N° 116

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 décembre 1999

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE, relatif à la réduction négociée du temps de travail ,

Par M. Louis SOUVET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet, André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jacques Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Jean-Pierre Vial, Guy Vissac.

Voir les numéros :

Assemblée nationale
( 11 ème législ.) : Première lecture : 1786 rect ., 1826 et T.A. 366 .

Commission mixte paritaire : 1921 .

Nouvelle lecture : 1889 , 1937 et T. A. 403 .

Sénat : Première lecture : 22 , 30 et T.A. 15 (1999-2000).

Commission mixte paritaire : 70 (1999-2000).

Nouvelle lecture : 115 (1999-2000).


Travail

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mardi 7 décembre 1999, sous la présidence de M. Jean Delaneau, président, la commission a procédé à l'examen , en nouvelle lecture, du rapport de M. Louis Souvet , sur le projet de loi n° 115 (1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la réduction négociée du temps de travail .

M. Louis Souvet, rapporteur, a déclaré qu'après l'échec de la commission mixte paritaire réunie le 15 novembre dernier, l'Assemblée nationale avait adopté, ce jour, lors d'un vote solennel en nouvelle lecture, le projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail.

Il a estimé qu'elle avait, dans l'ensemble, rétabli son texte, notamment pour tout ce qui concernait le principe de l'abaissement de la durée légale du travail à 35 heures ; il a observé que ces rétablissements n'avaient pas été sans de nombreux remords ou ajustements sur des dispositifs qui se caractérisaient par leur extrême complexité.

Il a considéré en conséquence que le texte adopté par l'Assemblée nationale était toujours inacceptable pour le Sénat puisqu'il ne tenait pas compte des apports de la Haute Assemblée, hormis de rares exceptions.

M. Louis Souvet, rapporteur, a déclaré que l'Assemblée nationale avait ainsi supprimé les six articles additionnels insérés par le Sénat en première lecture parmi lesquels des dispositions essentielles qui constituaient le dispositif alternatif proposé par la Haute Assemblée. Il a cité, à cet égard, l'article premier A relatif à la tenue d'une conférence nationale sur la négociation collective et l'article premier B qui prévoyait la validation pour cinq ans des accords conclus en application de la loi du 13 juin 1998, pour autant qu'ils ne comportaient pas de clauses contraires à l'ordre public social absolu.

Il a constaté que l'Assemblée nationale avait également supprimé l'article premier bis A adopté par le Sénat qui validait l'accord du 8 avril 1999 sur le mandatement ainsi que l'article premier bis B qui prévoyait des dispositions particulières applicables aux établissements soumis à la procédure d'agrément. A cet égard, il a précisé que la préoccupation soulevée par le Sénat avait été toutefois prise en compte par l'Assemblée nationale sous une autre forme aux articles 2 et 11.

Outre ces quatre articles additionnels fondateurs, M. Louis Souvet, rapporteur, a remarqué que l'Assemblée nationale avait également supprimé, en nouvelle lecture, l'article 6 ter qui clarifiait le régime applicable aux salariés en temps partagé en matière d'allégements de cotisations sociales, ainsi que l'article 6 quater qui reprenait les termes de la proposition de loi de M. André Jourdain, sur le multisalariat, adoptée par le Sénat le 11 mars dernier. Il a souhaité rappeler, à cette occasion, que cette excellente proposition de loi demeurait en instance de discussion à l'Assemblée nationale.

Il a constaté que l'Assemblée nationale avait rétabli huit articles dans le texte qu'elle avait adopté en première lecture dont l'article premier quinquies qui définit le régime des astreintes, l'article 2 bis qui abaisse la durée hebdomadaire maximale du travail à 44 heures sur douze semaines consécutives, l'article 4 qui permet la réduction de la durée du travail organisée sous forme de jours ou demi-journées de repos, l'article 4 bis relatif au contrôle du repos dominical, l'article 10 bis qui transpose certaines dispositions de la directive européenne du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail, l'article 12 quater qui prévoit un allégement des formalités administratives pour les entreprises de vingt salariés ou moins afin qu'elles puissent bénéficier de l'aide financière à la réduction du temps de travail dans le cadre d'un accord offensif, l'article 14 relatif à la sécurisation juridique des conventions ou accords conclus en application de la loi du 13 juin 1998 ainsi que l'article 19 qui précise le contenu du rapport annuel établi par le chef d'entreprise à l'attention du comité d'entreprise.

M. Louis Souvet, rapporteur, a relevé que l'Assemblée nationale avait par ailleurs modifié de manière quelquefois importante vingt-quatre articles que le Sénat avait modifiés ou supprimés.

Il a observé que l'Assemblée nationale avait ainsi précisé, à l'article premier, les modalités de décompte de l'effectif pour l'appréciation du seuil de vingt salariés qui déclenche le passage à la nouvelle durée légale du travail, et qu'elle avait tenu assez largement compte, à l'article premier ter, de la rédaction du Sénat en prévoyant que le temps relatif à l'habillage et au déshabillage ne constituait pas du temps de travail effectif mais devait faire l'objet de contreparties.

Il a considéré comme significatif le fait que, tant dans la loi du 13 juin 1998 que dans le présent projet de loi, l'Assemblée nationale ait souhaité ouvrir le dossier de la définition même du temps de travail. Il a observé que, dans l'un et l'autre cas, les dispositions qu'elle avait introduites en première lecture étaient quelque peu improvisées et qu'elle avait dû se rallier à une rédaction plus raisonnable en s'inspirant des travaux du Sénat.

Il a noté que l'Assemblée nationale avait précisé, à l'article premier quater, que les temps d'équivalence étaient rémunérés conformément aux usages, conventions ou accords collectifs.

Il a constaté qu'elle avait tenu compte de la position du Sénat exprimée à l'article premier bis B en prévoyant, à l'article 2, que les établissements sociaux et médico-sociaux soumis à la procédure de l'agrément seraient dispensés du paiement de la contribution sur les heures supplémentaires prévue pour les entreprises n'ayant pas signé d'accord de réduction du temps de travail, même si la solution retenue ne pouvait pas être entièrement satisfaisante puisqu'elle s'inscrivait dans le cadre de la baisse de la durée légale du travail.

Il a observé que l'Assemblée nationale avait adopté une modification rédactionnelle à l'article 2 ter relatif au repos hebdomadaire.

M. Louis Souvet, rapporteur, a indiqué que l'Assemblée nationale avait précisé, à l'article 3, qu'en cas de rupture du contrat de travail pour motif économique intervenant après ou pendant une période de modulation, le salarié conserverait le supplément de rémunération qu'il avait pu percevoir.

Il a observé que l'Assemblée nationale avait, à l'article 5 relatif au régime des cadres, encadré le forfait jour en précisant les catégories de cadres concernées, les voies de recours en cas d'application abusive et les modalités du droit d'opposition et à l'article 6 relatif au travail à temps partiel, précisé le régime relatif aux horaires de travail ; qu'elle avait également rétabli l'article 6 bis assorti de modifications rédactionnelles.

M. Louis Souvet, rapporteur, a indiqué que l'Assemblée nationale avait prévu, à l'article 7 relatif au travail intermittent, que les personnes atteintes de maladies graves devaient pouvoir bénéficier d'autorisations d'absence pour se soigner ; qu'elle avait également renforcé l'encadrement de l'utilisation du compte épargne temps prévu par l'article 9 , notamment pour les secteurs où l'activité fluctue selon un rythme pluriannuel.

Il a observé qu'elle avait rétabli son texte pour l'article 10 relatif à la formation et à la réduction du temps de travail assorti de modifications concernant les garanties apportées aux salariés en matière de rémunération, et qu'elle avait également considéré que le refus d'un salarié de participer à des actions de coïnvestissement ne constituait ni une faute ni un motif de licenciement.

M. Louis Souvet, rapporteur, a précisé que l'Assemblée nationale avait, à l'article 11, notamment prévu que les accords de branche agréés dans le secteur social et médico-social ouvraient droit à l'allégement de cotisations sociales.

A l'article 11 bis relatif aux allégements de cotisations sociales pour les entreprises créées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi, M. Louis Souvet, rapporteur, a observé que l'Assemblée nationale avait limité le bénéfice de l'aide dont pourraient bénéficier ces entreprises à cinq ans et qu'elle avait également prévu la possibilité d'un cumul entre cette aide dont le montant est identique à l'aide prévue par l'article 3 de la loi du 13 juin 1998 et le nouvel allégement prévu par l'article 12 du projet de loi.

Il a indiqué que l'Assemblée nationale avait apporté plusieurs précisions, concernant notamment les entreprises d'insertion, à l'article 12 relatif au nouvel allégement de cotisations sociales, qu'à l'article 12 ter, elle avait assoupli les dispositions permettant la réduction anticipée de la durée du travail dans les entreprises de vingt salariés au plus et renforcé les garanties apportées aux salariés mandatés pour signer de tels accords, qu'elle avait précisé la rédaction de l'article 12 quinquies concernant l'adaptation de certaines dispositions du projet de loi à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon afin que le barème de l'allégement soit établi au prorata des taux de cotisations patronales applicables dans cette collectivité.

M. Louis Souvet, rapporteur, a souligné qu'à l'article 13, relatif aux accords interentreprises et aux groupements d'employeurs, l'Assemblée nationale avait repris, sur le fond, la modification proposée par le Sénat sous une forme différente. Il a rappelé qu'il s'agissait de prévoir qu'une personne morale possédant plusieurs établissements enregistrés séparément, pouvait au titre de chacun de ces établissements appartenir à un groupement d'employeurs différent.

Concernant l'article 15 relatif aux modalités de licenciement d'un salarié refusant les conséquences sur son contrat de travail de l'application d'un accord de réduction du temps de travail, il a observé que l'Assemblée nationale avait repris la précision apportée par le Sénat excluant l'application des dispositions relatives au licenciement pour motif économique et qu'elle avait souhaité par ailleurs laisser au juge le soin d'apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement.

Il a indiqué qu'elle avait adopté dans le texte du Sénat l'article 15 bis relatif aux exemptions de la " contribution Delalande ", sous réserve d'une modification strictement rédactionnelle.

Il a constaté que l'Assemblée nationale avait modifié en nouvelle lecture sa rédaction de l'article 16 relatif au " double SMIC " afin de prévoir un mécanisme de complément différentiel de salaire pour les salariés " particuliers " que sont les apprentis, les personnes handicapées, les travailleurs en ateliers protégés et les titulaires de contrats de qualification ou d'orientation, qu'elle avait également modifié sa rédaction de l'article 17 de telle façon qu'il transcrive dans le code rural l'ensemble des dispositions contenues dans le présent projet de loi, qu'elle avait adopté une nouvelle rédaction de l'article 18 relative à la présomption de salariat, permettant aux organismes de sécurité sociale de récupérer auprès d'un employeur les cotisations relatives à un salarié considéré jusque-là comme indépendant, qu'elle avait rétabli son texte de première lecture à l'article 20 relatif à la présentation par le Gouvernement d'un bilan sur l'emploi, après l'avoir modifié, pour prévoir que le Gouvernement présenterait également au Parlement un bilan annuel de l'application de la réduction du temps de travail dans la fonction publique.

Il a par ailleurs souligné que l'Assemblée nationale avait adopté sans modification l'article 14 bis introduit par le Sénat à l'initiative de MM. Jean Chérioux et Alain Gournac.

Il a rappelé que cet article validait les versements effectués en contrepartie de permanences nocturnes comportant des périodes d'inaction accomplies en chambre de veille par le personnel des institutions sociales et médico-sociales.

Il a observé que l'Assemblée nationale avait également maintenu la suppression décidée par le Sénat de l'article premier bis relatif au principe des contreparties dont devaient bénéficier les salariés confrontés à un dispositif d'aménagement du temps de travail.

Il a constaté que les articles 14 bis et premier bis étaient ainsi les deux seuls articles adoptés ou supprimés conformes par l'Assemblée nationale.

M. Louis Souvet, rapporteur, a précisé que l'Assemblée nationale avait également introduit deux nouveaux articles, l'article 12 sexies qui coordonne les modalités de la réduction du temps de travail avec les allégements de charges sociales prévus dans le cadre de la zone franche corse et l'article 21 qui prévoit qu'au cas où la présente loi serait publiée après le 1 er janvier 2000, elle deviendrait applicable le premier jour du mois suivant celui de sa publication.

A l'issue de la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, il a considéré que la commission des affaires sociales pouvait certes se féliciter d'avoir été entendue sur des points importants comme la définition du travail effectif et les problèmes rencontrés par les établissements sociaux et médico-sociaux.

Cependant, il a observé que l'Assemblée nationale n'avait pas modifié sa position relative à l'abaissement généralisé de la durée du travail et qu'elle n'avait pas retenu en particulier deux exigences du Sénat concernant la tenue d'une conférence nationale sur le développement de la négociation collective et la validation pour cinq ans des accords conclus sur le fondement de la loi du 13 juin 1998.

Dans ces conditions, rappelant la position exprimée par la commission selon laquelle la réduction du temps de travail pouvait effectivement créer des emplois, lorsqu'elle était volontairement négociée et, constatant l'absence de volonté de dialogue de la part de l'Assemblée nationale sur les propositions du Sénat tendant à renforcer le rôle des partenaires sociaux et étendre le champ de la négociation collective, M. Louis Souvet, rapporteur, a proposé d'adopter une question préalable en application de l'article 44 du règlement du Sénat.

La commission a ensuite adopté, à la majorité, la question préalable présentée par M. Louis Souvet, rapporteur.

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