B. UNE SITUATION DONT LE RENVERSEMENT NE SAURAIT ÊTRE ATTENDU D'UN RALENTISSEMENT AMÉRICAIN

Si la prolongation de l'écart de croissance entre les Etats-Unis et l'Europe aurait des effets ambigus, dont certains franchement indésirables, il serait illusoire d'attendre d'un ralentissement américain prononcé la solution aux problèmes de l'économie européenne et mondiale.

C'est, du moins, l'enseignement d'un exercice de variantes récemment publié par le FMI 4 ( * ) .

1. Les avantages ambigus d'une accélération de la croissance aux Etats-Unis

Dans une première variante, sont mesurés les effets d'un gain de productivité de ½ point aux Etats-Unis.

Ce scénario présente les caractéristiques de la situation économique de la fin des années 90 avec une croissance mondiale tirée par l'économie américaine.

Variante avec des gains de productivité aux Etats-Unis
supérieurs de ½ point
(écart en % par rapport au compte central)

2002

2003

2004

2005

2006

PIB mondial

0,3

0,5

0,7

0,9

1,3

ETATS-UNIS

PIB

0,8

1,1

1,8

2,4

3,2

PIB potentiel

0,6

1,2

1,8

2,5

3,3

Demande intérieure

0,9

1,3

2,0

2,8

3,8

Investissement

2,3

2,6

4,0

5,5

7,9

Taux de change

0,4

0,4

0,7

1,0

1,4

Balance courante ( en milliards de dollars )

- 11,5

- 22,5

-37,8

- 59,1

- 89,7

Inflation

-

0,1

0,1

0,1

0,2

Taux d'intérêt à court terme

0,3

0,2

0,3

0,4

0,6

ZONE EURO

PIB

0,2

0,2

0,2

0,3

0,5

PIB potentiel

-

-

-

-

- 0,1

Demande intérieure

0,1

-

- 0,1

- 0,1

- 0,2

Investissement

0,2

- 0,2

- 0,6

- 1,1

- 1,8

Taux de change

- 0,2

- 0,3

- 0,5

- 0,8

- 1,3

Balance courante ( en milliards de dollars )

4,6

7,9

13,6

21,2

30,7

Inflation

-

0,1

0,2

0,3

0,4

Taux d'intérêt à court terme

0,2

0,4

0,6

0,9

0,9

JAPON

PIB

0,2

0,2

0,2

0,3

0,5

PIB potentiel

-

-

-

-

- 0,1

Demande intérieure

0,1

0,1

-

-

- 0,1

Investissement

0,3

- 0,0

- 0,4

- 0,7

- 1,3

Taux de change

- 0,4

- 0,5

- 0,9

- 1,4

- 1,9

Balance courante ( en milliards de dollars )

2,2

5,8

8,9

13,7

20,3

Inflation

-

0,1

0,1

0,2

0,3

Taux d'intérêt à court terme

0,1

0,3

0,4

0,7

1,1

PAYS ÉMERGENTS

PIB

0,1

0,2

0,3

0,4

0,6

Demande intérieure

0,2

0,3

0,4

0,7

0,9

Balance courante ( en milliards de dollars )

- 0,2

0,2

0,6

0,9

2,3

Source : FMI, World Economic Outlook. Octobre 2001

La croissance mondiale est plus élevée, le PIB mondial étant supérieur chaque année (de 1,3 point en 2006). Mais, le gain de croissance est inégalement réparti. Les Etats-Unis profitent à plein du choc de productivité qui, rappelons-le, ne survient que chez eux par hypothèse. Le PIB potentiel américain s'accroît, si bien que le rythme de la croissance effective peut s'accélérer sans tensions inflationnistes, d'autant que l'appréciation du dollar permet d'importer de la désinflation.

Les autres régimes du monde profitent nettement moins de cette embellie. Le supplément de croissance y est six fois moins important qu'aux Etats-Unis. Le PIB potentiel de ces zones n'est pas augmenté et le supplément d'inflation provoqué par la dépréciation de l'euro et du yen déclenche une augmentation des taux d'intérêt qui déprime la demande intérieure. Tout le léger supplément de croissance observé provient de l'excédent extérieur.

Les déséquilibres financiers mondiaux se creusent : l'Europe et le Japon continuent de financer la croissance américaine.

Cette variante illustre, aux yeux de votre rapporteur, les limites du cycle économique de la fin des années 90.

Ni l'Europe, ni le Japon, ni, finalement le monde ne devraient s'en satisfaire. Car, si la croissance de l'économie américaine exerce des effets positifs sur l'activité des autres zones ( a contrario, son ralentissement actuel démontre les effets négatifs d'un freinage brutal), un écart de performances économiques excessivement prononcé a, au moins, deux conséquences défavorables :

• elle accroît les déséquilibres financiers internationaux et renforce, à ce titre, les risques d'une correction brutale ;

• elle détourne les ressources des zones extérieures aux Etats-Unis, qui, perçues comme peu dynamiques, voient leur épargne se porter vers l'économie américaine et, du fait de la dépréciation de leurs monnaies, subissent non seulement les pertes du pouvoir d'achat qui s'ensuivent, mais aussi des tensions inflationnistes, sources de resserrement monétaire handicapant à leur tour leur essor.

Votre rapporteur voit dans ce scénario une justification très forte à des politiques déterminées d'augmentation de la croissance potentielle en Europe, qui supposent de renverser l'ordre des priorités. Une nette élévation du niveau de productivité doit en effet être recherchée.

* 4 FMI, World Economic Outlook, octobre 2001.

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