnements : des résultats insatisfaisants en matière de lutte contre la pauvreté malgré une dépense dynamique, des incohérences entre les dispositifs posant un problème d'équité et d'efficacité ainsi qu'une gestion complexe et coûteuse. Elle préconisait ainsi de procéder à une fusion des minima sociaux autour de trois grandes allocations : le revenu de solidarité active (RSA), qui constituerait l'allocation de solidarité de droit commun ; l'allocation aux adultes handicapés (AAH), pour prendre en compte les difficultés spécifiques liées au handicap ; l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA).

À la suite de ces observations, le Premier ministre a confié au député Christophe Sirugue une mission portant sur la réforme des minima sociaux, afin de faire des propositions permettant d'harmoniser et de simplifier ces prestations et de faciliter l'accès au droit.

Les propositions du rapport « Sirugue » sur la réforme des minima sociaux

Le rapport « Repenser les minima sociaux » remis au Premier ministre par M. Christophe Sirugue le 18 avril 2016, après avoir rappelé les limites actuelles du système des minima sociaux (complexité des dispositifs qui s'articulent imparfaitement, non-recours, coûts de gestion), propose trois scénarios de simplification :

- un scénario 1 qui consiste en la mise en oeuvre de douze mesures de simplification du système actuel , sans préjuger de réformes plus profondes pouvant être appliquées ultérieurement, comme la suppression du cumul entre l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et l'allocation de solidarité spécifique (ASS).

- un scénario 2 qui propose de regrouper les dix minima sociaux existants en cinq pôles : un pôle « solidarité », intégrant le revenu de solidarité active (RSA) actuel, l'allocation temporaire d'attente (ATA), l'allocation veuvage et le revenu de solidarité (RSO) versé dans les départements d'outre-mer ; un pôle « handicap et invalidité », regroupant l'AAH et l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI) ; un pôle « vieillesse » constitué de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) ; deux autres pôles construits autour d'une prestation unique, l'allocation pour demandeur d'asile (ADA) et l'ASS.

- un scénario 3 , plus ambitieux, qui vise une refonte globale du système des minima sociaux en substituant à l'ensemble des dispositifs existants une couverture sociale unique, d'un montant de 400 euros, versée sous condition de ressources. Cette couverture serait assorties de deux compléments : un complément de soutien pour les personnes âgées, handicapées ou invalides, dont le retour au travail est incertain, d'un montant de 400 euros ; un complément d'insertion, pour aider à l'insertion des personnes en âge et en capacité de travailler, pour un montant de 100 euros, et assorti d'un accompagnement de la part des pouvoirs publics.

Tirant les conséquences des propositions de Christophe Sirugue, l'article 49 du projet de loi de finances pour 2017 propose plusieurs réformes paramétriques relatives aux minima sociaux . S'agissant des prestations financées par la mission « Solidarité », il convient notamment de souligner les mesures suivantes :

- une harmonisation du dispositif d'intéressement à la reprise d'activité des bénéficiaires de l'ASS avec celui des bénéficiaires du RSA . Les bénéficiaires de l'ASS auront désormais automatiquement accès à la prime d'activité, sans avoir à remplir de dossier spécifique ;

- la suppression de la possibilité de cumul entre l'ASS et l'AAH (cf. infra ).

2. Un montant d'aide alimentaire stable

L' aide alimentaire permet de mettre à disposition des personnes les plus démunies des denrées qui sont distribuées par des réseaux associatifs nationaux ou locaux.

La mission « Solidarité » regroupe deux principaux types de financements de l'État au titre de l'aide alimentaire.

D'une part, la contribution de la France au fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD) mis en place pour la période 2014-2020 et dont le programme opérationnel prévoit d'octroyer à la France une dotation de 587,39 millions d'euros. Cette dotation est financée par des crédits européens à hauteur de 499 millions d'euros (85 %), via un fonds de concours relevant du programme 304, ainsi que par des crédits nationaux à hauteur de 88,11 millions d'euros (15 %).

La contribution nationale au FEAD s'élève, en 2017, à 12,58 millions d'euros pour un montant total consacré à l'aide alimentaire au titre du FEAD de 83,85 millions d'euros.

D'autre part, des crédits complémentaires destinés à soutenir les épiceries sociales - celles-ci n'étant pas éligibles au FEAD 9 ( * ) -, à subventionner les têtes de réseau associatives nationales afin de prendre en charge une partie de leurs coûts de fonctionnement au titre de l'aide alimentaire (logistique, formation des bénévoles, etc.), à financer les services déconcentrés qui mettent en oeuvre la distribution de l'aide alimentaire, ainsi qu'à verser une subvention pour charges de service public à France Agrimer en tant qu'organisme intermédiaire de gestion du FEAD.

Conformément au taux d'augmentation prévu par le programme opérationnel du FEAD, la contribution du fonds croît de 2 % en 2017. Cette augmentation est également appliquée aux crédits versés aux épiceries sociales et aux têtes de réseau associatives.

Au total, les financements dédiés à l'aide alimentaire représentent un montant total de 113,7 millions d'euros (dont 42,4 millions d'euros de crédits budgétaires et 71,27 millions de subventions européennes). Ces financements doivent permettre, comme l'année dernière, à plus de 4 millions de personnes de bénéficier d'une aide alimentaire en 2017.

Les crédits en faveur de l'aide alimentaire en 2017

(en millions d'euros)

Montant

FEAD

Contribution UE

71,27

Contribution nationale

12,58

Épiceries sociales

8,23

Subventions aux têtes de réseau associatives nationales

4,56

Aide alimentaire déconcentrée

14,88

Subvention pour charge de service public à France Agrimer

2,17

Source : commission des finances du Sénat, à partir du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017

3. Les mesures de protection juridique des majeurs poursuivent leur forte progression malgré la politique de convergence tarifaire menée

Les personnes majeures qui ne sont pas en mesure de pourvoir à leurs intérêts en raison d'une altération de leurs facultés mentales ou corporelles font l'objet de mesures de protections, prononcées par le juge des tutelles . Elles peuvent être confiées soit à un membre de leur famille, soit à un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM) , c'est-à-dire à un service mandataire, à un mandataire individuel ou à un préposé d'établissement.

La loi de finances pour 2016 a procédé à une simplification du financement des mandataires judiciaires à la protection des majeurs , jusqu'alors financés par plusieurs financeurs publics (les organismes de sécurité sociale, l'État ou les départements) en fonction de prestations sociales perçues par les personnes concernées par les mesures de protection.

Désormais, les mandataires individuels sont financés uniquement par l'État et les services mandataires sont financés quasi-totalement par l'État, les départements continuant de contribuer à hauteur de 0,3 % à leurs dotations. Votre rapporteur spécial continue de s'interroger sur l'utilité du maintien de la contribution subsidiaire des départements au financement des services mandataires, et préconise de pousser la simplification à son terme en procédant à une recentralisation totale du financement.

Comme les années précédentes, le nombre de mesures de protection financées poursuit sa progression en 2017, pour s'établir à 454 089 (contre 437 320 mesures financées en 2016), dont :

- 368 298 mesures prises en charge par les services mandataires (81,1 %) pour un montant de 567,7 millions d'euros ;

- 85 791 mesures prises en charge par les mandataires individuels (18,9 %), pour un montant de 79,3 millions d'euros. Ceci représente une augmentation à nouveau importante du nombre de mesures confiées à des mandataires individuels (+ 13 % par rapport à 2016).

Évolution nombre de dispositifs de protection juridique des majeurs
entre 2010 et 2017

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Services mandataires

320 645

328 783

334 390

341 245

347 986

354 629

361 399

368 298

Mandataires individuels

36 294

37 925

44 271

52 206

59 391

66 423

75 921

85 791

Total

356 939

366 708

378 661

393 451

407 377

421 052

437 320

454 089

Source : ministère des affaires sociales et de la santé

En raison de l'augmentation du nombre de personnes devant faire l'objet d'une mesure d'accompagnement ou de protection, la dotation prévue pour 2017 augmente de 1,5 % par rapport à 2016 et s'élève à 647 millions d'euros . L'évolution sur la période 2010-2016 montre une progression constante et significative du coût des MJPM, qui est passé de 520,3 à 639,2 millions d'euros (+ 22,8 %).

Évolution du coût des dispositifs de protection juridique des majeurs 10 ( * )
pour les financeurs publics entre 2010 et 2016

(en millions d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

État

211,2

209,4

217,4

224,8

231,6

239,3

637,3

Départements

5,7

4,1

4,0

3,0

1,6

1,7

1,9

Sécurité sociale

303,4

323,1

335,4

343,0

362,4

379,5

-

Total

520,3

536,6

556,8

570,8

595,6

620,5

639,2

Source : ministère des affaires sociales et de la santé

Outre la progression du nombre de mesures prises, l'augmentation du coût des services mandataires est liée à une revalorisation de la masse salariale de 0,27 % en 2017.

S'agissant des services mandataires, la progression de leur coût peut également s'expliquer, d'après le ministère des affaires sociales, par la professionnalisation du secteur « qui a eu pour impact de voir l'accroissement du nombre de mandataires souhaitant exercer cette activité à temps plein » 11 ( * ) . Cette progression est effective malgré les efforts entrepris en vue maîtriser les budgets des services mandataires et de réduire les écarts entre les services les mieux et les moins dotés.

En effet, la dotation des services mandataires est calculée en fonction d'indicateurs prenant en compte la charge de travail à partir de trois critères : la nature de la mesure, le lieu d'exercice (domicile ou établissement) et la période d'exercice. Ces indicateurs permettent de calculer un total de points de service permettant d'appréhender l'importance quantitative de l'activité du service concerné et de constater des éventuels écarts entre services fournissant des prestations comparables - à partir d'une valeur de point service calculée en divisant le budget du service par le nombre de points générés par les indicateurs.

D'après les informations transmises par le ministère des affaires sociales à votre rapporteur spécial, les écarts de dotations allouées aux services ont été réduits : de 2009 à 2015, la part des services ayant une valeur du point service correspondant à la moyenne nationale minorée ou majorée de 20 % est passé de 25 % à 8,5 %.

Évolution de la répartition des services selon leur positionnement
par rapport à la moyenne nationale de la valeur du point service

Source : ministère des affaires sociales et de la santé

4. Une réforme urgente de l'Agence française de l'adoption

L' Agence française de l'adoption (AFA) , créée en 2005 sous forme de groupement d'intérêt public (GIP), a pour mission d'informer, de conseiller et de servir d'intermédiaire pour l'adoption des mineurs étrangers de moins de quinze ans.

Le paysage de l'adoption en France est marqué par une baisse continue du nombre d'adoptions internationales . En 2015, seules 815 adoptions internationales ont été réalisées, contre plus de 3 000 en 2009. Parmi ces 815 adoptions, le nombre de celles réalisées par l'intermédiaire de l'agence française de l'adoption (AFA) était de 201 en 2015 12 ( * ) (soit 22 % des adoptions internationales) et devrait être du même ordre en 2016.

Évolution du nombre d'adoptions internationales depuis 2009

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Nombre d'adoptions internationales

3 019

3 508

2 003

1 569

1 343

1 069

815

dont adoptions réalisées par l'intermédiaire de l'AFA

514

568

402

304

256

239

201

Part des adoptions internationales réalisées par l'intermédiaire de l'AFA

17 %

16,2 %

20,1 %

19,4 %

19,1 %

22,4 %

24,7 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Bien qu'elle concerne l'ensemble des pays d'accueils et qu'elle s'explique notamment par la baisse du nombre d'enfants proposés à l'adoption et par l'évolution du profil des enfants adoptables 13 ( * ) , cette décrue pose la question de l'organisation de la politique d'adoption en France , et de la coexistence de l'agence et des autres intermédiaires que sont les 34 organismes agréés, dont l'action est parfois mal coordonnée.

Cette préoccupation a été exprimée par la Cour des comptes dans son rapport public annuel de 2014 14 ( * ) . Elle relevait notamment des délais d'attentes importants et un coût de l'adoption élevé, de 15 000 euros par adoption tous pays confondus, supérieur à celui des organismes autorisés pour l'adoption (9 112 euros). La Cour des comptes recommandait d'engager une réflexion sur les missions et les modalités d'intervention de l'AFA .

Dans ce contexte, le Gouvernement a engagé une réflexion sur l'organisation du dispositif d'adoption internationale et prévoit un regroupement de l'AFA et du GIP « Enfance en danger » , qui gère le service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (SNATED) et l'observatoire national pour la protection de l'enfance (ONPE) au sein d'un nouveau GIP. La perspective d'un tel regroupement est inscrite dans les conventions d'objectifs entre l'État et les GIP pour 2015-2017.

Une mission a été confiée à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et à l'Inspection générale des affaires étrangères (IGAE) afin d'expertiser les modalités de rapprochement des deux organismes. Cette mission a proposé que le nouveau GIP poursuive quatre objectifs :

- améliorer la connaissance des situations des enfants et des interventions les concernant ;

- identifier les bonnes pratiques professionnelles et en diffuser les recommandations en s'appuyant sur la recherche ;

- mieux articuler l'adoption nationale et internationale, tout en conservant une visibilité du dispositif sur l'adoption internationale ;

- être au service des stratégies de l'État et des collectivités territoriales.

Plusieurs associations représentant les parents 15 ( * ) , bien qu'elles partagent les objectifs de ce regroupement en particulier l'ambition de créer un organisme unique de la protection des enfants et de dynamiser le fonctionnement de l'AFA, ont exprimé leur craintes que la disparition juridique de l'AFA entraîne la disparition de ses accréditations dans la trentaine de pays d'origine dans lesquels elle est accréditée , ce qui aurait pour conséquence de voir les procédures d'adoption internationale auxquelles l'AFA est partie suspendues voire annulées 16 ( * ) . Votre rapporteur spécial partage cette inquiétude.

En matière de protection de l'enfance, il convient également de noter la hausse sensible de la prise en charge par l'État du dispositif d'accueil et d'orientation des mineurs isolés étrangers (MIE) piloté par les départements, qui a été expérimenté en 2013 et pérennisé par la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfant. Au titre du MIE, les départements qui engagent des actions de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation des jeunes isolés étrangers peuvent obtenir un remboursement des dépenses engagées sur la base d'un montant forfaitaire fixé à 50 euros par jour et par jeune, dans la limite de cinq jours, via le Fonds national de financement de la protection de l'enfance (FNFPE). Le coût de ce dispositif sera en augmentation de 9 % par rapport à l'année dernière, pour atteindre un montant de 15,26 millions d'euros.

5. Une aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leurs pays d'origine fortement sous-consommée

La loi de finances pour 2016 a permis la mise en place, à compter du 1 er janvier 2016, d'une nouvelle aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leurs pays d'origine (ARFS) .

Cette aide est destinée aux travailleurs immigrés âgés disposant de faibles ressources afin de leur permettre de compenser la perte de certaines prestations sociales servies sous condition de résidence (par exemple les aides personnelles au logement) lors de leurs séjours prolongés qu'ils effectuent dans leurs pays d'origine. Elle est exclusive des aides au logement et des minima sociaux.

Les conditions d'éligibilité à cette aide sont très restrictives puisqu'elle est ouverte aux ressortissants étrangers : en situation régulière, âgés d'au moins soixante-cinq ans ou ayant atteint l'âge légal de départ à la retraite en cas d'inaptitude au travail, vivant seul dans un foyer de travailleurs migrants ou dans une résidence sociale, qui justifient d'une résidence régulière ininterrompue en France pendant les quinze années précédant la demande d'aide (hors ressortissants communautaires), qui ont fait valoir les droits aux pensions de retraite auxquelles ils peuvent prétendre, qui effectuent des séjours dans leur pays d'origine supérieurs à six mois par an, et dont les ressources annuelles sont inférieures à 6 600 euros.

Le montant annuel d'aide versé est de 6 600 euros lorsque les ressources du demandeur sont inférieures à 600 euros par an, et décroît à mesure que ces ressources augmentent pour atteindre le plafond de 6 600 euros (l'aide est alors de 600 euros par an, soit 50 euros par mois).

Le Gouvernement prévoyait qu' environ 10 000 à 15 000 personnes bénéficient de cette aide en 2016 , pour un coût estimé à 60 millions d'euros, sur un montant total de personnes ressortissantes de pays tiers âgés de plus de 65 ans résidant en foyer de travailleurs migrants ou en résidence sociale estimé à 35 000 personnes.

Cependant, l'objectif fixé n'a pas été atteint , probablement par manque d'information des personnes éligibles quant à la possibilité de recourir à cette nouvelle aide. En conséquence, les crédits inscrits au titre de l'ARFS pour l'année 2017 sont fortement revus à la baisse : il s'élèvent à 10 millions d'euros contre 60 millions d'euros en 2016. Ceci traduit un certain manque d'ambition du Gouvernement qui devrait entreprendre une campagne d'information auprès des publics visés afin qu'ils se saisissent de cette aide.

II. LE PROGRAMME 157 « HANDICAP ET DÉPENDANCE » : UNE PART IMPORTANTE DU FINANCEMENT DE LA POLITIQUE DU HANDICAP TRANSFÉRÉE À L'ASSURANCE-MALADIE ET À LA CNSA

Le présent projet de loi de finances prévoit une refonte totale de la maquette du programme 157 « Handicap et dépendance », qui est resserré autour de trois actions :

- l'action 11 « Fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées », qui retrace les crédits attribués par l'État aux MDPH ;

- l'action 12 « Allocations et aides en faveur des personnes handicapées » , qui regroupe l'allocation aux adultes handicapées (AAH), l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI) et la part compensée aux établissements et services d'aide par le travail (ESAT) par l'État au titre de l'aide au poste pour les travailleurs handicapés ;

- l'action 13 « Pilotage du programme et animation des politiques inclusives » , qui regroupe notamment les crédits alloués aux politiques de soutien à l'emploi accompagné, à la promotion de la bientraitance des personnes âgées et handicapées, aux frais de justice en cas de contentieux liés notamment aux MDPH, ainsi que des subventions à des organismes comme les instituts nationaux pour jeunes aveugles et jeunes sourds (16,6 millions d'euros en 2017), le Centre national de formation des enseignants intervenant auprès des déficients sensoriels (0,2 million d'euros) ou les centres régionaux d'études, d'actions et d'informations en faveur des personnes en situation de vulnérabilité (0,78 million d'euros).

Cette refonte est liée à deux modifications majeures affectant les crédits du programme 137 :

- le transfert du financement des dotations de fonctionnement des ESAT à l'assurance-maladie, voté lors de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 et effectif au 1 er janvier 2017 ;

- le transfert des moyens de fonctionnement des MDPH actuellement à la charge de l'État à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), prévu à compter du 1 er janvier 2017 par l'article 26 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017.

Ces deux transferts entraînent une mesure de périmètre négative sur le budget du programme 157 de 1,47 milliard d'euros pour les ESAT et de 58 millions d'euros au titre des MDPH, soit un total d'environ 2 milliards d'euros. Ils sont compensés par l'augmentation des crédits alloués à l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ainsi que, dans une moindre mesure, par ceux alloués à l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI).

Au total, les crédits du programme 157 baissent de 9,2 % par rapport à l'année précédente , pour atteindre un montant de 10,6 milliards d'euros en 2017.

Crédits de paiement du programme 157 en 2017

(en euros)

Ouverts en LFI pour 2016

Demandés pour 2017

Évolution 2016-2017

Action 11 - Fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (nouveau)

-

1 499 999

-

Action 02 - Allocations et aides en faveur des personnes handicapées (nouveau)

-

10 581 644 679

-

Action 03 - Pilotage du programme et animation des politiques inclusives (nouveau)

-

28 117 184

-

Total programme 157

11 689 547 816

10 611 261 862

- 9,2 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017

1. Le transfert des crédits de fonctionnement des ESAT à l'assurance-maladie : un souci de cohérence qui nuit à la qualité du contrôle parlementaire

Les établissements et services d'aide par le travail (ESAT) sont des établissements médico-sociaux qui accueillent des personnes handicapées dont les capacités de travail ne leur permettent ni de travailler dans une entreprise ordinaire ni d'exercer une activité professionnelle indépendante.

Jusqu'à présent, les dotations globales de fonctionnement des ESAT étaient financées non pas, comme les autres établissements pour personnes handicapées, par les crédits de l'assurance-maladie via l'ONDAM médico-social, mais directement par l'État à travers une contribution inscrite au programme 157. La loi de finances initiale pour 2016 prévoyait ainsi une dotation de fonctionnement de 1 477,1 millions d'euros, permettant de financer 119 213 places.

L'article 74 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 a prévu le transfert des crédits de fonctionnement des ESAT de l'État à l'assurance-maladie au 1 er janvier 2017 . Ces dotations de fonctionnement seront intégrées à l'ONDAM médico-social, et réparties par la CNSA.

En conséquence, le programme 157 ne prévoit plus, en 2017, que le financement par l'État de la garantie de rémunération des travailleurs handicapés (GRTH) 17 ( * ) , c'est-à-dire une prise en charge partielle de la rémunération des personnes travaillant en ESAT, des cotisations sociales afférentes, de la formation professionnelle continue et de la prévoyance, pour un montant de 1 288,5 millions d'euros, en légère hausse par rapport à l'année dernière (+ 1 %).

Le transfert des dépenses de fonctionnement des ESAT de l'État à l'assurance-maladie peut paraître cohérent compte tenu du fait que cette dernière finance déjà les autres établissements et services d'accueil et d'accompagnement des personnes handicapées. Ceci pouvait conduire une même association gérant une telle association et un ESAT à dépendre de deux financeurs publics différents. Ce transfert doit également permettre aux agences régionales de santé (ARS) d'être en mesure de conclure des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM) multi-structures comprenant des ESAT et d'autres établissements.

L'alignement du financement des ESAT sur celui des autres établissements médico-sociaux accueillant des personnes handicapées paraît pouvoir être justifié par des raisons de cohérence et de lisibilité. Toutefois, le fait que les dotations des ESAT ne soient plus prises en charge par l'État et donc retracées dans les documents budgétaires à l'occasion des lois de finances conduira à ce que la question du financement des places en ESAT échappe largement au contrôle parlementaire - puisqu'il sera « noyé » parmi les autres montants importants de crédits dédiés aux établissements sociaux et médico-sociaux.

Le présent projet de loi de finances est également marqué par le financement du dispositif « d'emploi accompagné » , créé par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, qui permet d'offrir aux salariés handicapés un accompagnement médico-social et un soutien à leur insertion professionnelle en vue d'accéder et de se maintenir dans l'emploi. 5 millions d'euros sont prévus pour le lancement de ce dispositif, par un appel à projet permettant de développer des initiatives locales d'accompagnement dans l'emploi ordinaire ayant à terme vocation à se généraliser.

2. Le transfert des crédits des MDPH à la CNSA et la poursuite de l'évolution de leurs missions

Les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) sont des groupements d'intérêt public (GIP), sous tutelle administrative et financière du département dont sont membres de droit le département, l'État et les organismes locaux d'assurance maladie et d'allocations familiales.

Les MDPH sont chargées de l'évaluation des besoins des personnes handicapées et de leur orientation, à travers la définition d'un plan de compensation. Elles sont également compétentes pour se prononcer sur l'attribution de la prestation de compensation du handicap (PCH), de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), de l'allocation d'éducation enfant handicapé (AEEH) ou de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH).

L'État était jusqu'à présent le second financeur des MDPH, après les départements , avec une contribution à leur fonctionnement qui s'est élevée à 57,6 millions d'euros en 2016. Par ailleurs, 1 548 agents de l'État sont mis à disposition ou compensés financièrement si les personnels initialement mis à disposition n'ont pas été remplacés après leur départ en retraite ou ont été réintégrés dans leur administration d'origine. La contribution de la CNSA au fonctionnement des MDPH était pour sa part de 10 millions d'euros en 2016.

Évolution des apports financiers aux MDPH par contributeur entre 2011 et 2014

(en millions d'euros)

Source : ministère des affaires sociales, données déclaratives des MDPH sur un échantillon de 102 MDPH

L'article 26 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017 prévoit de supprimer la subvention de fonctionnement versée par l'État aux MDPH et de transférer ce financement à la CNSA (pour un montant de 58 millions d'euros), le concours de l'État se limitant à la mise à disposition de fonctionnaires et à la compensation financière en cas de vacances d'emplois.

En conséquence, les crédits portés par le présent projet de loi de finances pour 2017 à destination des MDPH s'élèvent à 1,5 million d'euros, et correspondent en réalité aux transferts de crédits en provenance des programmes 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » et 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » au titre de la compensation financière des vacances d'emploi.

Selon le Gouvernement, ce transfert a pour but de simplifier le financement des MDPH, qui ne serait plus assuré que par les départements et la CNSA. Comme dans le cas des ESAT, votre rapporteur spécial déplore que cette mesure de simplification ait pour conséquence une moindre faculté pour le Parlement d'assurer un contrôle sur le financement de la politique en direction des personnes handicapées par l'État .

Par ailleurs, les MPDH poursuivront en 2017 les actions visant à simplifier les démarches des usagers , à travers notamment le projet « IMPACT » visant à tester de nouvelles modalités de relation avec l'usager ainsi que de nouveaux processus de traitement internes.

Enfin, à la suite du signal d'alarme tiré par plusieurs associations de personnes handicapées lors du dernier débat budgétaire au sujet de la situation des personnes handicapées françaises contraintes de se rendre en Belgique faute de trouver une place dans des établissements en France 18 ( * ) , le Gouvernement a mis en place un plan de prévention et d'arrêt des départs non souhaités des personnes handicapées vers la Belgique . Doté, dans un premier temps, de 10 millions d'euros, ce plan doit permettre de créer des solutions d'accueil dans les établissements sociaux et médico-sociaux de proximité.

Il est réparti entre les différentes régions en fonction de trois critères : le nombre d'enfants et d'adultes handicapés originaires de la région et placés dans un établissement belge ; le nombre de personnes handicapées accueillies en établissement au titre de l'amendement Creton 19 ( * ) ; le taux d'équipement de la région en établissements et services médicosociaux pour enfants et adultes handicapés. Cette répartition permet de cibler la région du Haut-de-France (provisoirement appelée Nord-Pas-de-Calais-Picardie), frontalière de la Belgique, qui perçoit 30 % des crédits du plan, soit 3 millions d'euros.

Répartition des crédits du fonds d'amorçage du plan de prévention et d'arrêt des départs non souhaités des personnes handicapées vers la Belgique

(en euros)

Régions

Montant des crédits

Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine

900 000

Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes

500 000

Auvergne-Rhône-Alpes

600 000

Bourgogne-Franche-Comté

300 000

Bretagne

250 000

Centre-Val-de-Loire

350 000

Corse

100 000

Guadeloupe

0

Guyane

200 000

Ile-de-France

2 000 000

Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées

550 000

Martinique

0

Nord-Pas-de-Calais-Picardie

3 000 000

Normandie

350 000

Océan Indien

200 000

Pays-de-la-Loire

250 000

Provence-Alpes-Côte d'Azur

450 000

Total

10 000 000

Source : Cirulaire n° DGCS/SD5C/DSS/CNSA/2016/126 du 22 avril 2016 relative aux orientations de l'exercice 2016 pour la campagne budgétaire des établissements et services médico-sociaux accueillant des personnes handicapées et des personnes âgées

Toutefois, le montant de ce fond paraît bien trop faible au regard des besoins . En effet, les sommes versées annuellement par l'assurance-maladie aux établissements belges accueillant des personnes handicapées françaises s'élèvent à 152,2 millions d'euros, dont 70 millions d'euros au titre des établissements conventionnés et 82,2 millions d'euros au titre des établissements non conventionnés. Il est donc impératif que les crédits dédiés au développement de solutions de proximité pour les personnes handicapées soient donc nettement renforcés .

3. Une progression de la dépense d'AAH provisoirement ralentie du fait de la révision des règles de revalorisation
a) La progression ininterrompue du nombre d'allocataires d'AAH

L'allocation aux adultes handicapés (AAH) est un minimum social versé, sous conditions de ressources, aux personnes handicapées . Elle est subsidiaire par rapport à d'autres prestations, comme les pensions d'invalidité, les rentes d'accident du travail ou les avantages vieillesse. Elle peut se cumuler avec des ressources personnelles, dans la limite d'un plafond annuel, fixé à 9 701,52 euros pour une personne seule sans enfant au 1 er avril 2016 20 ( * ) .

Afin de bénéficier de l'AAH, la personne handicapée doit être atteinte :

- soit d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 % (« AAH 1 ») ;

- soit d'un taux d'incapacité compris entre 50 % et 80 %, et présenter une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi (« AAH 2 ») ne pouvant être compensée par des mesures d'aménagement du poste du travail 21 ( * ) .

Comme les années précédentes, la dépense d'AAH poursuit sa progression en 2017 pour atteindre un montant de 9,05 milliards d'euros soit une hausse de 2,25 % . Cette hausse est principalement liée à l'augmentation du nombre de bénéficiaires, qui était de 1 080 900 en 2016 contre 848 806 en 2008 (effet « volume »), du fait du décalage de l'âge légal de départ à la retraite qui prolonge le nombre de personnes bénéficiant de ce minima social ainsi que du vieillissement de la population, ainsi qu'à la revalorisation annuelle de l'allocation intervenue au 1 er avril 2016 (effet « prix »).

Toutefois, il y a eu un ralentissement de la hausse des dépenses d'AAH par rapport aux années antérieures (en moyenne, ces dépenses ont augmenté de 6 % par an depuis 2008). Ce ralentissement peut principalement s'expliquer par la révision des règles de revalorisation de l'AAH prévue par l'article 67 de la loi de finances pour 2016 - dans le cadre d'une réforme globale des modalités de revalorisation des prestations sociales. En effet, alors que cette revalorisation intervenait en fonction de l'inflation prévisionnelle, elle s'effectue désormais par rapport à l'inflation constatée sur les douze dernier mois par l'Insee 22 ( * ) . Compte tenu du contexte de faible inflation, la revalorisation intervenue au 1 er avril 2016 n'a été que de 0,1 %.

Évolution du nombre d'allocataires et du montant de dépense d'AAH
entre 2008 et 2016

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Nombre d'allocataires

848 806

883 330

915 000

956 589

996 957

1 023 300

1 041 775

1 063 306

1 080 900

Dépense d'AAH

(en millions d'euros)

5 650

6 149,60

6 624,60

7 150

7 806,2

8 165,4

8 482

8 524,43

8 852,8

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

b) Des réformes paramétriques prévues dans le cadre de la simplification des minima sociaux qui accroîtront la dépense d'AAH à terme

La dépense d'AAH devrait cependant à nouveau connaître une forte progression dans les années à venir sous l'effet de la réforme des minima sociaux proposée dans le cadre de l'article 49 du projet de loi de finances pour 2017, qui prévoit notamment :

- la possibilité pour les personnes handicapées ayant un taux d'incapacité supérieur ou égal à 80 % (AAH 1), au moment de leur départ à la retraite, de conserver le bénéfice de l'AAH sans avoir à solliciter préalablement l'allocation de solidarité pour les personnes âgées (ASPA) , ce qui était jusqu'à présent obligatoire. Cette mesure vise à simplifier les démarches administratives des personnes lourdement handicapées, ayant eu des parcours professionnels réduits, lorsqu'elles arrivent à l'âge de la retraite. Ce maintien des personnes dans le dispositif de l'AAH devrait entraîner un surcoût estimé à 20 millions d'euros.

- la suppression de la possibilité de cumul de l'allocation de solidarité spécifique (AAS) 23 ( * ) et de l'AAH , en retenant une « primauté » au droit à l'AAH. Environ 35 000 personnes bénéficieraient actuellement de ce cumul, leur permettant de bénéficier d'un revenu pouvant atteindre près de 1 300 euros par mois. Afin de ne pas remettre en cause les situations actuelles, les personnes bénéficiant actuellement de ce cumul continueront à en bénéficier au cours des dix prochaines années.

Par ailleurs, d'autres réformes paramétriques de l'AAH annoncées par le Président de la République lors de la conférence nationale du handicap (CNH) du 19 mai 2016 ont été mises en place :

- l'ouverture du cumul entre l'AAH et la prime d'activité. Depuis le 1 er juillet 2016, le montant d'AAH n'est plus retranché de celui de la prime d'activité ;

- l'accroissement de la durée d'attribution de l'AAH 1 pour les personnes dont le handicap est insusceptible d'évolution favorable - par dérogation, l'allocation pourra être versée pour une durée de vingt ans, ce qui permet d'alléger les démarches de demande de renouvellement. Cette mesure, annoncée lors de la conférence nationale du handicap de 2016, date toutefois d'un décret du 3 avril 2015.

En outre, la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) est engagée dans une politique d'harmonisation des pratiques d'attribution de l'AAH . Ainsi, la DGCS, en collaboration avec les MDPH et la CNSA, est en train d'élaborer un nouvel outil d'accompagnement à disposition des agents des directions départementales interministérielles chargées de la cohésion sociale qui représentent l'État au sein des commissions départementales des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) et des autres acteurs concernés qui regroupera, sous forme d'un guide, un ensemble de cas pratiques permettant de faciliter l'appréciation de la personne en vue de l'attribution de la prestation.

Votre rapporteur spécial salue cette initiative et considère qu'il est important que l'État, eu égard aux différences qui existent dans l'évaluation du taux d'incapacité en fonction des MDPH 24 ( * ) , mène une politique d'harmonisation des règles d'attribution de l'AAH afin de garantir l'égalité de traitement des bénéficiaires sur l'ensemble du territoire, à condition que cette convergence des pratique n'ait pas pour objectif déguisé de restreindre les conditions d'éligibilité des personnes à l'AAH .

4. Une légère remontée des bénéficiaires de l'ASI qui rompt avec la tendance baissière constatée depuis plusieurs années

L' allocation supplémentaire d'invalidité est une prestation visant à compléter les ressources des bénéficiaires d'une pension d'invalidité ou d'un avantage vieillesse jusqu'à l'âge légal de départ à la retraite, s'ils sont atteints d'une invalidité générale réduisant leur capacité de travail ou de gain d'au moins deux tiers.

L'ASI est versée sous conditions de ressources, jusqu'à un certain plafond (8 432,47 euros par an pour une personne seule et 14 770,08 euros par an pour un couple marié). Si le niveau d'ASI perçu est inférieur au montant de l'AAH, les bénéficiaires peuvent percevoir une AAH différentielle.

La dépense d'ASI connait une tendance baissière depuis plusieurs, directement liée à la décrue du nombre d'allocataires (- 12 % entre 2010 et 2016) qui s'explique principalement par l'amélioration des ressources des pensionnés d'invalidité plus rapide que l'évolution de l'inflation sur laquelle est indexé le plafond de ressources de l'ASI.

Évolution du nombre d'allocataires et du montant de dépense d'ASI
entre 2010 et 2016

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Nombre d'allocataires

81 616

77 917

75 640

74 480

73 872

72 272

71 640

Dépense d'ASI

(en millions d'euros)

266

257

255

253

249

242

121

(au 30 juin 2016)

Source : ministère des affaires sociales et de la santé

Toutefois, le relèvement de l'âge minimum légal de départ à la retraite tend à ralentir la baisse des effectifs, puisqu'il s'agit du seuil au-delà duquel les allocataires sortent du dispositif pour bénéficier de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA). La prévision de dépense d'ASI pour 2017 (240,8 millions d'euros) est ainsi construite sur l'hypothèse d'une légère remontée du nombre de bénéficiaires de cette prestation (+ 0,5 % par rapport à 2016).

III. LE PROGRAMME 137 « ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES » : DES MOYENS QUI AUGMENTENT APRÈS DES ANNÉES DE BAISSE

Contrastant avec les années précédentes, les moyens dédiés à la politique d'égalité entre les femmes et les hommes et à la lutte contre les violences faites aux femmes sont en hausse en 2017, de 7,9 % par rapport à l'année 2016 .

Ceci s'explique principalement par la hausse des moyens affectés à la lutte contre les violences sexistes (+ 4,2 %) et à la lutte système prostitutionnel (+ 32,6 %), compte tenu de la préparation du cinquième plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes et de l'application des mesures de la loi n° 2016-444 du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées, qui créé notamment une aide financière une allocation financière d'insertion sociale et professionnelle.

Il convient par ailleurs de souligner que les crédits de l'action 14 « Actions de soutien, d'expérimentation en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes » sont intégrés au sein de l'action 11 « Actions et expérimentations pour la culture de l'égalité et en faveur de l'égalité professionnelle, politique et sociale ».

Évolution des crédits de paiement du programme 137 entre 2016 et 2017

(en euros)

Exécutés en 2015

Ouverts en LFI pour 2016

Demandés pour 2017

Évolution 2016-2017

Action 11 - Actions et expérimentations pour la culture de l'égalité et en faveur de l'égalité professionnelle, politique et sociale

1 866 658

5 327 800

5 423 900

+ 1,8 %

Action 12 - Promotion des droits, prévention et lutte contre les violences sexistes

14 544 138

16 088 300

16 754 300

+ 4,2 %

Action 13 - Soutien du programme égalité entre les femmes et les hommes

1 403 718

1 200 500

1 019 781

- 15 %

Action 14 - Actions de soutien, d'expérimentation en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes (supprimée)

3 392 975

15 000

-

-

Action 15 - Prévention et lutte contre la prostitution et la traite des êtres humains

2 183 704

4 999 460

6 628 445

+ 32,6 %

Total programme 137

23 391 193

27 631 060

29 826 426

+ 7,9 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017

1. Le renforcement des moyens dédiés à la lutte contre les violences faites aux femmes et à la santé génésique

La politique de protection des femmes contre les violences sexistes, financée par le programme 137, s'inscrit dans le cadre du quatrième plan de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes piloté par le ministère chargée des droits des femmes. Par ailleurs, le programme 137 finance les actions menées visant à faciliter l'accès des femmes à la contraception et à l'interruption volontaire de grossesse (IVG).

Le rapport intermédiaire d'évaluation du quatrième plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes (2014-2016)

Lancé en novembre 2013, le quatrième plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes couvrant la période 2014-2016 était structuré autour de trois objectifs principaux : faire en sorte qu'aucune violence déclarée ne demeure sans réponse ; protéger efficacement les victimes ; mobiliser l'ensemble de la société.

Dans un rapport intermédiaire d'évaluation publié le 19 avril 2016 25 ( * ) , le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes met en avant les principales réussites portées par ce plan ainsi que les points de difficultés rencontrés.

Au titre des motifs de satisfaction figurent notamment : le renforcement de la plateforme téléphonique d'écoute et d'orientation « Femmes violences info », ouverte sept jours sur sept et gratuite d'un poste fixe ou d'un portable ; le développement du nombre d'accueils de jours (120 sites d'accueil dans 99 départements en 2015 contre 97 sites dans 89 départements en 2013) ; la création de 62 postes d'intervenants sociaux en commissariats et brigades de gendarmerie (ISCG) permettant de garantir un accueil adapté aux victimes, bien qu'il reste 108 postes à créer pour répondre à l'objectif de doublement de postes fixé par le plan ; la généralisation du dispositif « téléphones d'alerte grave danger » 26 ( * ) (TGD) avec 467 téléphones déployés sur l'ensemble du territoire, dans 175 tribunaux de grande instance pour un objectif de 500 TGD fin 2016.

Toutefois, le Haut Conseil constate que certaines mesures du plan n'ont pas été mises en oeuvre, souligne la disparité de la mise en oeuvre de certaines mesures selon les territoires, et appelle à la vigilance sur cinq points principaux : le caractère encore partiel des données disponibles pour le suivi et l'évaluation ; le manque de lisibilité des financements alloués ; la nature des places d'hébergement d'urgence et l'articulation avec l'accès au logement social ; l'hétérogénéité de l'implication des ministères concernés et du pilotage à l'échelon local ; l'insuffisante communication sur les obligations et outils nouveaux en matière de formation et d'information.

Les moyens accordés à cette politique connaissent une hausse sensible par rapport à la loi de finances pour 2016, puisqu'ils progressent de plus de 4 % pour s'établir à 16,7 millions d'euros .

Le programme 157 intervient principalement par des subventions versées à des associations assurant des missions de service public ou d'intérêt collectif, qui interviennent tant en matière de lutte contre les violences sexistes que de soutien à la santé génésique et l'accès des femmes à la contraception. Les associations subventionnées bénéficient d'une convention pluriannuelle d'objectifs (CPO) qui permettent d'inscrire leurs actions dans le cadre des priorités ministérielles. Parmi les dix associations bénéficiant de subventions les plus importantes, sept ont vu leurs CPO renouvelées pour la période 2016-2018, deux voient leur CPO arriver à échéance fin 2016 et une association voit sa CPO continuer à produire ses effets jusqu'en 2017.

Le présent projet de budget est notamment marqué par une stabilité des subventions versées aux associations, sauf s'agissant du financement du Mouvement français pour le planning familial qui est renforcé afin de contribuer à la poursuite du déploiement du numéro vert « Sexualité, contraception, IVG », et des associations oeuvrant dans le cadre de la lutte contre la prostitution (ALC, Mouvement du Nid et Amicale du Nid) afin de renforcer les mesures d'accompagnement des personnes prostituées prévues par la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

Le tableau suivant récapitule les montants versés aux dix principales associations subventionnées par le programme ainsi que l'objet des CPO qu'elles ont conclus.

Répartition des dix plus importantes subventions aux associations
par le programme 137

(en euros)

Association

Subvention 2015

Subvention 2016

Subvention 2017

Objet du financement

Fédération nationale solidarité femmes (FNSF)

1 445 000

1 445 000

1 445 000

Premier accueil et écoute des femmes victimes de violences (gestion du numéro national de référence 39.19)

Centre national d'information sur les droits des femmes et des familles (CNIDFF)

1 320 00

1 280 000

1 280 000

Accès aux droits et lutte contre les violences faites aux femmes

Collectif féministe contre le viol (CFCV)

312 500

312 500

312 500

Soutien aux femmes victimes de viols et d'agressions sexuelles (permanence téléphonique d'écoute, sensibilisation du grand public, etc.)

Mouvement français pour le planning familial (MFPF)

213 000

213 000

272 000

Accès aux droits sexuels et à la liberté des femmes à disposer de leurs corps

Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT)

235 000

235 000

235 000

Soutien aux femmes victimes de discriminations ou violences sexistes et sexuelles au travail

Accompagnement lieu d'accueil (ALC)

170 000

170 000

220 000

Accueil et protection des victimes de la traite des êtres humains, du proxénétisme et de la prostitution

Mouvement du nid

80 000

80 000

150 000

Prévention et lutte contre la prostitution (responsabilisation des clients, accueil et accompagnement des personnes prostituées, actions de prévention auprès des jeunes)

Amicale du nid

35 000

35 000

80 000

Action de prévention de la prostitution, accompagnement des personnes prostituées, amélioration de la connaissance du phénomène prostitutionnel

Comité contre l'esclavage moderne (CCEM)

60 000

60 000

60 000

Aide aux personnes victimes de servitude d'esclavage domestique (accompagnement juridique, socio-éducatif et psychologique des victimes)

Centre Hubertine Auclert

50 000

50 000

58 284

Promotion de l'éducation à l'égalité dans le champ éducatif, prévention des violences faites aux femmes à travers l'Observatoire régional des violences faites aux femmes

Source : ministère des affaires sociales et de la santé

Le cinquième plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes , en cours d'élaboration, devrait poursuivre et approfondir la mise en oeuvre des actions menées dans le cadre du quatrième plan, en particulier :

- les dispositifs d'accueil de jour des femmes victimes de violence ;

- les lieux d'écoute, d'accueil et d'orientation des femmes victimes de violence ou leurs antennes, assurant un accompagnement dans la durée de ces femmes ;

- le numéro national de référence d'accueil téléphonique et d'orientation des femmes victimes de violences, le 31.19 « Violences femmes info », géré par la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF) ;

- le dispositif de téléprotection d'alerte grave danger (TGD).

2. L'intensification de la lutte contre le système prostitutionnel et la traite des êtres humains

Les crédits alloués à l'action 15 « Prévention et lutte contre la prostitution et la traite des êtres humains » sont en forte hausse par rapport à l'année précédente et s'élèvent à 6,6 millions d'euros (+ 32,6 % d'augmentation par rapport à 2016).

Cette hausse permet de financer deux principaux types d'interventions.

D'une part, elle soutient la mise en place progressive du parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle, prévue par la loi n° 2016-444 du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées. Ce parcours, proposé aux personnes victimes de la prostitution et de la traite des êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle, leur permet notamment de bénéficier d'une aide financière à la réinsertion ainsi que d'un accompagnement social afin d'accéder à des alternatives à la prostitution.

Ce dispositif est alimenté par un fonds pour la prévention de la prostitution et l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées , qui bénéficie de trois types de financements :

- des crédits versés par l'État , portés par le présent programme 137 ;

- des recettes provenant de la confiscation des biens et produits des personnes et réseaux coupables de traite des êtres humains et de proxénétisme, réalisée par l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) ;

- d'un montant, déterminé annuellement par arrêté interministériel, prélevé sur le produit des amendes acquittées par les personnes ayant eu recours à la prostitution .

Ainsi, 6,1 million d'euros seront destinés au financement de ce dispositif de soutien à la sortie de la prostitution en 2017 (dont 3,8 millions d'euros consacrés au financement de l'allocation financière d'insertion sociale et professionnelle).

D'autre part, ces crédits permettront de subventionner les associations têtes de réseau en matière de lutte contre la prostitution et la traite des êtres humains, pour un montant de 0,52 million d'euros (contre 0,41 million d'euros en 2016), en particulier les associations « Amicale du nid », « Accompagnement lieu d'accueil » et « Mouvement du Nid » (cf. supra ).

IV. LE PROGRAMME 124 « CONDUITE ET SOUTIEN DES POLITIQUES SANITAIRES, SOCIALES, DU SPORT, DE LA JEUNESSE ET DE LA VIE ASSOCIATIVE » : DES CRÉDITS EN HAUSSE DU FAIT DE L'AUGMENTATION DE LA MASSE SALARIALE

Le programme 124 porte l'ensemble des crédits de soutien des politiques des ministères sociaux, c'est-à-dire les dépenses de personnel et de fonctionnement liées aux directions centrales et régionales de la cohésion sociale, de la jeunesse et des sports, ainsi que la contribution de l'État au fonctionnement des agences régionales de santé (ARS).

À la suite de la réorganisation des ministères sociaux intervenue en 2013, les fonctions support des ministères des affaires sociales et de la santé et du travail et de l'emploi ont été mutualisées, à travers la création du Secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales (SGMAS).

L'année 2017 est marquée par une augmentation de la masse salariale , principalement liée à la revalorisation du point d'indice de la fonction publique ainsi qu'à des mesures catégorielles, partiellement compensée par la poursuite de la réduction des effectifs, par des économies de fonctionnement, ainsi que par une mesure de transfert de crédits à hauteur de 4,7 millions d'euros.

Les agences régionales de santé (ARS), principaux opérateurs du programme, voient également leur dotation progresser sous l'effet de l'augmentation de leur masse salariale. Mais elles continuent d'être fortement sollicitées au titre de la réduction des dépenses publiques, puisque leurs effectifs baisseront de 100 ETPT supplémentaires en 2017 .

Évolution des crédits de paiement du programme 124 entre 2016 et 2017

(en euros)

Exécutés en 2015

Ouverts en LFI pour 2016

Demandés pour 2017

Évolution 2016-2017

Action 10 - Fonctionnement des services

21 217 861

18 786 242

13 004 375

- 30,8 %

Action 11 - Systèmes d'information

52 641 070

27 895 000

31 095 000

+ 11,5 %

Action 12 - Affaires immobilières

81 323 907

73 246 553

72 317 389

- 1,3 %

Action 14 - Communication

5 047 308

5 751 644

5 454 562

- 5,2 %

Action 15 - Affaires européennes et internationales

6 837 932

5 953 048

6 129 048

+ 2,9 %

Action 16 - Statistiques, études et recherche

9 930 881

9 960 176

9 955 176

- 0,05 %

Action 17 - Financement des agences régionales de santé

569 964 870

598 427 957

604 267 500

+ 0,9 %

Action 18 - Personnels mettant en oeuvre les politiques sociales et de la santé

255 626 369

235 713 346

269 880 045

+ 14,5 %

Action 19 - Personnels mettant en oeuvre les politiques du sport, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative

292 705 146

322 080 706

296 091 602

- 8,1 %

Action 20 - Personnels mettant en oeuvre les politiques pour les droits des femmes

12 277 151

14 286 386

12 776 465

- 10,6 %

Action 21 - Personnel mettant en oeuvre les politiques de la ville, du logement et de l'hébergement

40 434 487

43 427 700

40 772 876

- 6,1 %

Action 22 - Personnels transversaux et de soutien

123 995 109

115 298 027

121 533 998

+ 5,4 %

Action 23 - Politique de ressources humaines (libellé modifié)

19 573 658

26 806 581

26 503 658

- 1,1 %

Total programme 124

1 493 223 641

1 497 633 366

1 509 781 694

+ 0,8 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017

1. Une hausse sensible de la masse salariale, malgré la poursuite de la réduction des effectifs des ministères sociaux

Le schéma d'emploi des ministères sociaux prévoit une réduction de - 138 ETPT en 2017 , dont - 85 ETPT sont liés à l'impact en année pleine du schéma d'emplois 2016 sur 2017 et - 53 ETPT à l'impact du schéma d'emploi 2017 sur 2017.

Toutefois, cette réduction des effectifs est compensée par un solde des transferts d'emplois sortants et entrants positif de + 3 ETPT, ainsi que par deux mesures de périmètre aboutissant à une augmentation de + 118 ETPT : + 100 EPTP dans le cadre de la réforme des juridictions sociales prévue par le projet de loi de modernisation de la justice au XXI e siècle, qui permettront de recruter des agents rémunérés par des crédits de titre 2 du programme 124 contre remboursement par la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) ; + 18 ETPT au titre de la prise en charge par le programme 124 d'agents contractuels affectés à la direction générale de l'offre de soins (DGOS) qui relevaient avant de la fonction publique hospitalière.

En conséquence, le plafond d'emploi de la mission « Solidarité » pour 2017 ne baisse que de 4 ETPT par rapport à la loi de finances pour 2016, et est fixé à 10 225 ETPT.

Bien qu'il s'agisse d'une mesure imparfaite de l'évolution de l'emploi dans les ministères sociaux (compte tenu des mesures de périmètre pouvant intervenir), l'évolution du plafond d'emploi entre 2012 et 2017 témoigne d'une réduction significative des effectifs, de plus de 1 000 ETPT. En neutralisant les principaux effets de transfert et de périmètre, le quinquennat a été marqué par une baisse des effectifs d'environ 530 ETPT dans les ministères sociaux, soit 4,7 % des effectifs .

Les dépenses de personnel (titre 2) connaissent une progression de 10,2 millions d'euros entre 2016 et 2017 (hors mesures de transfert et de périmètre, cette hausse est de 9,3 millions d'euros) qui s'explique notamment par :

- une diminution de 4,5 millions d'euros des crédits hors CAS « Pensions » au titre des économies procurées par le schéma d'emplois ;

- une augmentation des crédits de 3,2 millions d'euros liée à la mise en oeuvre du protocole relatif aux parcours professionnels, aux carrières et aux rémunérations (PPCR) ;

- une augmentation des crédits de 3,4 millions d'euros au titre de la revalorisation de la valeur du point fonction publique (0,6 % au 1 er juillet 2016 et 0,6 % au 1 er février 2017) ;

- une augmentation des crédits de 4 millions d'euros afin de financer le complément indemnitaire annuel (CIA) dans le cadre de la mise en oeuvre du nouveau régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) ;

- une mesure de périmètre, à hauteur de 1,3 million d'euros au titre du recrutement de 18 agents contractuels affectés à la DGOS.

Évolution du plafond d'emploi de la mission « Solidarité » depuis 2012

(en ETPT)

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

LFI 2015

LFI 2016

PLF 2017

Plafond d'emplois

11 283

11 157

10 558

10 305

10 229

10 225

Suppression d'effectifs

-126

-599 (1)

-253

-99

-4

Évolution annuelle

-1,1 %

-5,7 %

-2,5 %

- 0,96 %

- 0,04 %

(1) Dont 389 ETPT liés à un transfert sortant (délégués des préfets et secrétariat général du comité interministériel à la ville).

Source : commission des finances, d'après les réponses du ministère au questionnaire budgétaire

2. Des dépenses « support » du ministère qui ne baissent qu'en apparence

Les dépenses support des ministères sociaux sont en baisse de 2,5 % par rapport à 2016 avec des variations différentes selon les principaux postes de dépense. Toutefois, cette baisse s'explique principalement par un transfert de crédits ; à périmètre constant, ces dépenses sont en très légère augmentation de un million d'euros.

Les moyens alloués au fonctionnement courant de services de l'administration centrale et déconcentrée connaissent une baisse significative (passant de 18,7 à 13 millions d'euros entre la loi de finances initiale pour 2016 et le présent projet de loi de finances pour 2017), sous l'effet de deux facteurs :

- une maîtrise des dépenses , qui conduit à une réduction de - 5,7 % des crédits, du fait du recours aux marchés interministériels et des renégociations de contrats qui sont intervenues ;

- un transfert de crédits de fonctionnement des directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociales au programme 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrés », pour un montant de 4,68 millions d'euros.

En revanche, les moyens alloués à l'action 11 « Systèmes d'information » croissent fortement, de 11 %, afin de financer les projets informatiques développés par le ministère, en particulier la refonte de l'application de gestion des tribunaux des affaires de sécurité sociale avant leur transfert au ministère de la justice et le financement des opérations de renouvellement des serveurs et des logiciels des services de messagerie et de travail collaboratif.

S'agissant des dépenses d'immobilier , elles connaissent un léger recul en 2017 pour s'établir à 72,2 millions d'euros. Après le regroupement de plusieurs directions dans l'immeuble Sud-Pont et l'abandon de deux sites locatifs privés en 2014 27 ( * ) , pour une économie annuelle de 11 millions d'euros, et la libération de quatre sites secondaires 28 ( * ) en 2015, entraînant des économies de loyers de 1,25 million d'euros, la situation immobilière de l'administration centrale est stabilisée.

Au total, la surface globale occupée par l'administration des ministères sociaux atteint 106 143 m2 de surface utile brute (SUB)

Surfaces occupées par l'administration centrale
des ministères sociaux en 2015

Parc Domanial

Parc Locatif

Duquesne

Hôtel du Châtelet

Nantes

Sud-Pont

Mirabeau

Avenue de France

Total

SUB en m²

(Surface utile brute)

45 561

3 917

407

24 806

19 052

12 400

106 143

SUN en m²

(surface utile nette)

27 281

2 015

363

15 278

12 729

7 183

64 849

Ratio d'occupation

12,3

Loyers

26 149 323

2 119 814

53 492

12 632 972

11 614 570

6 822 745

59 392 916

Charges locatives

1 845 127

2 698 533

1 036 150

5 579 810

Source : ministère des affaires sociales et de la santé

3. Une légère augmentation des dotations des ARS qui masque la poursuite d'importantes mesures d'économies

Les agences régionales de santé (ARS), qui assurent le pilotage de la politique de santé publique et la régulation de l'offre de santé en région, perçoivent deux types de financement :

- des dotations de fonctionnement versées par l'État , portées par le présent programme, ainsi que des contributions de régimes obligatoires d'assurance-maladie déterminées par arrêté des ministres chargés de la santé et de l'agriculture ;

- des crédits d'intervention , dont une subvention de l'État au titre des centres régionaux pour l'enfance et l'adolescence, des contributions de la CNSA pour ses interventions concernant la prise en charge des personnes handicapées ou âgées, des dotations du fonds d'intervention régional (FIR) ainsi que des versements de collectivités territoriales.

Depuis le 1 er janvier 2016, le nombre d'ARS passé de 26 à 17 à la suite de la nouvelle organisation territoriale et à la fusion de certaines régions.

En 2017, il est prévu que l'État verse une subvention pour charges de service public aux ARS d'un montant de 604 millions d'euros, en légère hausse par rapport à 2016 (+ 0,9 %). Cette hausse résulte principalement de l'augmentation de la masse salariale, consécutive :

- au glissement vieillesse-technicité (GVT) pour un montant de 4,5 millions d'euros ;

- à la hausse du point de la fonction publique, pour 2,9 millions d'euros ;

- à la mise en oeuvre du protocole relatif aux parcours professionnels, aux carrières et aux rémunérations (PPCR), pour un coût estimé à 3,7 millions d'euros.

Des mesures d'économies, portant tant sur les dépenses de personnel (titre 2) que les dépenses de fonctionnement permettent toutefois de compenser cette hausse. L'année 2017 sera ainsi marquée par la poursuite de la réduction des effectifs dans les ARS . 100 ETPT supplémentaires seront supprimés, portant le nombre d'emplois sous plafonds à 8 596.

Par ailleurs, les dépenses de fonctionnement courant, hors dépenses immobilières sont prévues pour diminuer de 2,2 millions d'euros, en raison notamment de la rationalisation de la politique d'achats à travers une démarche de mutualisation pilotée par le ministère, et une optimisation de la gestion du parc automobile des ARS.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 63 - Suppression du Fonds national des solidarités actives (FNSA)

Commentaire : le présent article prévoit de supprimer le Fonds national des solidarités actives (FNSA) et de faire prendre en charge par l'État les dépenses qu'il finançait.

I. LE DROIT EXISTANT

Le Fonds national des solidarités actives (FNSA) a été mis en place par le décret n° 2009-30 du 9 janvier 2009 , à la suite de la création du revenu de solidarité active (RSA) par la loi n°2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

Ce fonds, non doté de la personnalité morale et dont la gestion bancaire est confiée à la Caisse des dépôts et consignations, est actuellement financé assuré par :

- une subvention d'équilibre de l'État , qui représente sa principale ressource, à hauteur de 68 % (426 millions d'euros en 2016) ;

- une fraction du produit de la contribution exceptionnelle de solidarité des fonctionnaires 29 ( * ) , à hauteur de 15,2 % (200 millions d'euros en 2016)

Jusqu'en 2016, le FNSA finançait à titre principal, la part « activité » du RSA , ainsi que le « RSA jeunes » 30 ( * ) , les frais de gestion liés au RSA « activité », la RSA versé à Mayotte, et la prime de Noël versé aux bénéficiaires de certaines prestations sociales 31 ( * ) .

À la suite de la création de la prime d'activité au 1 er janvier 2016, prévue par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, qui est venue remplacer la part « activité » du RSA ainsi que la prime pour l'emploi (PPE) et dont le financement est directement assuré par le programme 304 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du budget de l'État, le FNSA ne finance désormais plus que le « RSA jeunes », les primes de Noël ainsi que les frais de gestion de la prime d'activité 32 ( * ) .

La création de la prime d'activité a conduit à une forte réduction des dépenses prises en charge par le Fonds entre 2015 et 2016, qui sont passées de 2,5 milliards d'euros à 666 millions d'euros.

Dépenses et recettes du FNSA en 2015 et 2016

(en millions d'euros)

2015 (LFI)

2016 (LFI)

Évolution 2015-2016

Dépenses

2 530,9

666

- 73,7 %

RSA « activité » France métropolitaine

1 951,4

-

-

RSA Mayotte

1

-

-

RSA « jeunes actifs »

26

14

- 46,2 %

Prime de Noël

513

552

7,6 %

Frais de gestion

39,5

60

51,9 %

Ressources

2 530,90

666

- 73,7 %

Subvention d'équilibre

2 330,90

426

- 81,7 %

Fraction de la contribution exceptionnelle de solidarité

200

200

0 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à supprimer le FNSA et à faire prendre en charge directement par le budget de l'État les dépenses qu'il finance puisque, de par la transformation notamment du RSA « activité » en prime d'activité, il a perdu sa source principale de dépenses .

Sa suppression doit permettre d'apporter une meilleure visibilité à la gestion des crédits de la prime d'activité, puisque la dépense associée au versement de l'aide et à ses frais de gestions seront intégrées dans un support budgétaire unique.

Le Gouvernement considère ainsi que, « compte tenu de la création en 2016 de la prime d'activité et de son financement sur le budget de l'État ainsi que de la suppression du volet activité du RSA, le maintien d'un fonds extrabudgétaire, dérogatoire au principe d'universalité budgétaire, apparait peu opportun dans la mesure où la contribution de l'État constitue la principale ressource du FNSA 33 ( * ) ».

La suppression du FNSA conduit à majorer les crédits du programme 304 du montant des dépenses prises en charge par le Fonds couvertes par la fraction du produit de la contribution exceptionnelles de solidarité, soit environ 205 millions d'euros.

Par ailleurs, la suppression du FSNA conduit à réaffecter 15,2 % du produit de cette contribution au Fonds de solidarité 34 ( * ) , établissement public chargé du financement de l'allocation spécifique de solidarité (ASS). Afin d'assurer l'équilibre budgétaire de la mesure, il est donc prévu que la subvention d'équilibre versée par l'État au Fonds de solidarité soit diminuée à due concurrence.

III. LES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Votre rapporteur spécial prend acte de la proposition de supprimer la Fonds national des solidarités actives (FNSA), qui va dans le sens de ce qu'il préconisait .

Dans son rapport budgétaire relatif à l'examen des crédits de la mission « Solidarité » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, votre rapporteur spécial s'interrogeait en effet sur le devenir du FNSA et estimait que « les dépenses du FNSA devraient être entièrement budgétisées » 35 ( * ) .

Du fait de la création de la prime d'activité, le maintien du FNSA ne semblait plus justifié et sa suppression permet de rendre plus cohérente la présentation des crédits budgétaires du programme 304 .

ARTICLE 63 bis (nouveau) - Décret relatif à la définition des conditions de calcul du plafond de 10 % de reste à charge pour les bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap

Commentaire : le présent article complète le contenu du décret définissant les conditions de calcul du plafond de 10 % de reste à charge pour les bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap, en prévoyant qu'il détermine également les modalités de prise en compte de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) dans les ressources personnelles du bénéficiaire.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA PRESTATION DE COMPENSATION DU HANDICAP

La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées 36 ( * ) crée un « droit à compensation du handicap ». Cette compensation prend la forme d'une prestation de compensation du handicap (PCH).

Il s'agit d'une prestation attribuée à toute personne handicapée, remplissant des critères d'âge, de résidence et de handicap définis par décret, prenant notamment en compte la nature et l'importance des besoins de compensation au regard de son projet de vie.

La demande de PCH fait l'objet d'une évaluation des besoins par une équipe pluridisciplinaire qui élabore ensuite un plan personnalisé de compensation (PPC). Le droit à la PCH est accordé par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), siégeant au sein des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Cette prestation en nature peut être versée, selon le choix du bénéficiaire, en nature ou en espèces 37 ( * ) .

Elle peut être affectée à plusieurs types de charges, liées à un besoin d'aides humaines (y compris celles apportées par les aidants familiaux), d'aides techniques, à l'aménagement du logement et du véhicule de la personne handicapée, à l'acquisition ou l'entretien de produits liés au handicap, ou encore à l'attribution et à l'entretien d'aides animalières 38 ( * ) .

Aux termes de l'article L. 245-6 du code de l'action sociale et des familles, chaque élément de la prestation fait l'objet de tarifs ou de montants maximums, dans la limite de taux de prise en charge pouvant varier selon les ressources du bénéficiaire. Ces montants, tarifs maximums et taux de prise en charge sont fixés par arrêté du ministre chargé des personnes handicapées.

La prestation est financée par les départements, qui perçoivent également depuis 2006 des concours versés par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

B. LE DÉCRET RELATIF AUX MODALITÉS DE CALCUL DU RESTE À CHARGE DES FRAIS DE COMPENSATION

Les fonds départementaux de compensation du handicap , gérés par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), sont chargés d'accorder des aides financières afin de permettre aux personnes handicapées de faire face aux frais de compensation restant à leur charge , après déduction de la prestation de compensation du handicap (PCH) 39 ( * ) .

Les contributeurs aux fonds départementaux sont membres du comité de gestion. Ce comité détermine l'emploi des sommes versées par le fonds. Les MDPH rendent compte aux différents contributeurs de l'usage des moyens des fonds départementaux de compensation.

Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 146-5 du code de l'action sociale et des familles 40 ( * ) , les frais de compensation du handicap restant à la charge du bénéficiaire de la prestation de compensation du handicap (PCH) ne peuvent excéder 10 % de ses ressources personnelles nettes d'impôts, dans des conditions définies par décret, et dans la limite des montants et tarifs fixés par nature de dépense.

Un décret doit ainsi définir les modalités de calcul du reste à charge. Ce décret d'application n'a pas été pris depuis la création de cette disposition par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Or, par une décision en date du 24 février 2016 41 ( * ) , le Conseil d'État a enjoint au Premier ministre de prendre ce décret d'application dans un délai de neuf mois à compter de la notification de sa décision , soit avant la fin du mois de novembre 2016.

Une astreinte de 100 euros par jour sera également prononcée à l'encontre de l'État s'il n'est pas justifié de l'exécution de la décision du Conseil d'État dans le délai précité.

C. L'ALLOCATION AUX ADULTES HANDICAPÉS

L'allocation aux adultes handicapés (AAH) est un minimum social versé, sous conditions de ressources, aux personnes handicapées . Elle est subsidiaire par rapport à d'autres prestations, comme les pensions d'invalidité, les rentes d'accident du travail ou les avantages vieillesse.

Elle peut se cumuler avec des ressources personnelles, dans la limite d'un plafond annuel, fixé à 9 701,52 euros pour une personne seule sans enfant au 1 er avril 2016 42 ( * ) .

Afin de bénéficier de l'AAH, la personne handicapée doit être atteinte :

- soit d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 % (« AAH 1 ») ;

- soit d'un taux d'incapacité compris entre 50 % et 80 %, et présenter une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi (« AAH 2 ») ne pouvant être compensée par des mesures d'aménagement du poste du travail 43 ( * ) .

Le droit à l'AAH est accordé par les commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) siégeant au sein des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

L'AAH est budgétée sur le programme 157 « Handicap et dépendance » de la présente mission. La dépense d'AAH atteint 9 milliards d'euros en 2017.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article résulte d'un amendement de nos collègues députés Gaby Charroux, rapport spécial au nom de la commission des finances, et Valérie Rabault, rapporteure générale du budget, adopté avec un avis favorable de la commission des finances et un avis de sagesse du Gouvernement.

Il complète le contenu du décret d'application précité, en prévoyant qu'il détermine également les modalités de prise en compte de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) dans les ressources personnelles du bénéficiaire .

III. LES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées prévoit que les frais de compensation du handicap restant à la charge du bénéficiaire de la prestation de compensation du handicap (PCH) ne peuvent excéder 10 % de ses ressources personnelles nettes d'impôts, dans des conditions définies par décret , et dans la limite des montants et tarifs fixés par nature de dépense. À ce jour, le décret d'application n'a pas été pris .

Il est désolant de constater que dix ans après la promulgation de la loi, des mesures d'application soient toujours attendues par nos concitoyens.

Votre rapporteur spécial déplore que cette carence de l'État ait conduit certains départements et maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) à ne pas appliquer la disposition relative au plafond des ressources personnelles que les frais de compensation du handicap restant à charge ne sont pas censées dépasser.

Cette situation entraîne une iniquité de traitement des personnes handicapées sur le territoire national : en effet, les comités de gestion des fonds départementaux de compensation du handicap ne font pas un usage homogène des crédits dont les fonds disposent 44 ( * ) .

Comme le mentionne l'arrêt du Conseil d'État, ce décret n'était, certes, pas indispensable pour que soient mis en place les fonds départementaux de compensation du handicap et pour que les personnes morales le souhaitant puissent y participer. Néanmoins, « son intervention demeure nécessaire pour fixer les modalités de calcul du montant des frais de compensation restant à la charge du bénéficiaire de la prestation de compensation du handicap et les conditions dans lesquelles les fonds interviennent pour que ce montant demeure dans la limite de 10 % de ses ressources personnelles nettes d'impôts fixée par le législateur » 45 ( * ) .

Il a ainsi fallu qu'une double mesure d'injonction et d'astreinte soit prononcée par le Conseil d'État pour que la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion s'engage à publier le décret d'application « dans les semaines qui viennent » 46 ( * ) . Néanmoins, il est permis de douter du caractère incitatif que revêt une astreinte de 100 euros par jour pour l'État. Cet arrêt aura toutefois contribué à l'accélération de la constitution d'un groupe de travail consacré à la prestation de compensation du handicap (PCH). La secrétaire d'État a en effet mentionné en séance publique avoir sollicité l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) en mars dernier à cet effet. La rédaction du décret débuterait ainsi après la remise des conclusions du groupe du travail.

Le présent article prévoit que les modalités de prise en compte de l'AAH devront être précisées par le décret, mais son objet principal reste, comme le rappelle l'exposé des motifs de l'article, « de rappeler au Gouvernement son obligation de prendre le décret d'application ». Votre rapporteur spécial souscrit à cette louable intention.

ARTICLE 63 ter (nouveau) - Financement des dispositifs d'information et de soutien des tuteurs familiaux

Commentaire : le présent article prévoit que l'État peut autoriser, à titre expérimental, les collectivités territoriales et la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) à financer les dispositifs d'information et de soutien des tuteurs familiaux.

I. LE DROIT EXISTANT

La loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs prévoit que les personnes majeures qui ne sont pas en mesure de pourvoir à leurs intérêts en raison d'une altération de leurs facultés mentales ou corporelles peuvent bénéficier de mesures de protections, prononcées par le juge de tutelle.

Ces mesures de protection peuvent être confiées soit à un membre de leur famille (tuteurs familiaux), soit à un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM) , c'est-à-dire à un service mandataire, à un mandataire individuel ou à un préposé d'établissement. Actuellement, plus de la moitié des mesures de protection juridique des majeurs sont exercées par un professionnel.

L'article 24 de la loi du 5 mars 2007 prévoit que les personnes qui exercent des mesures de protection puissent bénéficier, à leur demande, d'une information. Le décret n° 2008-1507 du 30 décembre 2008 47 ( * ) précise que les personnes appelées à exercer une mesure de protection juridique doivent s'adresser aux greffes des tribunaux d'instance ou de grande instance. Ceux-ci leur remettent la liste des personnes et des structures qui délivrent cette information, qui est établie par le procureur de la République après avis des juges de tutelles de son ressort.

Il est prévu qu'un soutien technique puisse être apporté à ces personnes par les structures inscrites sur cette liste , qui consiste en une information personnalisée et une aide technique dans la formalisation des actes de saisine de l'autorité judiciaire et dans la mise en oeuvre des diligences nécessaires à la protection des intérêts de la personne protégée.

En pratique, cette information est assurée par des structures associatives , comme les unions départementales des associations familiales.

Afin d'encourager l'exercice des mesures de protection par des membres de la famille, lorsque cela est possible, plutôt que par les mandataires judiciaires, le présent projet de loi de finances a prévu d'allouer 3 millions d'euros au développement des dispositifs d'information et de soutien aux tuteurs familiaux 48 ( * ) . D'après le projet annuel de performances annexé au présent projet de loi de finances, « un groupe de travail associant les différents partenaires, prenant appui sur un état des lieux des pratiques existantes, permettra de proposer des outils adaptés aux besoins des familles (guides d'information, accueil-conseil...) ».

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été adopté à l'initiative de notre collègue députée Valérie Rabault, avec un avis favorable de la commission des finances et un avis défavorable du Gouvernement.

Il prévoit que l'État peut autoriser les collectivités territoriales et leurs établissements ainsi que la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), à titre expérimental et pour une durée de trois ans, à financer des dispositifs d'information et de soutien des tuteurs familiaux .

III. LES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

D'après notre collègue Valérie Rabault, le présent article vise à pérenniser le financement des dispositifs de soutien des tuteurs familiaux prévus par la loi de 2007 après l'engagement financier inscrit dans le projet de loi de finances pour l'année 2017.

Au-delà du caractère insatisfaisant de la formule de l'expérimentation retenue, il paraît étrange de confier le financement des mesures d'information à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), qui n'intervient pas dans le financement des dispositifs de protection juridique des majeurs . En effet, outre les départements, c'est l'État qui finance ces mesures à titre principal depuis la réforme du financement de la protection juridique des majeurs intervenue à l'occasion du projet de loi de finances pour 2016 49 ( * ) .

Par ailleurs, le présent article n'alloue aucun financement supplémentaire à la CNSA ou aux départements pour mener à bien cette mission , mais se contente de prévoir que l'État peut les autoriser à financer des dispositifs d'information des tuteurs familiaux. Or, comme l'a indiqué la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées Ségolène Neuville en séance : « Pour le soutien aux tuteurs familiaux, les départements ont déjà la possibilité d'intervenir. La loi ne le leur interdit pas et une grande majorité d'entre eux le font ».

ARTICLE 63 quater (nouveau) - Rapport sur la prise en charge par la prestation de compensation du handicap des charges induites par la vie et les soins à domicile

Commentaire : le présent article prévoit que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les charges induites par la vie et les soins à domicile des personnes handicapées actuellement non couvertes par la prestation de compensation du handicap (PCH).

I. LE DROIT EXISTANT

La prestation de compensation du handicap (PCH) est attribuée à toute personne handicapée, remplissant des critères d'âge, de résidence et de handicap définis par décret, prenant notamment en compte la nature et l'importance des besoins de compensation au regard de son projet de vie.

Cette prestation peut être affectée à plusieurs types de charges, liées à un besoin d'aides humaines (y compris celles apportées par les aidants familiaux), d'aides techniques, à l'aménagement du logement et du véhicule de la personne handicapée, à l'acquisition ou l'entretien de produits liés au handicap, ou encore à l'attribution et à l'entretien d'aides animalières 50 ( * ) .

Aux termes de l'article L. 245-6 du code de l'action sociale et des familles, chaque élément de la prestation fait l'objet de tarifs ou de montants maximums, dans la limite de taux de prise en charge pouvant varier selon les ressources du bénéficiaire . Ces montants, tarifs maximums et taux de prise en charge sont fixés par arrêté du ministre chargé des personnes handicapées 51 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article résulte d'un amendement de nos collègues députées Kheira Bouziane-Laroussi, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires sociales et Annie Le Houerou, avec un avis de sagesse du Gouvernement. Le rapporteur spécial de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », Gaby Charroux, y a donné un avis favorable à titre personnel en séance publique.

Cet amendement prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1 er avril 2017, un rapport sur « la prise en charge par la prestation de compensation du handicap des charges induites par la vie et les soins à domicile actuellement non couvertes par la solidarité nationale » .

III. LES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Certaines dépenses, liées à un besoin en aides humaines, restent à la charge de la personne handicapée. Il s'agit du cas particulier où la personne handicapée est elle-même employeur de personnes lui apportant une aide à domicile, ce qui implique des coûts supplémentaires non pris en charge actuellement par la prestation de compensation du handicap , tels les congés, les arrêts de travail, les primes de fin de contrat, les indemnités de licenciement ou encore la prime de précarité de la personne employée par le particulier employeur. Toutefois, ces surcoûts ne sont pas à la charge de la personne handicapée lorsqu'elle a recours à une association employant des aides à domicile, et se limitent au cas du particulier employeur 52 ( * ) .

En conséquence, il peut être utile que la question d'une prise en charge de certaines dépenses liées aux aides humaines actuellement non couvertes par la prestation de compensation du handicap puisse être expertisée, et qu'un chiffrage des coûts qu'elle entraînerait pour les départements puisse être effectué, comme le demande le présent article.

ARTICLE 63 quinquies (nouveau) - Rapport sur les conséquences du rehaussement du plafond des conditions de ressources pour bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés

Commentaire : le présent article prévoit que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les conséquences du rehaussement du plafond des conditions de ressources pour bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés

I. LE DROIT EXISTANT

L'allocation aux adultes handicapés (AAH) est un minimum social versé, sous conditions de ressources, aux personnes handicapées . Elle est subsidiaire par rapport à d'autres prestations, comme les pensions d'invalidité, les rentes d'accident du travail ou les avantages vieillesse, et différentielle.

Afin de bénéficier de l'AAH, la personne handicapée doit être atteinte :

- soit d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 % (« AAH 1 ») ;

- soit d'un taux d'incapacité compris entre 50 % et 80 %, et présenter une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi (« AAH 2 ») ne pouvant être compensée par des mesures d'aménagement du poste du travail.

Le droit à l'AAH est accordé par les commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) siégeant au sein des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH)

L'AAH peut se cumuler avec des ressources personnelles, dans la limite d'un plafond annuel, fixé à 9 701,52 euros pour une personne seule sans enfant au 1 er avril 2016 . Ce plafond est doublé pour un couple et majoré de 50 % par enfant à charge.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article résulte de deux amendements identiques de nos collègues députés Kheira Bouziane-Laroussi, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires sociales et Gilles Lurton, avec l'avis défavorable du Gouvernement.

Il prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de quatre mois à compter de la publication de la loi de finances pour 2017, un rapport sur « les conséquences du rehaussement du plafond des conditions de ressources pour bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés pour le budget de l'État, pour le niveau de vie ainsi que sur le critère de la dépendance des personnes en couple éligibles à cette allocation » .

III. LES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

L'allocation aux adultes handicapés (AAH) est une allocation « familialisée » , qui est versée sous conditions de ressources et prend en compte les ressources du foyer fiscal auquel appartient le bénéficiaire.

Les personnes handicapées qui ne disposent pas de revenus d'activités mais dont le partenaire perçoit un revenu annuel supérieur à 19 403,04 euros, ne perçoivent pas d'AAH. Ceci entraîne une situation de dépendance financière et matérielle de ces personnes à l'égard de leurs partenaires .

En conséquence, il peut être utile que la question d'un rehaussement du plafond de conditions de ressources puisse être expertisée, comme le demande le présent article.

ARTICLE 63 sexies (nouveau) - Rapport sur les effets économiques de la réforme des aides au logement pour les personnes en situation de handicap

Commentaire : le présent article prévoit que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les effets de l'inclusion de la valeur en capital du patrimoine dont disposent le demandeur et les autres membres de son foyer dans le calcul des aides au logement pour les personnes handicapées.

I. LE DROIT EXISTANT

Aux termes de l'article L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation pour les aides personnalisées au logement (APL), de l'article L. 542-2 du code de la sécurité sociale pour l'allocation de logement familiale (ALF) et L. 831-4 du code de la sécurité sociale pour l'allocation de logement social (ALS), le montant de l'aide au logement est notamment fixé en tenant compte des ressources de l'allocataire, de son conjoint et des personnes vivant habituellement dans son foyer.

L'article 140 de la loi de finances pour 2016 53 ( * ) prévoit que la valeur en capital du patrimoine dont disposent le demandeur et les autres membres de son foyer soit désormais retenue dans le calcul des aides au logement, y compris lorsqu'ils n'en tirent pas de revenus imposables. Néanmoins, seul le patrimoine d'une valeur en capital supérieure à 30 000 euros est pris en compte dans le calcul des aides au logement.

Selon l'évaluation préalable de l'article annexé au projet de loi de finances pour 2016, « les 10 % d'allocataires qui ont un patrimoine supérieur à 30 000 euros, dont 4 % qui ont un patrimoine supérieur à 75 000 euros, et 2 % qui ont un patrimoine supérieur à 150 000 euros » sont ainsi principalement concernés.

Le décret du 12 octobre 2016 relatif à la prise en compte du patrimoine dans le calcul des aides personnelles au logement 54 ( * ) précise la détermination et les conditions de prise en compte des ressources et de la valeur du patrimoine dans le calcul des aides au logement 55 ( * ) .

La prise en compte de la valeur du patrimoine des allocataires est entrée en vigueur à compter du 1 er octobre 2016 et s'applique aux prestations dues à compter de cette date.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été adopté, avec avis favorable du Gouvernement, à l'initiative de notre collègue députée Valérie Rabault. Le rapporteur spécial de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », Gaby Charroux, y a donné un avis favorable à titre personnel en séance publique.

Il prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, dans les trois mois suivant la promulgation de la loi de finances pour 2017, un rapport permettant de déterminer :

- les effets économiques, pour les personnes handicapées, de la prise en compte de la valeur en capital du patrimoine dont disposent le demandeur et les autres membres de son foyer dans le calcul des aides au logement, et en particulier, du seuil de 30 000 euros retenu ;

- dans quelle mesure le seuil de 30 000 euros retenu pour la valeur en capital du patrimoine affecte les personnes handicapées, le cas échéant, bénéficiant de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ;

- l'inclusion dans l'assiette des 30 000 euros de valeur en capital du patrimoine des rentes et contrats d'assurance vie spécifiques aux personnes en situation de handicap 56 ( * ) .

III. LES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

L'applicabilité de la réforme des aides au logement aux personnes handicapées ne semble pas avoir fait l'objet d'une expertise particulière par le Gouvernement.

La secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, a néanmoins précisé en séance publique à l'Assemblée nationale que « le projet de loi de finances rectificative fera l'objet d'une proposition d'amendement du Gouvernement afin d'exclure les bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé (AAH) et de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH), ainsi que les personnes âgées logées en résidences autonomie ou en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) » 57 ( * ) de la prise en compte du patrimoine dans le calcul des aides au logement. Par ailleurs, les rentes survie et les contrats épargne handicap seraient d'ores et déjà « exclus de l'assiette de prise en compte du patrimoine ». Cette exclusion ne figure toutefois pas de manière expresse dans le décret 58 ( * ) .

En conséquence, il peut être utile que la question de l'applicabilité de la réforme des aides au logement aux personnes handicapées puisse être étudiée par le Gouvernement , d'autant plus qu'aucune disposition visant à exclure les bénéficiaires de l'AAH et de l'AEEH de la prise en compte du patrimoine dans le calcul des aides au logement ne figure dans le projet de loi de finances rectificative tel que présenté par le Gouvernement. Votre rapporteur spécial suivra donc avec attention le dépôt éventuel d'un amendement du Gouvernement sur ce sujet dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances rectificative.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de crédits du Gouvernement visant à majorer de 1,92 million d'euros les crédits de titre 2 du programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » et de majorer à due concurrence ceux du titre 3 de ce programme.

Ce montant correspond au traitement des 28 agents contractuels issus de la fonction publique hospitalière (FPH) mis à disposition au sein de la direction générale de l'offre de soins (DGOS). Ceci permet de rémunérer directement sur les crédits de titre 2 du ministère ces agents, plutôt que de procéder à un remboursement des établissements hospitaliers mettant ces personnes à disposition sur crédits de titre 3.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté cinq articles additionnels rattachés à la présente mission, commentés ci-dessus.

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement visant à minorer les crédits de la mission de 21 millions d'euros afin de gager des ouvertures de crédits sur d'autres missions. Cette minoration se répartit de la façon suivante :

- 11 millions d'euros sur le programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes », portant sur le financement des « primes de Noël » versées aux bénéficiaires de certains minima sociaux ;

- 7 millions d'euros sur le programme 157 « Handicap et dépendance » en raison d'une « rationalisation des dépenses de l'allocation supplémentaire d'invalidité et des maisons départementales des personnes handicapées » ;

- 1 million d'euros sur le programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » ;

- 2 millions d'euros sur le programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » permise par une « rationalisation des dépenses de fonctionnement ».

Ces baisses de crédits relèvent de réductions arbitraires nécessaires pour assurer le respect de la norme de dépense de l'État qui ne semblent pas justifiées.

La réduction de 11 millions d'euros des crédits liés au versement des « primes de Noël » représente 2 % des crédits prévus au titre de ces aides, alors même que les exécutions antérieures ont été marquées par une consommation de crédits supérieure aux prévisions. La minoration prévue conduit donc à une probable sous-budgétisation de cette dépense .

Il en est de même pour la réduction de 7 millions d'euros imputées sur le programme 157 au titre de l'allocation supplémentaire d'invalidité, alors même que le budget a été construit sur l'hypothèse d'une remontée du nombre de bénéficiaires de cette prestation (+0,5 % par rapport à 2016).

Ces modifications confortent la position de votre rapporteur spécial de proposer le rejet des crédits de cette mission.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie mercredi 19 octobre 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a examiné le rapport de M. Éric Bocquet, rapporteur spécial, sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

M. Éric Bocquet , rapporteur spécial . - Pour la dernière année du quinquennat, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » est marquée par un désengagement financier de l'État de la politique du handicap. Deux transferts de crédits sont prévus à compter du 1 er janvier 2017 : le transfert du financement des dotations de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail (ESAT) à l'assurance maladie ; le transfert des moyens de fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA.

Si elles ont pour objet de simplifier les modalités de financement de ces organismes, ces deux mesures conduisent à amputer les moyens consacrés par l'État à la politique du handicap de deux milliards d'euros. L'État ne financera plus que l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI) ainsi que la garantie de rémunération des travailleurs handicapés (GRTH) en ESAT. Ces transferts réduiront l'information du Parlement à propos du financement des ESAT et des MDPH. Leurs crédits de fonctionnement ne seront plus examinés à l'occasion des projets de loi de finances ; ils seront noyés parmi les autres montants alloués aux dépenses sociales et médico-sociales retracés dans les projets de lois de financement de la sécurité sociale.

Par ailleurs, le plan de prévention et d'arrêt des départs non souhaités des personnes handicapées vers la Belgique est largement insuffisant pour faire face aux besoins. Nous avons débattu de ce point l'an dernier. Ce plan est doté de 10 millions d'euros, alors que l'assurance maladie verse tous les ans 152 millions d'euros aux établissements belges accueillant des personnes handicapées françaises.

Enfin, la réforme des modalités de revalorisation de l'AAH, désormais réalisée en fonction de l'inflation constatée et non plus en fonction de l'inflation prévisionnelle, a conduit à une quasi-stagnation de son montant en 2016.

Plusieurs dispositifs financés par la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » connaissent une progression dynamique. La prime d'activité, créée au 1 er janvier 2016 en remplacement du RSA « activité » et de la prime pour l'emploi, connaît une montée en charge plus rapide que prévu : son taux de recours était de 60 % en juin 2016, alors que la prévision budgétaire avait été construite sur une hypothèse de 50 %. En conséquence, la dépense de prime d'activité est revue à la hausse en 2017 pour atteindre un montant prévisionnel de 4,3 milliards d'euros. Ceci prend également en compte l'ouverture de la prime à de nouveaux bénéficiaires en 2016, comme les allocataires de l'AAH, d'une pension d'invalidité ou d'une rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle.

De plus, le coût des mesures de protection juridique des majeurs continue à croître sous l'effet de la progression du nombre de majeurs concernés par des mesures de protection, directement liée au vieillissement démographique.

J'en viens à deux sujets d'inquiétude ou d'insatisfaction.

Tout d'abord : la situation de la politique d'adoption en France. Le nombre d'adoptions internationales réalisées par l'intermédiaire de l'Agence française de l'adoption (AFA) diminue de manière constante : 201 adoptions ont été réalisées via l'Agence en 2015, contre plus de 3 000 en 2009. Le Gouvernement a annoncé vouloir fusionner 1'AFA avec le groupement d'intérêt public « Enfants en danger ». Plusieurs associations représentant des parents adoptants ont manifesté leur inquiétude. Elles craignent que la disparition juridique de l'AFA entraîne la disparition des accréditations dont elle dispose dans les pays d'origine et l'annulation des procédures d'adoption en cours. Il conviendra d'être particulièrement vigilant sur ce point.

Par ailleurs, les montants relatifs à l'aide à la réinsertion familiale et sociale (ARFS) des anciens migrants dans leurs pays d'origine, créée en 2016 au profit des travailleurs immigrés âgés qui effectuent des séjours de longue durée dans leurs pays d'origine, sont fortement revus à la baisse en 2017. Cela traduit une sous-consommation importante de cette aide, ce qui n'est pas satisfaisant.

Point positif : le renforcement des moyens consacrés à la lutte contre les violences faites aux femmes ainsi qu'à la lutte contre le système prostitutionnel, afin notamment de financer l'aide financière à la réinsertion des personnes prostituées.

Enfin, s'agissant des dépenses support des ministères sociaux, les crédits augmentent en raison de la hausse de la masse salariale, principalement du fait de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique. Cependant, la politique de réduction des moyens se poursuit avec la suppression de 138 emplois, hors mesures de transfert, en 2017. Cette même politique est menée pour les agences régionales de santé, dont le schéma d'emploi prévoit la réduction de 100 ETPT supplémentaires en 2017.

Au total, au regard notamment des insuffisances de la politique du handicap, je donne, à titre personnel, un avis défavorable à l'adoption des crédits de cette mission.

L'article 63 rattaché à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » vise à supprimer le Fonds national des solidarités actives (FNSA) mis en place en 2009 afin notamment de financer le RSA « activité ». Il bénéficie d'une subvention de l'État et d'une fraction du produit de la contribution exceptionnelle de solidarité des fonctionnaires.

Avec la création de la prime d'activité en 2016, le FNSA a perdu sa principale raison d'être. Il ne finance désormais plus que le RSA « socle » versé aux jeunes actifs, la prime de Noël versée aux bénéficiaires de certaines prestations sociales et les frais de gestion liés à la prime d'activité. La proposition de suppression du FNSA constitue donc l'aboutissement logique de la mise en place de la prime d'activité. Elle va dans le sens de ce que j'avais préconisé l'année dernière.

La suppression du FNSA conduirait ainsi à faire prendre en charge directement par le budget de l'État les dépenses restant à sa charge, majorant les crédits du programme 304 de 205 millions d'euros en 2017. Afin d'assurer l'équilibre budgétaire de cette opération, la part du produit de la contribution allouée au FNSA serait réaffectée au Fonds de solidarité, qui finance l'allocation spécifique de solidarité, et qui verrait en conséquence sa subvention d'équilibre versée par l'État baisser à due concurrence.

Compte tenu de ces éléments, je propose d'adopter cet article sans modification.

M. Philippe Mouiller , rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires sociales . - Je voudrais d'abord féliciter le rapporteur spécial pour la qualité de ses investigations.

Je voudrais vous faire part de l'avis du rapporteur de la commission des affaires sociales sur cette mission, qui est contrasté. L'évolution des crédits qu'elle prévoit suscite une adhésion et deux réserves.

Je me réjouis de la préservation des crédits en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre la traite des êtres humains.

Ma première réserve porte sur la nouvelle architecture du programme 157 « Handicap et dépendance ». Je ne conteste pas la concentration de l'État au profit, principalement, de l'AAH, pas plus que le transfert d'autres crédits de la politique du handicap au profit d'acteurs nationaux plus indiqués, comme l'assurance maladie et la CNSA. Mais la méthode retenue pour ce faire s'apparente à un désengagement brutal plutôt qu'à un passage de relai. De plus, avec le transfert de la part nationale du financement des MDPH, c'est à une baisse artificielle des dépenses de l'État que ce budget se livre. Cela crée en outre de l'opacité, car les crédits de fonctionnement des MDPH se trouveront noyés, sans chiffrage particulier, dans la nouvelle dotation de la CNSA. Mais alors que les MDPH sont confrontées à un important surcroît de travail, tout ce dont elles ont besoin, c'est de sécurité et de visibilité. Certes, le Président de la République s'est engagé à accorder 8 millions d'euros supplémentaires à la politique du handicap, mais cette hausse ne devra pas reposer sur les seuls départements.

J'en viens au reste du programme et à la prime d'activité. Il faut se réjouir bien sûr du succès de cette nouvelle prestation. Selon nos calculs, le taux de recours dépassera bien les 50 % budgétés, pour atteindre les 70 %. Ce dispositif est en effet beaucoup mieux ciblé. Mais, deuxième réserve, on peut s'interroger sur le coût final de la prestation. De plus, avec la suppression de la prime pour l'emploi, nous nous privons du levier qu'est le crédit d'impôt, qui a des effets positifs sur l'emploi et qui est utilisé par nos voisins européens. Malgré la communication du Gouvernement, la prime d'activité, ne nous leurrons pas, n'aura aucun effet sur emploi : le chômage dans notre pays provient d'une offre d'emploi atone.

M. André Gattolin . - J'adresse toutes mes félicitations au rapporteur spécial et au rapporteur pour avis. Leurs deux interventions soulignent en effet le problème majeur de cette mission : la question du handicap. C'est un enjeu national. Or nous n'avons plus, hélas, de politique nationale du handicap. Un autre exemple, au-delà de ceux évoqués à l'instant, l'Institut national des jeunes aveugles et l'Institut national des jeunes sourds étaient auparavant financés à 60 % par l'État et à 40 % par les agences régionales de santé. Ils le sont désormais à 100 % par les régions.

Je veux bien entendre l'argument selon lequel, pour traiter ces sujets, il faut être au plus près du terrain. Soit, mais le traitement des situations doit être le même pour tous. Or ce n'est pas le cas. Le traitement d'un dossier de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) varie de deux à dix-huit mois en fonction d'un département à l'autre. De plus, dans certains départements, on attribue au maximum un taux d'incapacité de 50 %, sans qu'aucune expertise médicale soit réellement définie à l'échelon national.

M. Marc Laménie . - J'aurai la même question que l'an dernier : quelles solutions apporter au départ des handicapés français vers la Belgique pour s'y faire soigner ? Nous manquons cruellement de capacités d'accueil en France. Il en va de même pour les ESAT. Sommes-nous condamnés à l'impuissance ?

Enfin, comment mieux faire fonctionner les ARS ?

M. Yannick Botrel . - On ne peut pas à la fois dire qu'il est logique que l'État se concentre sur l'AAH et laisse la CNSA et l'assurance maladie prendre en charge des crédits qu'elles ont toute légitimité à exécuter, et regretter que l'État se désengage.

Je fais confiance au contrôle parlementaire pour vérifier la bonne utilisation de ces dépenses.

M. Serge Dassault . - J'aimerais connaître le coût de l'aide personnalisée au retour à emploi. Sait-on exactement combien de retours à l'emploi cette aide a rendu possibles ? Pour ma part, je doute de leur efficacité.

M. Éric Bocquet , rapporteur spécial . - Je rejoins André Gattolin sur l'enjeu que représente la gestion de la personne handicapée dans les politiques nationales. Des difficultés persistent dans le traitement des demandes et dans les délais de réponse. La situation varie selon les départements. Dans le mien, le Nord, c'est assez tendu.

Je partage le souci d'équité de traitement sur le territoire national. L'État doit, parmi ses priorités, veiller au bon déroulement des procédures et faire en sorte que les cas soumis aux maisons départementales des personnes handicapées reçoivent des réponses. Au-delà des non-voyants et des malentendants, le propos pourrait être élargi au handicap en général.

Nous avions eu un débat sur les personnes handicapées françaises accueillies dans des établissements belges l'an dernier. Je m'étais rendu à Charleroi, en Wallonie, pour observer la situation. Une mission spéciale a par la suite été instituée par la commission des affaires sociales du Sénat, ce dont il faut se féliciter. Je doute que la situation ait beaucoup évolué en un an, même si je ne dispose pas de données chiffrées.

La réponse réside dans la création de nouvelles places, de nouveaux établissements. Les listes d'attente sont assez importantes, en particulier dans les régions frontalières, comme la mienne.

Les disparités territoriales en matière de santé et d'espérance de vie sont fortes. Dans les Hauts-de-France, nous sommes en bas de classement depuis de nombreuses années, et l'on ne constate malheureusement pas d'amélioration. Des déserts médicaux s'installent, par exemple dans l'Avesnois, le Cambrésis. Cela devient très inquiétant. Il est urgent de mener une politique nationale volontariste pour éviter que les fossés ne se creusent. Outre la présence de services publics, de commerces et d'écoles, l'accès à la santé est une condition nécessaire pour pouvoir vivre sur un territoire.

Encore une fois, les transferts de compétences, que j'assimile à un désengagement de l'État, sont une vraie préoccupation.

Enfin, sur la question du contrôle parlementaire, je n'aurais pas pu mener le contrôle budgétaire que j'ai réalisé sur les ESAT si leurs dotations de fonctionnement n'avaient pas été financées par l'État et retracées dans la mission « Solidarité ».

M. Philippe Mouiller , rapporteur pour avis . - À la fin du mois de juillet, environ 2,37 millions de foyers - c'est une estimation ; nous n'avons pas tous les chiffres - percevaient la prime d'activité.

Nous ne disposons pas d'éléments tangibles sur le retour à l'emploi, mais nous savons que nous sommes loin des objectifs fixés en la matière, alors qu'il y a des améliorations sur le taux de pauvreté.

Le coût de la prime d'activité s'élève à 4,3 milliards d'euros environ. Cette prime remplace le RSA activité et la prime pour emploi : son automaticité et l'ouverture aux jeunes expliquent le nombre important de bénéficiaires.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et de l'article 63 rattaché.

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 24 novembre 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a décidé de proposer au Sénat d'opposer la question préalable au projet de loi de finances pour 2017.


* 1 La caisse passe à ce titre des conventions d'appui à la qualité de service avec chaque conseil départemental, qui concernent principalement les actions menées par les MDPH.

* 2 Rapport d'information n° 409 (2014-2015) de M. Éric Bocquet, « Les établissements et services d'aide par le travail face à la contrainte budgétaire », 15 avril 2015.

* 3 Voir le commentaire de l'article 63, rattaché à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » ci-dessous.

* 4 Ce montant correspond à 15,2 % du rendement prévu par la contribution exceptionnelle de solidarité en 2017.

* 5 Valérie Rabault, Rapport d'information n° 3973 sur l'application des mesures fiscales, 19 juillet 2016.

* 6 Le montant de la prime d'activité, calculé en fonction des revenus du trimestre précédent, est versé mensuellement pendant trois mois et ne varie pas quel que soit le changement de situation familiale ou professionnelle de l'allocataire.

* 7 Voir commentaire de l'article rattaché ci-dessous.

* 8 Cour des comptes, référé n° 72597 portant sur les minima sociaux, 21 septembre 2015.

* 9 La gratuité de la distribution des denrées est imposée par le règlement du FEAD, ce qui exclut les épiceries sociales, qui soutiennent les personnes en difficulté contre une participation financière symbolique.

* 10 Hors préposés d'établissement pour lesquels les chiffres ne sont pas disponibles.

* 11 Réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial.

* 12 Les autres adoptions ont été réalisées soit par le biais d'organismes autorisés pour l'adoption (OAA), soit dans le cadre de procédures individuelles.

* 13 De plus en plus d'enfants proposés à l'adoption sont des enfants dits « à besoins spécifiques », c'est-à-dire âgés de plus de cinq ans, en fratrie ou souffrant de pathologies ou de handicaps.

* 14 Cour des comptes, «L'organisation de l'adoption internationale en France : une réforme à poursuivre », insertion au rapport public annuel 2014.

* 15 Les associations Enfance & familles d'adoption, Mouvement de l'adoption sans frontière et Association des parents adoptant en Russie.

* 16 Lettre ouverte à M. François Hollande, Président de la République, 7 septembre 2016.

* 17 La GRTH permet d'assurer aux travailleurs en ESAT un niveau de rémunération au moins égal à 55 % du SMIC, l'État venant compléter les rémunérations versées par les établissements - celles-ci doivent être supérieures à 5 %. Lorsque la part de rémunération financée par l'ESAT est comprise entre 5 % et 20 % du SMIC, l'État verse une aide au poste égale à 50 % du SMIC. Lorsque cette part est supérieure à 20 %, le pourcentage de 50 % versé par l'État est réduit de 0,5 % pour chaque hausse de 1 % financée par l'établissement.

* 18 Environ 6 000 personnes handicapées françaises sont actuellement prises en charge dans des établissements belges, dont 1 500 enfants et 4 500 adultes.

* 19 Le dispositif « Creton », introduit par l'article 22 de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989, permet le maintien d'un jeune dans un établissement pour enfants handicapés au-delà de l'âge de 20 ans, en l'absence de places dans un établissement ou service médico-social pour adultes handicapés. D'après la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) des ministères sociaux, 6 000 jeunes adultes seraient concernés, soit 5,6 % des usagers des structures pour enfants handicapés.

* 20 Ce plafond est doublé pour un couple et majoré de 50 % par enfant à charge.

* 21 Ces conditions sont appréciées par les commissions départementales des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) au sein des MDPH.

* 22 Un mécanisme de « bouclier » est toutefois prévu garantissant le maintien des prestations à leur niveau antérieur en cas d'inflation négative.

* 23 L'allocation de solidarité spécifique (ASS) est versée pour une période renouvelable de six mois aux demandeurs d'emploi ayant épuisé leurs droits aux allocations chômage et ayant travaillé au moins cinq ans au cours des dix années précédentes.

* 24 En particulier s'agissant de l'appréciation de la notion de « restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi » (RSDAE), qui est une condition nécessaire d'attribution l' « AAH 2 », pour les personnes dont le taux d'incapacité permanente reconnu par la CDAPH est égal ou supérieur à 50 %, mais inférieur à 80 % (soit environ 35 % du nombre total des allocataires de l'AAH).

* 25 Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, rapport intermédiaire d'évaluation du quatrième plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, 19 avril 2016.

* 26 Le dispositif « téléphones d'alerte grave danger » permet aux victimes de violences de la part de leurs conjoints d'alerter les autorités publiques en activant un bouton d'urgence sur un téléphone portable déclenchant l'intervention des forces de l'ordre - le cas échéant, grâce à un dispositif de géolocalisation -, si les personnes concernées ont fait l'objet d'une interdiction judiciaire d'entrer en contact avec la victime.

* 27 Les surfaces de l'immeuble locatif Montparnasse Nord-Pont (13 151 m²) et de l'immeuble Max Hymans (7 623 m 2 ).

* 28 Les sites « Borromées », « Nancy », « Rue de Malte » et « Bonne Nouvelle ».

* 29 Cette contribution de 1 % sur les rémunérations des fonctionnaires et agents publics alimente le Fonds de solidarité, qui finance le régime de solidarité des personnes privées d'emploi ou n'ayant pas droit à l'allocation chômage.

* 30 La part socle du RSA versé aux jeunes actifs de moins de 25 ans, à condition d'avoir exercé' une activité professionnelle pendant au moins deux ans à` temps plein (soit au moins 3 214 heures) au cours des trois années précédant la date de la demande du RSA - cette durée est prolongée dans la limite de six mois pour ceux qui ont connu des périodes de chômage indemnise'.

* 31 Cette prime, instaurée en 1998 et reconduite chaque année depuis, constitue une aide exceptionnelle versée en fin d'année aux bénéficiaires du RSA, de l'allocation de solidarité spécifique (ASS), de l'allocation équivalent retraite (AER) et de l'allocation transitoire de solidarité (ATS).

* 32 Article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles.

* 33 Évaluations préalables des articles du projet de loi de finances pour 2017.

* 34 Article L. 5423-25 du code du travail.

* 35 Annexe n° 30 « Solidarité, insertion et égalité des chances » au rapport général n° 164 sur le projet de loi de finances pour 2016 de la commission des finances du Sénat.

* 36 Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

* 37 Article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles.

* 38 Article L. 245-3 du code de l'action sociale et des familles.

* 39 Le département, l'État, les autres collectivités territoriales, les organismes d'assurance maladie, les caisses d'allocations familiales, les organismes régis par le code de la mutualité, le fonds de développement pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées, le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique et les autres personnes morales concernées peuvent participer au financement du fonds.

* 40 Créé par l'article 64 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

* 41 CE, 24 février 2016, N° 383070, 1 ere et 6 ème sous-sections réunies.

* 42 Ce plafond est doublé pour un couple et majoré de 50 % par enfant à charge.

* 43 Ces conditions sont appréciées par les commissions départementales des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) au sein des MDPH.

* 44 Les fonds départementaux de compensation affichaient un solde positif, au 31 décembre 2010, de près de 29 millions d'euros. Mais comme le constate la CNSA, cette situation globale masque des disparités entre départements : ainsi, vingt-deux fonds avaient un solde négatif et six, un solde nul. (Rapport d'information n° 635 de Claire-Lise Campion et Isabelle Debré, fait au nom de la commission pour le contrôle de l'application des lois, déposé le 4 juillet 2012)

* 45 CE, 24 février 2016, N° 383070, 1 ere et 6 eme sous-sections réunies

* 46 Compte-rendu intégral des débats de l'Assemblée nationale, séance publique du 16 novembre 2016

* 47 Décret n° 2008-1507 du 30 décembre 2008 relatif à l'information et au soutien des personnes appelées à exercer ou exerçant une mesure de protection juridique des majeurs en application de l'article 449 du code civil.

* 48 Cette somme est inscrite à l'action 16 du programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes » de la mission « Solidarité ».

* 49 La loi de finances pour 2016 a procédé à une simplification du financement des mandataires judiciaires à la protection des majeurs, jusqu'alors financés par plusieurs financeurs publics (les organismes de sécurité sociale, l'État ou les départements) en fonction de prestations sociales perçues par les personnes concernées par les mesures de protection. Désormais, les mandataires individuels sont financés uniquement par l'État et les services mandataires sont financés quasi-totalement par l'État, les départements continuant de contribuer à hauteur de 0,3 % à leurs dotations.

* 50 Article L. 245-3 du code de l'action sociale et des familles.

* 51 Pour plus d'éléments concernant l'évaluation de la demande de la prestation par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et le financement de la PCH, cf. le commentaire de l'article 63 bis.

* 52 La secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, a précisé en séance publique à l'Assemblée nationale que « Des négociations ont eu lieu dans la branche des salariés du particulier employeur. Un arrêté en date du 25 février 2016 a modifié l'arrêté précédent qui datait de 2005 et qui fixait les tarifs de la PCH, pour tirer les conséquences de l'extension de l'accord de classification et de l'avenant salarial signé le 21 mars 2014 par la branche des salariés du particulier employeur. Plusieurs tarifs ont été revalorisés, à hauteur de 26 millions d'euros au total pour 2016 et de 35 millions d'euros en année pleine, financés par les départements - montant à rapporter à la dépense totale de PCH des départements, laquelle est d'environ 1,5 milliard d'euros. La revalorisation relative à certains actes accomplis par les salariés à domicile a donc déjà été longuement négociée pour conclure à cet arrêté de février 2016 » (compte-rendu intégral des débats de l'Assemblée nationale, séance publique du 16 novembre 2016).

* 53 Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 54 Décret n° 2016-1385 du 12 octobre 2016 relatif à la prise en compte du patrimoine dans le calcul des aides personnelles au logement.

* 55 Ainsi, ce dernier dispose que le seuil de 30 000 euros s'applique à la somme de la valeur du patrimoine mobilier financier et de la valeur estimée de l'ensemble du patrimoine immobilier, à l'exception de la résidence principale et des biens à usage professionnel. Les « biens non productifs de revenus », desquels est exclue la résidence principale, sont considérés « comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s'il s'agit d'immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s'il s'agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux ».

* 56 L'article 199 septies du code général des impôts prévoit en effet que les primes afférentes aux contrats d'assurance vie conclus par un assuré atteint « d'une infirmité qui l'empêche de se livrer, dans des conditions normales de rentabilité, à une activité professionnelle » ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu de 25 %, dans la limite d'un plafond global de versements annules de 1 525 euros, majoré de 300 euros par enfant à charge.

* 57 Compte-rendu intégral des débats de l'Assemblée nationale, séance publique du 16 novembre 2016.

* 58 Cependant, le formulaire de demande d'aide au logement ne comporte pas dans la partie « déclaration de ressource » de rubrique « contrats d'assurance vie ».

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