3. Deux exceptions supplémentaires apportées au principe de la spécialisation des crédits, les transferts et les virements.

L'ordonnance pose une règle de spécialisation des crédits qui prend deux visages : celui d'une mise à disposition des crédits aux ministres et celui d'une répartition des crédits par chapitre. On rappelle que, selon les termes de l'article 7 de l'ordonnance, les chapitres groupent " les dépenses selon leur nature ou selon leur destination ".

Deux exceptions à la règle de spécialisations des crédits sont organisées par l'article 14 de l'ordonnance. Elles concernent les transferts et les virements.

Les transferts et les virements ont en commun de ne pouvoir conduire à la création de nouveaux chapitres. Ils ne peuvent ainsi intervenir que dans le cadre de la nomenclature budgétaire consacrée par la loi de finances.

Les transferts sont, en théorie, une forme bénigne d'atteinte à la spécialité des crédits. En effet, s'ils modifient la détermination du service responsable de l'exécution de la dépense, ils ne modifient pas celle-ci dans sa nature. Aussi, peuvent-ils être autorisés par simple arrêté du ministre des finances.

Pourtant, leur volume est important.

Budget général : Transferts de crédits

Montants rapportés

Montants (en millions de francs)

Evolution par rapport à l'année précédente (en %)

au total des mouvements internes de crédits (en %)

aux crédits ouverts en loi de finances initiale (en %)

au total des crédits votés (en %)

au total net des crédits ouverts

(en %)

1994

142.132,4

- 0,26

89,4

8,49

8,26

7,82

1995

143.056,6

+ 0,7

92,1

8,38

7,94

7,64

1996

151.817,1

+ 6,1

91,4

8,44

8,25

7,80

1997

174.520,4

+ 15,0

91,2

9,53

9,35

8,85

1998

180.807,24

+ 3,6

93,0

9,62

9,32

8,82

Mais, sauf à ce qu'ils respectent leur destination, ce qui n'est hélas pas toujours le cas, comme en témoignent les rapports de la Cour des comptes, il n'y a pas de raison de supprimer les transferts de crédits.

Les questions posées par les virements de crédits sont plus épineuses. En effet, les virements modifient la nature de la dépense prévue par les lois de finances. Ils constituent donc une entorse à la règle qui veut que les lois de finances déterminent, seules, la nature des charges de l'Etat. Cette entorse est certes encadrée par l'ordonnance. Formellement, les virements appellent ainsi l'intervention d'un décret. Sur le fond, ils doivent intervenir à l'intérieur d'un même titre du budget d'un même ministère, et doivent être maintenus dans la limite du dixième de la dotation de chacun des chapitres intéressés. Ces conditions expliquent sans doute le montant relativement modeste des virements.

Budget général : virements de crédits

Montants rapportés

Montants (en millions de francs)

Evolution par rapport à l'année précédente
(en %)

au total des mouvements internes de crédits (en %)

aux crédits ouverts en loi de finances initiale (en %)

au total des crédits votés (en %)

au total net des crédits ouverts

(en %)

1994

1.161,6

- 50,4

0,7

0,07

0,07

0,06

1995

1.093,5

- 5,9

0,7

0,06

0,06

0,06

1996

1.880,4

+ 72,0

1,1

0,10

0,10

0,10

1997

2.679,4

+ 42,5

1,4

0,15

0,14

0,14

1998

2.756,9

+ 2,9

1,4

0,15

0,14

0,13

Potentiellement très attentatoires à la portée de l'autorisation parlementaire, les virements semblent en pratique utilisés dans des conditions à peu près satisfaisantes, la Cour des comptes étant toutefois conduite à produire à leur propos des observations régulières.

Les propositions de réforme de l'ordonnance organique sont néanmoins susceptibles de modifier cette appréciation.

Ainsi, la proposition de loi organique déposée à l'Assemblée nationale prévoit-elle que les virements seraient susceptibles d'intervenir entre différents programmes et instaure-t-elle un nouveau plafond, le dixième des dotations de chaque programme, qui, désormais, en conditionnerait le montant. Cette formule nouvelle aboutirait à élargir considérablement les facultés de virement puisque :

•  ils pourraient intervenir entre des ministères différents ;

•  ils pourraient conduire à des changements d'affectation des crédits d'une politique publique à une autre, entièrement différente, d'autant plus radicaux que des ministères différents pourraient être concernés ;

•  ils pourraient, enfin, modifier tout aussi radicalement la nature des crédits ouverts en lois de finances puisqu'ils ne seraient plus soumis à la condition d'intervenir au sein du même titre de crédits.

Cette large extension du régime des virements doit être soigneusement évaluée. Sans doute serait-il préférable d'en revenir à une conception plus traditionnelle, qui serait évidemment adaptée à la nouvelle nomenclature budgétaire. Il conviendrait par exemple de restaurer les souplesses nécessaires à la bonne gestion de chaque programme en prévoyant la faculté de virements de crédits au sein de chacun d'entre eux. En effet, la suppression de cette utile faculté que semble comporter la proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale serait un frein à la fongibilité des crédits qui est, par ailleurs, recherchée.

Votre commission exprime donc une préférence pour une large fongibilité des crédits à l'intérieur des programmes, et pour une exclusion des mouvements entre programmes.

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