2. Assurer, dans l'intérêt exclusif de la personne handicapée, l'évolution de son environnement
a) L'adaptation de la structure d'accueil
Deux
problèmes majeurs sont inventoriés, auxquels des réponses
doivent être apportées
. D'une part, il ressort des propos
tenus à commission d'enquête par Mme Catherine Milcent,
psychiatre, administratrice d'Autisme France, que
les autistes sont
insuffisamment intégrés dans les instituts
médico-éducatifs
, desquels il arrive qu'ils soient
renvoyés pour troubles du comportement, faute d'une recherche suffisante
d'adaptation par l'institution.
Or, soit ils n'ont pas été orientés vers
l'établissement correspondant le mieux à leur situation, soit
l'établissement s'est avéré incapable de s'adapter aux cas
qu'ils ont pour mission de traiter.
D'autre part, il est apparu au cours des déplacements de la commission
d'enquête que
la question du maintien dans les lieux des personnes
handicapées vieillissantes n'était pas toujours
traitée.
Pourtant, leur orientation vers une maison de retraite
ne devrait pas être systématique
. Certaines formules
permettent d'éviter des ruptures particulièrement traumatisantes.
Ainsi, des centres d'accueil de jour pour personnes handicapées
vieillissantes sont parfois installés à proximité des CAT
dont elles sont issues.
Concernant les personnes les plus faiblement handicapées
, qui
peuvent être accueillies sans difficultés majeures dans une maison
de retraite, il semble à la commission d'enquête qu'
il ne
devrait être envisagé que le transfert d'effectifs réduits
au sein d'un même établissement, avec une préparation
psychologique et physique en amont, qui comprendrait notamment une immersion
progressive
.
D'une manière plus générale, il apparaît
indispensable à la commission d'enquête de s'interroger sur
l'avenir de la population handicapée vieillissante, qui devrait, au fil
des années, être de plus en plus nombreuse.
Il s'agit, en effet, d'une question qui ne pourra pas durablement continuer
à ne recevoir que des réponses ponctuelles et liées aux
moyens disponibles ou aux opportunités.
Proposition
Engager
une réflexion d'ensemble sur la question du placement des personnes
handicapées vieillissantes.
b) Le changement de structure d'accueil et le retour en milieu ordinaire
Le
maintien dans une structure mal dimensionnée compte tenu des
capacités de la personne constitue une forme insidieuse de maltraitance.
Ce problème se rencontre principalement pour les CAT. Mme
Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'état aux
personnes handicapées a déclaré à la
commission d'enquête: «
Il y a maltraitance dans un
CAT ou un atelier protégé qui fait de la rétention de ses
meilleurs éléments
en ne les orientant pas vers le
milieu ordinaire de travail.
»
La mauvaise volonté de certains CAT dont les objectifs en terme de
rentabilité seraient excessifs n'est pas la seule cause du maintien en
place de personnes susceptibles d'évoluer dans des ateliers
protégés ou en milieu ordinaire.
Il faut d'abord rappeler que
des difficultés
(qui sont d'ailleurs
susceptibles de concerner n'importe quel changement de structure)
sont
couramment rencontrées au stade de la COTOREP
.
Mais l'obstacle le plus fréquent semble être une excessive
volonté protectrice des familles.
Ainsi, M. Gérard
Soumet directeur de l'action sanitaire et sociale et des services aux personnes
de la Mutualité sociale agricole (MSA), a donné ces explications
à la commission d'enquête : «
Nous avons aussi
des exemples de parents qui interviennent pour maintenir leur enfant dans une
structure alors que, par suite de l'évolution de son handicap, il ne
devrait plus y rester. Certains parents exercent parfois des pressions
très difficiles à gérer pour les gestionnaires
d'établissement. Cela m'est arrivé souvent
. Les parents nous
demandent de garder l'enfant dans l'institution en disant « Il est
bien chez vous »
, alors que l'enfant, qui est un adulte, a
évolué et aurait besoin d'un autre contexte pour continuer
à cultiver son autonomie et à développer ses
possibilités. Il faut savoir gérer la relation avec les parents
parce que, parfois, cette relation pèse sur les possibilités
d'évolution.
»
Il est exact que ces changements sont parfois perçus par les familles
comme des ruptures, voire comme des échecs alors qu'il s'agit
d'évolutions positives pour la personne concernée. Les familles
pensent volontiers que le handicap de leur enfant l'empêche de retourner
dans le milieu ordinaire
. Cette attitude renvoie à la double
nécessité d'une formation des familles, et de leur participation
à la vie de l'établissement
.
Dans cette perspective,
le vieillissement des personnes handicapées
entraîne des difficultés supplémentaires
. Les parents
d'enfants handicapés se représentent ce vieillissement avec
angoisse, et se demandent souvent, non sans raisons, en quel lieu leur enfant
finira sa vie. Lorsque les enfants handicapés sont
hébergés en établissement, et lorsque cet
établissement convient aux familles, il est alors naturel que le premier
objectif des familles consiste à les y maintenir.
En amont, il convient de
se féliciter de la
généralisation des démarches d'évaluation
(
infra
),
qui seront propices à la détection, au sein
des établissements, des placements inadéquats
.
M. Laurent Coquebert, directeur général par intérim
de l'Union nationale des parents et amis de personnes handicapées
mentales (UNAPEI), s'en est expliqué auprès de la commission
d'enquête : «
Ces démarches d'évaluation des
besoins des personnes et d'auto-évaluation des structures
présentent l'intérêt de bousculer un certain nombre
d'idées reçues.
Plus concrètement, dans un certain
nombre d'établissements dans lesquels ces outils ont été
testés, il s'est avéré qu'un certain nombre de personnes
handicapées
n'avaient pas forcément leur place dans de tels
établissements, soit parce qu'elles
relevaient d'un
établissement destiné à des populations plus lourdement
handicapées
, soit,
au contraire
, parce qu'elles
relevaient
d'établissements proposant un accompagnement un peu moins
lourd
».