C. LA POSITION DE LA COMMISSION : CONFIRMER, EN NOUVELLE LECTURE, LA VOLONTÉ DU SÉNAT DE MIEUX ENCADRER LES HABILITATIONS

Le rapporteur ne peut que déplorer que les députés consentent à déléguer d'une manière aussi large leur propre pouvoir législatif . L'Assemblée nationale cautionne ainsi un recours général aux ordonnances, alors que l'année 2020 est déjà marquée par un recours sans précédent aux ordonnances : 92 ordonnances ont été publiées depuis le 1 er janvier, contre une moyenne annuelle de 46 ordonnances depuis 2007.

Les ordonnances ne doivent pas devenir le mode « normal » de législation, au risque de remettre en cause la place de l'Assemblée nationale et du Sénat dans nos institutions. Avant de déléguer son pouvoir législatif, le Parlement doit donc s'assurer de l'opportunité et de la nécessité de chaque habilitation, ce qui n'a été que partiellement le cas en l'espèce.

En nouvelle lecture, la commission des lois a donc confirmé la volonté du Sénat de mieux encadrer les habilitations à légiférer par ordonnances .

D'une part, elle a rétabli l'article 4 tel qu'adopté par le Sénat en première lecture, réduisant ainsi le nombre d'habilitations de 70 à 30 et imposant au Gouvernement de procéder aux consultations préalables prévues par les lois et règlements (amendement COM-16 du rapporteur) .

D'autre part, la commission a réintroduit les dispositifs supprimés par l'Assemblée nationale, préférant les inscrire « en clair » dans la loi (amendements COM-7, COM-8, COM-9, COM-11, COM-12, COM-13, COM-14 et COM-15 du rapporteur et amendements COM-1 et COM-2 de Philippe Mouiller) .

Cette démarche - qui a fait l'objet d'un consensus politique au sein du Sénat - présente un double intérêt :

- permettre aux mesures les plus urgentes d'entrer plus rapidement en vigueur, sans attendre la publication de nouvelles ordonnances (continuité des prestations versées aux personnes handicapées, maintien des revenus pour les salariés placés en chômage partiel, report de transferts de compétence entre collectivités territoriales, adaptation du droit applicable aux entreprises en difficulté, etc .) ;

- réduire le recours aux ordonnances et susciter un véritable débat parlementaire sur les matières les plus sensibles (continuité du service public de la justice, soutien aux entreprises culturelles et touristiques, règles d'affectation des personnes détenues dans les établissements pénitentiaires, etc .).

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