D. LA CONSTRUCTION NAVALE

Le chiffre d'affaires de l'exercice 1995 pour le secteur de la construction navale a enregistré une progression de 10% par rapport à l'exercice 1994 qui était lui-même en forte progression par rapport à celui de 1993. Six navires (dont deux méthaniers et un paquebot) ont été livrés en 1995 et 7 navires ont été commandés en 1995.

1 navire a été commandé au cours du premier semestre 1996 ; 5 navires ont été achevés au cours du premier semestre 1996.

L'année sous revue a été heureusement marquée par l'adoption, sur la suggestion du groupe d'étude de la Mer du Sénat, de la loi n° 96-607 du 5 juillet 1996 qui, en adaptant le régime fiscal des copropriétés de navires de commerce (quirats), encourage l'investissement dans la construction navale.

Votre commission est attentive à l'application de cette loi, à savoir :

- à l'adoption de dispositions réglementaires relatives aux navires d'occasion ;

- à la mise en place d'une instruction administrative aussi rapide que possible des dossiers permettant aux professionnels de réagir avec la célérité souhaitable ;

- à la publication rapide d'une instruction précise en matière de fonds de placement quirataires.

CONSTRUCTION NAVALE :
LES CARNETS DE COMMANDES EN EUROPE DE L'OUEST

(en millions de tonnes de jauge brute compensée)

30.06.1991

30.06.1992

30.06.1993

30.06.1994

30.06.1995

Monde

Europe

% Monde

26,5

8,97

33,9 %

25,8

7,98

30,9 %

23,6

7,02

29,7 %

27,8

7,96

28,6 %

30,8

8,67

28,1 %

France

% Europe

0,73

8,1 %

0,48

6,1 %

0,55

7,9 %

0,57

7,2 %

0,53

6,1 %

Italie

% Europe

1,83

20,4 %

1,93

24,1 %

1,63

23,2%

1,65

20,7 %

2,70

31,1 %

Finlande

% Europe

0,34

3,8 %

0,49

6,2 %

0,75

10,7%

0,85

10,7%

1,04

12%

Allemagne

% Europe

2,36

26,3 %

1,82

22,8 %

1,97

28%

2,07

26%

2,04

23,5 %

Espagne

% Europe

0,95

10,6%

0,71

8,9 %

0,43

6,1 %

0,46

5,8 %

0,65

7,4 %


La mise en oeuvre de l'accord conclu le 21 décembre 1994, dans le cadre de l'OCDE entre l'Union européenne et les principaux États concernés par la construction navale a été à nouveau repoussée.

Cet accord, rappelons-le, instaure des règles strictes pour l'octroi d'aides publiques dans la construction navale et devait constituer une étape vers l'harmonisation des conditions de la concurrence internationale dans ce secteur. Le congrès américain opposant, avec l'amendement « Bateman » en juin 1996, des obstacles à sa ratification, l'accord -dont l'entrée en vigueur est subordonnée à la ratification de l'ensemble des parties- semble fragilisé.

L'Union européenne a, pour sa part, décidé, au début de 1996, de maintenir en vigueur, jusqu'à la date d'applicabilité de l'accord, sa réglementation actuelle en matière d'aides à la construction navale (VIIe Directive) permettant une subvention étatique à hauteur de 9 % du coût de la construction pour les gros navires.

Enfin, le 20 septembre 1996, elle a décidé de prolonger le régime européen d'aides publiques (aux armateurs, à la production, à la restructuration et à la recherche) jusqu'au 31 décembre 1997.

Votre commission renouvelle les mises en garde qu'elle a énoncées s'agissant de l'application non réciproque d'un tel accord au profit de concurrents aussi redoutables que la Corée, le Japon ou les États-Unis. L'accord OCDE ne doit pas être un marché de dupes.

Quelques chiffres permettent de mesurer le risque encouru par les constructeurs européens.

Ainsi, alors qu'en 1970 les navires battant pavillon d'un État membre de l'Union européenne représentaient 32 % de la flotte mondiale, ils n'en représentent plus que 14 % en 1996. Depuis 1976, 200.000 emplois ont été perdus dans le secteur de la construction navale en Europe. En France, les effectifs qui atteignaient 35.000 salariés en 1975 sont tombés à 6.000 aujourd'hui. Quant à la Corée du Sud, elle a vu l'effectif de ses chantiers navales passer de 36.000 à 45.000 employés en quatre ans.

Votre commission accueille donc avec soulagement le maintien de l'aide directe de l'État à la construction navale.


Le projet de budget pour 1997 prévoit une ouverture de 850 millions de francs d'autorisations de programme et 750 millions de francs de crédits de paiement pour concourir aux besoins des entreprises de ce secteur.

Il convient de rappeler que ces crédits sont ouverts sur le chapitre 64-93 « Équipement naval - Interventions » du budget « Industrie ». Le tableau ci-après résume l'évolution des aides sur ce chapitre depuis 1993.

A.P. (en MF)

1993

1994

1995

1996

Perspective 1997

Dotation

ouvert (n)

(dont LFIn)

1.239,8

(711,0)

1.413,1

(1.144)

1.647,4

(826,0)

1.499,5

(691,6)

850,0

Consommations

889,2

591,7

839,5

815,9


Les principaux constructeurs navals français se trouvent, en dépit des aides, dans une situation délicate.

* Les chantiers de l'Atlantique

Avec un chiffre d'affaires de 4,7 milliards de francs en 1994-1995 et 4.200 salariés, la filiale de GEC-Alsthom se spécialise dans les navires complexes et l'architecture navale.

La commande de deux paquebots de 300 cabines par l'armement américain n'éclaircit pas totalement l'avenir.

En effet, les Chantiers de l'Atlantique sont contraints de réduire leurs coûts de quelque 30 % dans les meilleurs délais face à la concurrence italienne et finlandaise.

L'entreprise a conclu, en novembre 1996, une charte avec une vingtaine d'entreprises, afin de réorganiser sa sous-traitance.

Votre commission s'interroge une nouvelle fois sur le développement qu'induirait une éventuelle complémentarité entre les Chantiers de l'Atlantique et les Chantiers militaires de la DCN.

* Leroux et Lotz

Entreprise familiale, le plus performant des « petits » constructeurs français a réalisé 850 millions de francs de chiffre d'affaires en 1995 pour un effectif de 1.300 salariés.

Fragilisé par sa trésorerie, Leroux et Lotz était annoncé déficitaire pour 1995 mais le retour aux bénéfices est attendu en 1996.

Alors que les navires à grande vitesse (NGV) révolutionnent le transport maritime de voyageurs, Leroux et Lotz a développé une gamme de navires de ce type : les « Corsaire ».

Un accord devait être conclu avec la DCN pour développer les complémentarités.

* Les chantiers de la Ciotat

En avril 1995, le Conseil régional, le Conseil général et la municipalité de La Ciotat ont constitué une société d'économie mixte, la SEMIDEP, chargée, conformément au protocole d'accord signé en août 1994 entre les parties, l'État et le syndicat CGT, de l'aménagement du site des anciens chantiers dans le but d'y accueillir de nouvelles entreprises de la filière maritime et industrielle en 1995. La société Mistral Composites, spécialisée dans la construction de voiliers, a déjà pris possession d'une des nefs des anciens chantiers pour y réaliser une série de monocoques.

L'accord conclu avec les collectivités locales tarde à porter ses fruits. La firme Mistral composites (51 salariés), fondée en 1995, a vu le projet de course de grands voiliers, qui pouvait susciter son expansion, reporté.

Dans l'attente de la réalisation d'autres projets industriels, et parallèlement à la société d'économie mixte, une société d'insertion, la CIM, a été mise en place pour les anciens salariés du chantier. Conformément aux engagements qu'il avait souscrits, l'État a doté cette entreprise des moyens financiers nécessaires à son fonctionnement en 1995 ainsi qu'en 1996.

* L'industrie française de la plaisance demeure « encalminée », selon les commentateurs.

Le chiffre d'affaires de la production française en 1994 (2,15 milliards de francs) inférieur du tiers à celui de 1990 (3,2 milliards). Après avoir pris part au redémarrage européen à la fin de l'année dernière, les ventes françaises se sont effondrées au printemps 1995.

En 1995, l'activité a stagné dans les meilleurs des cas. Dans un marché en rétrécissement n'offrant plus de perspectives de croissance interne, la recomposition du paysage concurrentiel s'est accélérée.

C'est dans ce contexte que l'on a appris, au début de l'année 1996, la reprise de Jeanneau par Bénéteau qui a réalisé 2 milliards de chiffre d'affaires et 4,6 millions de francs de résultat net en 1995, contre 827 millions de francs de chiffre d'affaires pour Jeanneau qui, pour 100 millions de fonds propres comptait 169 millions de dettes.

Votre commission tient à conclure sur la construction navale :

- que la vente presque à perte ne saurait durablement constituer une politique pour une entreprise, même si elle peut permettre de séduire les acheteurs ;

- que la sous-traitance est un des aspects les plus délicats du dossier de la construction navale à prendre en compte pour qui est soucieux d'aménagement du territoire.

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