II. LE BREXIT : UNE OPPORTUNITÉ POUR LA PLACE FINANCIÈRE PARISIENNE

A. PARIS ACCUEILLERA LE SIÈGE DE L'AUTORITÉ BANCAIRE EUROPÉENNE

Dans la perspective du Brexit, la Commission européenne a proposé, en septembre 2017, de reprendre aux États membres certains de leurs pouvoirs de supervision du secteur financier européen. Cette piste de réflexion s'inscrivait dans le cadre d'un projet à plus long terme de mise en place d'un superviseur unique et de renforcement de l'influence des AES sur les sociétés étrangères opérant au sein de l'Union européenne.

Le retrait du Royaume-Uni de l'Union la privera de son plus grand centre financier, la City, rendant le besoin d'élargissement des pouvoirs de la Commission d'autant plus prégnant. En effet, le Brexit a renforcé les besoins de convergence des pratiques de surveillance des marchés financiers et ce, afin de lutter contre tout « arbitrage réglementaire » - c'est-à-dire pour éviter que les États ne cherchent à attirer les entreprises en assouplissant leur niveau réglementaire.

La Commission envisageait donc, entre autres, de confier à l'AEMF le contrôle des fonds régulés, des assurances et des indices de référence comme le taux interbancaire Euribor, et de lui accorder un pouvoir de contrôle direct des données en matière de transactions sur les marchés.

Parallèlement, la Commission a renoncé à rapprocher l'AEAPP et l'ABE , faute de consensus sur le pays qui accueillera le siège de cette dernière, situé dans la capitale britannique. Rapprocher la surveillance européenne des banques et des assurances n'avait d'ailleurs plus grand sens dans un contexte de disparition progressive du modèle des « bancassurances » au sein de la plupart des pays de l'Union. À l'inverse, depuis la crise de 2007-2008, les entreprises européennes se financent de plus en plus via les marchés financiers, ainsi que par le crédit bancaire ; la fusion de l'ABE avec l'AEMF paraissait alors plus pertinente .

À l'occasion de la consultation lancée par la Commission européenne sur la réforme des AES, achevée en mai 2017, la France a avancé cet argument afin d'attirer le siège de l'Autorité bancaire européenne à Paris. La présence de l'AEMF a constitué un des éléments du narratif pour attirer l'ABE dans la capitale : ce rapprochement géographique des deux autorités favoriserait leur collaboration, essentielle à la supervision de l'activité des marchés et des entreprises d'investissement, et permettrait en outre d'envisager leur fusion . Le rapprochement géographique de la Banque centrale européenne, située à Francfort, avec l'ABE n'avait, lui, plus vraiment d'intérêt dans la mesure où l'Autorité bancaire européenne joue essentiellement un rôle de coordination entre la City et la zone euro ; or, après le Brexit, ce besoin disparaitra et pourrait remettre en cause l'existence même de cette Autorité.

En novembre 2017, Paris a été choisie pour accueillir le siège de l'ABE , au tirage au sort, après trois tours de scrutin non concluants. L'Autorité s'installera dans le quartier de La Défense avec ses quelque 170 employés. Le 25 octobre dernier, le Parlement européen a largement approuvé cette relocalisation 10 ( * ) , ainsi que les règles encadrant ce transfert qui sera effectif à la fin du mois de mars 2019, quand le Royaume-Uni sera officiellement sorti de l'Union européenne.

L'installation du siège de l'ABE en France contribuera au rayonnement de la place parisienne. La présence et le séjour de professionnels de la finance à Paris est de nature à renforcer l'image de la ville comme capitale financière de la zone euro alors qu'elle est concurrencée par d'autres places européennes dans de domaine, en particulier Francfort. Par ailleurs, les retombées en termes d'emplois et de recettes pour l'État sont relativement conséquentes 11 ( * ) .


* 10 462 voix contre 48, et 40 abstentions.

* 11 L'ABE occupait 2 345 mètres carrés de bureaux à Londres. Ses visiteurs généraient près de 9 000 nuitées par an.

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