(4) Le désamiantage en milieu occupé : un moindre coût

Le président du SYRTA, a fait remarquer qu'il avait fallu près de 18 mois pour désamianter l'immeuble du Berlaymont, qui abrite la Commission européenne à Bruxelles. Il a ajouté que « les travaux ont coûté quelque 180 millions d'euros. Sur ces 180 millions, me croirez-vous si je vous dis que les opérations de déménagement ont coûté aussi cher que les travaux de désamiantage ? »

Sur les chantiers, en effet, deux méthodes peuvent être utilisées : soit le maintien partiel temporaire des populations sur place, avec location de « locaux-tampons », comme à Jussieu 108 ( * ) , soit le déménagement total des occupants pendant la durée des opérations, comme à Bruxelles.

Si cette deuxième solution permet une réalisation plus rapide des travaux, le coût du déménagement est très élevé.

« Le problème est, naturellement, d'ordre essentiellement financier » a reconnu M. Bernard Peyrat, qui a estimé que le désamiantage en milieu occupé constituait aujourd'hui la solution la plus raisonnable. Evoquant une actualité récente, il a considéré « qu'il est absolument irréaliste d'évacuer la Tour Montparnasse pour procéder aux travaux de désamiantage » , précisant que « même si vous faites des économies sur l'opération de désamiantage elle-même, ce déménagement impliquerait par ailleurs tant de contraintes que (...) les dérives (financières) seraient considérables » .

La présence des occupants et d'une population autour des zones d'intervention implique la mise en oeuvre de techniques spécifiques, visant à confiner de manière parfaitement étanche les locaux dans lesquels les entreprises interviennent. La mission a pu se rendre compte à Jussieu que ces techniques étaient maîtrisées par l'entreprise concernée, comme en témoigne le document ci-après :

Les étapes du désamiantage à Jussieu

Après le dépoussiérage et le déménagement, le désamiantage peut commencer. C'est une opération qui se déroule en plusieurs étapes, chacune nécessitant des techniques, du matériel et des mesures de sécurité spécifiques accompagnant tout chantier de désamiantage.

1 re étape :
curage de la zone de chantier

Cette première étape comprend la dépose de tous les équipements des locaux (réseaux, fluides, portes, cloisons amovibles etc....) qui ne sont pas en contact direct avec l'amiante et qui ne sont pas contaminés par des fibres.

2 e étape : confinement des locaux

Le confinement consiste à protéger les murs et à rendre étanche la zone de chantier par rapport à l'extérieur. Les confinements statiques (pose de films plastiques) et dynamiques (mise en dépression du bâtiment) permettent de garantir qu'aucune fibre d'amiante ne sorte du chantier. Par ailleurs, des filets sont posés sur les façades afin d'éviter toute chute accidentelle d'objet ou d'élément de façade durant les travaux.

3 e étape : démantèlement (ou curage)

Le démantèlement consiste à déposer et évacuer l'ensemble des matériaux contaminés (dalles de faux plafonds, placards techniques et réseaux...) pour accéder au flocage. Ces éléments ont été soit en contact direct avec l'amiante, soit pollués par les fibres.

4 e étape : arrachage de l'amiante

Lors de l'enlèvement des flocages, les techniques doivent limiter le potentiel d'exposition des opérateurs de désamiantage aux poussières d'amiante et faciliter l'enlèvement des flocages. La méthode de l'enlèvement à l'humide est préconisée et privilégiée. Consistant à saturer totalement d'eau le matériau à base d'amiante avant de le retirer, elle se révèle la plus efficace pour limiter les émissions de poussières. Une fois l'amiante enlevé, la phase de nettoyage commence et les surfaces sont brossées et aspirées.

Fin de désamiantage : mesures libératoires et mesures de restitution

Une inspection visuelle est réalisée pour vérifier l'enlèvement de l'amiante. Après cette visite, s'il n'y a pas de réserve, l'entreprise de désamiantage est autorisée à déposer la première peau du confinement. Une période d'attente de 48 h est respectée avant de réaliser les mesures dites « libératoires », à charge du maître d'ouvrage, c'est-à-dire de l'EPA Jussieu.

Lorsque ces mesures indiquent un niveau intérieur au seuil réglementaire de 5 fibres d'amiante par litre d'air, la phase de restitution peut commencer : l'entreprise dépose l'ensemble des installations de confinement et procède à un ultime nettoyage du chantier.

Une nouvelle série de mesures, dites de restitution, a alors lieu : toutes les mesures doivent indiquer un taux inférieur à 5 fibres d'amiante par litre d'air pour que le chantier soit déclaré terminé.

Les entreprises de désamiantage et la sécurité des opérateurs : Les entreprises de désamiantage sont agrées et doivent justifier d'un « certificat de qualification amiante ». Leurs opérateurs, eux-mêmes habilités, interviennent en zone amiantée équipés d'une tenue spécifique et d'un masque leur assurant une alimentation en air sain. Les relevés de présence des opérateurs en zone amiantée sont envoyés régulièrement aux services de médecine du travail. De plus, ils passent régulièrement des visites médicales.

Source : EPA Jussieu

Le président du SYRTA a insisté sur le fait que « l'on ne peut pas faire autrement que d'accepter de désamianter des immeubles (en milieu occupé), mais à condition de ne pas confier ces travaux à des entreprises générales qui sous-traitent parfois à n'importe qui » , ajoutant que « c'est un travail de spécialistes, spécifiques (...), il faut donc faire appel à des entreprises qui ont des compétences réelles ». Il a rappelé que toutes les tours de la Défense, sauf la Tour Aurore, avaient été désamiantées alors qu'elles étaient occupées, et que les contrôles du niveau d'empoussièrement réalisés alors avaient montré l'absence de risque pour les occupants.

* 108 Le coût de location des « locaux tampons » pendant le désamiantage du campus de Jussieu devrait cependant, représenter environ le tiers du coût total des opérations.

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