III. LES ÉTABLISSEMENTS MÉDICO-SOCIAUX FINANCÉS PAR LA MISSION FONT FACE À DES CHARGES GRANDISSANTES MAIS MAL COMPENSÉES
A. LE « SÉGUR POUR TOUS » EST FINANCÉ EN THÉORIE, MAIS PAS EN PRATIQUE
À la suite de l'avis favorable émis par la commission nationale d'agrément (CNA) le 20 juin 2024, l'arrêté du 25 juin 2024 a apporté son agrément à la convention collective nationale unique élargie (CCNUE) de la branche de l'action sanitaire et sociale (BASS) du 4 juin 2024. Ces accords prévoyaient notamment l'octroi de la prime « Ségur », soit une indemnité de 238 euros bruts par mois, à tous les professionnels qui n'en bénéficiaient pas encore dans le cadre de la politique salariale, à compter du 1er janvier 2024, quel que soit leur secteur d'activité.
L'application, rétroactive au 1er janvier 2024, de cette convention aux structures financées par la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » provoque un besoin de financement de 38 millions d'euros sur le programme 304, dont 32 millions d'euros pour les services mandataires de la protection juridique des majeurs, qui sont des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) agréés et tarifés par l'État - pour la seule année 2024.
Lors de l'examen du PLF 2025, les services de l'Etat et le Gouvernement avaient assuré que ce financement aurait bien lieu en 2025.
Si les rapporteurs spéciaux ont pu, au cours de leurs auditions, constater que le financement pérenne de la prime Ségur pour les mandataires de la protection juridique des majeurs était bien assuré par le programme 304, la fédération nationale des associations tutélaires (FNAT), qui défend les intérêt des services mandataires à la protection juridique des majeurs, a indiqué que, bien que l'État ait rendu cette prime opposable par arrêté au 1er janvier 2024, les services de protection des majeurs ont dû avancer les montants sans qu'aucune compensation budgétaire effective ne leur soit versée à ce jour.
Il semble en effet que les montants versés en 2025 ne couvrent que les surcoût induits par le Ségur en 2025, laissant en revanche non compensés les surcoûts pour 2024.
S'agissant des structures médico-sociales financées par les départements, la situation semble encore plus complexe. À l'automne 2024, l'Assemblée des départements de France (ADF) a ainsi appelé ses membres, quitte à se mettre en délicatesse avec la législation, à ne pas mettre en oeuvre l'extension de la prime « Ségur » tant que l'État ne leur en compensait pas les conséquences financières23(*).
Malgré l'accord du 29 avril 2025 entre le Gouvernement et Départements de France qui a permis un financement à 50 % par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA - c'est-à-dire la Sécurité sociale), pour un montant de 85 millions d'euros en 2025, les difficultés de financement persistent pour les départements et les structures qui dépendent de leur tarification.
Enfin, la compensation de la prime pour l'année 2024 est également une source d'inquiétude, puisque plusieurs départements auraient déjà annoncé que celle-ci ne serait pas versée.
* 23 ADF, Communiqué de presse : « L'ADF appelle ses membres à ne pas mettre en oeuvre l'extension de la prime « Ségur » tant que l'État ne leur en compense pas les conséquences », 13 septembre 2024.