III. UN PARTENARIAT ÉTAT-DÉPARTEMENTS À CONSOLIDER

Un récent rapport de Mme Cécile Cukierman, fait au nom de la mission d'information « Quel rôle, quelle place et quelles compétences des départements dans les nouvelles régions fusionnées » présidée par M. Arnaud Bazin 28 ( * ) a montré que, si « en matière sociale, le partage des compétences a longtemps été clair : les principes et les règles étaient fixés au niveau national et les départements étaient chargés de la mise en oeuvre opérationnelle et du financement des dispositifs » , une « 'refondation des logiques d'action' 29 ( * ) se fait jour via le développement de la technique de la contractualisation . L'État fixe alors une stratégie et des objectifs, puis demande aux départements de s'inscrire dans cette démarche en bénéficiant pour cela de moyens supplémentaires ».

Les rapporteurs spéciaux considèrent que cette technique mérite effectivement d'être amplifiée, dans un contexte où la situation financière des départements ne leur permet pas toujours de tirer le meilleur parti de l'expertise dont ils disposent en matière d'action sociale et de leur fine connaissance du territoire. Encore faut-il que celle-ci se fasse sur une base équitable et lever les points de tensions qui subsistent entre l'État et les départements.

A. LES DÉPARTEMENTS SONT DES PARTENAIRES ESSENTIELS DE L'ÉTAT DANS LA MISE EN oeUVRE DE LA STRATÉGIE INTERMINISTÉRIELLE DE PRÉVENTION ET DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ

Les collectivités territoriales, au premier rang desquelles les départements, sont en particulier associés à la mise en oeuvre de la stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté lancée à l'automne 2018.

Le programme 304 finance depuis 2019 un programme de contractualisation avec celles-ci, doté de 252,6 millions d'euros en PLF 2021, soit une montée en puissance par rapport à l'année précédente (175 millions d'euros).

La stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté

Annoncée par le Président de la République le 13 septembre 2018, la stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté s'articule autour de cinq objectifs :

- l'égalité des chances dès les premiers pas pour rompre la reproduction de la pauvreté ;

- garantir au quotidien les droits fondamentaux de tous les enfants ;

- un parcours de formation garanti pour tous les jeunes ;

- assurer l'émancipation sociale par l'activité ;

- rendre les minima sociaux plus simples, plus lisibles et plus incitatifs à l'activité.

Elle s'appuie sur trois leviers de transformation :

- un « choc de participation » et la rénovation du travail social ;

- un pilotage de la stratégie à partir des territoires ;

- un engagement des entreprises.

Ses deux principaux piliers sont :

- la refonte de plusieurs prestations sociales existantes, dont le RSA, au sein d'un revenu universel d'activité (RUA) ;

- la création d'un service public de l'insertion.

La stratégie doit être dotée de 8,5 milliards d'euros sur la période 2018-2022.

La quasi-totalité des départements (hormis les Yvelines et les Hauts-de-Seine) se sont engagés dans une contractualisation avec l'État, ainsi que certaines métropoles (pour environ 10 millions d'euros en 2020 et en 2021) et régions (pour environ 2 millions d'euros en 2020 et en 2021).

Les conventions, d'une durée de trois ans, comportent un socle de trois engagements : accompagner les sorties de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) ; améliorer l'insertion des bénéficiaires du RSA ; généraliser les démarches de premier accueil social et de référent de parcours. Ces engagements sont complétés par deux mesures sur des territoires ciblés : la création ou le renforcement de maraudes mixtes et le renforcement ou la création d'actions de terrain relevant de la prévention spécialisée.

La hausse constatée en 2021 concerne plus spécifiquement les actions en faveur de l'insertion des bénéficiaires du RSA (+ 30 millions d'euros) . Cette priorité paraît judicieuse dans la mesure où, face à un reste à charge croissant lié au financement de cette allocation, les marges de manoeuvre financière des départements pour mener des actions d'insertion sont de plus en plus réduites.

Un des points de vigilance, déjà souligné l'an passé par les rapporteurs spéciaux, concerne la définition des indicateurs de résultats des actions, qui conditionnent en partie les financements . L'Assemblée des départements de France déplore une absence totale de concertation préalable sur la fixation de ces indicateurs, alors que leur fine connaissance de leur territoire les prédisposait à au moins participer à leur conception. Bien que certains assouplissements aient pu être observés à cet égard en 2020, la méthode de l'État reste contestable et ne doit pas être réitérée à l'avenir.

Toujours dans le cadre de la stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté , la très attendue réforme du revenu universel d'activité , devant fusionner plusieurs minima sociaux dont le RSA, n'est plus à l'ordre du jour dans le contexte de la gestion de la crise sanitaire. Le moment venu, les départements devront être pleinement associés à son élaboration.


* 28 Rapport d'information n° 706 (2019-2020) de Mme Cécile Cukierman , fait au nom de la mission d'information « Compétences des départements », déposé le 15 septembre 2020.

* 29 Expression du Mme Martine Long, professeur de droit public.

Page mise à jour le

Partager cette page