III. APRÈS DES DYSFONCTIONNEMENTS AYANT GÉNÉRÉ PLUS D'UN MILLIARD D'EUROS DE DÉGRÈVEMENTS, L'APPLICATION GÉRER MES BIENS IMMOBILIERS (GMBI) SE MET PROGRESSIVEMENT EN PLACE
A. « UNE CAMPAGNE 2023 CHAOTIQUE AUX TRÈS LOURDES CONSÉQUENCES FINANCIÈRES POUR L'ÉTAT »29(*)
En 2023, la taxe d'habitation sur les résidences principales a été supprimée. Néanmoins, la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS), la taxe d'habitation sur les logements vacants (THLV) et la taxe sur les logements vacants (TLV) ont été maintenues.
L'identification des redevables de ces taxations maintenues implique d'affecter un statut d'occupation précis (résidence principale ou secondaire, local vacant ou loué) à chacun des 71 millions de locaux connus de la DGFiP. C'est dans ce but qu'une nouvelle obligation déclarative pesant sur les propriétaires a été instituée : aux termes de l'article 16 de la loi de finances pour 2020, codifié à l'article 1418 du code général des impôt, une nouvelle obligation incombe aux propriétaires de locaux d'habitation, celle d'en déclarer leurs conditions d'occupation. La taxation des résidences secondaires s'est appuyée pour une large part sur cette déclaration, rendue obligatoire pour la première fois sur l'année 2023.
À cet effet, l'outil « gérer mon bien immobilier » (GMBI) a été déployé progressivement. En réflexion depuis 2015 et mis en service en 2021, GMBI est un outil de l'administration fiscale conçu pour moderniser la déclaration des biens immobiliers des propriétaires en France et les modalités d'occupation de ces biens, offrant aux contribuables la possibilité d'avoir accès en temps réel aux informations dont dispose l'administration sur leurs biens et de pouvoir les corriger, assurant également la gestion des déclarations foncières et des taxes d'urbanisme.
Pour initialiser ce système déclaratif, l'ensemble des 34 millions de propriétaires (personnes physiques ou morales) devaient effectuer au premier semestre 2023 une déclaration d'occupation. La première campagne de collecte des déclarations d'occupation a donné lieu à une importante défaillance déclarative. En raison notamment de l'incompréhension des contribuables sur ce qui leur était demandé, l'administration fiscale n'a pas pu disposer en temps utile de données robustes sur l'occupation des locaux30(*).
Dans ces conditions, la première campagne TH « en mode GMBI » a donné lieu à des erreurs de taxation. De nombreux avis ont été émis à tort du fait des erreurs des propriétaires, au titre de leur déclaration d'occupation ou des locataires n'ayant pas signalé leur changement d'adresse dans leur déclaration de revenus.
Dégrèvements accordés au titre de la campagne 2023 (au 4 octobre 2024)
(en euros)
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Nombre de contentieux |
Montants dégrévés |
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Taxe d'habitation sur les résidences secondaires |
906 202 |
995 141 282 |
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Taxe d'habitation sur les logements vacants |
94 887 |
58 697 112 |
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Taxe sur les logements vacants |
226 011 |
252 882 285 |
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Total |
1 227 100 |
1 306 720 676 |
Source : commission des finances du Sénat d'après la Cour des comptes
La Cour des comptes relève que ce montant d'1,3 milliard d'euros représentait 34 % du produit de ces trois taxes en 2023.
D'après les dernières estimations communiquées par l'administration fiscale (situation au 15 septembre 2025), les montants mis en recouvrement au titre de la THRS 2023 ont été d'environ 4 milliards d'euros (contre 3 milliards d'euros en 2022) et près de 1,1 milliard d'euros ont été dégrevés. En matière de taxe d'habitation sur les logements vacants (THLV), les montants mis en recouvrement ont atteint 152 millions d'euros dont 63,2 millions d'euros dégrevés.
En application de l'article 1641 du code général des impôts, l'État prend à sa charge les frais de dégrèvement et de non-valeurs de la taxe d'habitation31(*). La totalité de ces nouvelles recettes fiscales a été reversée aux collectivités locales et leur est définitivement acquise pour l'année 2023.
À la suite de cette mise en oeuvre, qui a suscité de multiples défaillances ou erreurs déclaratives, la direction générale des finances publiques a été amenée à dégrever un montant important de taxation sur les résidences secondaires, estimé à date d'1,2 milliard d'euros pour l'année 2024.
* 29 Selon le sous-titre du rapport publié par la Cour des comptes à ce sujet : Gérer mes biens immobiliers, Cour des comptes, janvier 2025.
* 30 D'après la DGFiP, 82 % des locaux des « petits propriétaires » (moins de 200 biens) et 45 % de ceux des « grands propriétaires » (bailleurs sociaux et privés, grandes collectivités territoriales...) ont fait l'objet d'une déclaration d'occupation en 2023.
* 31 À l'exception des dégrèvements de la majoration de la taxe d'habitation pour les résidences secondaires résultant de l'application du II de l'article 1407 ter du code général des impôts.