2. Une nécessité : améliorer la coordination des acteurs
De ses
nombreux déplacements sur le terrain, la commission d'enquête a
tiré une certitude : la seule clarification, certes
nécessaire, des compétences dans le domaine du handicap ne
saurait suffire pour mettre en oeuvre une politique cohérente de
contrôle et de lutte contre la maltraitance. Une coordination accrue des
acteurs apparaît notamment aujourd'hui indispensable.
« Il faut que les conseils généraux, les services de
l'Etat et les bailleurs de prestations sociales définissent des
règles du jeu communes. Il n'y a rien de pire pour contourner un mal que
d'avoir différents intervenants qui ne se rencontrent pas et qui
refusent que d'autres touchent aux personnes dont ils ont la charge. Il
convient d'adopter un regard global sur le handicap dans un
territoire. »
Cette affirmation de M. Philippe Nogrix, au nom de l'Assemblée des
départements de France, résume parfaitement l'orientation de la
commission d'enquête en la matière.
Des dispositifs expérimentaux de coordination ont d'ores et
déjà été mis en place dans un certain nombre de
départements, soit sur la base du schéma départemental en
faveur des personnes handicapées, soit en s'inspirant du schéma
départemental de l'enfance maltraitée.
Ainsi, le département des Yvelines, visité par la commission
d'enquête, a-t-il mis en place un «
groupe technique
pluridisciplinaire
» commun à la DDASS et aux services
sociaux du conseil général, devant lequel les travailleurs
sociaux peuvent venir exposer des cas de maltraitance, afin d'obtenir un avis
commun pour éclairer une décision.
Une circulaire du 3 mai 2002
35(
*
)
du ministère de l'emploi et
de la solidarité demande expressément aux préfets de
mettre en place des dispositifs coordonnés de prévention et de
lutte contre la maltraitance des adultes vulnérables.
Un comité départemental de prévention et de lutte contre
les maltraitances envers les adultes vulnérables doit associer
l'ensemble des acteurs publics et associatifs concernés par la lutte
contre la maltraitance et notamment la DDASS, le procureur de la
République, les juges des tutelles, les services de police et de
gendarmerie, ainsi que l'antenne ALMA locale et les associations
représentatives des usagers.
Les missions du comité départemental de
prévention et de lutte contre les maltraitances envers les adultes
vulnérables
-
réaliser, par la collecte et l'analyse des données disponibles,
un état des lieux des problèmes et des réponses
apportées dans le département, en vue d'effectuer un diagnostic
partagé ;
- élaborer un programme de sensibilisation, de prévention et
de lutte contre la maltraitance envers les personnes vulnérables, qui
constituera un volet spécifique commun aux schémas
départementaux des personnes âgées et des personnes
handicapées ;
- veiller à la mise en oeuvre du programme et procéder
à son évaluation ;
- mobiliser l'ensemble des acteurs en vue de développer ou de
créer une antenne d'écoute et d'accueil
téléphonique des personnes victimes ou témoins de
maltraitances ;
- prendre les dispositions nécessaires au traitement et au suivi
des signalements, et notamment, la mise en place d'une cellule
inter-institutionnelle de traitement et de suivi des signalements ;
- proposer des sites d'inspection dans le cadre de l'élaboration du
programme pluriannuel d'inspection et de contrôle des
établissements sociaux et médico-sociaux inscrit dans la
directive nationale d'orientation 2002.
Source : DGAS, circulaire du 3 mai 2002
La
circulaire demande donc que soit mise en place, au sein de ce comité,
une « cellule inter-institutionnelle de traitement et de suivi des
signalements », chargée :
- de regrouper les signalements effectués auprès des
différentes instances ;
- d'analyser les signalements ;
- de coordonner la gestion et le suivi des situations de
maltraitance ;
- d'élaborer un protocole précis d'intervention dans les
situations de crise ;
- de prévoir les modalités des enquêtes et des
contrôles nécessaires ;
- de centraliser les données recueillies par les différents
services en constituant un fichier départemental des signalements.
Si les orientations fixées par cette circulaire vont incontestablement
dans le bon sens,
il reste que, de l'aveu même de la DGAS, la mise en
place de ces comités est loin d'être achevée dans
l'ensemble des départements
, comme en témoigne cet extrait de
l'audition de Mme Sylviane Léger, directrice générale de
l'action sociale :
Mme Sylviane Léger
- Aujourd'hui l'articulation
[entre
les différents acteurs]
varie d'un département à
l'autre. Elle est parfois inexistante. A contrario, elle est parfois
excellente.
M. le président
- Insinuez-vous qu'un comité
départemental n'a pas été mis en place dans chaque
département ?
Mme Sylviane Léger
- Tout à fait.
M. le président
- Avez-vous connaissance du nombre de
départements qui ne l'ont pas institué ?
Mme Sylviane Léger
- Il serait plus rapide de compter le nombre
de départements qui l'ont fait. »
La commission d'enquête regrette vivement qu'il ne soit pas porté
une attention plus soutenue à l'effectivité de ce dispositif qui
répond parfaitement aux besoins de coordination du secteur.