II. UN TEXTE QUI DÉÇOIT LES ACTEURS DE L'ADOPTION ET DE LA PROTECTION DE L'ENFANCE

Les acteurs de l'adoption et de la protection de l'enfance entendus au cours des auditions du rapporteur sont toutefois déçus par la proposition de loi : ils estiment qu'elle porte davantage la volonté de faciliter l'adoption pour les candidats, que de sécuriser la situation de l'enfant . De plus, en dépit d'une ambition affichée de « réforme » de l'adoption , ce texte ne comprend que des mesures disparates dans le code civil et n'a que peu de substance pour celles figurant dans le code de l'action sociale et des familles, malgré la réécriture de sections entières.

Certains ont même noté une occasion manquée : celle d'aborder de front les échecs de l'adoption . Ces situations existent, mais ne sont pas traitées 5 ( * ) . Le cas des territoires d'outre-mer , qui connaissent des spécificités comme en Polynésie française avec la tradition du fa'a'amu 6 ( * ) qui favorise une utilisation détournée des délégations d'autorité parentale dans le but de pouvoir ensuite adopter l'enfant après ses deux ans, n'est pas même évoqué .

Il est par ailleurs étrange que la revalorisation de l'adoption simple , qui est l'une des mesures centrales préconisées par le rapport « Limon-Imbert », soit réduite à une modification rédactionnelle sur les effets de cette filiation ou, pire, à une habilitation à légiférer par ordonnances et à une extension du placement de l'enfant à ce type d'adoption - que la commission a refusées ( amendements COM-53 et COM-39 du rapporteur et COM-16 de Laurence Harribey).

La commission a enfin regretté l' absence de vision globale sur la protection de l'enfance : trois textes sur le sujet sont discutés en même temps au Parlement 7 ( * ) . Avant de légiférer à nouveau, il conviendrait de mettre en oeuvre le droit existant et, en particulier, la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 sur la protection de l'enfance . De surcroît, comme l'a indiqué le rapporteur, nombre de difficultés de l'adoption ne vont pas se résoudre par la loi mais appellent une évolution des pratiques et des mentalités .

III. DES PRISES DE POSITION DOGMATIQUES QUI NE SONT PAS DANS L'INTÉRÊT DE L'ENFANT

A. L'AJOUT D'UN DISPOSITIF TRANSITOIRE INOPPORTUN POUR ÉTABLIR LA FILIATION DE LA MÈRE D'INTENTION EN CAS DE RECOURS À UNE AMP À L'ÉTRANGER

La loi du 2 août 2021 relative à la bioéthique permet la reconnaissance conjointe rétroactive pour la mère d'intention en cas de recours avant cette loi à une assistance médicale à la procréation (AMP) avec donneur à l'étranger. La proposition de loi tend à imposer l'adoption de l'enfant par la mère d'intention, lorsque la mère qui a accouché « s'y oppose sans motif légitime » . La commission a supprimé cette disposition ( amendement COM-44 du rapporteur) qui revient à se passer dans des conditions trop floues du consentement de la mère qui a accouché , et poursuit un but de règlement d'un litige entre adultes plutôt que l'intérêt de l'enfant.


* 5 Compte tenu de son caractère irrévocable, une adoption plénière une fois prononcée ferme la voie d'une nouvelle adoption plénière.

* 6 Désigne les pratiques traditionnelles d'adoption ouverte et de don d'enfant.

* 7 À la présente proposition de loi sur l'adoption s'ajoutent les projets de loi relatifs à la protection des enfants et à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

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