II. La position de la commission

L'environnement concurrentiel du championnat français s'étant profondément transformé au cours des vingt dernières années, la commission a approuvé cet article tendant à supprimer l'obligation d'allotissement.

La possibilité de constituer un lot unique doit permettre de valoriser l'offre en la rendant plus attractive grâce à l'exclusivité ainsi octroyée au diffuseur, sous réserve bien sûr de l'application du droit de la concurrence.

Par ailleurs, cette exclusivité doit réduire la fragmentation de l'offre de matchs de football et permettre notamment que tous les matchs de la ligue 1 puissent être visionnés moyennant un seul abonnement, ce qui devrait augmenter le nombre d'abonnements, à condition que le prix proposé soit adapté au marché.

La constitution de plusieurs lots et le choix de plusieurs diffuseurs resteront possibles si l'ayant droit l'estime dans son intérêt.

La commission a adopté l'article 5 sans modification.

Article 6

Création d'une société commerciale associant la fédération et les clubs

Cet article prévoit la possibilité pour une fédération de créer une société commerciale l'associant aux sociétés sportives auxquelles elle a cédé les droits audiovisuels.

À l'initiative du rapporteur, la commission a adopté un amendement précisant l'objet de la société commerciale et apportant des précisions quant à sa gouvernance.

I. Le dispositif proposé

A. L'introduction de sociétés de clubs

- La loi du 2 mars 2022 permet à une ligue professionnelle de créer une société commerciale pour la gestion et la commercialisation des droits d'exploitation des compétitions et manifestations sportives qu'elle organise, aux conditions déjà décrites précédemment, à propos de l'article 4 (l'article L. 333-1 du code du sport).

L'article 6 complète ce dispositif en donnant une possibilité similaire aux fédérations. À l'heure actuelle, la loi permet en effet aux fédérations de créer une ligue et aux ligues de créer une société commerciale, mais elle ne permet pas aux fédérations de créer directement une société commerciale.

Toutefois, cette possibilité ne trouverait à s'appliquer que dans l'hypothèse d'une fédération ayant cédé les droits d'exploitation audiovisuelle des compétitions et manifestations sportives professionnelles aux sociétés sportives.

La société commerciale envisagée ici disposerait d'une gouvernance différente de celle que les ligues peuvent créer, tenant compte du fait que les clubs sont propriétaires de leurs droits d'exploitation audiovisuelle. Il s'agirait d'une société associant l'ensemble des clubs participant à une compétition donnée. Chacun de ces clubs y disposerait d'un droit de vote égal.

La fédération jouerait un rôle central dans ce nouveau schéma, étant associée aux clubs avec un droit de veto sur les décisions importantes.

La gouvernance ici proposée s'inspire de celle de la Premier League anglaise, tout en maintenant les spécificités du modèle français des fédérations délégataires. L'English Premier League (EPL) est une société privée dans laquelle sont associés les 20 clubs qui participent à la compétition de première division anglaise, ainsi que la fédération anglaise (Football association). Celle-ci y dispose d'une action spéciale, c'est-à-dire que certaines décisions importantes ne peuvent être prises qu'avec son approbation. À la fin de

chaque saison, les clubs relégués transfèrent leurs actions aux clubs promus. Chaque club dispose d'un vote au sein de la société. Toutes les décisions majeures nécessitent l'approbation d'au moins deux tiers des clubs. Le conseil d'administration (board) de l'EPL est composé d'un président, de trois administrateurs indépendants non exécutifs et d'un directeur général.

Pour mémoire, par comparaison, au sein de l'Assemblée générale de la LFP, les clubs de Ligue 1 disposent chacun de 2,75 voix et ceux de Ligue 2 de 1,75 voix. Le représentant de la FFF dispose d'une voix. Les cinq autres membres de l'AG disposent chacun de 2 voix. Ces pondérations sont différentes lors de l'élection des membres du conseil d'administration. Les clubs de ligue 1 et de ligue 2 forment, en outre, deux collèges distincts dont le rôle est consultatif. Les membres du conseil d'administration ne sont toutefois pas tenus de suivre les avis des collèges. Cette gouvernance est peu lisible, voire très opaque, et la fédération y joue un rôle très limité comme l'a montré le rapport de la mission d'information précité. La société commerciale LFP Media forme une couche de gouvernance supplémentaire, avec la participation du fonds d'investissement CVC. Les clubs ne participent pas à son organe délibératif (comité de supervision) et le représentant de la fédération y a un rôle consultatif.

Cette gouvernance complexe déresponsabilise les clubs. Ceux-ci continuent à promouvoir leurs intérêts particuliers, voire à agir comme les adversaires qu'ils sont sur le terrain, alors que le développement harmonieux du football professionnel devrait constituer pour eux un intérêt collectif et un objectif partagé. C'est cet objet commun qu'il est proposé d'incarner au sein d'une société.

B. Les garanties associées

L'article 6 prévoit un certain nombre de garanties, semblables à celles existant à l'article L. 333-1 du code du sport pour les sociétés commerciales créées par les ligues, tel que modifié par l'article 4 de la proposition de loi.

L'objet de cette société est restreint à la commercialisation et à la gestion des droits. La fédération exerce les prérogatives régaliennes : organisation des championnats, réglementation, sanction, lutte contre les discriminations, respect du contrat d'engagement républicain...

La société commerciale ne peut pas céder, déléguer ou transférer ses activités.

Les paris sportifs sont exclus du champ des droits concédés à la société. Ce droit resterait géré et commercialisé par la fédération ;

Les statuts de la société, leurs annexes et modifications sont approuvés par la fédération et par le ministre chargé des sports.

La fédération et les sociétés sportives ne peuvent détenir moins de 80 % des parts de la société commerciale.

Lorsqu'une fraction du capital est cédée à d'autres personnes physiques ou morales, un contrôle étendu des documents contractuels liant les parties dans le cadre de cette opération est mis en place.

Le droit de consentir à l'organisation de paris sportifs ne génère directement ou indirectement aucun revenu pour un investisseur minoritaire au sein de la société commerciale.

En cas d'apport financier extérieur, les modalités de répartition de cet apport sont contrôlées par la fédération et par le ministère. Aucun avantage en nature ou en espèces, c'est-à-dire aucun bonus, ne peut être perçu au titre d'une telle opération.

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