B. LES INCERTITUDES ENTOURANT LA PROGRAMMATION DES DÉPENSES

Les propositions de la Commission ne permettent pas d'élucider ce que sera l'évolution effective des crédits de paiement par rubrique puisque les seules références disponibles concernent les crédits agricoles et la mention d'un plafond global de crédits de paiement.

Cependant, ces quelques données et le bilan de la programmation d'Edimbourg laissent planer des doutes sérieux sur la sincérité de la programmation des dépenses proposée par la Commission.

Avant de les exposer, il convient de déplorer le laconisme avec lequel la Commission a présenté son programme, le niveau d'agrégation des données interdisant d'accéder à une connaissance précise de la substance de cette programmation.

Ces vifs regrets s'appliquent tout particulièrement relativement aux fonds structurels, aux politiques internes et aux actions extérieures, domaines à l'égard desquels la Commission n'a, généralement, même pas pris la peine de fournir des éléments indicatifs.

L'examen des crédits programmés au titre des différentes rubriques laisse perplexe.

L'on a évoqué plus haut les incertitudes relatives au scénario agricole sous-tendant les propositions de la Commission. Les autres rubriques comportent, chacune, des incertitudes également. Mais c'est l'apurement de la programmation d'Edimbourg qui doit surtout être pris en considération. Fin 1999, il devrait ainsi rester près de 45 milliards d'euros à liquider du fait des crédits engagés dans le cadre de la programmation actuelle des actions structurelles. Cette dette devra être honorée alors même que la programmation de la Commission traduit une augmentation importante des crédits d'engagement des actions structurelles en début de période et que la Commission propose d'accorder une avance sur les programmes de 10 % de leur montant. Cette combinaison de variables laisse à penser que les crédits de paiement ouverts au titre des actions structurelles pourraient être d'un niveau très proche du plafond. Il est ainsi assez douteux que les exercices budgétaires à venir permettent de dégager des marges sous les plafonds contrairement aux orientations clairement affirmées dans l'accord interinstitutionnel.

Il s'en suivrait un net ressaut des dépenses non obligatoires qui pourrait atteindre près de 10 milliards d'euros par rapport au niveau atteint dans le budget de 1999. La contribution française en serait alourdie de l'ordre de 10 milliards de francs. Comme en outre les seules marges disponibles subsistantes se trouveraient réunies au sein de la rubrique 1, l'on peut craindre des tentatives de les mobiliser , le plafond des crédits de paiement s'appliquant globalement et non rubrique par rubrique.

Enfin, dans ce contexte, les doutes relatifs à l'estimation des dépenses liées à l'adhésion ajoutent à l'inquiétude. Si les dépenses liées à l'adhésion ne sont pas intégrées à la programmation financière centrale, elles font l'objet d'une programmation spécifique pour l'ensemble des rubriques du budget communautaire, à l'exception de la rubrique " Actions extérieures " supposée insensible à l'adhésion de nouveaux membres.

Les dépenses liées à l'adhésion et leur financement

Millions d'euros - prix 1999

2002

2003

2004

2005

2006

Les dépenses

 
 
 
 
 

Rubrique 1 (*)

1 600

2030

2 450

2 930

3 400

Rubrique 2

3 750

5 830

7 920

10 000

12 080

Rubrique 3

730

760

790

820

850

Rubrique 5

370

410

450

450

450

Total des crédits pour engagements

6 450

9 030

11 610

14 200

16 780

(1) Total des crédits pour paiements

4 140

6 710

8 890

11 440

14 220

Les sources de financement disponibles

 
 
 
 
 

Financement des dépenses agricoles par prélèvement sur la marge disponible sous la ligne directrice

1 600

2 030

2 450

2 930

3 400

Disponibilités réservées pour l'adhésion dans le cadre financier de la Communauté à Quinze (estimation)

1 280

3 300

5 680

8 060

10 470

Augmentation des ressources propres résultant de l'accroissement du PNB de l'Union du fait de l'adhésion (estimation)

3 440

3 510

3 580

3 660

3 740

(2) Total des financements disponibles

6 320

8 840

11 710

14 650

17 610

Evolution des marges sous le plafond des ressources propres

 
 
 
 
 

Marge (2) - (1)

2 180

2 130

2 820

3 210

3 390

Marge dans le cadre financier à Quinze (0,03 % du PNB)

2 520

2 580

2 650

2 720

2 780

Marge totale disponible dans une Communauté élargie (estimation)

4 700

4 710

5 470

5 930

6 170

Marge totale en pourcentage du PNB de la Communauté élargie

0,05 %

0,05 %

0,06 %

0,06 %

0,06 %

(*) dépenses estimées à prix 1999 à titre de comparaison. Seules les estimations à prix courants sont pertinentes.

Source : Document 1049


Ces estimations sont bâties, semble-t-il, sur l'hypothèse d'un élargissement à partir de 2002 à six nouveaux Etats membres, Chypre, la Pologne, la Hongrie, la République Tchèque, la Slovénie et l'Estonie.

On ne discutera pas la vraisemblance de cette hypothèse qui suppose en particulier que l'ensemble de ces Etats remplissent les critères de Copenhague destinés à s'assurer que les nouveaux membres puissent appliquer l'acquis communautaire. Ayant souligné que les perspectives d'élargissement sont en outre ouvertes à d'autres états, l'on doit, à ce stade, tenter d'analyser les estimations financières du processus en cours telles que les présente la Commission.

Les dépenses liées à l'adhésion s'élèveraient en crédits pour engagements à 58.070 millions d'euros et à 45.400 millions d'euros en crédits pour paiements.

Les surcoûts liés à l'élargissement peuvent être appréhender à partir des données suivantes.

Les crédits résultant de l'adhésion des nouveaux membres représenteraient environ 11,1 % des crédits d'engagements et 8,7 % des crédits de paiement de l'Europe à 15.

Le caractère redistributif du budget européen serait accentué par l'élargissement - Chapitre III - Les crédits d'engagements destinés aux nouveaux membres représenteraient sur la période 3,7 % de leur PIB contre seulement 1,18 % du PIB des 15.

Ce phénomène serait le résultat de l'importance relative des crédits d'actions structurelles nécessaires dans le cade d'un élargissement de ces actions aux nouveaux Etats membres.

En effet, la structure des charges résultant de l'élargissement serait marquée par la prédominance des charges d'actions structurelles.

Structure des charges résultant de l'élargissement

(En % du total)

Rubrique 1

21,4

Rubrique 2

68,1

Rubrique 3

6,8

Rubrique 5

3,7

Les nouveaux Etats membres mobiliseraient une masse importante de crédits d'actions structurelles qui, en pourcentage des crédits de cette nature réservés aux 15 s'élèverait à 23 %.

On vérifie là aussi l'accentuation de caractère redistributif du budget européen résultant de l'élargissement puisqu'avec un PIB équivalent à 3,6 % du PIB des 15, les nouveaux Etats membres bénéficieraient de crédits d'actions structurelles représentant près du quart des crédits de l'espèce disponibles pour les 15.

En ce qui concerne l'effet de l'élargissement sur les crédits de la politique agricole commune, les estimations de la Commission débouchent sur une réévaluation des besoins de 5 % par rapport aux crédits d'engagements disponibles pour les 15. La majoration des dépenses agricoles liée à l'élargissement serait ainsi modeste. Mais, cette estimation est tributaire de conventions qui la rendent très incertaine -v. supra-. Elle repose en particulier sur l'hypothèse selon laquelle les agriculteurs des nouveaux Etats membres ne bénéficieraient pas des aides directes.

Enfin, les tensions exercées sur les politiques internes paraissent insuffisamment prises en compte au regard des besoins de rattrapage existants.

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