2. Le financement privé des investissements publics
a) Le partenariat public-privé
Une plus
grande implication du secteur privé peut être une solution pour
limiter la hausse des prélèvements obligatoires, notamment en
matière de financement et de gestion des infrastructures utiles à
la collectivité.
Les ressources budgétaires devenant plus rares, l'Etat est
confronté à des problèmes croissants pour réaliser
les infrastructures dont notre pays a besoin. Les collectivités
territoriales prennent le relais mais elles ne peuvent avoir la charge des
infrastructures nationales.
Une bonne utilisation des ressources publiques nécessite une gestion
moderne. Le partenariat public-privé peut incontestablement redevenir
une voie de financement pour les infrastructures. Ce partenariat permettrait de
transférer une partie des risques vers le privé,
d'accélérer la réalisation d'infrastructures, de
réduire les coûts à qualité au moins égale,
d'optimiser la gestion des infrastructures, de permettre un financement par
l'usager adapté au service rendu.
Pour que le partenariat réussisse, il faudra que la puissance publique
laisse une certaine flexibilité au privé dans les
modalités de réalisation de l'infrastructure, tout en fixant
clairement les performances à en attendre, notamment en termes de
qualité de service. Le recours au secteur privé sera
utilisé pour sa souplesse, sans sacrifier aux objectifs de performance
et de qualité.
Il faut souligner que cette idée n'est pas nouvelle, puisque notre
pays a déjà une expérience utile de partenariat avec le
secteur privé
, notamment pour le financement des infrastructures
publiques, par le biais des concessions. Le modèle des concessions
était même le modèle de référence au
début du siècle dernier, pour l'équipement de la France en
réseaux de communication, dans le domaine des transports ou de
l'énergie.
La différence tient essentiellement aux nouvelles utilisations qui
pourraient être faites du recours au secteur privé.
En effet, le partenariat devrait concerner la réalisation de grandes
infrastructures (TGV, autoroutes, transports collectifs de grandes
agglomérations) mais aussi des projets d'immobilier public, et surtout
il devrait concerner tant la réalisation que, dans les cas où il
cela s'avèrerait plus performant, la gestion de l'infrastructure.
En effet, l'Etat a du mal à appréhender la valeur de son
patrimoine
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et donc à
assurer son entretien et sa valorisation. Le patrimoine immobilier de l'Etat se
dégrade faute de moyens consacrés à l'entretien courant et
d'une gestion de long terme. L'entretien des infrastructures est insuffisant,
comme en témoigne le rapport de la Cour des comptes sur l'entretien du
réseau routier national ou les crédits relativement faibles en
matière de régénération du réseau
ferroviaire. S'agissant du parc de logements détenu par l'Etat
(logements de fonction, logements de service, etc), il relève de modes
de gestion divers qui conduisent à des politiques d'entretien et
d'occupation très variables, mais incontestablement insuffisantes. Les
logements sont mal connus et mal recensés, et ne répondent que
très imparfaitement aux besoins des utilisateurs. L'Etat a donc besoin
de mettre en oeuvre une gestion dynamique de son patrimoine.
b) Les partenariats public-privé dans le domaine régalien
L'effort
massif que l'Etat doit consentir dans l'urgence en matière
d'investissement et de fonctionnement dans les domaines régaliens hors
défense nationale (sécurité et justice), est de nature
à peser sur les prélèvements obligatoires, et ce d'autant
plus qu'il s'agit de rattraper le temps perdu pendant le quinquennat
précédent. C'est cette hausse, à laquelle les
contribuables ne sont pas prêts, qui a d'ailleurs pu conduire à
différer trop longtemps l'effort nécessaire. En lissant la charge
financière dans le temps, le partenariat public-privé permettrait
à l'Etat de faire face rapidement à ses obligations de service
public.
La loi du 22 juin 1987 a déjà permis à l'administration
pénitentiaire d'externaliser certaines des missions concourrant au
fonctionnement de ses établissements en recourant à la gestion
mixte. Ce mode de gestion consiste à confier à des entreprises
privées mises en concurrence les fonctions de soutien logistique
(restauration, cantine, hôtellerie, maintenance, transport, formation
professionnelle et travail) pour lesquelles l'administration ne dispose pas de
ressources humaines suffisantes, l'Etat conservant l'intégralité
de ses missions régaliennes de surveillance. Cette « gestion
mixte », dont le premier initiateur a été le garde des
sceaux M. Albin Chalandon, a été mise en oeuvre dans le cadre du
programme « 13.000 places » entre 1988 et 1992, puis plus
récemment pour le nouveau programme « 4.000 places ».
La loi d'orientation et de programmation pour la justice et la loi
d'orientation et de programmation pour la sécurité
intérieure ont permis d'aller plus loin, en externalisant la
maîtrise d'ouvrage vers des opérateurs privés. L'Etat
pourra autoriser un opérateur privé à construire sur le
domaine public pour les besoins de la police ou de la justice, puis prendre en
bail le bâtiment avec, à son profit, une option d'achat. L'Etat
transfère ainsi la charge du financement de l'investissement initial
à l'opérateur privé. Il assume sur longue période
le coût de l'investissement augmenté de la marge de
l'opérateur
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L'entreprise privée, responsable du bâti sur une longue
période, a intérêt à réaliser des
équipements de qualité et à en assurer l'entretien.
Bien entendu, en contrepartie l'Etat devra financer des frais
d'intermédiation et faire face à une dépense annuelle
récurrente et peu modulable. La réalisation de telles
opérations suppose, à l'évidence, que des économies
soient opérées sur d'autres frais de fonctionnement, si l'on veut
éviter que la rigidité du budget ne progresse encore.