EXAMEN DES ARTICLES
DU PROJET DE LOI ORGANIQUE

Article 1er
Communes, provinces et aires coutumières
de la Nouvelle-Calédonie

Cet article définit le territoire -au sens géographique- de la Nouvelle-Calédonie. Il s'agit de dispositions classiques, qu'on retrouve à l'article 4 du statut du 9 novembre 1988 ou à l'article 2 du statut du 6 septembre 1984. L'article premier du statut du 12 avril 1966 procède de même pour la Polynésie française.

Parmi les îles qui composent la Nouvelle-Calédonie, les îles Huon et Surprise, Chesterfield, les îles Walpole, de l'Astrolabe, Mathew, Fern ou Hunter ne sont rattachées à aucune commune et à aucune province. L'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à réintégrer l'île de Beautemps-Beaupré parmi les îles Loyauté puisque cette île fait partie de la commune d'Ouvéa.

Les trois provinces de la Nouvelle-Calédonie sont ensuite délimitées, sans changement par rapport à l'article 6 du statut du 9 novembre 1988, si ce n'est pour tenir compte de la création de la commune de Kouaoua en province Nord par le décret n° 95-454 du 25 avril 1995. Malgré le point 2.1.5 de l'Accord de Nouméa qui veut que les limites des provinces et des communes coïncident, de manière qu'une commune n'appartienne qu'à une province, l'exception de Poya est maintenue. Le territoire de la commune de Poya est réparti entre les provinces nord et sud par un décret du 26 avril 1989, qui devra être actualisé.

Une disposition nouvelle autorise la modification par décret en Conseil d'Etat des limites des provinces, sur proposition du congrès et après avis des assemblées de province, des conseils municipaux concernés et du sénat coutumier. Votre commission des Lois vous propose un amendement rédactionnel permettant en outre au gouvernement comme au congrès de prendre l'initiative d'une telle modification.

Enfin, sont énumérées les aires coutumières de la Nouvelle-Calédonie, comme à l'article 60, alinéa premier, du statut du 9 novembre 1988. Le fait de mentionner les aires coutumières dès le premier article du projet de loi organique correspond à une orientation de l'Accord de Nouméa (point 1.2.2.) selon laquelle l'organisation spatiale de la Nouvelle-Calédonie doit davantage tenir compte des limites des aires coutumières.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 1er ainsi modifié.

Article 2
Institutions de la Nouvelle-Calédonie - Haut-Commissaire -
Représentation au Parlement et au Conseil économique et social
de la République

Cet article énumère les institutions de la Nouvelle-Calédonie. Le congrès, le gouvernement, le sénat coutumier et le conseil économique et social en font partie.

L'Assemblée nationale, avec l'avis favorable du Gouvernement, a supprimé les conseils municipaux de la liste des institutions de la Nouvelle-Calédonie, pour deux raisons :

- les communes sont des collectivités territoriales de la République, régies par la loi simple ;

- l'Accord de Nouméa (point 2) prévoit que les restrictions apportées au corps électoral s'appliquent " pour les élections aux institutions du pays " et pour la consultation finale ; inclure les communes dans la liste des institutions de la Nouvelle-Calédonie serait leur rendre applicables les restrictions au droit de vote, ce qui n'a jamais été envisagé.

Votre commission des Lois vous propose à son tour un amendement tendant à supprimer les assemblées de province de la liste des institutions de la Nouvelle-Calédonie. Si les assemblées de province sont élues selon des modalités spécifiques décrites au titre V (corps électoral spécial), elles demeurent, aux termes de l'article 148 du présent projet de loi organique, des collectivités territoriales de la République, comme les communes. Aussi votre commission des Lois vous soumet-elle un amendement tendant à supprimer le deuxième alinéa de cet article, selon lequel les communes de la Nouvelle-Calédonie sont des collectivités territoriales de la République, mention qu'elle vous proposera de reprendre dans un article additionnel après l'article 2.

Le troisième alinéa dispose que le haut-commissaire de la République est dépositaire des pouvoirs de la République et représente le Gouvernement. Afin d'éviter toute confusion, votre commission des Lois rappelle que de façon générale, l'emploi de la majuscule désigne le Gouvernement de la République.

Enfin, il est indiqué que la Nouvelle-Calédonie est représentée au Parlement et au Conseil économique et social dans les conditions fixées par les lois organiques (reproduction de l'article 4, alinéa 2, du statut du 6 septembre 1984). Il s'agit actuellement de :

- la loi organique n° 85-689 du 10 juillet 1985 relative à l'élection des députés des territoires d'outre-mer et de la collectivité territoriale de Mayotte, complétée par la loi n° 85-691 dont l'article 1er dispose que la Nouvelle-Calédonie élit deux députés ;

- l'ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959, complétant celle du 15 novembre 1958, selon laquelle chaque territoire d'outre-mer élit un sénateur ;

- enfin l'article 7 de l'ordonnance n° 58-1360 du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique et social, dans sa rédaction issue de la loi n° 90-1001 du 7 novembre 1990, qui prévoit que le Conseil économique et social comprend neuf représentants des activités économiques et sociales des départements, des territoires et des collectivités territoriales à statut particulier d'outre-mer.

Afin de tenir compte du fait que la Nouvelle-Calédonie n'est plus un territoire d'outre-mer, votre commission des Lois vous proposera d'adapter les textes susvisés par des articles additionnels insérés après l'article 216 du présent projet de loi organique et après l'article 19 du projet de loi simple. Ces adaptations, pourtant indispensables pour que la Nouvelle-Calédonie puisse continuer à désigner des représentants aux institutions de la République, ne figurent ni dans les projets de loi initiaux, ni dans les textes adoptés par l'Assemblée nationale !

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 2 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 2
Collectivités territoriales de la République

Votre commission des Lois vous propose un amendement tendant à insérer un article additionnel qui fusionne le deuxième alinéa de l'article 2 et l'article 148 du présent projet de loi organique, selon lesquels les communes et les provinces de la Nouvelle-Calédonie sont des collectivités territoriales de la République.

Elles s'administrent librement par des assemblées élues au suffrage universel direct, sous réserve des adaptations apportées au corps électoral pour les élections aux assemblées de province par le titre V du présent projet de loi organique.

Article 3
Citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie

Conformément au point 2 du document d'orientation de l'Accord de Nouméa et à l'article 77 de la Constitution disposant que la loi organique déterminerait " les règles relatives à la citoyenneté " , l'article 3 institue une " citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie " .

Cette innovation constitue un aspect essentiel de l'Accord de Nouméa aux termes duquel :

" L'un des principes de l'accord politique est la reconnaissance d'une citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie. Celle-ci traduit la communauté de destin choisie et s'organiserait, après la fin de la période d'application de l'accord, en nationalité, s'il en était décidé ainsi. Pour cette période, la notion de citoyenneté fonde les restrictions apportées au corps électoral pour les élections aux institutions du pays et pour la consultation finale. Elle sera aussi une référence pour la mise au point des dispositions qui seront définies pour préserver l'emploi local. "

L'article 3 du projet de loi organique réserve le bénéfice de la citoyenneté calédonienne aux seules personnes, de nationalité française, qui répondent aux conditions fixées par l'article 177 pour définir le corps électoral appelé à voter aux élections des membres des assemblées de province et du congrès. Définition du corps électoral et notion de citoyenneté calédonienne sont donc intimement liées, cette notion permettant de justifier politiquement les restrictions apportées au corps électoral et, inversement, le corps électoral restreint constituant le critère de référence pour définir cette citoyenneté.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 3 sans modification .

Article 4
Signes identitaires

Cet article permet à la Nouvelle-Calédonie de déterminer librement les " signes distinctifs " permettant de marquer sa personnalité aux côtés de ceux de la République.

L'Assemblée nationale, avec l'accord du Gouvernement, a rétabli la rédaction de l'Accord de Nouméa dont le point 1.5. stipule que " des signes identitaires du pays, nom, drapeau, hymne, devise, graphisme des billets de banque, devront être recherchés en commun pour exprimer l'identité kanak ". De plus, elle a clarifié la rédaction pour la rendre conforme à l'article 2 de la Constitution qui traite de l'emblème, de l'hymne, de la devise et du principe de la République mais pas de " signes ". Elle a préféré reprendre la rédaction de l'article 1er de la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française.

La possibilité offerte à la Nouvelle-Calédonie de modifier son nom est prévue au point 1.5. de l'Accord de Nouméa, qui précise que ce changement résultera d'une loi du pays adoptée à la majorité qualifiée. Cette majorité est fixée aux trois cinquièmes des membres du congrès, ce qui correspond à la majorité qualifiée requise pour la modification par le congrès de l'échéancier des transferts de compétence (point 3 de l'Accord de Nouméa). Comme les autres lois du pays, celle qui modifiera éventuellement le nom de la Nouvelle-Calédonie ou définira ses signes identitaires sera prise selon les modalités prévues aux articles 92 et suivants du présent projet de loi organique.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 4 sans modification .

Article 5
Propriété foncière

Cet article, dont la portée est déclaratoire plus que normative, souligne la spécificité du droit de propriété en Nouvelle-Calédonie qui reste toutefois garanti par la Constitution.

Le droit de propriété en matière foncière peut revêtir trois aspects distincts soumis chacun à un régime juridique propre : la propriété privée, la propriété publique, les terres coutumières.

Est ainsi introduite la notion de " terres coutumières " , définie au point 1.4 de l'Accord de Nouméa qui affirme solennellement que " l'identité de chaque Kanak se définit d'abord en référence à une terre " . Le statut des terres coutumières est précisé à l'article 17 du présent projet de loi organique.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 5 sans modification .

Page mise à jour le

Partager cette page