III. LE PROGRAMME « JEUNESSE ET VIE ASSOCIATIVE » PERD UN QUART DE SES CRÉDITS
Le tableau ci-après retrace l'évolution des crédits proposée en 2025 pour le programme 163 « Jeunesse et vie associative ».
Évolution
des crédits du programme 163
« Jeunesse et vie
associative »
(en millions d'euros)
|
LFI 2025 |
PLF 2026 |
Évolution 2025-2026 |
|
|
AE = CP |
AE = CP |
AE = CP |
|
|
Action 01 « Développement de la vie associative » |
55,6 |
48,3 |
- 13,2 % |
|
Action 02 « Actions en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire » |
147,3 |
113,4 |
- 23,0 % |
|
Action 04 « Développement du service civique » |
579,4 |
465,0 |
- 19,7 % |
|
Action 06 « Service national universel » |
65,9 |
0 |
- 100 % |
|
Total |
848,1 |
626,6 |
- 26,1 % |
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
Toutes les actions du programme 163 « Jeunesse et vie associative » perdent une partie significative de leurs crédits en 2026. Avec 626,6 millions d'euros prévus pour 2026, le programme a quasiment retrouvé son niveau de 2019 (612,3 millions d'euros). Si l'on tient compte de l'effet de l'inflation, alors le programme le programme compte 12,6 % de crédits (euros 2025) de moins par rapport à 2019.
A. LES DISPOSITIFS D'AIDE AU DÉVELOPPEMENT DE LA VIE ASSOCIATIVE ET DE L'ÉDUCATION POPULAIRE DOIVENT DAVANTAGE RÉPONDRE AUX BESOINS DES ASSOCIATIONS
Les associations ont toujours joué un rôle essentiel dans le maintien de la cohésion sociale, notamment dans les territoires ruraux. Il faut rappeler l'engagement des 20 millions de bénévoles, dont plus de 5 millions agissant quotidiennement, et des 1,8 million de salariés qui forment le tissu associatif.
Le programme 163 dispose de plusieurs outils de soutien au monde associatif, dont il est nécessaire d'évaluer l'efficacité.
1. Le Compte d'engagement citoyen n'a pas encore atteint son potentiel
Pour 2026, les crédits du compte d'engagement citoyen (CEC) s'établissent à 2,9 millions d'euros, ce qui est un niveau identique à celui de 2025. Il faut cependant relever que le dispositif avait connu une forte baisse de ses crédits les années précédentes : les moyens étaient en diminution constante depuis 2022, où le budget s'établissait à 14,4 millions d'euros.
Le compte d'engagement citoyen
Le compte d'engagement citoyen (CEC) est un dispositif qui permet d'acquérir des droits à formation, inscrits sur le compte personnel de formation. Le CEC est ouvert pour toute personne âgée de 16 ans ou plus29(*), et il reste ouvert tout au long de la vie.
Les activités concernées sont les activités de bénévolat, qui sont réalisées dans les conditions suivantes :
- l'association est déclarée depuis au moins 1 an ;
- l'objet de l'association relève d'une des catégories énoncées au b) du 1 de l'article 200 du code général des impôts ;
- la personne siège dans l'organe d'administration ou de direction de l'association ou participe à l'encadrement d'autres bénévoles.
Le CEC permet de bénéficier de 240 euros par an pour 200 heures de bénévolat, et il est plafonné à 720 euros.
Le CEC a été créé par l'article 39 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.
Le dispositif n'est utilisable par les bénéficiaires que depuis le début de l'année 2021, mais les droits sont pris en compte depuis 2017.
Source : commission des finances
Cette diminution des moyens s'explique par la sous-exécution chronique du dispositif, qui n'a jamais atteint l'ampleur initialement prévue. Alors que le stock des droits depuis 2017 est estimé à 850 000 personnes, au 30 avril 2025, le nombre de dossiers validés par les usagers est de 47 860 depuis le lancement du CEC.
Sur ces dossiers, 1 437 ont été financés uniquement avec des droits CEC et 46 423 dossiers ont été financés avec des droits CEC en complément d'autres droits (CPF, reste à charge, abondement...). Les dossiers validés depuis le lancement du dispositif représentent un montant de 9,7 millions d'euros, contre 7 millions d'euros à la même date l'année précédente.
Le budget retenu pour 2025, c'est-à-dire 2,9 millions d'euros, était donc plus proche de l'exécution réelle du dispositif que les prévisions précédentes. L'administration a donc décidé de retenir le même chiffre pour 2026.
La loi n° 2024-344 du 15 avril 2024 visant à soutenir l'engagement bénévole et à simplifier la vie associative a par ailleurs ouvert plus largement ce dispositif aux bénévoles qui s'engagent auprès d'associations déclarées depuis au moins une année contre trois précédemment. En outre, dès 2025 les personnes en situation de détention réalisant des activités bénévoles au sein des prisons devraient être rendues éligibles au CEC. Ces dispositions vont dans le bon sens, et il conviendra d'examiner leur application.
Le CEC est un outil intéressant dans son principe pour valoriser le bénévolat, en particulier pour les personnes qui exercent des responsabilités au sein des associations. Le rapporteur spécial encourage donc à continuer d'explorer différents moyens pour inciter les détenteurs des droits à les utiliser.
2. Le dispositif « Guid'Asso » achève son déploiement sur l'ensemble du territoire
Le dispositif « Guid'Asso » a été lancé officiellement le 19 octobre 2022, avec pour objectif d'orienter et d'accompagner les associations dans la réalisation de leurs démarches. Il vise notamment à mettre en place des « points d'appui », qui désignent des structures labellisées par l'État pour conseiller les associations. L'État ne gère donc pas directement ces points d'appuis, mais met en place des partenariats dits de « coanimations » avec les collectivités territoriales et des associations. Guid'Asso bénéficie en outre de postes financés par le Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep).
Le déploiement du dispositif est progressif. Au 31 décembre 2024, Guid'Asso se compose de 1 585 points d'appui, contre 846 en 2023 (+ 87 %), et ils sont gérés pour les deux tiers par des associations et pour un tiers par les collectivités territoriales.
Répartition territoriale des partenariats et points d'appui Guid'Asso
|
Nombre de partenariats mis en place |
Nombre points d'appui Guid'Asso |
Nombre de postes Fonjep attribués |
|
|
Hauts-de-France |
6 |
248 |
57 |
|
Nouvelle-Aquitaine |
13 |
294 |
108,5 |
|
Centre-Val de Loire |
7 |
179 |
51 |
|
Pays-de-la-Loire |
6 |
141 |
49 |
|
Normandie |
6 |
81 |
45 |
|
Bretagne |
5 |
106 |
41 |
|
Réunion |
1 |
43 |
11 |
|
Auvergne-Rhône-Alpes |
13 |
156 |
100,5 |
|
Occitanie |
14 |
187 |
94,5 |
|
PACA |
7 |
50 |
40 |
|
Mayotte |
1 |
13 |
9 |
|
Bourgogne-Franche Comté |
9 |
76 |
72 |
|
Corse |
1 |
11 |
13 |
|
Grand-Est |
5 |
0 |
10 |
|
Guadeloupe |
1 |
0 |
2 |
|
Île-de-France |
1 |
0 |
4 |
|
Martinique |
0 |
0 |
0 |
|
Guyane |
0 |
0 |
0 |
|
Total |
96 |
1 585 |
707,5 |
Source : commission des finances, d'après les réponses de la DJEPVA au questionnaire du rapporteur spécial
En 2025, le déploiement est en cours de finalisation dans les régions Grand-Est, Guadeloupe, Martinique et la Guyane. La généralisation de Guid'Asso en Île-de-France et dans les collectivités d'outre-mer (Nouvelle-Calédonie, Polynésie, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna) est prévue pour 2026.
Dans le cadre de son déploiement à l'ensemble du territoire français, le budget de Guid'Asso a progressivement augmenté de 2,9 millions d'euros à 7,4 millions d'euros en 2025. 7,4 millions sont à nouveau inscrits dans le projet de loi de finances pour 2026, et il est possible que la finalisation du dispositif conduise à une diminution de ses coûts dans les années à venir.
Le rapporteur spécial estime que Guid'Asso apporte une aide précieuse aux associations, et toutes les personnes auditionnées à ce sujet dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2026 ont souligné l'intérêt du dispositif.
3. Le Fonds de développement de la vie associative (FDVA) bénéficie du mécanisme de fléchage des comptes inactifs récupérés par l'État
Le Fonds de développement de la vie associative est composé de deux volets : le premier est destiné à la formation des bénévoles (FDVA 1), et le second est consacré au financement du « fonctionnement et de l'innovation » des petites associations (FDVA 2). Ce second volet a remplacé la dotation parlementaire, supprimée en 2017.
Le FDVA est destiné principalement à financer les petites associations, c'est-à-dire les associations non-employeuses ou qui possèdent au plus deux ETPT. Les subventions sont de l'ordre de quelques milliers d'euros. En 2024, 1 640 associations ont bénéficié d'une subvention au titre du FDVA 1, et 16 138 associations ont obtenu un financement par le FDVA 2.
Avec respectivement 8,1 millions d'euros et 25 millions d'euros inscrits pour 2026, le montant des crédits inscrits respectivement pour le FDVA 1 et le FDVA 2 sur le programme 163 est similaire à celui des années précédentes. Ces sommes donnent cependant une vision incomplète des fonds consacrés au FDVA, car il faut y ajouter le fléchage des comptes inactifs de l'État, effectif depuis 2021.
L'article 272 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a en effet mis en place un mécanisme de fléchage des avoirs inactifs récupérés par l'État vers le fonds pour le développement de la vie associative. Ce mécanisme est une demande ancienne du Mouvement associatif, qui a été soutenu par le rapporteur spécial.
Il prévoit qu'une quote-part des sommes acquises à l'État provenant des comptes bancaires inactifs et des contrats d'assurance-vie en déshérence, est affectée au FDVA. La loi de finances pour 2020 prévoyait initialement que 20 % de ces sommes bénéficient chaque année au FDVA30(*). Le taux de quote-part a été réhaussé à 40 % par l'article 258 de la loi de finances pour 202431(*).
Les premières prévisions de la direction générale de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative prévoient un complément de financement de 43,1 millions d'euros pour 2025, ce qui porterait le total des sommes dévolues au FDVA à 70,5 millions d'euros, en tenant compte des reports ainsi que d'une annulation de crédits de 10,5 millions d'euros décidées en cours de gestion.
Financements du FDVA depuis 2017
(en million d'euros)
|
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
|
|
FDVA 1 |
8,1 |
8,1 |
8,1 |
8,1 |
8,1 |
8,1 |
8,1 |
8,1 |
8,1 |
8,1 |
|
FDVA 2 |
25 |
25 |
25 |
25 |
25 |
25 |
25 |
25 |
14,5 |
25 |
|
Comptes inactifs |
- |
- |
- |
- |
19,2 |
20,9 |
17,6 |
31,1 |
43,1 |
35 |
|
Reports de crédits |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
4,8 |
- |
|
Total |
33,1 |
33,1 |
33,1 |
33,1 |
52,3 |
54 |
50,7 |
64,2 |
70,5 |
66,1 |
Note : les chiffres donnés pour 2025 et 2026 sont prévisionnels.
Source : commission des finances
Le développement de ce financement est bien entendu une bonne nouvelle. Pendant les premières années d'existence du FDVA 2, les crédits destinés au dispositif étaient en effet insuffisants pour offrir un véritable soutien aux petites associations, sachant qu'ils ne représentaient que la moitié de l'ancienne dotation parlementaire. Il était urgent que le soutien à la vie associative soit dotée de moyens au moins équivalents à celui qu'il était au moment de la réserve parlementaire.
Au-delà de la question des montants qui lui sont attribués, le FDVA 2 possède plusieurs faiblesses. Dans son enquête sur le FDVA 232(*), la Cour des comptes a souligné une baisse de l'ordre d'un tiers du nombre de demandes de financement entre 2018 et 2020 (de 22 800 à 15 300). De plus, tandis que le taux d'acceptation des demandes est bon (supérieur à 80 %), le montant des subventions accordées est nettement inférieur aux demandes. Ces résultats montrent que la lisibilité des critères du financement du FDVA 2 peut être améliorée. Le rapporteur spécial a formulé des recommandations à ce sujet dans son rapport d'information, « Pour un financement des petites associations à la hauteur : rénover le Fonds pour le développement de la vie associative ».
Le rapporteur spécial souhaite par ailleurs souligner la qualité du fonctionnement des collèges départementaux, qui cherchent réellement à définir des stratégies de financement adaptées aux territoires dans lesquelles exercent les associations. Ils montrent que l'échelon départemental reste l'échelon le plus pertinent pour piloter le FDVA 2.
Cinq exemples d'associations financées par
le FDVA en 2025 ; présentation
par la direction de la
jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative
Dans l'Ain, la Toute Petite Compagnie est une association basée à Val-Revermont. Elle est spécialisée dans le jeune public et a pour but la création et la diffusion de spectacles musicaux et poétiques. Elle propose des spectacles itinérants, afin de rendre plus facile l'accès à la culture et à la pratique artistique en milieu rural ou dans des milieux défavorisés. En 2024, elle intervient en milieu scolaire de la maternelle au lycée et dans la formation des professionnels de la petite enfance. Elle coordonne et anime également des projets artistiques auprès de publics empêchés (EHPAD, enfants et adultes polyhandicapés), allophones et en milieu carcéral. Elle a reçu une subvention de 2 000 euros.
Dans les Pyrénées-Atlantiques, en complément de l'activité originelle de l'association La Table du Soir, qui est de proposer un repas chaud toute l'année aux personnes en situation de précarité, le projet soutenu à hauteur de 1 000 euros consistait à intégrer ces bénéficiaires dans des activités culturelles, artistiques et sportives à réaliser ensemble.
En Meurthe et Moselle, la Maison des jeunes et de la culture de Toul constitue un élément essentiel de la vie sociale et culturelle de la Communauté de Communes Terres Touloises. Les projets et les activités permanentes se sont enrichis de nouvelles propositions permettant d'accueillir un public plus large (seniors, personnes en situation de handicap, jeunes en insertion, très jeunes enfants...) et de mieux répondre aux besoins du territoire. Le nombre d'adhérents est passé ainsi de 458 en 2014 à 862 en 2024, issus pour 47 % de Toul et pour 53 % des communes rurales alentours. L'association a bénéficié de 2 150 euros du FDVA.
Dans les Alpes-Maritimes, le Rowing club de Cannes Mandelieu a été soutenu pour organiser, en partenariat avec l'association « Coeur et Santé » du centre hospitalier de Cannes, des séances d'aviron adaptées et spécifiques sur l'eau ou en salle pour les personnes en rééducation à la suite d'un problème cardiaque. Elle a reçu une subvention de 2 500 euros.
À la Martinique, l'association Les Premières Martinique est un réseau dédié à l'entrepreneuriat au féminin. Grâce à une subvention de 3 000 euros du FDVA, l'association a prévu de former vingt jeunes femmes porteuses de projets et/ou créatrices d'entreprise.
Source : réponses au questionnaire budgétaire
* 29 15 ans si la personne dispose d'un contrat d'apprentissage.
* 30 La première rédaction de l'article prévoyait que cette quote-part soit fixée chaque année en loi de finances, mais l'article 205 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances initiale pour 2022 a fixé ce montant à 20 %, ce qui est le montant qui était systématiquement retenu.
* 31 Loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances initiale pour 2024.
* 32 « Le Fonds pour le développement de la vie associative. Volet fonctionnement et innovation », Septembre 2021. Enquête menée à la demande de la commission des finances du Sénat dans le cadre de l'article 58-2 de la loi organique relative aux lois de finance.