B. LES MOYENS BUDGÉTAIRES ET HUMAINS EN 2002

1. La présentation du nouveau « jaune budgétaire »

En application de l'article 96 de la loi de finances pour 2001, adopté à l'initiative de votre rapporteur, un rapport relatif à l'ensemble des moyens alloués par l'Etat à la lutte contre l'insécurité routière et à l'effort de la Nation en faveur de la sécurité routière doit désormais être présenté en annexe du projet de loi de finances (« jaune budgétaire »). Ce rapport doit également fournir des indicateurs de résultats de la politique menée.

a) Les moyens consacrés à la recherche publique

Le « jaune budgétaire » présente un chapitre consacré à la recherche. Le détail des crédits est le suivant.

Crédits du ministère de la recherche en faveur de la sécurité routière

(crédits exprimés en millions d'euros)

1999

2000

2001

2002

AP

DO/CP

AP

DO/CP

AP

DO/CP

AP

DO/CP

Titre III

36-19 Recherche dans le domaine de l'équipement (LCPC, INRETS)

3,35

3,53

8,61

10,36

Sous-total titre III

0,00

3,35

0,00

3,53

0,00

8,61

0,00

10,36

Sous-total titre IV

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00

Titre VI

63-00 Recherche dans le domaine de l'équipement (LCPC, INRETS)

0,77

0,75

0,77

0,76

1,80

1,74

3,22

2,00

66-21 CNRS

0,90

0,90

0,90

0,90

0,90

0,90

0,90

0,90

66-04 Soutien à la recherche et à la technologie

3,51

3,50

1,80

1,80

2,28

2,20

3,04

3,00

Sous-total titre VI

5,18

5,15

3,47

3,46

4,98

4,84

7,16

6,80

TOTAL

5,18

8,50

3,47

6,99

4,98

13,45

7,16

17,16

Selon ce tableau, les crédits de recherche publics s'élevaient à 17 millions d'euros en 2002 .

Ces crédits ne représentent pas toutefois l'ensemble des moyens publics de la recherche : ils ne prennent pas en compte le PREDIT, le budget du Conseil national de la sécurité routière (CNSR) et n'intègrent pas les ressources propres des établissements de recherche. Ils doivent aussi être complétés par une analyse des moyens privés.

b) Les financements privés

Les crédits présentés ci-dessus sont les crédits de l'Etat. Il faut leur ajouter les crédits de recherche émanant des partenaires extérieurs, et notamment des constructeurs français d'automobiles. Le « jaune budgétaire » n'est toutefois pas en mesure de chiffrer cet effort : « un chiffrage précis est impossible car il dépend du périmètre retenu, beaucoup d'organes ou d'équipements ayant des finalités multiples (confort, ergonomie...) ».

Le « jaune budgétaire » précise toutefois que les efforts des constructeurs peuvent se décomposer en trois rubriques :

- l'équipement des véhicules en organes ou fonctions de sécurité ;

- les études et recherches portant sur la sécurité des véhicules ou la sécurité routière ;

- l'apport de leur expertise aux discussions publiques, et les manifestations publiques visant à améliorer la sécurité routière en France.

Le « jaune » ne donne que très peu d'éléments chiffrés mais il rappelle toutefois que les dépenses de recherche totales de PSA Peugeot Citroën et Renault pour l'année 2000 ont dépassé les 3,6 milliards d'euros . Le budget courant du Laboratoire d'accidentologie, de biomécanique et d'étude du comportement humain (LAB) est de 9,2 millions d'euros, financé entièrement par les constructeurs. Ce budget a été augmenté de 2 millions d'euros supplémentaires à l'automne 2000 pour développer l'analyse du comportement humain.

Le seul budget du LAB, qui ne résume pas l'effort des constructeurs en faveur de la recherche en sécurité routière (par exemple, un autre laboratoire, le CEESAR, effectue des études d'accidentologie pour le compte des constructeurs) représente donc 11,2 millions d'euros, à comparer aux 17,16 millions d'euros de recherche publique en matière de sécurité routière. Enfin, il faut noter que Renault estime que plus de 600 personnes dans l'entreprise se consacrent à la sécurité routière, pour un effort de recherche annuel supérieur à 100 millions d'euros, ce qui dépasse de loi le budget du LAB.

On pourra également observer que quelques fondations de sociétés d'assurance apportent des contributions financières non négligeables pour le « bouclage » de certains programmes de recherche. La fondation MAIF estime avoir consacré 7 millions d'euros à des actions de recherche ces dernières années, dont environ la moitié pour la recherche en sécurité routière.

2. L'évaluation des moyens publics

a) Les moyens humains

Les deux centres de recherche publics, l'INRETS et le LCPC disposent d'environ un millier d'agents : 553 agents permanents pour le LCPC et 426 pour l'INRETS.

Ces moyens humains semblent, au dire des responsables de ces établissements, globalement satisfaisants. Pour autant, la lutte contre l'insécurité routière devenant une priorité, il est apparu nécessaire de mobiliser davantage le personnel vers cet objectif prioritaire. Près de 40 % des ressources humaines de l'INRETS devraient donc être consacrées à la sécurité routière en 2004, contre 33 % aujourd'hui.

La répartition des moyens humains de l'INRETS

Axes stratégiques

Répartition en hommes-mois du personnel permanent de l'institut et des doctorants

2000

2004

Sécurité routière

33 %

40 %

Aide à la conduite

22 %

19 %

Réseaux de transport et services

25 %

21 %

Durabilité, environnement

20 %

20 %

Ensemble

100 %

100 %

Source : contrat pluriannuel de l'INRETS 2001-2004

Outre cette réorganisation, il apparaît utile d'anticiper des départs à la retraite , particulièrement nombreux dans le domaine de la sécurité routière. Afin de préparer la relève d'équipes « sécurité routière » vieillissantes qui connaîtront des départs importants au-delà de 2005, des recrutements supplémentaires sont prévus. Dans le cadre du contrat pluriannuel, l'INRETS bénéficie de 18 recrutements supplémentaires sur la période 2001-2003, en supplément de ceux autorisés par les départs à la retraite et par les créations d'emplois. Parmi ces recrutements, 8 surnombres sont attribués en 2001, ils seront résorbés à hauteur de 3 en 2004 et 5 en 2005. Ces recrutements supplémentaires sont spécifiquement destinés à la thématique « sécurité routière ». Les postes affectés au domaine de la sécurité routière permettront un accroissement de l'activité de recherche consacrée par l'institut à ce domaine de 33 % à 40 %.

Enfin, en termes qualitatifs, il est indispensable de développer, dans le domaine « sécurité routière », de nouvelles compétences : sciences cognitives, sciences de l'éducation, évaluation des politiques publiques, modélisation en liaison avec les sciences de la vie et les nouvelles technologies.

Concernant le LCPC, les mêmes problématiques se posent, même si la « spécificité » du secteur sécurité routière est moins forte . Les analyses de l'évolution prévisible des effectifs montrent que sur la période 2001-2005, 25 % du personnel d'encadrement et 10 à 20 % des techniciens supérieurs partiront en retraite. Ces départs seront compensés par des recrutements et des redéploiements. Si la priorité à la recherche en sécurité routière n'est pas clairement affichée pour les prochains recrutements, les priorités de recrutements nouveaux pour les chercheurs et ingénieurs porteront sur des compétences d'approches globales, et seront notamment recherchés des profils associant compétences techniques et connaissance en sciences sociales et humaines, ainsi que des compétences dans le domaine du traitement de l'information afin de délivrer des diagnostics d'aide à la gestion.

b) Les équipements

Les équipements lourds ou mi-lourds dont s'est doté l'INRETS sont uniques et de haut niveau scientifique : rampe de lancement, catapultes, bancs d'essais de choc, bancs à rouleau pour l'étude de la pollution, bancs d'essais moteur, roue permettant de simuler des vitesses au delà de 300 km/h, véhicules équipés, simulateurs de conduite, etc.

Concernant les moyens du LCPC, celui-ci dispose d'une piste de référence pour expérimentations routières et d'une station d'étude des systèmes de localisation . D'après la programmation quadriennale, les caractéristiques des équipements seront adaptées chaque fois que les programmes scientifiques issus des nouvelles priorités le nécessitent.

Cependant, malgré leur importance, les moyens d'équipement de l'INRETS et du LCPC doivent être revus constamment à l'aune des besoins de la recherche en sécurité routière, car cette recherche évolue très rapidement .

Il faut ainsi noter le jugement négatif du rapport d'inspection de l'INRETS réalisé par le conseil général des ponts et chaussées en juin 2001 : « les équipements de Bron et de Marseille ont, de l'avis général vieilli et fonctionnent au quart de leurs possibilités quand ils ne sont pas, plus simplement mis en réserve comme la roue de Grenoble maintenue en état de marche mais non utilisée. Le contrat pluriannuel prévoit d'ailleurs, dans les obligations de l'Etat, la rénovation des moyens d'essai comme ce qui est envisagé pour la catapulte de Marseille ou la construction de moyens nouveaux. »

Concernant les moyens du LCPC, l'orientation en faveur de la sécurité routière implique l'étude et la réalisation d'un ensemble de moyens expérimentaux nouveaux (piste et véhicules) pour les recherches sur la sécurité routière et la route intelligente, pour un coût de l'ordre de 6 à 7,6 millions d'euros. On notera que ces investissements absorberont 83 % des moyens d'équipement nouveaux du LCPC et 65 % des moyens d'investissement (maintien à niveau + nouveaux équipements) sur la période 2001-2004. Les études portant que les moyens d'expérimentations routières « qui constituent un enjeu stratégique pour l'établissement » ont été entamées dès 2001.

Dans le contrat quadriennal Etat/LCPC, il est ainsi indiqué : « la mise en oeuvre des orientations prioritaires du contrat quadriennal, et en particulier de celles relatives à la sécurité routière, à l'environnement et aux risques, implique des investissements ciblés, après la pause dans les investissements qu'a connue l'organisme au cours des dernières années. »

D'une manière générale, si l'on tient compte de la programmation de nouveaux investissements pour le LCPC, les équipements des organismes de recherche publics semblent relativement bien adaptés. Il est cependant possible de s'interroger sur leur taux d'utilisation.

Le rapport d'inspection de l'INRETS précité note ainsi : « il ne semble pas qu'il y ait une réflexion globale sur une carte des implantations de grands équipements reliée aux objectifs à moyen terme de l'INRETS, mais plutôt une absence de choix et une volonté de maintenir en vie des équipements dont les performances ont tendance à décroître au fur et à mesure que les centres de recherche des constructeurs privés augmentent leur compétitivité. »

Le rapport fait des préconisations : « sur la question d'un plan global de rationalisation pour les grands équipements de l'INRETS, l'absence d'une véritable direction scientifique capable de mettre en discussion au sein de la communauté des chercheurs, la création, la rénovation ou la fermeture d'équipement et de proposer des choix à la direction générale, se fait cruellement sentir. On ne saurait que trop suggérer à la direction générale d'aller dans ce sens et de ne rénover qu'à partir d'une étude des besoins, en favorisant le regroupement d'équipes de recherche autour de quelques grands équipements très performants. Il serait souhaitable que l'institut se dote également d'une réelle politique de partenariat externe afin d'utiliser ces grands équipements à plein temps. »

Dans ce même esprit, on observera que la commission européenne a décidé de lancer une étude sur les ressources en recherche sur les transports. Cette étude devrait durer trois ans. Le programme TREE ( Transport Research Equipement in Europe - Equipement en Recherche sur les Transports en Europe) est piloté par le LCPC et rassemble 16 instituts de recherche dans 12 pays européens. Le projet part du principe que les simulateurs de conduite, les appareils de collision, etc, sont des outils coûteux, qui ne sont pas obligatoirement utilisés de manière optimale. Un inventaire des équipements de recherche doit donc être dressé. La deuxième étape sera d'identifier les équipements les plus indispensables pour l'avancement de la recherche et les commandes des autorités et financeurs des différents pays membres de l'Union européenne. Le programme TREE devra faire des propositions pour améliorer l'utilisation des équipements, par le biais par exemple d'accords de coopération. Il est en effet établi que la plupart des équipements lourds de recherche sont seulement utilisés au niveau national aujourd'hui et pourraient davantage s'intégrer dans un cadre européen.

En conclusion, il faut remarquer que si l'objectif doit bien être d'accroître le taux d'utilisation des équipements existants, il est important que des équipes de recherche soient également mobilisées pour exploiter les résultats. Une réforme visant à augmenter le nombre d'expérimentations ne pourra réussir que par une mobilisation supplémentaire de chercheurs et notamment le remplacement des départs à la retraite .

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