EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er Prorogation de l'état d'urgence jusqu'au 15 juillet 2017

Le I de l'article 1 er du projet de loi a pour objet de proroger l'état d'urgence qui, selon le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, aurait dû cesser de s'appliquer à partir du 22 décembre 2016 à zéro heure, conformément aux termes de l'article 4 de la loi du 3 avril 1955 35 ( * ) en raison de la démission du Gouvernement de Manuel Valls le mardi 6 décembre dernier 36 ( * ) .

L'état d'urgence a été déclaré sur le territoire métropolitain le 14 novembre 2015 37 ( * ) , puis élargi aux outre-mer 38 ( * ) le 18 novembre 2015 39 ( * ) . Il a ensuite été prorogé pour une durée de trois mois à deux reprises 40 ( * ) , puis pour une durée de deux mois 41 ( * ) et enfin pour une durée de six mois 42 ( * ) .

Pour la première fois depuis le mois de novembre 2015, la nouvelle prorogation soumise à l'appréciation du législateur est fixée par référence, non pas à une durée, mais à une date précise fixée au 15 juillet 2017 .

Votre rapporteur estime satisfaisante cette référence car elle permet de maintenir l'état d'urgence pendant toute la période électorale qui s'ouvrira à compter de la fin du mois de février 2017, pendant laquelle le Parlement va suspendre ses travaux en séance plénière, tout en offrant au nouveau pouvoir exécutif et à la majorité parlementaire qui seront issus des prochaines élections un délai suffisant pour décider de lever ou de maintenir l'état d'urgence.

Le second tour des élections législatives ayant lieu le 18 juin 2017, l'Assemblée nationale ne sera pas en mesure d'examiner, le cas échéant, un nouveau texte de prorogation avant la semaine du 3 juillet, compte tenu par exemple des délais observés en 2012 en matière de renouvellement de ses instances. À cet égard, l'échéance du 15 juillet 2017 ménage un délai suffisant qui permettrait au Parlement de proroger l'état d'urgence après cette échéance s'il le jugeait opportun.

Sur la proposition du rapporteur de la commission des lois, les députés ont adopté un amendement afin de préciser, à l'instar de ce qu'avaient prévu les précédents textes de prorogation, la date d'entrée en vigueur de la prorogation résultant du présent projet de loi. En effet, deux interprétations auraient pu naître, en l'absence d'une telle mention, en considérant que la nouvelle phase de l'état d'urgence aurait débuté à la date d'entrée en vigueur du présent projet de loi - c'est-à-dire le lendemain de sa publication au Journal officiel en application de l'article 1 er du code civil - ou immédiatement après la caducité de la phase IV de l'état d'urgence, c'est-à-dire dans le délai des quinze jours francs suivant la date de démission du Gouvernement de Manuel Valls. Une telle question est loin d'être anecdotique dans la mesure où certaines des mesures de l'état d'urgence, à l'instar des arrêtés d'assignation à résidence ou des fermetures de lieux de réunion, doivent être renouvelées par l'autorité administrative à l'occasion d'une prorogation. Pour éviter qu'une mesure ne soit caduque alors que l'autorité administrative entend la maintenir, il convient alors de la notifier à l'intéressé au plus tard au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle phase de prorogation. Dans ces conditions, l'amendement voté par les députés précise expressément que la nouvelle prorogation de l'état d'urgence démarre le 22 décembre à zéro heure à l'issue de la caducité de la prorogation résultait de la loi du 21 juillet 2016.

Le II de l'article 1 er comporte la mention expresse requise par le I de l'article 11 de la loi du 3 avril 1955 afin de donner à l'autorité administrative la possibilité d'ordonner des perquisitions administratives au cours de cette nouvelle période de prorogation de l'état d'urgence.

Enfin, à l'instar de ce qu'avaient prévu les lois précitées des 20 novembre 2015, 19 février 2016, 20 mai 2016 et 21 juillet 2016, le III prévoit qu'il puisse être mis fin à l'état d'urgence par décret en conseil des ministres avant l'échéance du 15 juillet 2017. En ce cas, il en serait rendu compte au Parlement.

Votre commission a adopté l'article 1 er sans modification .

Article 2 (art. 6 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence) Encadrement de la durée des assignations à résidence

Dans sa rédaction initiale, l'article 2 du projet de loi proposait de fixer à quinze mois consécutifs, en l'absence d'éléments nouveaux de nature à justifier le maintien de la mesure, la durée maximale d'assignation à résidence.

Votre rapporteur rappelle que, depuis le 22 juillet dernier, 115 personnes ont fait l'objet d'une décision d'assignation à résidence prise par le ministre de l'intérieur en application de l'article 6 de la loi du 3 avril 1955. À la date du 14 décembre 2016, 91 de ces arrêtés d'assignation à résidence demeuraient en vigueur puisqu'entre le 22 juillet et cette date, 2 arrêtés ont été suspendus par la juridiction administrative, 2 arrêtés n'ont pas été notifiés en raison de la mise à exécution d'une obligation de quitter le territoire français et 20 arrêtés ont été abrogés :

- 14 en raison de l'incarcération de la personne dans un établissement pénitentiaire ou de son placement dans un centre éducatif fermé ;

- 2 pour cause de mise à exécution d'une mesure d'éloignement du territoire français et 1 pour placement en centre de rétention administratif dans l'attente de cette exécution ;

- 3 après réexamen par l'autorité administrative des éléments de faits ayant fondé l'assignation, laquelle n'apparaissait plus justifiée.

Sur ces 91 personnes :

- 37 étaient assignées à résidence depuis plus d'un an ;

- 10 depuis 6 à 12 mois ;

- 44 depuis moins de 6 mois.

Il en résulte que, dans le cas où une limitation à quinze mois de la durée d'assignation à résidence entrerait en vigueur, l'assignation de 41 personnes serait levée, en l'absence d'éléments nouveaux, entre le 15 février 2017 et le 29 mars 2017.

Votre rapporteur estime que les conséquences d'une telle disposition ne sont pas satisfaisantes.

Il apparaît tout d'abord que, dans la plupart des cas, il n'existera pas d'éléments nouveaux de nature à justifier le maintien de la mesure, alors même que le comportement des intéressés continue à présenter un risque pour la sécurité et l'ordre publics, sans pour autant qu'il existe des éléments permettant de judiciariser leur situation.

Par ailleurs, votre rapporteur rappelle que l'assignation à résidence constitue bien une mesure de police administrative restreignant la liberté d'aller et venir, comme l'a précisé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 22 décembre 2015, et non une mesure de privation de liberté individuelle qui nécessiterait l'intervention de l'autorité judiciaire en application de l'article 66 de la Constitution.

Décision n° 2015-527 QPC du 22 décembre 2015 - M. Cédric D.

5. Considérant, en premier lieu, que les dispositions contestées permettent au ministre de l'intérieur, lorsque l'état d'urgence a été déclaré, de « prononcer l'assignation à résidence, dans le lieu qu'il fixe, de toute personne résidant dans la zone fixée » par le décret déclarant l'état d'urgence ; que cette assignation à résidence , qui ne peut être prononcée qu'à l'égard d'une personne pour laquelle « il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics », est une mesure qui relève de la seule police administrative et qui ne peut donc avoir d'autre but que de préserver l'ordre public et de prévenir les infractions ; que cette assignation à résidence « doit permettre à ceux qui en sont l'objet de résider dans une agglomération ou à proximité immédiate d'une agglomération » ; qu'elle ne peut en aucun cas « avoir pour effet la création de camps où seraient détenues les personnes » assignées à résidence ; que, tant par leur objet que par leur portée, ces dispositions ne comportent pas de privation de la liberté individuelle au sens de l'article 66 de la Constitution ;

6. Considérant, en second lieu, que, dans le cadre d'une assignation à résidence prononcée par le ministre de l'intérieur, la personne « peut également être astreinte à demeurer dans le lieu d'habitation déterminé par le ministre de l'intérieur, pendant la plage horaire qu'il fixe, dans la limite de douze heures par vingt-quatre heures » ; que la plage horaire maximale de l'astreinte à domicile dans le cadre de l'assignation à résidence, fixée à douze heures par jour, ne saurait être allongée sans que l'assignation à résidence soit alors regardée comme une mesure privative de liberté, dès lors soumise aux exigences de l'article 66 de la Constitution ;

Il n'existe pas de précédent ou de référence, ni dans la jurisprudence nationale ni dans celle de la cour européenne des droits de l'homme, qui tendrait à indiquer que le maintien, au-delà d'une certaine durée, d'une mesure de police administrative restreignant la liberté d'aller et venir aurait pour effet de la transformer en mesure s'apparentant à une privation de liberté. À titre d'exemple, dans un arrêt du 6 novembre 1980 43 ( * ) , la cour européenne des droits de l'homme a statué sur une mesure de surveillance spéciale d'individus dangereux pour la sécurité ou la moralité publique prévue par la législation italienne au regard du « droit à la liberté » consacré par l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Dans le cas d'espèce, la CEDH, selon laquelle « entre privation et restriction de liberté, il n'y a pourtant qu'une différence de degré ou d'intensité, non de nature ou d'essence », a considéré que la mesure de surveillance spéciale relevait de la catégorie des mesures de privation de liberté non pas uniquement au regard de sa durée d'application mais également de ses modalités d'application 44 ( * ) .

L'application d'une telle grille d'analyse permet ainsi de confirmer que la mesure d'assignation à résidence de l'article 6 de la loi de 1955, même en se prolongeant au-delà d'un certain délai, appartient bien à la catégorie des mesures restrictives de liberté compte tenu de ses modalités .

Certes, votre rapporteur ne néglige pas l'ampleur des contraintes qui peuvent s'imposer à un assigné à résidence, alors même qu'il n'existe pas d'éléments de nature à judiciariser sa situation. Il relève cependant la souplesse de la pratique du ministère de l'intérieur 45 ( * ) en matière d'aménagement des obligations de l'assignation à résidence quand de tels aménagements sont nécessaires pour répondre aux contraintes d'une activité professionnelle ou familiale.

Dans ces conditions, il considère peu appropriée la fixation d'une durée maximale d'assignation à résidence en l'absence de faits nouveaux. D'une part, il apparaît que le délai proposé de quinze mois ne répond à aucune logique spécifique en matière de sécurité ou de protection des libertés et que sa fixation présente de ce fait un caractère aléatoire. D'autre part, il convient de relever que certaines personnes ayant fait l'objet d'une assignation à résidence peuvent présenter une réelle dangerosité pour la société, comme le démontre le nombre élevé d'assignés - quatorze - qui ont été incarcérés depuis le 22 juillet dernier . Il ne semble en conséquence pas souhaitable que l'autorité administrative, qui a déjà jugé utile de renouveler ces assignations à trois reprises depuis le mois de novembre 2015, se trouve dépourvue de moyens de contrôle des personnes concernées alors même que l'état d'urgence continuerait à être applicable.

Au demeurant, votre rapporteur souligne que les arrêtés d'assignation à résidence sont placés sous le contrôle étroit de la juridiction administrative , tant en matière de référé-liberté que de recours au fond, qui doit veiller à ce que la mesure soit nécessaire, adaptée et proportionnée selon les termes de la décision précitée du Conseil constitutionnel du 22 décembre 2015.

Pour autant, il apparaît indispensable d'établir solidement les motivations d'une assignation à résidence qui se prolongerait dans le temps au regard de la menace pour la sécurité et l'ordre publics que constitue le comportement de la personne .

C'est pour ces raisons que le président Philippe Bas et votre rapporteur ont pris l'initiative de se rapprocher du président et du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale afin de leur proposer un dispositif alternatif prenant en compte les objections formulées ci-dessus et susceptible d'être adopté dès le stade de l'examen du texte par les députés afin de permettre à votre commission de proposer au Sénat un vote conforme pour faciliter une adoption rapide du texte de prorogation.

Ces échanges, menés au cours de la journée du 12 décembre, ont conduit nos collègues députés Dominique Raimbourg et Pascal Popelin à déposer, en commission, un amendement de rédaction globale de l'article 2 dont l'économie générale s'inspire des dispositions votées par le législateur dans la loi du 21 juillet 2016 pour autoriser l'exploitation de données informatiques copiées à l'occasion d'une perquisition administrative. Si ce dispositif a été adopté en commission des lois, les députés ont cependant, dans un premier temps, adopté en séance publique un amendement de Guillaume Larrivé revenant au texte du Gouvernement. À l'initiative du président Dominique Raimbourg, l'Assemblée nationale a cependant rétabli le texte de la commission, sous réserve d'une précision, à l'occasion d'une seconde délibération.

Ce dispositif prévoit tout d'abord d'inscrire à l'article 6 de la loi du 3 avril 1955 la règle dégagée par le Conseil constitutionnel dans sa décision précitée du 22 décembre 2015 en vertu de laquelle les mesures d'assignation à résidence ne peuvent être prolongées sans être renouvelées si le législateur prolonge l'état d'urgence par une nouvelle loi 46 ( * ) .

Puis, le texte voté par les députés fixe le principe d'une limitation d'une durée maximale équivalant à douze mois de la durée d'assignation à résidence d'une même personne, sans préciser qu'il s'agit d'une durée consécutive . Il en résulte que, contrairement à la version qui avait été proposée par le Conseil d'État et aménagée ensuite par le Gouvernement, cette durée de douze mois serait appréciée, non plus de manière consécutive, mais sur l'ensemble d'un état d'urgence donné depuis sa déclaration initiale par l'exécutif jusqu'à la fin de sa dernière période de prorogation. Il en résulte qu'une personne assignée à résidence pendant une période de six mois, dont l'assignation serait ensuite abrogée pour cause d'incarcération, ne pourrait faire l'objet d'une nouvelle assignation que d'une durée maximale de six mois dans le cadre du même état d'urgence.

Toutefois, conformément au souhait formulé par le Président Philippe Bas et votre rapporteur, le ministre de l'intérieur aurait la possibilité de prolonger cette assignation au-delà de cette durée de douze mois avec l'autorisation du juge des référés du Conseil d'État . La demande du ministre devrait être adressée au juge au plus tôt quinze jours avant l'échéance des douze mois. Le juge des référés, statuant dans les formes prévues au livre V du code de justice administrative relatif aux différents référés devant la juridiction administrative, serait tenu de se prononcer dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa saisine au vu des éléments produits par l'autorité administrative faisant apparaître les raisons sérieuses de penser que le comportement de la personne continue à constituer une menace pour la sécurité et l'ordre publics . La prolongation autorisée par le juge des référés ne pourrait excéder une durée de trois mois, l'autorité administrative pouvant cependant, à tout moment, mettre fin à l'assignation ou diminuer les obligations qui en découlent. À l'issue de cette prolongation ou à la fin d'une période de l'état d'urgence, le ministre de l'intérieur pourrait, dans les mêmes conditions, saisir le juge des référés du Conseil d'État pour obtenir une nouvelle autorisation de prolongation de l'assignation à résidence.

Ce dispositif, s'il prévoit que le juge des référés compétent, celui du Conseil d'État, statue en premier et dernier ressort, ce qui a pour effet d'exclure la possibilité d'un appel, permet cependant à l'intéressé de former un recours pour excès de pouvoir de la décision de renouvellement. Rien ne lui interdirait au demeurant, après notification de son arrêté de prolongation, de saisir à nouveau le juge des référés du Conseil d'État d'un « référé-liberté » 47 ( * ) , par exemple s'il souhaitait faire valoir des éléments nouveaux.

Enfin, l'article 2 voté par l'Assemblée nationale comprend un dispositif transitoire pour permettre le renouvellement des actuelles assignations ayant une durée supérieure à douze mois à la date d'entrée en vigueur du présent texte de prorogation dans les conditions actuellement prévues par l'article 6 de la loi du 3 avril 1955, c'est-à-dire sans recours à l'autorisation du juge des référés du Conseil d'État. Dans un délai de 90 jours à compter de l'entrée en vigueur du présent texte de prorogation, ce dispositif permet au ministre de l'intérieur de renouveler l'assignation, pour une durée de 90 jours maximum, dès lors que le comportement de l'intéressé constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics. À l'issue de ce renouvellement de l'assignation pour 90 jours, le ministre devrait suivre la nouvelle procédure d'autorisation préalable devant le juge des référés du Conseil d'État.

En pratique, ce dispositif permet à la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur de renouveler, avant l'entrée en vigueur du présent projet de loi, les arrêtés d'assignation à résidence qu'elle jugerait pertinents dans les conditions actuelles et lui laisse un délai de trois mois pour se préparer à la nouvelle procédure devant le juge des référés du Conseil d'État.

Tout en admettant la lourdeur de la procédure prévue par l'article 2 dans sa nouvelle rédaction, votre rapporteur l'estime néanmoins préférable au principe d'une limitation de la durée globale d'assignation à résidence, quelle qu'en soit l'ampleur, en l'absence d'éléments nouveaux que l'autorité administrative ne sera que très rarement en mesure d'apporter.

Dans ces conditions, votre rapporteur considère que le dispositif retenu par les députés répond aux objections formulées à l'encontre du texte présenté par le Gouvernement.

Votre commission a adopté l'article 2 sans modification .

Article 2 bis (art. 15 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence) Application outre-mer des modifications apportées au régime juridique de l'état d'urgence

L'insertion de l'article 2 bis dans le texte du projet de loi résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale, en séance, d'un amendement présenté par le rapporteur de la commission des lois. Le dispositif de cet article a pour objet d'assurer l'application dans les collectivités régies par le principe de spécialité législative (îles Wallis et Futuna, Polynésie française, Nouvelle-Calédonie et Terres australes et antarctiques françaises) des modifications apportées par l'article 2 du projet de loi au régime juridique des assignations à résidence prévu à l'article 6 de la loi du 3 avril 1955. À cet effet, le « compteur outre-mer » 48 ( * ) , existant à l'article 15 de la loi du 3 avril 1955, a été actualisé.

Votre commission a adopté l'article 2 bis sans modification .

Article 3 Dérogation à l'application de l'article 4 de la loi du 3 avril 1955

Afin de favoriser le maintien sans discontinuité de l'application de l'état d'urgence jusqu'au 15 juillet 2017, il est indispensable de prévoir une disposition transitoire permettant de déroger à l'application de l'article 4 de la loi du 3 avril 1955 en vertu duquel la loi portant prorogation de l'état d'urgence est caduque à l'issue d'un délai de quinze jours francs suivant la date de démission du Gouvernement ou de dissolution de l'Assemblée nationale.

En raison de l'élection d'un nouveau Président de la République le 7 mai 2017, le Gouvernement sera amené à présenter sa démission dans les jours suivant le second tour de l'élection présidentielle, selon une pratique bien établie 49 ( * ) . Il est généralement également de tradition que le Gouvernement nommé par le Président de la République immédiatement après son élection présente sa démission après le second tour des élections législatives 50 ( * ) .

Par conséquent, sans modifier le principe fixé à l'article 4 de la loi du 3 avril 1955, l'article 3 du présent projet de loi porte une dérogation audit article 4, limitée à la période de prorogation prévue par l'article 1 er du projet de loi, c'est-à-dire jusqu'au 15 juillet 2017. Cette dérogation serait ainsi limitée, pour cette période, à la seule démission du Gouvernement consécutive à l'élection du Président de la République ou à celle des députés à l'Assemblée nationale. Il en résulte ainsi que l'article 4 demeurerait applicable dans le cas, hautement improbable, où le Président de la République déciderait de dissoudre l'Assemblée nationale d'ici au 7 mai 2017 ou si le Gouvernement remettait sa démission pour une toute autre cause que l'élection présidentielle ou les élections législatives.

Votre commission a adopté l'article 3 sans modification .

*

* *

Votre commission a adopté le projet de loi sans modification.


* 35 Article qui dispose que « la loi portant prorogation de l'état d'urgence est caduque à l'issue d'un délai de quinze jours francs suivant la date de démission du Gouvernement ou de dissolution de l'Assemblée nationale ».

* 36 Décret du 6 décembre 2016 du Président de la République relatif à la cessation des fonctions du Gouvernement.

* 37 Décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015.

* 38 Sur le territoire des collectivités de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de La Réunion, de Mayotte, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

* 39 Décret n° 2015-1493 du 18 novembre 2015.

* 40 Loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015 précitée et loi n° 2016-162 du 19 février 2016 précitée.

* 41 Loi n° 2016-629 du 20 mai 2016 précitée.

* 42 Loi n° 2016-987 du 21 juillet 2016 précitée.

* 43 CEDH (Cour plénière), Guzzardi c. Italie, n° 7367/76, 6 novembre 1980.

* 44 Voir point 92 de l'arrêt : « Pour déterminer si un individu se trouve "privé de sa liberté" au sens de l'article 5 (art. 5), il faut partir de sa situation concrète et prendre en compte un ensemble de critères comme le genre, la durée, les effets et les modalités d'exécution de la mesure considérée ».

* 45 Si l'on se réfère aux 37 décisions d'aménagement accordées aux assignés à résidence depuis le 22 juillet 2016.

* 46 Voir point 13 de la décision n° 2015-527 QPC.

* 47 Article L. 521-2 du code de justice administrative.

* 48 La technique du « compteur » consiste à indiquer qu'une disposition est applicable dans une collectivité régie par le principe de spécialité législative dans sa rédaction résultant d'une loi déterminée, ce qui permet de savoir si les modifications ultérieures de cette disposition ont été ou non étendues.

* 49 Le Gouvernement a démissionné le 10 mai après les élections présidentielles de 2012, le 15 mai après les élections présidentielles de 2007 ou encore le 6 mai après les élections présidentielles de 2002.

* 50 En 2012, le Gouvernement nommé par le Président de la République nouvellement élu le 15 mai a présenté sa démission le 18 juin, au lendemain du deuxième tour des élections législatives. Il en fut de même en 2007 avec la démission, le 18 juin également, du Gouvernement nommé le 15 mai.

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