B. UNE STABILISATION DES CRÉDITS FAISANT SUITE À SIX ANNÉES DE HAUSSE DES DÉPENSES
1. Une relative stabilité des crédits de la mission
Les crédits de la mission « Enseignement scolaire » s'élèvent en PLF 2026, à structure courante, à 64,463 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 64,485 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) hors contribution au CAS « Pensions », contre respectivement 64,317 milliards d'euros et 64,329 milliards d'euros en loi de finances initiale (LFI) pour 2025.
Cela correspond à une hausse de 134 millions d'euros en AE et de 167 millions d'euros en CP, soit une progression de 0,26 % par rapport à 2025 et de 18,8 % (soit + 12,13 milliards d'euros) par rapport à 2019.
En y incluant la contribution au CAS « Pensions », la mission atteint 89,623 milliards d'euros en AE et 89,643 milliards d'euros en CP, soit une hausse de 1,1 % correspondant à 969,4 millions d'euros en AE et à 1 milliard d'euros en CP. Le montant des crédits correspondant à la contribution du ministère de l'Éducation nationale au CAS « Pensions » passe de 24,3 milliards d'euros en LFI 2025 à 25,16 milliards d'euros au PLF 2026 (+ 3,3 %).
Évolution des crédits de la mission
« Enseignement scolaire »,
y compris CAS
« Pensions
(en millions d'euros et en pourcentage)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Les moyens de la mission se stabilisent y compris au cours des prochaines années, la croissance devant être limitée à 0,7 % dès l'année prochaine, CAS « Pensions » inclus.
Évolution pluriannuelle prévisionnelle de la mission Enseignement scolaire
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Le ralentissement de la hausse devrait être également réparti entre les différents programmes jusqu'en 2028. Ces prévisions peuvent sembler optimistes, dans la mesure où il parait difficilement concevable, à moins d'une inflation extrêmement limitée, que les dépenses des personnels des premier et second degrés n'augmentent annuellement que de 1,3 %, CAS « Pensions » inclus, ce que le Gouvernement anticipe pourtant entre 2026 et 2028.
2. Une évolution contrastée des crédits selon les programmes et la nature des dépenses
Les crédits hors titre 2 inscrits au PLF 2026 s'élèvent, en CP et à structure courante, à 5 188,26 millions d'euros contre 5 423,65 millions d'euros en LFI 2025, soit une diminution de 4,5 %, après la baisse de 8,6 % constatée entre 2024 et 2025. Cependant, cette baisse des dépenses hors dépenses de personnel ne traduit ni un sous-investissement ni une évolution à la baisse des dépenses de fonctionnement, mais découle largement d'enjeux de comptabilité.
En effet, un grand nombre d'emplois permanents d'assistants d'éducation (AED) demeurent non comptabilisés dans les plafonds d'emplois de la mission et relèvent des dépenses « hors T2 » du programme 230. Or, la politique de transformation des contrats de droit public de trois ans, renouvelable une fois en contrat à durée indéterminée (CDI) pour les AED, conformément à la loi1(*) du 16 décembre 2022, conduit à l'intégration massive d'AESH dans les plafonds d'emplois de la mission et contribue par conséquent à la hausse faciale des dépenses de personnels, en partie par redéploiement des crédits depuis le hors titre 2, à hauteur de 133 millions d'euros entre 2025 et 2026. Ce sont 2 667 équivalents temps pleins travaillés d'AED (ETPT) qui vont donc être transférés vers le titre 2.
Au total, l'évolution des crédits de la mission « Enseignement scolaire » est liée :
- pour un montant de 835 millions d'euros, à la hausse de la contribution au CAS « Pensions » ;
- à l'augmentation du schéma d'emplois (voir infra), représentant 62 millions d'euros ;
- aux mesures de revalorisation catégorielle (voir infra), soit une hausse de 11 millions d'euros ;
- au glissement vieillesse technicité (GVT) et autres dépenses de personnel (dont la protection sociale complémentaire), pour un montant de 329 millions d'euros ;
- à la baisse de 235 millions d'euros des dépenses hors titre 2, dont 133 millions d'euros pour la requalification des emplois d'AED vers le titre 2.
Décomposition de l'évolution des
dépenses de la mission
« Enseignement
scolaire » entre la LFI 2025 et le PLF 2026
(en CP et en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Par ailleurs, la stabilité constatée des crédits de la mission recoupe des réalités diverses selon les programmes. Ainsi, les programmes 141 « Enseignement scolaire public du second degré » et 140 « Enseignement scolaire public du premier degré » augmentent de 1,6 % et 1,4 % respectivement par rapport à 2025 (respectivement 0,9 % et 0,47 % hors contribution au CAS « Pensions »), alors que le programme 139 « Enseignement privé du premier et du second degré » voit ses crédits baisser de 0,7 %.
Taux annuel d'évolution du montant des
crédits demandés par programme,
CAS
« pensions » inclus, en 2024, 2025 et
2026
(en pourcentage et en CP)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
La baisse de 43,75 millions d'euros sur le programme 139 « Enseignement privé » est liée dans une large mesure à la diminution des crédits de formation des personnels enseignants de 61,8 millions d'euros (voir supra).
Le programme 230 « Vie de l'élève » perd également 41 millions d'euros, en raison des diminutions sur l'action 6 « Actions éducatives complémentaires aux enseignements », à hauteur de 26,8 millions d'euros :
- le fonds de soutien au développement des activités périscolaires, qui représentait 15 millions d'euros, est éteint au 1er septembre 2025. Un fonds de soutien similaire est toutefois créé à Mayotte par la loi du 11 août 2025 de programmation pour la refondation de Mayotte, et est doté de 4,526 millions d'euros ;
- les subventions aux associations assurant la mise en oeuvre des politiques éducatives perdent 3,4 millions d'euros, soit une baisse de 5,9 % par rapport à 2025 ;
- la part collective du Pass culture, financée à hauteur de 61,8 millions d'euros, est diminuée de 10 millions d'euros par rapport à 2025 (voir infra).
La hausse des crédits du programme 141 « Enseignement public du second degré » de 554,2 millions d'euros s'explique à 74 % par l'augmentation de 407 millions d'euros de sa contribution au CAS « Pensions ». Les 146,5 millions d'euros de hausse restants sont liés à la hausse du glissement vieillesse technicité (195,5 millions d'euros) et du schéma d'emplois (20 millions d'euros).
Concernant le programme 140 « Enseignement public du premier degré », l'augmentation de 442 millions d'euros de crédits de paiement est, elle aussi, largement liée à l'augmentation de la contribution au CAS « Pensions ».
Quant au programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale », la hausse de 88 millions d'euros est liée pour partie à la contribution au CAS « Pensions » (+ 29,3 millions d'euros), et de l'augmentation de la dotation pour les établissements scolaires à Mayotte, à hauteur de 25 millions d'euros, l'État y conservant par exception l'exercice des compétences en matière d'investissement.
3. Une amélioration de la budgétisation des crédits liés à la formation des enseignants à saluer
Le rapporteur spécial souhaite saluer l'effort conduit par le ministère de l'éducation nationale pour sincériser la budgétisation des dépenses de formation des enseignants. En effet, il avait alerté à des nombreuses reprises les années précédentes sur l'écart croissant entre les dépenses de formation budgétées en loi de finances initiale et l'exécution réelle de celles-ci, à la suite de son prédécesseur Gérard Longuet, qui avait réalisé un rapport2(*) sur la formation continue des enseignants. Si en 2019, ce sont 366 millions d'écart qui existaient entre les dépenses budgétées et les crédits consommés, l'écart a atteint même 1,194 milliard d'euros en 2024. Un tel écart entre la programmation et l'exécution n'était pas acceptable pour la représentation nationale, qui doit disposer d'un budget sincère présenté par le Gouvernement.
L'écart entre prévision et consommation s'expliquait par un défaut de comptabilité, lié au fait que les dépenses relatives aux enseignants stagiaires étaient comptabilisées dans les dépenses des personnels non stagiaires, alors qu'elles étaient budgétées dans les actions de formation.
Pour 2026, ce sont 807 millions d'euros qui sont prévus pour la formation, soit un montant plus élevé de seulement 9,4 %, représentant 69 millions d'euros, que l'exécution des dépenses de formation en 2024. Il s'agit d'une prévision qui semble nettement plus sincère.
Évolution de la prévision et de
l'exécution des dépenses liées à la
formation
des enseignants, entre 2019 et 2026
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
D'autres difficultés de budgétisation persistent toutefois dans la maquette de la mission « Enseignement scolaire ». Notamment, concernant l'action 5 « enseignement post-baccalauréat en lycée » du programme 141 « enseignement scolaire public du second degré ». En 2024, la sous-consommation s'est élevée à 1,094 milliard d'euros. L'action 2 « enseignement général et technologique en lycée » a toutefois été surconsommée de 1,74 milliard d'euros. Un problème d'imputation budgétaire semble demeurer, qui pose de réelles difficultés de compréhension de la maquette à la représentation nationale. Il serait urgent de poursuivre les efforts de sincérisation.
Évolution de la prévision et de l'exécution des crédits de l'action 5 « enseignement post-baccalauréat en lycée » du programme 141
(en CP)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
D'autres prévisions insincères demeurent dans la maquette budgétaire, notamment :
- concernant les besoins éducatifs particuliers, qui financent des dispositifs supplémentaires pour les élèves particuliers, par exemple en situation de handicap ou bien allophones, une surbudgétisation de 624 millions d'euros en 2024 est constatée ;
- de même, pour l'action 3 « enseignement professionnel sous statut scolaire », qui finance les lycées professionnels, la surconsommation est de 917 millions d'euros en 2024.
* 1 Loi n° 2022-1574 du 16 décembre 2022 visant à lutter contre la précarité des accompagnants d'élèves en situation de handicap et des assistants d'éducation (AED).
* 2 La formation continue des enseignants, rapport d'information n° 869 (2022-2023), déposé le 11 juillet 2023, par M. Gérard Longuet au nom de la commission des finances.





