Rapport n° 297 (2017-2018) de Mme Josiane COSTES , fait au nom de la commission des lois, déposé le 14 février 2018

Disponible au format PDF (1,4 Moctet)

Tableau comparatif au format PDF (386 Koctets)

Synthèse du rapport (326 Koctets)


N° 297

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 14 février 2018

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi visant à renforcer la prévention des conflits d' intérêts liés à la mobilité des hauts fonctionnaires ,

Par Mme Josiane COSTES,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas , président ; MM. François Pillet, Jean-Pierre Sueur, François-Noël Buffet, Jacques Bigot, Mmes Catherine Di Folco, Sophie Joissains, M. Arnaud de Belenet, Mme Nathalie Delattre, MM. Pierre-Yves Collombat, Alain Marc , vice-présidents ; M. Christophe-André Frassa, Mme Laurence Harribey, MM. Loïc Hervé, André Reichardt , secrétaires ; Mme Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Philippe Bonnecarrère, Mmes Agnès Canayer, Maryse Carrère, Josiane Costes, MM. Mathieu Darnaud, Marc-Philippe Daubresse, Mme Jacky Deromedi, MM. Yves Détraigne, Jérôme Durain, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Jean-Luc Fichet, Pierre Frogier, Mmes Françoise Gatel, Marie-Pierre de la Gontrie, M. François Grosdidier, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Sébastien Leroux, Henri Leroy, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Jean Louis Masson, Mme Marie Mercier, MM. Thani Mohamed Soilihi, Alain Richard, Simon Sutour, Mmes Lana Tetuanui, Catherine Troendlé, M. Dany Wattebled .

Voir les numéros :

Sénat :

205 et 298 (2017-2018)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 14 février 2018, sous la présidence de M. Philippe Bas, président , la commission des lois a examiné le rapport de Mme Josiane Costes et établi son texte sur la proposition de loi n° 205 (2017-2018), présentée par M. Jean-Claude Requier et plusieurs de ses collègues, visant à renforcer la prévention des conflits d' intérêts liés à la mobilité des hauts fonctionnaires .

La rapporteure a salué la grande qualité de la fonction publique française, estimé que la mobilité des hauts fonctionnaires devait être encouragée, tant au sein des administrations publiques que vers le secteur privé, tout en veillant à prévenir et faire cesser les situations de conflits d'intérêts, et souligné que l'équilibre entre cette double nécessité était difficile à établir.

Elle a observé que la mobilité des fonctionnaires vers le secteur privé était difficilement quantifiable, en raison à la fois de l'absence de données agrégées au niveau de l'ensemble des administrations publiques et de définition de la haute fonction publique.

Elle a rappelé que la commission de déontologie de la fonction publique, dont les prérogatives ont été renforcées par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, constituait aujourd'hui le pivot de la prévention des conflits d'intérêts dans la fonction publique, mais faisait encore l'objet de nombreuses critiques, en particulier sur la portée de ses avis et l'articulation de ses compétences avec celles de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

La rapporteure a salué l'initiative des auteurs de la proposition de loi, considérant qu'elle permettait d'aborder des questions n'ayant pas encore trouvé de solutions satisfaisantes, mais observé que plusieurs dispositions soulevaient des difficultés juridiques ou pratiques.

Au terme d'un large débat, la commission a adopté neuf amendements (huit de sa rapporteure et un de M. François Patriat et des membres du groupe La République en Marche) tendant à :

- supprimer les articles 1 er , 2, 3 et 6 relatifs à l'extension des compétences de la commission de déontologie de la fonction publique en raison des difficultés soulevées ;

- préciser les dispositions de l' article 4 relatives à l'attribution à la commission de déontologie de la fonction publique du contrôle de la compatibilité des fonctions exercées par les fonctionnaires réintégrés dans la fonction publique après une mobilité dans le secteur privé ;

- prévoir la publicité des avis rendus par ladite commission, en insérant un article 4 bis ;

- restreint le champ de compétence de ladite commission au recrutement des secrétaires et des directeurs généraux des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, à l' article 5 ;

- supprimer les délits détachables de l'exercice d'une fonction publique et qui font l'objet de sanctions pénales spécifiques, à l' article 7 .

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

La France s'honore de pouvoir compter sur une fonction publique de grande qualité, dont les agents assurent avec probité et désintéressement les missions qui leur incombent, quels que soient ses versants, catégories, corps et cadres d'emplois, grâce à des procédures de recrutement sélectives et transparentes et à des obligations déontologiques fortes tout au long de la carrière de ses agents.

La mobilité des fonctionnaires, singulièrement celles des hauts fonctionnaires, doit être encouragée, tant au sein des administrations publiques que vers le secteur privé, car elle leur permet d'acquérir de nouvelles expériences et compétences, ce qui contribue à leur épanouissement professionnel, et est de nature à favoriser le décloisonnement, l'efficacité et l'efficience des administrations publiques. La mobilité dans le secteur public comme dans le secteur privé est aussi un outil de valorisation des carrières et des compétences, au moment où la fonction publique souffre d'un manque d'attractivité, en raison à la fois de l'insuffisance de perspectives de carrières et de rémunérations souvent moins attractives que celles proposées dans les entreprises du secteur privé. Comme l'a indiqué le secrétaire général du Gouvernement à votre rapporteure, notre pays a besoin d'une élite administrative de qualité. D'où l'importance de veiller à ne pas créer de nouvelles contraintes envers les fonctionnaires qui aurait pour résultat la perte de talents potentiels.

Mais il importe, dans le même temps, de veiller à prévenir et faire cesser les situations de conflits d'intérêts, définies comme « toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif d'une fonction », qui peuvent parfois survenir voire entraîner des faits constitutifs d'infractions pénales. Ce risque peut se manifester tant dans l'exercice par un agent de ses fonctions au sein du secteur public - par exemple, un fonctionnaire ne doit pas participer à l'attribution d'un marché public à une entreprise au sein de laquelle il détiendrait des intérêts - qu'en cas de « pantouflage », c'est-à-dire lorsqu'un fonctionnaire souhaite quitter temporairement ou définitivement ses fonctions publiques afin d'occuper un poste dans le secteur privé. Le « pantouflage » est une pratique ancienne mais, dans un contexte où la probité est érigée en une vertu cardinale devant guider l'action des acteurs publics, ces mobilités sont souvent mal comprises, mal acceptées. Les fonctionnaires qui y recourent sont accusés d'avoir utilisé leurs fonctions publiques à des fins privées, ce qui jette le soupçon sur leur action, souvent à tort.

L'équilibre entre cette double nécessité de favoriser la mobilité des fonctionnaires et d'éviter les situations de conflits d'intérêts est difficile à établir. Les nombreuses réformes qui se sont succédé au cours des dernières années n'ont probablement pas permis de l'atteindre, ce qui explique les initiatives déjà prises par le Sénat, notamment en 2016, et le dépôt par M. Jean-Claude Requier et plusieurs de nos collègues de la proposition de loi n° 205 (2017-2018) visant à renforcer la prévention des conflits d'intérêts liés à la mobilité des hauts fonctionnaires , inscrite à l'ordre du jour réservé au groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen du 22 février 2018.

C'est la recherche de cet équilibre qui a également guidé votre commission dans l'examen de cette proposition de loi.

I. DES DISPOSITIFS DE PRÉVENTION DES CONFLITS D'INTÉRÊTS POUR LES AGENTS PUBLICS EN CAS DE MOBILITÉ DANS LE SECTEUR PRIVÉ NOMBREUX MAIS PERFECTIBLES

A. LE « PANTOUFLAGE » DES HAUTS FONCTIONNAIRES : UNE RÉALITÉ À NUANCER

1. Une mobilité globale des fonctionnaires limitée

La mobilité des fonctionnaires, définie comme le fait de changer d'employeur, de zone d'emploi ou de statut, est aujourd'hui perçue à la fois comme un vecteur de motivation pour les agents eux-mêmes et un outil d'évolution des différentes administrations.

Elle reste toutefois peu développée. Selon les données du ministère de l'action et des comptes publics, en 2015, sur les 5,4 millions d'agents publics que compte notre fonction publique, seuls 8,5 % des agents étaient en situation de mobilité : 4,5 % ont changé d'employeur public (dont 0,7 % de versant de la fonction publique) ; 4,2 % de zone d'emploi ; et 2,9 % de statut ou de situation d'emploi.

2. Le « pantouflage » : un phénomène difficile à mesurer mais une pratique a priori peu répandue

La mobilité des fonctionnaires vers le secteur privé, communément appelée le « pantouflage », s'avère difficile à quantifier.

La direction générale de l'administration et de la fonction publique ne dispose pas aujourd'hui de données agrégées sur son importance, comme ont pu le constater avec étonnement et regrets votre rapporteure au cours de ses auditions et la récente mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale 1 ( * ) sur la déontologie des fonctionnaires et l'encadrement des conflits d'intérêts 2 ( * ) . C'est pourquoi votre rapporteure estime que cette lacune devrait être comblée par la mise en place d'outils statistiques adaptés.

Le départ, temporaire ou définitif, d'agents publics vers le secteur privé concerne l'ensemble des catégories de fonctionnaires. Mais les départs les plus emblématiques et les plus remarqués sont ceux des hauts fonctionnaires. Là encore, il n'existe pas de définition légale de la haute fonction publique. Selon les personnes entendues par votre rapporteure, elle pourrait comprendre entre 12 000 et 34 000 agents, exclusion faite des maîtres de conférences.

Cette absence de définition légale de la haute fonction publique, couplée à l'absence de données agrégées sur la mobilité des agents publics vers le secteur privé, ne permet pas d'apprécier l'importance du pantouflage au sein de la haute fonction publique et rend difficile la définition d'outils pertinents et adaptés à la prévention des conflits d'intérêts. On ne peut que le regretter.

D'après le rapport d'activité pour 2015 de la commission de déontologie de la fonction publique, environ 850 agents publics ont demandé à effectuer une mobilité dans le secteur privé, soit un volume relativement restreint en comparaison des 5,4 millions d'agents que comptent les trois fonctions publiques. La direction générale de l'administration et de la fonction publique estime que les demandes de hauts fonctionnaires ne représenteraient que 2 à 3 % des dossiers soumis à la commission de déontologie de la fonction publique.

Une étude de 2015, « Que sont nos énarques devenus ? » 3 ( * ) , réalisée par l'École Nationale d'Administration (ENA) et l'École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS) sur le devenir des anciens élèves de l'ENA, estime que :

- 78 % des anciens élèves de l'ENA n'avaient jamais exercé de responsabilité en entreprise au cours de leur carrière ;

- 22 % avaient rejoint au cours de leur carrière une entreprise (publique ou privée) mais poursuivaient ensuite leur carrière au sein de l'administration d'État ;

- 8 % des anciens élèves avaient durablement quitté l'administration d'État.

La mobilité dans le secteur privé varie fortement selon le corps d'origine du haut fonctionnaire. Ainsi, 75,5 % des énarques issus du corps des inspecteurs généraux des finances avaient rejoint une entreprise publique ou privée au cours de leur carrière et 34 % d'entre eux ont passé plus de la moitié de leur carrière hors de l'administration.

Ainsi que l'a indiqué la direction générale du Trésor à votre rapporteure, les passages dans le secteur privé sont fondamentaux pour cette direction qui a besoin d'agents maîtrisant parfaitement bien le fonctionnement des entreprises. La mobilité dans le secteur privé y est aussi conçue comme un outil de gestion des carrières indispensable, en raison notamment d'une structure hiérarchique très défavorable qui ne permet pas de proposer des perspectives de carrières satisfaisantes à tous les agents de la direction.

Le passage des fonctionnaires issus des grands corps de l'ENA dans le secteur privé au cours de leur carrière

Corps d'origine

Passage

Passage durable

Inspecteur des finances

75,5 %

34,0 %

Auditeur à la cour des comptes

45,3 %

20,3 %

Auditeur au conseil d'État

37,7 %

11,5 %

Inspecteur des affaires sociales

20,7 %

3,4 %

Administrateur civil

20,4 %

7,6 %

Conseiller commercial

15,8 %

5,3 %

Administrateur de la ville de Paris

12,8 %

2,6 %

Conseiller des affaires étrangères

12,2 %

4,1 %

Conseiller de chambre régionale des comptes

5,8 %

4,3 %

Inspecteur de l'administration

5,0 %

5,0 %

Conseiller de tribunal administratif

3,5 %

3,5 %

Source : « Que sont nos énarques devenus ? », étude sur le devenir des anciens élèves de l'ENA, réalisée par l'École Nationale d'Administration
et l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, 2015

Ainsi, l'étude précitée concluait que la très grande majorité des énarques se consacre donc au service de l'État et de l'intérêt général.

Ce constat s'appliquerait également, selon les personnes entendues par votre rapporteure, aux autres grands corps de l'État (Polytechnique, les Mines, les Ponts-et-Chaussées, ...).

La récente mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale a, quant à elle, relevé qu' « entre 2013 et 2017, sept membres de l'IGF 4 ( * ) ont dû rembourser une pantoufle (soit moins de 4 % du corps) ; entre 2016 et 2017, 3 IPEF 5 ( * ) et 7 ingénieurs des travaux publics de l'État ont également dû rembourser une pantoufle ».

B. LA MISE EN PLACE DE DISPOSITIFS DE PRÉVENTION DES CONFLITS D'INTÉRÊTS DANS LA FONCTION PUBLIQUE

La France s'est dotée depuis longtemps de règles destinées à prévenir et à sanctionner les conflits d'intérêts dans le secteur public : en 1302 par exemple, le roi Philippe IV le Bel avait édicté un certain nombre de règles que ses agents devaient respecter : désintéressement, impartialité, interdiction d'accepter des cadeaux, interdiction de percevoir des rémunérations provenant de particuliers, interdiction d'accepter des prêts, vie de « bonne renommée », ...

Ces règles ont connu plusieurs évolutions récentes, à la suite notamment de la publication, en 2011, du rapport de la commission de réflexion pour la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique, présidée par M. Jean-Marc Sauvé 6 ( * ) . Celle-ci relevait que les fonctionnaires « ne disposent guère de référentiels précis susceptibles de les aider à éviter ou à faire face aux conflits d'intérêts » 7 ( * ) . L'effet dissuasif des sanctions disciplinaires ou pénales semblait prévaloir sur une approche préventive dans laquelle les fonctionnaires évitent ou font cesser d'eux-mêmes une situation de conflits d'intérêts.

C'est ce renversement de philosophie qui a guidé le législateur dans les évolutions législatives adoptées depuis 2013, afin de passer d'une culture répressive à une culture de responsabilisation des fonctionnaires, en les dotant des outils déontologiques adaptés aux nouvelles attentes de nos concitoyens tout en leur laissant une latitude d'action suffisante pour l'exercice de leurs fonctions.

1. Des dispositifs de prévention des conflits d'intérêts des agents publics renforcés

La loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique dispose que les personnes chargées d'une mission de service public exercent leurs fonctions avec « dignité, probité et intégrité ». Elle a prévu plusieurs dispositifs préventifs - déclarations d'intérêts, déclarations de situation patrimoniale, etc . - et leur contrôle par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui s'appliquent aux élus nationaux et locaux , aux membres du Gouvernement, ainsi qu'à certains hauts fonctionnaires dont la nomination à des emplois relèvent de la décision du Gouvernement (préfets, directeurs d'administrations centrales, etc .).

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a élargi ce corpus à l'ensemble des fonctionnaires. Elle a notamment explicité, au sein du statut général des fonctionnaires, les principes déontologiques applicables à tous les agents publics : dignité, impartialité, intégrité, probité, neutralité et laïcité. En matière de prévention des conflits d'intérêts, elle a élargi le périmètre des agents assujettis à l'obligation de déclaration d'intérêts et de déclaration de situation patrimoniale et créé un référent déontologue dans chaque administration, chargé d'apporter aux agents publics tout conseil utile au respect des obligations déontologiques.

La loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes , issue d'une initiative de nos anciens collègues Mme Marie-Hélène des Esgaulx et MM. Jean-Léonce Dupont et Jacques Mézard, a défini un socle commun de règles déontologiques aux membres des autorités administratives indépendantes (AAI) et des autorités publiques indépendantes (API) : devoir de réserve, disponibilité à temps plein des présidents, incompatibilité avec des mandats électifs ou des fonctions juridictionnelles. Par ailleurs, la HATVP contrôle la compatibilité de l'exercice d'une activité libérale ou d'une activité rémunérée au sein d'un organisme ou d'une entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles du droit privé, avec le mandat de membre d'une AAI ou d'une API jusqu'à trois ans après la cessation du mandat.

Plus récemment, lors de l'examen de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique , le Sénat avait introduit, en première lecture, avec l'avis favorable de votre commission des lois mais contre celui du Gouvernement, quatre articles (articles 2 ter B, 2 ter C, 2 ter D et 2 ter E) visant notamment à interdire à un ancien fonctionnaire le droit d'exercer des activités de conseil en lien avec sa précédente fonction ou activité pendant une durée de trois ans et à un représentant d'intérêts d'exercer toute action pour le compte ou auprès d'une personne de droit public dont il aurait été le fonctionnaire ou l'agent public au cours des trois années précédentes. Ces articles n'ont cependant pas été retenus dans le texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Texte adopté par le Sénat en première lecture sur le projet de loi rétablissant la confiance dans l'action publique, dont est issue la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie publique

[...]

TITRE II BIS A

DISPOSITIONS RELATIVES À LA DÉONTOLOGIE DES FONCTIONNAIRES

(Division et intitulé nouveaux)

Article 2 ter B (nouveau)

Après l'article 25 decies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un article 25 undecies ainsi rédigé :

« Art. 25 undecies. - Il est interdit à tout ancien fonctionnaire ou agent public d'exercer une activité de conseil qui a trait directement ou indirectement aux missions de service public attachées à ses anciennes fonctions pendant un délai de trois ans. »

Article 2 ter C (nouveau)

Après l'article 25 decies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un article 25 duodecies ainsi rédigé :

« Art. 25 duodecies. - Il est interdit à tout ancien fonctionnaire ou agent public en disponibilité et ayant exercé des fonctions pour le compte d'une entreprise publique ou privée ou pour une société de conseil d'occuper une fonction impliquant une mission de service public ou l'exercice de prérogatives de puissance publique directement ou indirectement liés aux secteurs d'activités dans lesquels il est intervenu pendant un délai de trois ans. »

Article 2 ter D (nouveau)

Après le 9° de l'article 18-5 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un 10° ainsi rédigé :

« 10° S'abstenir d'exercer toute action pour le compte ou auprès d'une personne morale de droit public dont ils auraient été le fonctionnaire ou l'agent public dans les trois dernières années. »

Article 2 ter E (nouveau)

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport présentant les mesures mises en oeuvre pour obtenir le remboursement du montant des traitements et indemnités perçues lors de leur scolarité par les anciens élèves de l'École normale supérieure, l'École nationale d'administration et l'École Polytechnique bénéficiant d'une mise en disponibilité et n'ayant pas souscrit à l'engagement de rester au service de l'État pendant la durée minimale prévue par décret.

Le décret n° 2017-929 du 9 mai 2017 relatif à la position de disponibilité des fonctionnaires de l'État souhaitant exercer une activité dans le secteur privé a fixé les conditions de mise en disponibilité des fonctionnaires de l'État, pour convenances personnelles, pour occuper un poste dans le secteur privé ou pour créer ou reprendre une entreprise. Il conditionne l'octroi d'une telle disponibilité à l'accomplissement préalable de quatre ans de services effectifs depuis la titularisation dans le corps au titre duquel les fonctionnaires d'État sont soumis à l'engagement de servir. Lorsque cet engagement n'a pas été intégralement réalisé, la durée de la disponibilité pour convenances personnelles, pour exercer des activités dans le secteur privé concurrentiel, est fixé à trois ans, renouvelable une fois pour une durée d'un an. Le bénéfice d'une nouvelle disponibilité de ce type est subordonné à l'accomplissement de l'intégralité de la période d'engagement de servir.

2. La commission de déontologie de la fonction publique : pivot souvent critiqué de la prévention des conflits d'intérêts des fonctionnaires

La commission de déontologie constitue le pivot de la prévention des conflits d'intérêts pour l'ensemble des agents publics.

Créée en 1991 sous l'appellation « commission de déontologie », consacrée par l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (dite loi « Sapin I »), elle a vu son champ de compétence élargi, d'abord en 2007, puis par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée, qui lui a également donné son appellation actuelle de « commission de déontologie de la fonction publique ».

a) Un périmètre de compétences élargi

L'article 8 de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée a élargi les compétences de la commission de déontologie de la fonction publique en matière de contrôle des départs des agents publics vers le secteur privé.

La commission peut désormais se prononcer sur toutes les questions touchant aux obligations générales des fonctionnaires, aux conflits d'intérêts, aux lanceurs d'alerte dans la fonction publique, aux déclarations d'intérêts et, enfin, aux cumuls d'activités. Elle peut également formuler des avis sur les projets de loi et de décret relatifs à la déontologie.

Initialement chargée de l'examen des cas des fonctionnaires exerçant une activité privée en parallèle de leur emploi public ( cumul d'activités ) ou souhaitant être mis en disponibilité pour travailler dans le secteur privé (« pantouflage » ), pour lesquels elle émettait un avis de compatibilité avec ou sans réserves ou un avis d'incompatibilité sur ces projets professionnels, seul ce dernier liant l'administration, la commission est désormais chargée d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative , salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé ou de toute activité libérale, avec les fonctions exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité par tout fonctionnaire cessant, définitivement ou temporairement, ses fonctions.

Ce contrôle s'exerce en cas de démission ou de mise à la retraite mais également en cas de disponibilité, de détachement, de placement en position hors-cadre, de mise à disposition ou d'exclusion temporaire de l'agent public.

b) Une saisine désormais obligatoire

Autre aspect majeur de la réforme de 2016, la saisine de la commission est désormais rendue obligatoire .

Avant 2017, la saisine de la commission n'était obligatoire, sous réserve d'un pouvoir d'auto-saisine de la commission, que pour les agents publics chargés soit d'assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels contrats, soit de proposer des décisions relatives à des opérations effectuées par une entreprise privée ou de formuler un avis sur de telles décisions. Pour les autres agents, la saisine était facultative.

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée a mis fin à cette distinction entre saisine obligatoire et saisine facultative dont la frontière n'était pas toujours aisée. L'agent public a dorénavant l'obligation de saisir dans tous les cas la commission de déontologie de la fonction publique, préalablement à l'exercice de l'activité envisagée . À défaut, la saisine doit être effectuée par l'autorité administrative dont il relève. À titre subsidiaire, le président de la commission conserve la faculté de saisir la commission d'un cas qui ne lui serait pas soumis, disposant pour cela d'un délai de trois mois à compter de l'embauche du fonctionnaire ou de la création de l'entreprise ou de l'organisme privé.

Dans ce cadre, le contrôle de la commission de déontologie comporte une double dimension :

- d'une part, elle s'assure qu'un départ vers le secteur privé ne conduit pas le fonctionnaire à commettre le délit de prise illégale d'intérêts prévu à l'article 432-13 du code pénal ( contrôle pénal ) ;

- d'autre part, elle veille à ce que l'activité du fonctionnaire dans le secteur privé ne porte pas atteinte à la dignité des fonctions précédemment exercées ou ne risque pas de compromettre ou de mettre en cause le fonctionnement normal, l'indépendance ou la neutralité du service ( contrôle déontologique ).

Selon la récente mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale, « Moins de 2 % des avis constatent une incompatibilité ». Cette faible proportion s'expliquerait par le fait que « De nombreuses situations potentiellement risquées, y compris sur le plan pénal, sont désamorcées très en amont par l'administration en amenant à la renonciation aux fonctions privées envisagées ou par le rapporteur du dossier lors des entretiens avec l'agent concerné lorsque le dossier est parvenu jusqu'à l'instruction ».

c) Une extension du périmètre des agents publics soumis à l'avis de la commission

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée a étendu le périmètre des agents appelés à solliciter l'avis de la commission de déontologie de la fonction publique avant leur départ temporaire ou définitif vers le secteur privé.

Périmètre des agents soumis au contrôle de la commission de déontologie de la fonction publique

Avant 2016, le champ initial des agents publics relevant de la commission de déontologie de la fonction publique recouvrait :

- les fonctionnaires ;

- les agents contractuels de droit public employés par l'État, une collectivité territoriale ou un établissement public, ayant une ancienneté minimale d'un an ;

- les collaborateurs du Président de la République ;

- les membres des cabinets ministériels ;

- les collaborateurs des cabinets des autorités territoriales ;

- les agents contractuels, de droit public ou de droit privé, de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), de l'Établissement français du sang (EFS), de l'Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), de l'Institut de veille sanitaire (InVS), de l'Agence de la biomédecine, de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), organismes mentionnés aux articles L. 1142-22, L. 1222-1, L. 1313-1, L. 1413-2, L. 1418-1 et L. 5311-1 du code de la santé publique ;

- les agents contractuels, de droit public ou de droit privé, des autorités administratives indépendantes (AAI) ;

- les praticiens hospitaliers des établissements de santé, mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique.

L'article 5 de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a élargi le champ de compétence de la commission aux catégories suivantes :

- agents non titulaires employés par l'État, une collectivité territoriale, un établissement public ou une autorité administrative indépendante, sans durée minimale d'emploi ;

- agents de certains organismes oeuvrant dans le domaine de la santé publique :

a. les comités de protection des personnes ;

b. les commissions de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;

c. l'Institut national du cancer ;

d. l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) ;

e. les agences régionales de santé (ARS) ;

f. l'établissement public de gestion administrative et financière de la réserve sanitaire ;

g. la Haute Autorité de santé (HAS) ;

h. l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) ;

i. l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

- agents contractuels des autorités publiques indépendants (API).

d) Une commission qui fait l'objet de nombreuses critiques

Malgré le renforcement de ses prérogatives et de ses compétences, la commission de déontologie de la fonction publique continue de faire l'objet de nombreuses critiques : absence de suivi et de portée réelle de ses avis, risques de collusion entre ses membres et les agents soumis à ses avis, etc .

La récente mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale qualifie d'inabouti le renforcement des compétences de la commission prévu par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée. Elle regrette, par exemple, l'absence de publication des avis rendus par la commission, privant ces derniers de tout effet. Ce point a été soulevé à plusieurs reprises à votre rapporteure.

Si elle constitue une avancée majeure, l'obligation de saisine de la commission de déontologie de la fonction publique n'est, dans les faits, pas encore totalement respectée par l'ensemble des fonctionnaires, des agents contractuels et des administrations qui ne la saisissent toujours pas systématiquement. Par ailleurs, les moyens dont elle dispose ne lui permettent pas d'assumer ses prérogatives de façon toujours satisfaisante, ce qui peut contribuer à affaiblir l'autorité de ses avis.

L'articulation entre les compétences de la commission de déontologie de la fonction publique et celles de la HATVP constitue un autre sujet de critiques et de réflexion. Pour certains, la répartition des compétences entre les deux institutions ne favorise pas la lisibilité du dispositif. Quand la première est chargée de veiller au respect des principes déontologiques de la fonction publique en cas de mobilité d'un agent public vers le secteur privé, la seconde doit s'assurer que l'exercice d'une fonction publique ne conduit pas à un enrichissement personnel. Si les missions sont en principe distinctes, elles peuvent s'exercer à l'égard des mêmes personnes à différents moments de leur vie professionnelle.

Aussi, lors de l'examen en première lecture du projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires , devenu depuis la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée, le Sénat avait prévu l'intégration de la commission de déontologie de la fonction publique au sein de la HATVP. Cette disposition avait été introduite à l'initiative de notre collègue Catherine Di Folco mais n'avait cependant pas été retenue dans le texte élaboré par la commission mixte paritaire.

De même, lors de l'examen du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique , devenu la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 dite « Sapin 2 », le Sénat avait prévu 7 ( * ) , à l'initiative de nos collègues Éliane Assassi et François Pillet, d'étendre, par cohérence, la compétence de la HATVP, limitée aux personnes exerçant des fonctions gouvernementales ou des fonctions exécutives locales, au contrôle de l'activité de certains agents publics relevant de la commission de déontologie de la fonction publique. Cette extension concernait, d'une part, les membres des cabinets ministériels et les collaborateurs du Président de la République et, d'autre part, les personnes exerçant un emploi ou des fonctions à la décision du Gouvernement pour lesquels elles ont été nommées en conseil des ministres. L'Assemblée nationale avait d'ailleurs approuvé cette évolution. Mais ces dispositions ont été censurées par le Conseil constitutionnel au motif qu'elle méconnaissait l'objectif à valeur constitutionnel d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi 8 ( * ) .

En 2017, la commission de déontologie de la fonction publique et la HATVP ont conclu un protocole d'échange d'informations pour faciliter l'exercice de leurs missions respectives. Si on peut se féliciter de cette initiative, l'enchevêtrement de leurs compétences n'en demeure pas moins une source de difficultés et n'est donc pas suffisante aux yeux de votre commission pour résoudre la situation actuelle non satisfaisante.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : AMÉLIORER LA PRÉVENTION DES CONFLITS D'INTÉRÊTS DANS LA FONCTION PUBLIQUE

La proposition de loi n° 205 (2017-2018) présentée par Jean-Claude Requier et plusieurs de nos collègues tend à renforcer la prévention des conflits d'intérêts des hauts fonctionnaires dans le cadre de leur mobilité dans le secteur privé.

Les dispositions adoptées par votre commission ont été guidées par la volonté d'assurer une meilleure prévention des conflits d'intérêts dans la fonction publique, sans décourager une mobilité des fonctionnaires qui présente une utilité réelle à la fois pour les intéressés et pour leurs employeurs publics.

A. LA PROPOSITION DE LOI INITIALE

Selon les auteurs de la proposition de loi, les dispositifs de prévention des conflits d'intérêts doivent être renforcés, « dans le souci de garantir une meilleure transparence des évolutions de carrière et de ne permettre aucune suspicion » des hauts fonctionnaires qui souhaitent effectuer une mobilité vers le secteur privé.

À cette fin, la proposition de loi tend tout d'abord à renforcer les compétences et les prérogatives de la commission de déontologie de la fonction publique , par diverses mesures consistant à :

- conditionner la recevabilité de la demande d'un fonctionnaire souhaitant quitter définitivement la fonction publique pour exercer une activité dans le secteur privé au respect de son engagement d'une durée minimale de services effectifs au sein de la fonction publique, d'une part, et à la présentation de sa démission de la fonction publique préalablement à l'examen de sa demande par la commission de déontologie de la fonction publique, chargée de vérifier la compatibilité de l'activité envisagée dans le secteur privé avec les fonctions précédemment exercées dans la fonction publique, d'autre part ( article 1 er ) ;

- rendre, d'une part, obligatoire la saisine de la commission de déontologie de la fonction publique pour les demandes de mobilité des fonctionnaires soumis à déclaration auprès de la HATVP et, d'autre part, automatique l'ouverture d'une procédure disciplinaire en cas de non-respect de l'avis d'incompatibilité ou de compatibilité avec réserve de la commission ( article 2 ) ;

- confier la présidence de la commission, non plus au conseiller d'État qui en est membre comme c'est le cas aujourd'hui mais, alternativement tous les trois ans, à celui-ci, au conseiller maître à la Cour des comptes et au magistrat de l'ordre judiciaire qui en sont membres ( article 3 ) ;

- étendre son contrôle à la compatibilité des fonctions exercées par les fonctionnaires réintégrés dans la fonction publique après une mobilité dans le secteur privé ( article 4 ) ;

- étendre son contrôle à la nomination des secrétaires ou directeurs généraux des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ( article 5 ).

La proposition de loi tend également à limiter la durée d'un détachement des fonctionnaires à cinq ans, mettant ainsi fin à la distinction entre détachements de courte durée et de longue durée ( article 6 ). Il semblerait toutefois que l'intention des auteurs était en réalité de viser la mise en disponibilité, et non le détachement.

Enfin, la proposition de loi prévoit d'instaurer une peine obligatoire complémentaire d'interdiction d'exercice d'une fonction publique pour les fonctionnaires condamnés aux mêmes infractions que celles donnant lieu au prononcé d'une peine d'inéligibilité ( article 7 ).

B. LA POSITION DE LA COMMISSION

Si votre commission souscrit pleinement à l'objectif d'une prévention renforcée des conflits d'intérêts, fidèle à sa position constamment réaffirmée depuis 2013, les dispositions proposées ne lui paraissent pas toujours pertinentes pour y répondre.

Par ailleurs, plusieurs membres de votre commission ont regretté le calendrier dans lequel intervenait l'examen de cette proposition de loi : en effet, la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée n'est pleinement applicable que depuis le 1 er février 2017, date d'entrée en vigueur des derniers décrets d'application. Aucun bilan n'a à ce jour été effectuer pour mesurer l'efficacité des dispositifs adoptés : leur modification en dehors de toute évaluation leur est apparu prématurée, et risquerait de perturber l'appropriation par les administrations de leurs nouvelles obligations déontologiques.

Plusieurs dispositions de la proposition de loi soulèvent des questions juridiques ou pratiques qui risqueraient de réduire l'attractivité de la fonction publique, sans pour autant permettre d'atteindre efficacement l'objectif recherché.

Tel est le cas des articles 1 er , 2 et 3 , que votre commission a supprimés , à l'initiative de sa rapporteure et de M. François Patriat et des membres du groupe La République en Marche, et en accord avec les auteurs de la proposition de loi.

Votre commission a par ailleurs supprimé l' article 6 . Elle a modifié les articles 4, 5 et 7 pour en affiner le périmètre d'application ou pour en clarifier la rédaction.

Elle a enfin introduit , sur la proposition de sa rapporteure, un article 4 bis tendant à rendre obligatoire la publication des avis de la commission de déontologie de la fonction publique, selon les modalités que celle-ci fixerait. Cette question a été soulevée à de nombreuses reprises à votre rapporteure.

* *

*

Votre commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée .

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er (supprimé) (art. 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) - Subordination de la recevabilité d'une demande de fonctionnaire souhaitant cesser définitivement ses fonctions à sa démission préalable de la fonction publique avant son examen par la commission de déontologie de la fonction publique

Supprimé par votre commission, qui a adopté l'amendement COM-4 de sa rapporteure, l'article 1 er de la proposition de loi tend à durcir les conditions de recevabilité d'une demande de démission de la fonction publique d'un fonctionnaire souhaitant exercer une activité professionnelle dans le secteur privé.

Le III de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires fait actuellement obligation à tout fonctionnaire cessant définitivement ou temporairement ses fonctions ou, le cas échéant, à l'autorité dont il relève dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine de saisir à titre préalable la commission de déontologie de la fonction publique « afin d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé, ou de toute activité libérale, avec les fonctions exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité . » Est assimilé à une entreprise privée tout organisme ou toute entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles de droit privé.

Le IV de ce même article permet à la commission de déontologie de la fonction publique de recueillir auprès des personnes publiques ou privées toute information nécessaire, de même qu'entendre ou consulter toute personne dont le concours lui paraît utile. Elle peut échanger, avec la HATVP, les informations nécessaires à l'accomplissement de leurs missions respectives, y compris celles couvertes par le secret professionnel. À ce titre, les deux institutions ont conclu, en 2017, un protocole d'échange d'informations. La commission de déontologie de la fonction publique est aussi informée de tout fait relatif à une situation de conflits d'intérêts relatés ou ayant fait l'objet d'un témoignage dans les conditions fixées à l'article 6 ter A de la loi n° 83-634 précitée dès lors que ces faits concernent des fonctions exercées ou ayant été exercées au cours des trois années antérieures par le fonctionnaire.

L'article 1 er de la proposition de loi tend à compléter ces dispositions pour prévoir que : « Dans le cas de l'examen d'une demande de cessation définitive de ses fonctions, le fonctionnaire transmet à la commission la preuve de sa démission de la fonction publique et du respect de son engagement décennal ou, le cas échéant, des remboursements de frais de scolarité nécessaires, selon des conditions déterminées par décret . » En d'autres termes, tout agent public devrait fournir à la commission, préalablement à son examen, la preuve de sa démission et du respect d'au moins dix années de services dans la fonction publique. Dans le cas où cette période décennale ne serait pas respectée, l'agent public devrait apporter la preuve du remboursement de sa pantoufle ou des frais de scolarité pour les fonctionnaires stagiaires. Un décret préciserait les modalités de cette disposition.

Cet article soulève au moins trois séries d'interrogations.

En premier lieu, la cessation définitive de fonctions au sein de la fonction publique concerne soit la mise en retraite, soit la démission, soit la révocation. La disposition proposée ne semble viser que le cas de la démission d'un fonctionnaire. La présentation préalable de sa démission par un fonctionnaire serait contradictoire avec le premier alinéa du III de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée selon lequel « le fonctionnaire cessant définitivement ou temporairement ses fonctions (...) saisit à titre préalable la commission afin d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé, ou de toute activité libérale, avec les fonctions exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité . » En d'autres termes, comme l'a rappelé M. Roland Peylet, président de la commission de déontologie de la fonction publique, à votre rapporteure, l'administration ne peut prendre une décision administrative avant que la commission de déontologie n'ait été saisie et statué sur la demande de l'agent. Or les dispositions proposées tendent à imposer que la démission soit effective avant la saisine de la commission de déontologie de la fonction publique, ce qui soulève une question d'articulation. Il pourrait être plus pertinent de donner à la commission la faculté de s'assurer de l'effectivité de la démission de l'agent après avoir rendu son avis.

En deuxième lieu, l'obligation faite au fonctionnaire désireux d'exercer définitivement une activité professionnelle dans le secteur privé de démissionner de la fonction publique avant de connaître l'avis de la commission de déontologie de la fonction publique pourrait soulever une difficulté si cet avis était négatif ou si, en raison des délais d'examen trop longs de la commission, l'offre proposée par une entreprise privée était retirée. Il ne semble pas y avoir lieu d'imposer à un fonctionnaire désireux de quitter définitivement la fonction publique de courir un tel risque. Mieux vaudrait renforcer les dispositifs de prévention des conflits d'intérêts.

Enfin, en troisième lieu, la durée de l'engagement minimal de servir dans la fonction publique varie selon les corps et cadres d'emplois. Selon les données recueillies auprès de la direction générale de l'administration et de la fonction publique et du secrétaire général du Gouvernement, il n'existe aucune règle générale en la matière. À titre d'exemple, les élèves de l'École nationale d'administration sont soumis à un engagement décennal à l'issue de leur scolarité. Les élèves des instituts régionaux d'administration sont quant à eux soumis à un engagement quinquennal à compter de leur titularisation. Par ailleurs, le décompte de l'engagement minimal au service de l'État ne s'opère pas selon les mêmes modalités (prise en compte ou non des années de scolarité, etc .) : à titre d'exemple, les élèves des écoles normales supérieures ont un engagement décennal qui inclut leurs quatre années d'études. Enfin, le remboursement de la pantoufle dépend du corps ou du cadre d'emplois dont relève le fonctionnaire et n'est pas nécessairement calée sur les frais de scolarité. Chaque corps ou chaque administration dispose de ses propres règles de gestion. Il n'existe donc pas de dispositions générales en la matière.

Compte tenu de ces difficultés, votre commission a adopté l' amendement de suppression COM-4 de sa rapporteure.

La commission a supprimé l'article 1 er .

Article 2 (supprimé) (art. 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) - Saisine obligatoire de la commission de déontologie de la fonction publique pour les demandes de mobilité de fonctionnaires soumis à déclaration auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique

Supprimé par votre commission, qui a adopté les amendements de suppression COM-5 de sa rapporteure et COM-1 de M. François Patriat et des membres du groupe La République en Marche, l'article 2 de la proposition de loi tend à rendre :

- d'une part, obligatoire la saisine de la commission de déontologie de la fonction publique pour les demandes de mobilité des fonctionnaires soumis à déclaration auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) ;

- d'autre part, automatique l'ouverture d'une procédure disciplinaire en cas de non-respect de l'avis d'incompatibilité ou de compatibilité avec réserve de la commission.

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée a renforcé la compétence de la commission de déontologie de la fonction publique en matière de cumul d'activités et de pantouflage.

Elle est désormais chargée d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé ou de toute activité libérale, avec les fonctions exercées au cours des trois dernières années précédant le début de cette activité par tout fonctionnaire cessant, définitivement (démission ou mise à la retraite) ou temporairement (disponibilité, détachement, hors cadre, mise à disposition ou exclusion temporaire de l'agent public) ses fonctions.

Comme cela a déjà été indiqué au commentaire de l'article 1 er , la notion d'entreprise privée est entendue de manière large puisqu'elle recouvre « tout organisme ou entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles de droit privé » 9 ( * ) . Cette définition est également celle retenue pour le contrôle de la HATVP pour la reconversion professionnelle des ministres et des exécutifs locaux.

Depuis le 1 er février 2017, date d'entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée, tout agent doit désormais saisir obligatoirement la commission de déontologie de la fonction publique, préalablement à l'exercice de l'activité envisagée. À défaut, cette saisine doit être effectuée par l'autorité administrative dont il relève « dans son corps ou cadre d'emplois d'origine ». A titre subsidiaire, la commission de déontologie de la fonction publique peut être saisie par son président dans un délai de trois mois à compter de l'embauche du fonctionnaire ou de la création de l'entreprise ou de l'organisme privé.

Dans ce cadre, la commission apprécie si l'activité exercée ou que projette d'exercer l'agent risque de compromettre ou de mettre en cause le fonctionnement normal, l'indépendance ou la neutralité du service, de méconnaître les principes déontologiques mentionnés à l'article 25 de la loi n° 83-634 10 ( * ) du 13 juillet 1983 précitée ou de placer l'intéressé dans une situation de prise illégale d'intérêts, dans les conditions prévues à l'article 432-13 du code pénal.

Le 1° de l' article 2 de la proposition de loi tend à prévoir la saisine de la commission de déontologie de la fonction publique par son président « lorsque le fonctionnaire exerce l'un des emplois dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient », c'est-à-dire les emplois soumis aux obligations de déclarations d'intérêts et de situation patrimoniale mentionnés à l'article 25 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée.

Le 2° de l'article 2 vise à rendre obligatoire - et non plus facultative, comme aujourd'hui - l'engagement de poursuites disciplinaires, par son administration d'origine, à l'encontre d'un fonctionnaire qui ne respecterait pas les avis rendus par la commission en cas de compatibilité avec réserves ou d'incompatibilité.

Ces deux propositions soulèvent plusieurs difficultés.

Le 1° soulève un évident problème d'application : pour rendre effective la saisine de la commission par son président, encore faut-il que ce dernier soit effectivement informé de la mobilité d'un fonctionnaire soumis à une obligation déclarative ou dispose des moyens pour bénéficier d'une information en temps utile, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Par ailleurs, la disposition proposée pose un problème d'articulation avec la compétence de la HATVP. Celle-ci recueille, dans les deux mois suivant la cessation des fonctions, les déclarations d'intérêts et de situation patrimoniale du fonctionnaire concerné afin d'apprécier l'absence de tout enrichissement personnel lié à l'exercice de ces fonctions. Le 1° de l'article 2 de la proposition de loi invite le président de la commission de déontologie de la fonction publique à se saisir dans les trois mois suivant la cessation des fonctions. Or, si un fonctionnaire soumis aux obligations déclaratives relevant de la HATVP décide de quitter ses fonctions pour en exercer de nouvelles, il doit préalablement saisir la commission de déontologie de la fonction publique pour vérifier la compatibilité de ses nouvelles fonctions avec celles exercées précédemment. Ce n'est qu'à l'issue de l'avis positif de la commission de déontologie de la fonction publique que le fonctionnaire adressera à la HATVP ses déclarations d'intérêts et de situation patrimoniale. Les fonctionnaires soumis aux obligations déclaratives relevant de la HATVP ne sont pas exemptés de la saisine de la commission de déontologie de la fonction publique en cas de mobilité vers le secteur privé, en vertu du III de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée. Le 1° apparaît donc superfétatoire.

Quant au 2°, les personnes entendues par votre rapporteure ont émis de vives réserves quant à l'obligation, pour l'administration d'origine du fonctionnaire, d'engager des poursuites disciplinaires obligatoires en cas de non-respect des avis d'incompatibilité et de compatibilité avec réserves de la commission de déontologie de la fonction publique. Par ailleurs, l'engagement de poursuites disciplinaires ne rend pas automatique la prise de sanctions.

C'est pourquoi, sur proposition de sa rapporteure et de M. François Patriat et des membres du groupe La République en Marche, votre commission a adopté les amendement de suppression COM-5 et COM-1 .

Votre commission a supprimé l'article 2.

Article 3 (supprimé) (art. 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) - Présidence tournante de la commission de déontologie de la fonction publique

Supprimé par votre commission, qui a adopté l'amendement COM-6 de sa rapporteure, l'article 3 de la proposition de loi tend à prévoir une présidence tournante de la commission de déontologie de la fonction publique.

La composition actuelle de la commission de déontologie de la fonction publique est issue de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 précitée et prévue au VII de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée.

Présidée de droit par un conseiller d'État 11 ( * ) , elle comprend en outre un conseiller maître à la Cour des comptes, un magistrat de l'ordre judiciaire et trois personnalités qualifiées, dont l'une au moins doit avoir exercé des fonctions au sein d'une entreprise privée.

A ces six membres permanents , s'ajoutent :

- lorsqu'elle exerce ses attributions à l'égard d'un agent de la fonction publique de l'État ou d'une autorité administrative indépendante , deux directeurs d'administration centrale ;

- lorsqu'elle exerce ses attributions à l'égard d'un agent de la fonction publique territoriale , un représentant d'une association d'élus de la catégorie de collectivité dont relève l'intéressé, ainsi que le directeur ou ancien directeur des services d'une collectivité territoriale ;

- lorsqu'elle exerce ses attributions à l'égard d'un agent de la fonction publique hospitalière , une personnalité qualifiée dans le domaine de la santé publique, ainsi qu'un inspecteur général des affaires sociales ou un ancien directeur d'hôpital ;

- lorsqu'elle exerce ses attributions à l'égard des personnels du service public de la recherche , deux personnalités qualifiées dans le domaine de la recherche ou de la valorisation de la recherche.

Enfin, selon le cas, le directeur du personnel du ministère ou de l'établissement public ou le chef du corps dont relève l'agent concerné, l'autorité investie du pouvoir de nomination dans la collectivité territoriale dont relève l'agent concerné, le directeur de l'établissement hospitalier ou de l'établissement social ou médico-social dont relève l'agent concerné, assiste aux séances de la commission, sans voix délibérative.

En conséquence, la commission siège en quatre formations spécialisées - composées de neuf membres - compétentes respectivement pour la fonction publique de l'État, la fonction publique territoriale, la fonction publique hospitalière et les personnels du service public de la recherche. Elle peut également siéger en formation plénière - composée de quatorze membres - pour les questions d'intérêt commun.

Les membres de la commission sont nommés par décret pour une durée de trois ans, renouvelable une fois, dans le respect du principe de parité, la commission comptant autant d'hommes que de femmes.

L' article 3 de la proposition de loi tend à confier la présidence de cette commission, aujourd'hui assurée de droit par le conseiller d'État qui en est membre, alternativement à ce même conseiller d'État, au conseiller maître à la Cour des comptes ou au magistrat de l'ordre judiciaire, pour une durée de trois ans. En d'autres termes, à chaque renouvellement de la commission, la présidence serait alternativement assurée par un de ses trois membres.

Les personnes entendues par votre rapporteure ont émis de fortes réserves sur cette disposition. Il importe en effet, d'une part, de confier la présidence de la commission à une personne ayant une fine connaissance du fonctionnement de l'administration, d'autre part, de permettre une certaine continuité dans l'exercice de ces fonctions, étant rappelé que le président n'a pas de voix prépondérante au sein de la commission. Les personnes entendues par votre rapporteure ont émis de fortes réserves sur cette disposition, estimant qu'elle reviendrait à confier la présidence d'une commission administrative à des magistrats ne relevant pas de l'ordre administratif.

C'est pourquoi, par l'adoption de l' amendement COM-6 de sa rapporteure, votre commission a supprimé l'article 3.

Article 4 (art. 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) - Extension du contrôle de la commission de déontologie de la fonction publique

L'article 4 de la proposition de loi tend à prévoir le contrôle par la commission de déontologie de la fonction publique de la compatibilité des fonctions exercées par les fonctionnaires réintégrés dans la fonction publique après une mobilité dans le secteur privé.

À cette fin, il prévoit l'insertion d'un III bis au sein de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée en vertu duquel, après une période de détachement ou de disponibilité, la commission devrait apprécier « si l'activité exercée lors de cette période est susceptible de compromettre ou de mettre en cause le fonctionnement normal, l'indépendance ou la neutralité du service, de méconnaitre tout principe déontologique mentionné à l'article 25 » de la même loi (1°) et une coordination au V de ce même article 25 octies (2°).

Comme votre rapporteure l'a rappelé précédemment, la commission de déontologie de la fonction publique est, aujourd'hui, uniquement compétente lors du départ d'un agent public vers le secteur privé , pour apprécier la compatibilité des fonctions exercées par ce dernier au cours des trois années précédentes avec celle qu'il exercerait au sein d'une entreprise du secteur concurrentiel, dans les conditions fixées par le III de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée.

L'article 4 de la proposition de loi tend à élargir cette disposition au retour d'un agent public dans la fonction publique , après une partie de carrière effectuée, par une disponibilité ou un détachement, dans un organisme privé à but lucratif. Comme lors de son contrôle exercé lors du départ d'un fonctionnaire dans le secteur privé, la commission de déontologie de la fonction publique devrait apprécier la compatibilité de la nouvelle affectation du fonctionnaire dans la fonction publique avec les fonctions précédemment exercées dans le secteur concurrentiel.

Cette disposition ne serait opérante qu'une fois connue l'affectation du fonctionnaire, ainsi réintégré dans la fonction publique. Son champ d'application dépasse largement celui de la haute fonction publique et s'appliquerait ainsi à l'ensemble des fonctionnaires. Or, étant donné les moyens humains dont elle dispose, il conviendra de s'assurer que la commission pourra assumer cette extension de son champ de compétences.

Souscrivant aux dispositions proposées, votre commission a adopté l' amendement COM-7 de sa rapporteure, tendant à les préciser et à renvoyer à un décret la fixation des emplois qui feraient l'objet d'un tel contrôle. Il importe en effet éviter que tout retour dans la fonction publique puisse être perçu comme un moyen de favoriser ses employeurs passés.

Il est à noter que cette disposition ne s'appliquerait pas aux personnels contractuels, qui peuvent également bénéficier d'un congé pour création d'entreprise d'une durée d'un an renouvelable une fois. Votre rapporteure, en l'état actuel de sa réflexion, n'a pas souhaité leur étendre ce dispositif, compte tenu de la faiblesse des moyens dont dispose la commission de déontologie de la fonction publique.

La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié .

Article 4 bis (nouveau) (art. 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) - Publicité des avis rendus par la commission de déontologie de la fonction publique

Le présent article, issu de l'adoption, par votre commission, de l' amendement COM-8 de sa rapporteure, vise à assurer la publicité des avis de la commission de déontologie de la fonction publique, selon les modalités qu'elle définirait elle-même.

Les auditions menées par votre rapporteure ont souligné la nécessité, pour les administrations, de connaître les avis rendus par la commission. Cela permettrait en outre de renforcer la doctrine de la commission.

Cette mesure a également été proposée par la récente mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur la déontologie des fonctionnaires et l'encadrement des conflits d'intérêts.

Votre commission a adopté l'article 4 bis ainsi rédigé .

Article 5 (art. 17 bis (nouveau) de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes) - Extension du contrôle de la commission de déontologie de la fonction publique au recrutement des secrétaires généraux et directeurs généraux des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes

L'article 5 de la proposition de loi tend à étendre le contrôle de la commission de déontologie de la fonction publique au recrutement des secrétaires et directeurs généraux et, plus généralement, à toute autre personne participant à l'activité de contrôle des autorités administratives indépendantes (AAI) et des autorités publiques indépendantes (API), afin que la commission puisse se prononcer sur la compatibilité de leurs activités passées ou futures avec les fonctions exercées au sein de l'autorité.

Le chapitre I er du titre III de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes regroupe les dispositions applicables aux personnels des AAI et des API.

L'article 16 de cette loi rappelle l'autonomie de recrutement des AAI et des API qui peuvent avoir recours de manière indifférenciée à des fonctionnaires mis à disposition ou détachés, d'une part, et à des agents contractuels, d'autre part. Cette autonomie de recrutement est justifiée par les domaines spécialisés dans lesquels interviennent ces autorités, qui nécessitent un personnel qualifié dont les compétences complètent et renforcent celles des membres de leurs collèges.

L'article 17 précise, quant à lui, que le secrétaire général ou le directeur général de ces autorités est nommé par le président de cette autorité.

L'article 5 de la proposition de loi vise à renforcer la prévention des conflits d'intérêts au sein des AAI et des API. Elle complèterait l'arsenal déjà prévu par le législateur en la matière avec notamment :

- la limitation de la durée du mandat des membres d'une AAI et d'une API entre trois et six ans ;

- le caractère irrévocable du mandat et la possibilité d'un seul renouvellement ;

- l'application des principes de dignité, de probité et d'intégrité pour l'exercice des fonctions de membres d'une AAI ou API ;

- la soumission des membres à diverses incompatibilités ;

- des obligations de déport dans certains cas prévus à l'article 12 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 précitée.

Loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes

(...)

Article 10

I. - A l'exception des députés et sénateurs, le mandat de membre d'une autorité administrative indépendante ou d'une autorité publique indépendante est incompatible avec :

1° La fonction de maire ;

2° La fonction de président d'un établissement public de coopération intercommunale ;

3° La fonction de président de conseil départemental ;

4° La fonction de président de la métropole de Lyon ;

5° La fonction de président de conseil régional ;

6° La fonction de président d'un syndicat mixte ;

7° Les fonctions de président du conseil exécutif de Corse et de président de l'Assemblée de Corse ;

8° Les fonctions de président de l'assemblée de Guyane ou de l'assemblée de Martinique et de président du conseil exécutif de Martinique ;

9° La fonction de président de l'organe délibérant de toute autre collectivité territoriale créée par la loi ;

10° La fonction de président de l'Assemblée des Français de l'étranger.

II. - La fonction de président d'une autorité administrative indépendante ou d'une autorité publique indépendante est également incompatible avec :

1° La fonction de maire d'arrondissement, de maire délégué et d'adjoint au maire ;

2° La fonction de vice-président de l'organe délibérant ou de membre de l'organe exécutif d'une collectivité territoriale mentionnée au I ;

3° La fonction de vice-président d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'un syndicat mixte ;

4° La fonction de membre du bureau de l'Assemblée des Français de l'étranger et de vice-président de conseil consulaire.

III. - Aucun membre d'une autorité administrative indépendante ou d'une autorité publique indépendante ne peut exercer des fonctions de chef d'entreprise, de gérant de société, de président ou membre d'un organe de gestion, d'administration, de direction ou de surveillance ou une nouvelle activité professionnelle au sein d'une personne morale ou d'une société qu'elle contrôle au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce si cette personne morale ou cette société a fait l'objet d'une délibération, d'une vérification ou d'un contrôle auquel il a participé au cours des deux années précédentes.

IV. - Lorsqu'il est exercé à temps plein, le mandat de membre d'une autorité administrative indépendante ou d'une autorité publique indépendante est incompatible avec l'exercice par les membres de l'autorité d'une activité professionnelle ou d'un emploi public. Le président de l'autorité peut toutefois autoriser l'exercice de travaux scientifiques, littéraires, artistiques ou d'enseignement.

V. - Lorsque la loi prévoit la présence, au sein du collège d'une autorité administrative indépendante ou d'une autorité publique indépendante, de membres désignés parmi les membres en activité du Conseil d'État, de la Cour des comptes, du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et du corps des magistrats des chambres régionales des comptes, il ne peut être désigné d'autre membre en activité du même corps, à l'exclusion du président de l'autorité concernée.

(...)

Article 12

Aucun membre de l'autorité administrative indépendante ou de l'autorité publique indépendante ne peut siéger ou, le cas échéant, ne peut participer à une délibération, une vérification ou un contrôle si :

1° Il y a un intérêt, au sens de l'article 2 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 précitée, ou il y a eu un tel intérêt au cours des trois années précédant la délibération, la vérification ou le contrôle ;

2° Il exerce des fonctions ou détient des mandats ou, si au cours de la même période, il a exercé des fonctions ou détenu des mandats au sein d'une personne morale concernée par la délibération, la vérification ou le contrôle ;

3° Il représente ou, au cours de la même période, a représenté une des parties intéressées.

L'article 5 de la proposition de loi tend à élargir la compétence de la commission de déontologie de la fonction publique au recrutement de certains fonctionnaires des AAI et des API alors que sa compétence actuelle se limite à leur départ vers le secteur privé. Seraient concernés les secrétaires, délégués généraux et, plus généralement, de toute autre personne participant à l'activité de contrôle des AAI et des API.

Cet élargissement apparaît bienvenu compte tenu des missions spécifiques exercées par ces autorités, qui réclament de la part de leur personnel comme de leurs membres une neutralité totale dans l'exercice de leurs fonctions. Tout conflit d'intérêts ou soupçon de conflit d'intérêts pourrait nuire à la qualité des décisions rendues.

Quant au départ de ces fonctionnaires dans le secteur privé, il est inclus dans les compétences actuelles de la commission de déontologie de la fonction publique.

Approuvant ce dispositif, votre commission a adopté l' amendement COM-9 de sa rapporteure qui vise, d'une part, à élargir le champ de compétence de la commission au recrutement des secrétaires et des directeurs généraux (improprement appelés « délégués » dans la proposition de loi) des AAI et des API - le départ de ces agents publics relevant déjà de la commission de déontologie -, à l'exclusion des autres personnes participant à l'activité de contrôle de ces autorités, d'autre part, à préciser que le contrôle de la commission porterait sur les fonctions effectivement exercées les trois années précédant le recrutement.

La commission a adopté l'article 5 ainsi modifié .

Article 6 (supprimé) (art. 13 bis de la loi n° 83-64 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; art. 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ; art. 64 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; art. 51 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) - Limitation à cinq ans de la durée maximale d'un détachement

Supprimé par votre commission, par l'adoption de l' amendement COM-10 de sa rapporteure, l'article 6 de la proposition de loi vise à limiter à cinq ans la durée d'un détachement.

Le détachement est la position d'un fonctionnaire titulaire placé, sur sa demande ou par l'administration, hors de son cadre d'emplois , emploi ou corps d'origine. Il exerce ses fonctions et est rémunéré selon les règles applicables dans son corps ou cadre d'emplois d'accueil. Il continue cependant à bénéficier dans ce cadre d'emplois, emploi ou corps d'origine, de ses droits à l'avancement et à la retraite.

Le détachement s'effectue dans un cadre d'emplois ou dans un corps de même catégorie et de niveau comparable, apprécié au regard des conditions de recrutement ou du niveau des missions prévues par les statuts particuliers. Si le corps d'origine ou d'accueil ne relève d'aucune catégorie, le détachement s'effectue entre corps ou cadre d'emplois de niveau comparable.

Le détachement est une des formes de mobilité des fonctionnaires, soit au sein de la fonction publique dont ils relèvent, soit entre les trois fonctions publiques sur des emplois de fonctionnaires ou de contractuels. Hormis les professions réglementées, dont l'accès est conditionné par la détention d'un diplôme, d'un agrément, ou de la réalisation de formations particulières, tous les cadres d'emplois sont accessibles par la voie du détachement.

Un fonctionnaire bénéficie d'un droit à intégration au-delà de cinq ans de détachement dans son administration d'accueil.

En vertu de l'article 7 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l'intégration , le détachement peut être, soit de courte durée (au plus égal à six mois, non renouvelable), soit de longue durée (au plus égal à cinq ans, renouvelable par périodes ne pouvant excéder cinq ans, sauf cas particuliers).

Les cas de détachement

Les cas de détachement sont énumérés à l'article 2 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 précité. Les plus fréquents sont :

Détachements discrétionnaires :

- auprès d'une administration de l'État, de la même collectivité territoriale sur un cadre d'emplois différent , d'une autre collectivité territoriale ou d'un établissement public , d'une entreprise publique ou d'un groupement d'intérêt public ;

- auprès d'un établissement public de la fonction publique territoriale ;

- vers un organisme privé , ainsi que pour participer à des missions de coopération internationale ;

- pour collaborer avec un député, un sénateur ou un représentant au Parlement européen, ou pour exercer les fonctions de collaborateur de cabinet.

Détachements de droit :

- pour exercer un mandat syndical, accomplir un stage ou une période de scolarité préalable à sa titularisation ou suivre un cycle de préparation à un concours donnant accès à un emploi public ;

- pour exercer les fonctions de membre du gouvernement ou d'une fonction publique élective (exemple : pour accomplir un mandat local lorsqu'il cesse d'exercer son activité professionnelle).

L'article 6 de la proposition de loi vise à modifier l'article 13 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée pour élever, au niveau législatif, la disposition selon laquelle la durée d'un détachement ne pourrait excéder cinq ans. Aujourd'hui, ne figure dans la loi que la mention qu'un détachement peut être de courte ou de longue durée, la durée effective étant précisée dans le décret précité n° 86-68. Il serait ainsi mis fin à cette distinction.

Les II, III et IV de l'article 6 procède aux coordinations nécessaires aux articles 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État , 64 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et 51 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière , en supprimant la référence selon laquelle le détachement peut être de courte ou de longue durée.

Cet article apparaît particulièrement surprenant dans la mesure où, sauf cas extrêmement rares, le détachement d'un agent public s'effectue entre deux administrations publiques. Par ailleurs, en limitant à cinq ans la durée maximale d'un détachement, tout fonctionnaire perdrait le bénéfice de l'intégration dans son administration d'accueil, ce qui serait préjudiciable à la fois pour les fonctionnaires et pour les administrations pour lesquelles le détachement représente une souplesse dans la gestion de leurs agents.

En outre, il convient de rappeler que le détachement n'est pas la position administrative permettant la mobilité d'un fonctionnaire vers le secteur privé concurrentiel, sauf exceptions expressément prévue. Le départ vers le secteur privé s'effectue dans le cadre d'une mise en disponibilité.

Selon les éléments recueillis par votre rapporteure, il semblerait que la disposition proposée viserait en réalité les cas de mise en disponibilité des fonctionnaires pour exercer une activité dans le secteur privé. La mise en disponibilité est la situation d'un fonctionnaire qui cesse d'exercer son activité professionnelle pendant une certaine période. Il est alors placé temporairement hors de son administration d'origine et cesse de bénéficier de sa rémunération et de ses droits à l'avancement et à la retraite. La mise en disponibilité peut intervenir soit à la demande du fonctionnaire, soit à l'initiative de l'administration. Elle ne peut excéder une durée de dix ans.

Les conditions de réintégration d'un fonctionnaire en fin de disponibilité varient selon la fonction publique d'appartenance, le motif pour lequel la disponibilité a été accordée et/ou sa durée.

Motifs, durées et conditions de mise en disponibilité

Cas de disponibilité

Motif

Durée

Conditions d'attribution

Raisons familiales

Élever un enfant de moins de 8 ans

3 ans maximum renouvelables jusqu'au 8 ans de l'enfant

Accordée de droit

Donner des soins à un enfant à charge, à l'époux-se, au partenaire de Pacs, à un ascendant à la suite d'un accident ou d'une maladie grave ou atteint d'un handicap nécessitant la présence d'une tierce personne

3 ans maximum renouvelables tant que la présence d'une tierce personne est justifiée

Suivre son époux-se ou partenaire de Pacs tenu de déménager pour des raisons professionnelles

3 ans maximum renouvelables sans limitation

Se rendre en outre-mer ou à l'étranger pour adopter un ou des enfants

6 semaines maximum par agrément

Convenances personnelles

Convenances personnelles

3 ans renouvelables dans la limite de 10 ans pour toute la carrière

Accordée sous réserve des nécessités du service

Exercice d'une autre activité

Création ou reprise d'entreprise

2 ans maximum

Accordée sous réserve que l'activité envisagée soit compatible avec les activités exercées dans le secteur public au cours des 3 années précédentes

Études ou recherches présentant un intérêt général

3 ans renouvelables une fois 3 ans

Accordée sous réserve des nécessités du service

Exercer un mandat d'élu local (FPE ou FPT)

Durée du mandat électif

Accordée de droit

Exercer une activité dans un organisme international (FPH)

3 ans renouvelables une fois 3 ans

Accordée sous réserve des nécessités du service

Source : service-public.fr

L'ensemble des personnes entendues par votre rapporteure ont exprimé de vives réserves sur cet article. En cas d'application à la mise en disponibilité pour exercer une activité dans le privé, il apporterait des contraintes difficilement justifiables, dans un contexte où la mobilité est devenue un outil de valorisation des carrières. Par ailleurs, la durée de cinq ans ainsi imposée apparaît particulièrement courte et obligerait le fonctionnaire à choisir son retour dans la fonction publique ou sa démission de celle-ci avant même de pouvoir valoriser son expérience. Or la réintégration dans son administration d'origine à la suite d'une mise en disponibilité n'est pas de droit.

Par ailleurs, une telle disposition n'est pas le meilleur moyen pour atteindre l'objectif d'une meilleure prévention des conflits d'intérêts dans la fonction publique. Elle pourrait au contraire concourir à un manque d'attractivité de la fonction publique pour les talents dont notre administration a besoin.

C'est pourquoi, par l'adoption de l' amendement COM-10 de sa rapporteure, votre commission a supprimé l'article 6.

Article 7 (art. 131-11-1 (nouveau) du code pénal) - Institution d'une peine complémentaire obligatoire d'interdiction d'exercer une fonction publique pour les fonctionnaires coupables de crimes ou de certains délits

L'article 7 de la proposition de loi a pour objet l'instauration d'une peine complémentaire obligatoire d'interdiction d'exercer une fonction publique pour un fonctionnaire condamné pour les mêmes infractions que celles donnant lieu au prononcé d'une peine d'inéligibilité.

Le nouvel article 131-11-1 du code pénal que propose d'insérer l'article 7 dans la sous-section 3 de la section 1 du chapitre I er du titre III du livre I er du code pénal reprend les dispositions déjà existantes en matière d'inéligibilité des élus, prévue à l'article 131-26-2 du même code. Votre rapporteure renvoie à l'excellente analyse de notre collègue Philippe Bas, sur les dispositions de cet article modifié par l'article 1 er de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 précitée 12 ( * ) .

En vertu d'une jurisprudence désormais bien établie sur l'inconstitutionnalité des peines automatiques, le Conseil constitutionnel estime qu'une telle sanction ne peut être appliquée que si le juge l'a expressément prononcée, en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce. Cette jurisprudence prohibe donc l'instauration de toute peine automatique et de toute disposition pouvant s'assimiler à une peine d'incapacité automatique.

En revanche, le Conseil constitutionnel admet des peines complémentaires obligatoires dès lors que le juge n'est pas privé du pouvoir d'individualisation des peines, en en modulant la durée et en y dérogeant compte tenu des circonstances de l'infraction et de la personnalité de l'auteur.

La loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 précitée a instauré une peine complémentaire obligatoire d'inéligibilité en cas de condamnation pour les délits correspondant à des manquements au devoir de probité commis par les personnes exerçant une fonction publique, mais également pour les délits de corruption active et de trafic d'influence commis par des particuliers. Cette disposition n'assortit pas automatiquement une condamnation pénale d'une peine complémentaire d'inéligibilité mais elle oblige le juge à se prononcer sur cette peine.

Reprenant la philosophie et les dispositions déjà prévues pour les élus locaux et nationaux, l'article 7 de la proposition de loi prévoit de soumettre les fonctionnaires à cette peine complémentaire obligatoire pour les crimes et délits qu'il énumère, et notamment :

- les délits de fraude fiscale aggravée ;

- les délits d'initiés ;

- les délits de corruption et de trafic d'influence des personnes concourant au fonctionnement de la justice, d'agents publics d'un État ou d'une organisation étrangère publique ;

- les délits de corruption de personnes n'exerçant pas une fonction publique ;

- le blanchiment des infractions précitées ;

- les infractions de faux administratifs ;

- les infractions relatives aux élections, au financement des campagnes électorales et des partis politiques ;

- les manquements aux obligations déclaratives à la HATVP.

Plusieurs délits mentionnés n'ont toutefois aucun lien avec l'exercice des fonctions confiées à un fonctionnaire.

Délits énumérés par l'article 7 de la proposition de loi

Code

Article

Disposition

Code pénal

222-9

Violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente

222-11

Violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours

222-12

Circonstances aggravantes de l'article 222-11

222-14

Violences habituelles sur un mineur de quinze ans ou sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur

222-14-1

Violences commises en bande organisée ou avec guet-apens avec usage ou menace d'une arme sur un fonctionnaire de police nationale, un militaire de la gendarmerie, un membre du personnel de l'administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l'autorité publique, ou sur un sapeur-pompier civil ou militaire ou un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs dans l'exercice, à l'occasion de l'exercice ou en raison de ses fonctions ou de sa mission

222-14-4

Le fait, dans le but de contraindre une personne à contracter un mariage ou à conclure une union à l'étranger, d'user à son égard de manoeuvres dolosives afin de la déterminer à quitter le territoire de la République

222-15

Administration de substances nuisibles ayant porté atteinte à l'intégrité physique ou psychique d'autrui

222-15-1

Embuscade

222-27 à
222-31

Agressions sexuelles autres que le viol

222-31-1 à 222-31-2

Inceste

222-32 à
222-33

Exhibition et harcèlement sexuel

222-33-1

Responsabilité des personnes morales

222-33-2-1 à 222-33-2-2

Harcèlement

225-1 à
225-2

Discrimination

313-1

Escroquerie

313-2

Circonstances aggravantes

314-1

Abus de confiance

Chapitre I er du titre II du livre IV

Actes de terrorisme

432-10

Concussion

432-11 à 432-11-1

Corruption passive et trafic d'influence commis par des personnes exerçant une fonction publique

432-12 à
432-13

Prise illégale d'intérêts

432-14

Atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics et les contrats de concession

432-15

Soustraction et détournement de biens

433-1 et
433-2

Corruption active et trafic d'influence commis par les particuliers

435-1 à
435-10

Atteintes à l'administration publique et à l'action de la justice de l'Union européenne, des États membres de l'Union européenne, des autres États étrangers et des autres organisations internationales publiques

445-1 à
445-2-1

Corruption passive et active des personnes n'exerçant pas une fonction publique

441-2 à
441-6

Faux et usage de faux

Code électoral

L. 86 à
L. 88

Faux en matière de listes électorales

L. 91 à
L. 104

Troubles apportés aux opérations électorales

L. 106 à
L. 109

Actes ayant pour intention ou pour effet d'influencer le vote

L. 111

Manoeuvres frauduleuses

L. 113

Violation du secret ou de la sincérité du vote

Code général des impôts

1741

Fraude fiscale par omission ou fausse déclaration

1743

Fraude fiscale par faux en écritures de commerce

Livre des procédures fiscales

L. 228

Infractions fiscales

Code monétaire et financier

L. 465-1 à L. 465-3-3

Atteinte à la transparence des marchés

Code de commerce

L. 241-3

Abus de bien social en société à responsabilité limitée (SARL)

L. 242-6

Abus de bien social en société anonyme (SA)

Code électoral

L. 113-1

Financement des campagnes électorales

Loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique

Art. 11-5

Financement des partis ou des groupes politiques

Code électoral

L.O. 135-1

Déclaration de situation patrimoniale et déclaration d'intérêts des parlementaires

Loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique

Art. 26

Sanctions envers les personnes n'ayant pas rempli leurs obligations déclaratives auprès de la HATVP

Code pénal

450-1

Association de malfaiteurs

Source : commission des lois du Sénat

C'est pourquoi votre commission a adopté l' amendement COM-11 de sa rapporteure tendant à retirer de cette liste les délits détachables de l'exercice d'une fonction publique et qui font l'objet de sanctions pénales spécifiques. Il convient en effet de distinguer l'exercice d'un mandat électif, qui relève d'une élection démocratique, de celui d'une profession.

La commission a adopté l'article 7 ainsi modifié .

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée .

EXAMEN EN COMMISSION

_______

MERCREDI 14 FÉVRIER 2018

Mme Josiane Costes, rapporteure . - Notre pays peut s'enorgueillir de pouvoir compter sur une fonction publique de grande qualité. Nos agents publics assurent avec probité et désintéressement les missions qui leur incombent, quels que soient la catégorie, le corps et le cadre d ' emplois auxquels ils appartiennent.

La mobilité des fonctionnaires, particulièrement celle des hauts fonctionnaires, doit être encouragée, tant au sein des administrations publiques que vers le secteur privé. Elle leur permet en effet d'acquérir de nouvelles expériences et compétences qui contribuent à leur épanouissement professionnel, et elle favorise le décloisonnement, l'efficacité et l'efficience des administrations publiques. La mobilité est aussi un outil de valorisation des carrières et des compétences, au moment où la fonction publique souffre d'un manque d'attractivité.

Mais il importe, dans le même temps, de veiller à prévenir et à faire cesser les situations de conflits d'intérêts qui peuvent parfois survenir, voire entraîner des faits constitutifs d'infractions pénales. Ce risque peut se manifester tant dans l'exercice par un agent de ses fonctions au sein du secteur public - par exemple, lors de l ' attribution d'un marché public à une entreprise au sein de laquelle il détiendrait des intérêts - qu'en cas de « pantouflage », c'est-à-dire lorsqu'un fonctionnaire souhaite quitter temporairement ou définitivement ses fonctions publiques pour le secteur privé.

L'équilibre entre cette double nécessité - favoriser la mobilité des fonctionnaires et éviter les situations de conflits d'intérêts - est difficile à établir. Au cours des auditions, j'ai pu constater, avec surprise, que la question de la mobilité des hauts fonctionnaires vers le secteur privé était un phénomène réel mais difficilement quantifiable.

D'une part, la direction générale de l'administration et de la fonction publique - la DGAFP - ne dispose pas de données agrégées sur cette question. Chaque corps, chaque administration, recueille, ou non, des données sur la mobilité de ses membres mais il n'y a pas de données générales.

D'autre part, il n'existe aucune définition légale de la haute fonction publique. Selon mes interlocuteurs, selon la définition que chacun retient, leur nombre varie entre 12 000 et 34 000 personnes, exception faite des maîtres de conférences. Si on ajoute cette dernière catégorie, leur nombre serait porté à 100 000.

M. Pierre-Yves Collombat . - Ce n'est pas le problème !

Mme Josiane Costes, rapporteure . - Il est très difficile d'apprécier un phénomène quand on ne sait pas quel périmètre il recouvre et quand il n'existe aucune donnée agrégée.

L'étude de 2015 intitulée « Que sont nos énarques devenus ? », réalisée par l'École nationale d'administration (ENA) et l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS) sur le devenir des anciens élèves de l'ENA, concluait que 78 % d'entre eux n'avaient jamais exercé de responsabilité en entreprise au cours de leur carrière ; 22 % avaient momentanément travaillé dans une entreprise publique ou privée, mais poursuivaient ensuite leur carrière au sein de l'administration d'État. 8 % de l'ensemble des énarques avaient durablement quitté l'administration d'État.

Selon cette étude, la mobilité dans le secteur privé varie fortement selon le corps d'origine du haut fonctionnaire. Ainsi, 75,5 % des énarques issus du corps des inspecteurs généraux des finances avaient rejoint une entreprise publique ou privée au cours de leur carrière et 34 % d'entre eux avaient passé plus de la moitié de leur carrière hors de l ' administration.

Précisons que, pour certaines administrations, comme la direction générale du trésor, les passages dans le secteur privé sont fondamentaux pour maîtriser les problématiques diverses liées à la vie des entreprises.

Mais si une mobilité de nos fonctionnaires dans le secteur privé est un outil de valorisation des compétences et des carrières, elle doit nécessairement s'articuler avec le respect des principes déontologiques pour prévenir et sanctionner tout conflit d'intérêts dans l'exercice de leurs missions au sein du secteur public.

La France s'est dotée depuis longtemps de règles destinées à prévenir et à sanctionner les conflits d'intérêts dans le secteur public. La commission de déontologie de la fonction publique constitue, aujourd'hui, le pivot de cette prévention. Ses prérogatives ont été progressivement renforcées depuis 2007 et, surtout, par l'article 8 de la loi « Déontologie des fonctionnaires » du 20 avril 2016.

Initialement, cette commission était chargée de l'examen des demandes de cumul d'activités ou des demandes de mise en disponibilité pour travailler dans le secteur privé, autrement dit le « pantouflage ». Elle émettait dans ces deux cas un avis de compatibilité, avec ou sans réserves, ou un avis d'incompatibilité sur ces projets professionnels. Seul ce dernier avis liait l'administration.

Aujourd'hui, la commission est chargée d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé ou de toute activité libérale, avec les fonctions exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité par tout fonctionnaire qui cesserait, définitivement ou temporairement, ses fonctions. Depuis la réforme de 2016, la saisine de la commission est obligatoire : d'abord, par l'agent public lui-même ; à défaut, par l'autorité administrative dont il relève ; à titre subsidiaire, par le président de la commission qui dispose d'un délai de trois mois à compter de l'embauche du fonctionnaire ou de la création de l'entreprise ou de l'organisme privé.

Le contrôle de la commission comporte deux dimensions. D'une part, un aspect pénal : elle s'assure qu'un départ vers le secteur privé ne conduit pas le fonctionnaire à commettre le délit de prise illégale d'intérêts prévu à l'article 432-13 du code pénal. D'autre part, un aspect déontologique : elle veille à ce que l'activité du fonctionnaire dans le secteur privé ne porte pas atteinte à la dignité des fonctions précédemment exercées ou ne risque pas de compromettre ou de mettre en cause le fonctionnement normal, l'impartialité ou la neutralité du service.

Malgré le renforcement de ses prérogatives, la commission de déontologie de la fonction publique continue de faire l'objet de nombreuses critiques : absence de suivi et de portée réelle de ses avis, risques de collusion entre ses membres et les agents soumis à ses avis, etc.

La récente mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale qualifie d'inabouti le renforcement de ses compétences. Elle regrette l'absence de publication de ses avis, qui priverait ces derniers de tout effet. L'obligation de saisine n'est pas encore totalement respectée par les agents et leur administration. Les moyens dont elle dispose ne lui permettent pas d ' assumer ses prérogatives de façon toujours satisfaisante, ce qui peut contribuer à affaiblir l'autorité de ses avis. Enfin, l ' articulation entre ses compétences et celles de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) fait aussi l'objet de nombreuses critiques. La première est chargée de veiller au respect des principes déontologiques de la fonction publique en cas de mobilité d'un agent public vers le secteur privé, tandis que la seconde doit s'assurer que l'exercice d'une fonction publique ne conduit pas à un enrichissement personnel. Si les missions sont en principe distinctes, elles peuvent s'exercer à l'égard des mêmes personnes à différents moments de leur vie professionnelle.

Ces avancées, notables, n'ont pas permis d'atteindre de façon satisfaisante cet équilibre entre mobilité et prévention des conflits d'intérêts. C'est ce qui explique les initiatives que nous avons prises, notamment lors des débats sur les lois « Déontologie des fonctionnaires » et « Sapin 2 » en 2016, et « Confiance dans la vie politique » en 2017. C'est ce qui explique aussi le dépôt par le président Jean-Claude Requier et plusieurs de nos collègues de la proposition de loi visant à renforcer la prévention des conflits d'intérêts liés à la mobilité des hauts fonctionnaires, qui sera examinée en séance publique le 22 février prochain. Cette proposition de loi, qui complète la loi « Déontologie des fonctionnaires » de 2016, me paraît essentielle pour aborder certaines questions qui n'ont pas encore trouvé de réponses satisfaisantes.

Elle tend à renforcer les compétences de la commission de déontologie de la fonction publique, par diverses mesures. L'article 1 er conditionne la recevabilité de la demande d'un fonctionnaire souhaitant quitter définitivement la fonction publique pour exercer une activité dans le secteur privé, d'une part, au respect de son engagement d'une durée minimale de services effectifs dans la fonction publique, d'autre part, à sa démission de la fonction publique préalablement à l'examen de sa demande par la commission.

L'article 2 tend à rendre obligatoire la saisine de la commission pour les demandes de mobilité des fonctionnaires soumis à déclaration auprès de la HATVP, et automatique l'ouverture d ' une procédure disciplinaire en cas de non-respect de l'avis d ' incompatibilité ou de compatibilité avec réserve émis par la commission.

L'article 3 prévoit de confier la présidence de la commission, non plus au conseiller d'État qui en est membre comme c'est le cas aujourd'hui, mais, alternativement tous les trois ans, à celui-ci, au conseiller maître à la Cour des comptes et au magistrat de l'ordre judiciaire qui en sont également membres.

L'article 4 tend à étendre le contrôle de la commission à la compatibilité des fonctions exercées par les fonctionnaires réintégrés dans la fonction publique après une mobilité dans le secteur privé. L'article 5 vise à étendre son contrôle au recrutement et au départ des secrétaires généraux et directeurs généraux des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ou de toute autre personne participant à l'activité de contrôle de l'autorité. L'article 6 tend à limiter la durée d'un détachement des fonctionnaires à cinq ans, mettant ainsi fin à la distinction entre détachements de courte durée et ceux de longue durée. Il semblerait toutefois que l'intention des auteurs était de viser la mise en disponibilité, et non le détachement.

Enfin, l'article 7 prévoit d'instaurer une peine complémentaire obligatoire d'interdiction d'exercice d'une fonction publique pour les fonctionnaires condamnés aux mêmes infractions que celles donnant lieu au prononcé d'une peine d'inéligibilité.

Plusieurs de ces articles soulèvent des questions juridiques ou pratiques majeures. J'y reviendrai en vous présentant mes amendements. Il y a néanmoins deux sujets qui mériteraient un débat au sein de notre commission.

D'abord, celui du remboursement de la pantoufle : en effet, il serait légitime que les fonctionnaires ne respectant pas leur engagement d'une durée minimale de service au sein de l'État doivent, s'ils quittent définitivement la fonction publique, rembourser leur pantoufle. Mais il y a une difficulté : la durée de l'engagement minimal au service de l'État est variable selon le corps d'origine et le calcul de la pantoufle également (prise en compte ou non des années de scolarité). Toutefois, une disposition générale serait peut-être nécessaire.

Se pose ensuite la question d ' une durée maximale d'une mise à disponibilité dans le secteur privé. Aujourd'hui, cette durée varie selon les cas : elle est de deux ans, non renouvelable, pour la création ou la reprise d'une entreprise, et de trois ans, renouvelables dans la limite de dix ans, pour un motif de « convenances personnelles ». Faut-il prévoir une durée de cinq ans dans la loi ?

M. Philippe Bas, président . - Je veux saluer le travail très objectif mené par Josiane Costes pour ce rapport.

M. Alain Marc . - Je salue la qualité du rapport. Les élèves qui choisissent de travailler dans le secteur privé à la sortie de l'ENA doivent-ils rembourser les frais de formation engagés par l'État ? Un préfet doit attendre un délai de trois ans avant de se porter candidat à une élection dans le département où il a exercé ses fonctions. J'estime que la durée de cette inéligibilité devrait être portée à dix ans.

M. Pierre-Yves Collombat . - L'ouvrage Les intouchables d'État , récemment paru, commence par une citation de l'inoubliable livre Révolution d'Emmanuel Macron : « Les hauts fonctionnaires se sont constitués en caste. [...] Il n'est plus acceptable qu'ils continuent à jouir de protections hors du temps ». Je constate qu'ils ont encore de beaux jours devant eux !

Vous souhaitez encourager la mobilité des fonctionnaires, mais tout dépend de la conception que vous vous faites de l'État. Pour défendre l'intérêt général, ce n'est pas utile ; en revanche, si le but est de favoriser le fonctionnement des affaires, alors il faut le faire. Si les intérêts de BNP Paribas se confondent avec ceux de la France, alors oui, il faut le faire.

Le problème ne vient pas du pantouflage, mais des allers-retours entre secteur public et secteur privé. Je ne mets pas en cause la moralité personnelle des hauts fonctionnaires. Et le déport ne règle rien. Si je prends l'exemple de la nomination de M. Villeroy de Galhau à la tête de la Banque de France, ce qui est à craindre, ce n'est pas qu'il favorise la banque dans laquelle il a auparavant travaillé, mais que les intérêts du système bancaire se confondent avec ceux de notre pays. La Banque de France, lorsqu'elle était dirigée par M. Christian Noyer, était à la manoeuvre pour saboter la réforme de la régulation bancaire.

Le problème n'est pas seulement moral, il est beaucoup plus fondamental.

Si l'on s'en tient à l'aspect purement déontologique, vous n'allez pas très loin. J'aurais pu voter la proposition de loi initiale, qui comprenait quelques éléments intéressants, mais avec vos amendements, que va-t-il rester ? Les articles disparaissent les uns après les autres...

Je ne comprends pas ; ou alors je comprends trop bien !

M. Thani Mohamed Soilihi . - Je vous remercie pour la qualité de votre rapport sur un sujet important au regard de la défiance actuelle de nos concitoyens envers ceux qui exercent une activité publique.

Je veux souligner deux points : d'une part, la loi « Déontologie des fonctionnaires » du 20 avril 2016 n'a pas encore fait l'objet d'une évaluation ; d'autre part, le groupe RDSE a présenté cette proposition de loi avant la remise du rapport de la mission de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur la déontologie des fonctionnaires et l'encadrement des conflits d'intérêts. Dans un esprit de respect des travaux engagés par chacune des chambres, il eût été préférable d'attendre.

Cette proposition de loi n'arrive-t-elle pas trop tard au vu de la loi de 2016 et trop tôt au vu du rapport de la commission des lois de l'Assemblée nationale, puisqu'il n'a pas encore donné lieu à une initiative parlementaire ?

M. Jacques Bigot . - La proposition de loi présente l'intérêt de susciter en séance publique un débat sur la haute fonction publique et la prévention des conflits d'intérêts. Néanmoins, je ne suis pas sûr que ce texte complète utilement celui de 2016 et qu'il soit nécessaire d'adopter une nouvelle loi. Nous jugerons, au cours de la discussion des amendements, de l'utilité et de la portée de chaque article.

Mme Catherine Di Folco . - Quelle est la finalité de l'article 6 qui fixe à cinq ans la durée maximale d'un détachement d'un fonctionnaire ?

Mme Maryse Carrère . - Au nom du groupe RDSE, je veux rappeler la philosophie générale de la proposition de loi. Il s'agit de renforcer la loi du 20 avril 2016, qui s'applique à tous les fonctionnaires. L'étude « Que sont nos énarques devenus ? » a montré que les énarques étaient les plus mobiles. Un rapport de la DGAFP indique que la part les fonctionnaires de catégorie A+ en situation de disponibilité était de 7,9 %, contre 2,7 % des fonctionnaires des catégories A, 2 % des fonctionnaires des catégories B et 2,9 % des fonctionnaires des catégories C.

Les anciens élèves de l'ENA sont ceux qui ont le plus d'influence sur la politique de la nation. C'est la raison pour laquelle il semble nécessaire de leur appliquer des règles spécifiques, afin de s'assurer que leur mobilité ne met pas en danger l'intérêt général. Leurs allers-retours entre secteur public et secteur privé doivent être mieux contrôlés.

Cette proposition de loi s'intègre dans une réflexion plus globale sur l'avenir de la fonction publique, à la suite des mesures annoncées par le Premier ministre. Nous souhaitons réaffirmer les valeurs de la fonction publique et réfléchir aux moyens de restaurer l'attractivité de ses carrières.

Nous proposons des mesures destinées à ouvrir le débat en vue d'élaborer une position de compromis au sein du Sénat en prévision des futures discussions avec l'Assemblée nationale et le Gouvernement. Le rapport de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur la déontologie des fonctionnaires et l'encadrement des conflits d'intérêts, rédigé par les députés Fabien Matras et Olivier Marleix, a été publié après le dépôt de notre proposition de loi.

Je salue la qualité du travail de notre rapporteure et sa volonté d'honorer au mieux son rôle dans la position quelque peu schizophrénique qui la conduit à rapporter le texte dont elle est l'un des auteurs.

Mme Josiane Costes, rapporteure . - Monsieur Marc, si un élève quitte l'ENA en cours de scolarité, c'est l'école qui procède au recouvrement des frais de scolarité. S'il pantoufle, c'est le corps ou l'administration dont il relève qui assure le recouvrement du remboursement de la pantoufle.

S'agissant des préfets, ils doivent effectivement respecter un délai de trois ans entre la cessation de leurs fonctions dans un département et leur présentation à une élection dans ce même territoire.

M. Alain Marc . - Si un préfet est nommé au début du mandat des futurs grands électeurs, il pourra se présenter à une élection au bout de six ans. Il faudrait, pour éviter tout conflit d'intérêts, que le délai soit porté à sept ans.

M. Philippe Bas, président . - Cela pourrait être jugé inconstitutionnel. Les préfets sont des citoyens français qui ne sont frappés que d'une inéligibilité relative. Le Conseil constitutionnel tient à préserver le droit de chaque citoyen à être candidat à une élection. Néanmoins, vous avez raison, il faut être attentif à éviter tout conflit d'intérêts. Une modification du seuil actuel est peut-être envisageable.

Mme Josiane Costes, rapporteure . - Monsieur Collombat, nous avons des conceptions philosophiques différentes sur le rôle de notre fonction publique.

Monsieur Mohamed Soilihi, aucune évaluation de la loi de 2016 n'a pour l'instant été conduite. Mais pourquoi attendre une proposition de loi de l'Assemblée nationale ? Le rapport des députés Fabien Matras et Olivier Marleix est public : il enrichira le débat du Sénat.

Madame Di Folco, il s'agit effectivement d'une erreur : l'article 6 vise en réalité les mises en disponibilité, et non les détachements.

Mme Brigitte Lherbier . - Prenons le cas d'un magistrat de tribunal administratif qui revient dans son corps d'origine après l'avoir temporairement quitté pour devenir conseiller municipal : n'y a-t-il pas conflit d'intérêts ?

M. Alain Richard . - La règle de déport s'applique.

M. Philippe Bas, président . - Si le tribunal doit connaître d'un contentieux intéressant la commune dans laquelle le magistrat a servi comme conseiller municipal, celui-ci ne pourra pas participer au jugement.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er

Mme Josiane Costes, rapporteure . - L'amendement COM-4 vise à supprimer l'article 1 er , qui soulève plusieurs interrogations. En premier lieu, la cessation définitive de fonctions visée mériterait d'être mieux définie. Car celle-ci concerne soit la mise en retraite, soit la démission, soit la révocation. Or, l'article 1 er ne vise que la démission.

En deuxième lieu, il soulève une question d'articulation avec le droit existant. La présentation préalable de sa démission par un fonctionnaire serait contradictoire avec le premier alinéa du III de l'article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983 selon lequel « le fonctionnaire cessant définitivement ou temporairement ses fonctions [...] saisit à titre préalable la commission afin d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé, ou de toute activité libérale, avec les fonctions exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité ». En d'autres termes, l'administration ne peut prendre une décision avant que la commission de déontologie de la fonction publique ait été saisie et ait statué sur la demande de l'agent. Or l'article impose la démission avant la saisine de la commission ! Mieux vaudrait donner à la commission la possibilité de s'assurer de la démission effective de l'agent après qu'elle a rendu son avis.

L'amendement COM-4 est adopté.

Mme Nathalie Delattre. - Cet article visait à ouvrir le débat sur le manque de clarté des textes concernant les règles relatives au maintien prolongé des fonctionnaires hors de leurs fonctions dans l'administration. Celle-ci a-t-elle intérêt à ce que des agents souhaitant quitter la fonction publique se maintiennent hors de leurs fonctions durant plusieurs années par une combinaison de détachements et de mises en disponibilité ? Il arrive que certains fonctionnaires passent plus de la moitié de leur carrière hors de l'administration.

Par ailleurs, il faut évoquer le remboursement de la pantoufle. Nous regrettons la suppression de cet article.

M. Pierre-Yves Collombat . - J'aurais aimé que cet article fût maintenu. Le remboursement de la pantoufle peut sembler anecdotique mais, en réalité, il représente beaucoup plus ! Les choses sont parfaitement claires : vous ne souhaitez rien changer au système !

M. Jean Louis Masson . - Je suis favorable au remboursement de la pantoufle. Les écoles de fonctionnaires versent un salaire à leurs élèves. J'en ai bénéficié quand j'étais à Polytechnique. Il est normal de demander qu'en contrepartie, les bénéficiaires rendent un service à l'État et, s'ils ne le font pas, qu'ils remboursent leurs frais de scolarité.

M. Philippe Bas, président . - La règle du remboursement existe déjà, ce n'est pas l'objet de cet article. Il pose une règle inacceptable : le fonctionnaire devrait démissionner de la fonction publique avant d'être autorisé à exercer à titre définitif une fonction dans le secteur privé.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Si j'ai bien compris, Mme la rapporteure présente des amendements de suppression des articles de sa propre proposition de loi...

M. Philippe Bas, président . - Vous soulevez un point de méthode très intéressant. J'hésite toujours à confier à un membre du groupe auteur d'une proposition de loi le rapport sur ce texte. La fonction de rapporteur l'emporte nécessairement sur celle de signataire de la proposition de loi. Elle suppose de prendre du recul, et d'examiner le texte de la façon la plus impartiale et objective pour éclairer la commission des lois. C'est ce qu'a fait Mme Costes ; et les membres de son groupe, quelque peu déçus de la proposition de suppression de plusieurs dispositions, ont d'ailleurs rendu hommage à son objectivité.

Article 2

Mme Josiane Costes, rapporteure . - Mon amendement COM-5 et l'amendement COM-1 de M. François Patriat et des membres du groupe La République en Marche sont identiques : ils visent à supprimer l'article 2.

Les amendements identiques COM-5 et COM-1 sont adoptés.

Article 3

Mme Josiane Costes, rapporteure . - L'amendement COM-6 vise à supprimer l'article 3, qui prévoit une présidence tournante de la commission de déontologie de la fonction publique, aujourd'hui assurée de droit par le conseiller d'État qui en est membre, entre celui-ci, le conseiller maître à la Cour des comptes et le magistrat de l'ordre judiciaire. Or il importe de confier la présidence de la commission à une personne ayant une fine connaissance du fonctionnement de l'administration. En outre, la continuité dans l'exercice de cette fonction est souhaitable, étant rappelé que le président n'a pas voix prépondérante au sein de la commission.

M. Pierre-Yves Collombat . - Il s'agissait aussi avec cet article de limiter l'entre soi... La proposition était bien modeste à l'origine. Mais je constate que c'est encore trop !

M. Philippe Bas, président . - Vous appréciez tant la nature de la présidence de la HATVP que vous aimeriez étendre cette inamovibilité à tous les cas possibles, mais le travail des deux instances est de nature très différente.

M. Pierre-Yves Collombat . - Je dis au contraire qu'une mobilité est nécessaire !

M. Philippe Bas, président . - Je vous avais mal compris.

Mme Maryse Carrère . - Cet article vise à introduire une alternance entre les trois principaux membres de la commission de déontologie afin de réduire l'emprise d'un corps plutôt que d'un autre sur la doctrine développée en matière de pantouflage. Le triptyque incarné par un membre du Conseil d'État, un membre de la Cour des comptes et un membre de l'autorité judiciaire s'impose dans de nombreuses instances administratives. Une réflexion pourrait être conduite sur l'opportunité d'ouvrir cette fonction à d'autres corps, comme les inspecteurs généraux de l'administration ou les administrateurs civils...

L'amendement COM-6 est adopté.

Article 4

Mme Josiane Costes, rapporteure . - L'amendement COM-7 est un amendement de précision et de clarification.

L'amendement COM-7 est adopté.

Article additionnel après l'article 4

Mme Josiane Costes, rapporteure . - L'amendement COM-8 tend à prévoir la publicité des avis rendus par la commission de déontologie de la fonction publique, dont les administrations regrettent la méconnaissance puisqu'elles n'en sont pas destinataires. Il reviendrait à la commission de fixer elle-même les modalités de publicité de ses avis.

L'amendement COM-8 est adopté.

Article 5

Mme Josiane Costes, rapporteure . - L'amendement COM-9 vise à restreindre le champ de compétence de la commission de déontologie de la fonction publique au recrutement des secrétaires généraux et des directeurs généraux des autorités administratives indépendantes (AAI) et des autorités publiques indépendantes (API), le départ de ces agents publics relevant déjà du champ de compétences actuel de la commission de déontologie de la fonction publique.

Il tend également à préciser que le contrôle de la commission porterait sur les fonctions effectivement exercées les trois années précédant ledit recrutement.

L'amendement COM-9 est adopté. Par conséquent, l'amendement COM-2 devient sans objet.

Article 6

Mme Josiane Costes, rapporteure . - L'amendement COM-10 vise à supprimer l'article 6, qui prévoit de plafonner à cinq ans la durée d'un détachement d'un fonctionnaire. Il semblerait que les auteurs souhaitaient en réalité encadrer la mise en disponibilité.

L'amendement COM-10 est adopté.

Article 7

Mme Josiane Costes, rapporteure . - L'amendement COM-11 tend à supprimer du champ de la peine complémentaire obligatoire d'exercice d'une fonction publique les délits détachables de l'exercice d'une fonction publique et qui font l'objet de sanctions pénales spécifiques.

L'amendement COM-11 est adopté.

Mme Josiane Costes, rapporteure . - Je veux revenir sur un amendement que j'avais déposé et que j'ai retiré avant la réunion de notre commission, relatif au rattachement de la commission de déontologie de la fonction publique à la HATVP. J'aimerais que l'on débatte de l'opportunité ou non d'un tel rattachement.

Mme Maryse Carrère . - Le groupe RDSE est prudent sur la question des missions de la HATVP. Il existe des raisons objectives plaidant en faveur d'un rapprochement entre les deux instances qui poursuivent des objectifs très proches. Nous pourrions être favorables à une fusion, si elle ne se fait pas a minima . Plusieurs points méritent une attention particulière : la nature du contrôle de déontologie doit être adaptée à la sensibilité des fonctions exercées ; une cartographie des risques pourrait être établie ; la HATVP doit bénéficier de tous les moyens d'information nécessaires pour se saisir rapidement des passages des hauts fonctionnaires vers le secteur privé ; et il faudrait sans doute créer un collège spécifique au sein de la HATVP.

Mme Catherine Di Folco . - Ce sujet avait été évoqué par notre ancien collègue Alain Vasselle, rapporteur de la loi « Déontologie des fonctionnaires » de 2016. Nous avions voté un amendement prévoyant la fusion des deux instances.

M. Philippe Bas, président . - Effectivement, l'amendement avait été adopté en séance publique, à votre initiative, malgré un avis défavorable de la commission.

M. Jacques Bigot . - Mme la rapporteure a proposé de nombreuses suppressions d'articles qui, au final, vident ce texte de sa substance. Notre groupe ne voit pas très bien l'intérêt des quelques petits points restants. Nous nous abstiendrons en commission, et nous verrons si la discussion en séance publique fait évoluer notre position.

Mme Josiane Costes, rapporteure . - Certaines avancées ne sont pas négligeables : publication des avis de la commission de déontologie, extension de son contrôle au recrutement des secrétaires généraux et directeurs généraux des AAI et des API ainsi que vis-à-vis des fonctionnaires réintégrant le secteur public après un passage dans le secteur privé.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1 er
Subordination de la recevabilité d'une demande de fonctionnaire
souhaitant cesser définitivement ses fonctions
à sa démission préalable de la fonction publique avant son examen
par la commission de déontologie de la fonction publique

Mme COSTES, rapporteure

4

Suppression

Adopté

Article 2
Saisine obligatoire de la commission de déontologie de la fonction publique
pour les demandes de mobilité de fonctionnaires soumis à déclaration
auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique

Mme COSTES, rapporteure

5

Suppression

Adopté

M. PATRIAT

1

Suppression

Adopté

Article 3
Présidence tournante de la commission de déontologie de la fonction publique

Mme COSTES, rapporteure

6

Suppression

Adopté

Article 4
Extension du contrôle de la commission de déontologie de la fonction publique

Mme COSTES, rapporteure

7

Précision et clarification

Adopté

Article additionnel après l'article 4

Mme COSTES, rapporteure

8

Publicité des avis de la commission de déontologie de la fonction publique

Adopté

Article 5
Extension du contrôle de la commission de déontologie de la fonction publique
au recrutement des secrétaires généraux et directeurs généraux
des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes

Mme COSTES, rapporteure

9

Compétence de la commission de déontologie de la fonction publique pour le recrutement des secrétaires généraux et directeurs généraux des AAI et API

Adopté

M. PATRIAT

2

Suppression

Satisfait ou sans objet

Article 6
Limitation à cinq ans de la durée maximale d'un détachement

Mme COSTES, rapporteure

10

Suppression

Adopté

Article 7
Institution d'une peine complémentaire obligatoire d'interdiction
d'exercer une fonction publique pour les fonctionnaires coupables de crimes ou de certains délits

Mme COSTES, rapporteure

11

Restriction des délits susceptibles de faire l'objet d'une peine complémentaire obligatoire d'interdiction d'exercer une fonction publique pour un fonctionnaire

Adopté

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

M. Jean-Claude Requier , sénateur, auteur de la proposition de loi n° 205 (2017-2018) visant à renforcer la prévention des conflits d'intérêts liés à la mobilité des hauts fonctionnaires

Ministère de l'action et des comptes publics - Direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP)

Mme Carine Soulay , directrice, adjointe au directeur général

Mme Florence Cayla , adjointe au sous-directeur de la synthèse statutaire de la gouvernance et des partenariats

M. Michaël Chaussard , chef de bureau du statut général, de la diffusion du droit et du dialogue social

M. Xavier Marotel , chef de bureau de l'encadrement supérieur et des politiques d'encadrement

Ministère de l'économie et des finances - Direction générale du Trésor

Mme Astrid Milsan , secrétaire général

Mme Audrey Cezard-Assouad , adjointe au chef de bureau RH1

Secrétariat général du gouvernement (SGG)

M. Marc Guillaume , secrétaire général

Commission de déontologie de la fonction publique

M. Roland Peylet , président

Mme Mireille Le Corre , rapporteure générale

Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP)

M. David Ginocchi , responsable du pôle juridique

Mme Elodie Cuerq , responsable des relations institutionnelles

École nationale d'administration (ENA)

M. Patrick Gérard , directeur

Groupe des Associations de la Haute Fonction Publique - G 16

M. Jean Poulit , président

M. Michel Rostagnat , membre

M. Vincent Feller , membre

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

ARTICLE 5

Amendement n° COM-2 présenté par

M. PATRIAT et les membres du groupe La République En Marche

Supprimer cet article.

OBJET

L'article propose d'étendre le contrôle de la commission de déontologie a` la nomination des secrétaires ou délégués généraux des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. Sans évaluation précise du nombre de personnes concernées par cet article, il semble inopportun de créer un potentiel encombrement de la commission de déontologie.

Par ailleurs, dans le cadre du bon dialogue entre les chambres, il est préférable de ne pas interférer avec le travail de la mission d'information sur la déontologie des fonctionnaires et l'encadrement des conflits d'intérêts, qui a rendu récemment son rapport, a évalué le travail de la commission de déontologie de la fonction publique et proposé des pistes de réflexion.

Concernant les AAI comme l'ensemble de l'action publique, l'exigence de déontologie ne peut simplement être apprécié par rapport à l'arsenal législatif existant mais concerne aussi le soft law et la mise en oeuvre pratique.


* 1 Le président-rapporteur est M. Fabien Matras (REM, Var) et le vice-président et co-rapporteur est M. Olivier Marleix (LR, Eure-et-Loir).

* 2 Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :

http://www2.assemblee-nationale.fr/documents/notice/15/rap-info/i0611/(index)/depots

* 3 « Que sont les énarques devenus ? », étude de l'ENA/EHESS sur le devenir des anciens élèves de l'École nationale d'administration (1985-2009).

* 4 Inspection générale des finances.

* 5 Ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts.

* 6 Le rapport est consultable à l'adresse suivante :

http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/114000051.pdf

* 7 Article 28 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

* 8 Décision n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016, Loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, cons. 146 : « Ces dispositions n'excluent la compétence de la commission de déontologie de la fonction publique que pour les personnes exerçant, au moment de leur départ dans le secteur privé, des fonctions à la décision du Gouvernement. Elles affirment concurremment la compétence de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique pendant une durée de trois ans suivant la fin de l'exercice de fonctions de cette nature. Dès lors et en tout état de cause, ces dispositions portent atteinte, par leur contradiction, à l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi. »

* 9 Deuxième alinéa du III de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983

* 10 Il s'agit des principes de dignité, d'impartialité, d'intégrité, de probité, de neutralité, dans le respect du principe de laïcité,

* 11 Son président actuel est M. Roland Peylet.

* 12 Cf. rapport n° 607 (2016-2017) de M. Philippe BAS, fait au nom de la commission des lois, déposé le 4 juillet 2017. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/rap/l16-607/l16-6071.pdf

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page